CATIE

Déclaration de CATIE sur l’usage de la prophylaxie pré-exposition (PrEP) au VIH par les personnes qui utilisent des drogues

Cette déclaration de CATIE fait la synthèse des meilleures données probantes à notre disposition concernant l’efficacité de la PrEP dans la prévention du VIH chez les personnes qui utilisent des drogues.

Cette déclaration a été préparée pour aider les prestataires de services au Canada à adapter leurs programmes et à intégrer ces données probantes dans les messages qu’ils et elles transmettent à leur clientèle.

Messages essentiels

Prendre la PrEP par voie orale correctement et systématiquement est une stratégie très efficace pour aider à prévenir la transmission du VIH lors des relations sexuelles et du partage de matériel d’injection de drogues. Les personnes qui utilisent des drogues peuvent bénéficier de la PrEP si elles sont exposées à un risque de contracter le VIH par le biais de relations sexuelles, de l’usage de drogues ou des deux. La PrEP n’aide à prévenir que le VIH; elle ne prévient pas d’autres infections ni d’autres méfaits potentiels découlant de l’usage de drogues. Il s’agit d’un outil qui peut être utilisé avec d’autres outils de promotion de la santé sexuelle et de réduction des méfaits.

Pour obtenir de plus amples renseignements, consultez l’analyse des données probantes à la fin de la présente déclaration.

Recommandations pour les prestataires de services

Les prestataires de services travaillant auprès de personnes qui utilisent des drogues ont un rôle important à jouer dans la promotion de la PrEP en tant que stratégie très efficace de prévention du VIH. Vous trouverez ci-dessous des recommandations sur la manière de mieux intégrer la PrEP dans vos programmes.

1. Sensibiliser à la PrEP en tant qu’option très efficace de prévention du VIH chez les personnes qui utilisent des drogues.

Discutez avec vos client·e·s de leur risque de contracter le VIH. Une personne peut être à risque de contracter le VIH par le partage de matériel d’injection de drogues ou lors de relations sexuelles. Informez vos client·e·s au sujet de la PrEP, qui est un moyen très efficace de prévenir le VIH.

Les lignes directrices canadiennes fournissent des renseignements sur la PrEP, y compris sur le suivi médical recommandé et les mesures de soutien à mettre en œuvre pendant ce traitement. L’information et le counseling sur la PrEP à offrir aux personnes qui utilisent des drogues doivent inclure les principaux points suivants :

  • La PrEP est une méthode très efficace de prévention du VIH quand elle est prise telle qu’elle a été prescrite.
  • La PrEP ne prévient pas d’infections transmissibles sexuellement et par le sang (ITSS) autres que le VIH.
  • Le seul schéma de PrEP actuellement recommandé dans les lignes directrices canadiennes pour les personnes qui utilisent des drogues est un comprimé contenant les médicaments fumarate de ténofovir disoproxil et emtricitabine (FTD + FTC), à prendre tous les jours. Il existe un autre type de PrEP par voie orale autorisé au Canada associant les médicaments ténofovir alafénamide et emtricitabine (TAF + FTC), mais il n’est actuellement recommandé que pour les hommes gais, bisexuels et autres hommes ayant des relations sexuelles avec des hommes (gbHARSAH).
  • De nombreuses personnes prenant la PrEP n’ont pas d’effets secondaires, et pour celles qui en ont, ces effets secondaires sont en temps normal légers et temporaires. Ils peuvent inclure des douleurs abdominales, des nausées, des maux de tête et des étourdissements.
  • La PrEP doit être obtenue auprès d’un·e prestataire de soins de santé. Il faut subir un test de dépistage du VIH avant de commencer la PrEP, car celle-ci ne doit être utilisée que par des personnes séronégatives.
  • Il est recommandé que les personnes prenant la PrEP voient un·e prestataire de soins de santé tous les trois mois pour subir un test de dépistage du VIH et d’autres ITSS et pour obtenir des conseils sur l’observance et la réduction des méfaits, et pour qu’on puisse surveiller les effets secondaires et les effets toxiques du médicament.

Aidez vos client·e·s à déterminer si la PrEP peut être une bonne option dans leur cas. Au moment de décider de prendre ou non la PrEP, la personne doit se demander si elle sera capable de prendre un médicament tous les jours et de se rendre à des rendez-vous de suivi réguliers. Les client·e·s peuvent avoir d’autres préoccupations dont ils ou elles souhaitent discuter, comme les effets secondaires possibles des médicaments.

En plus d’informer les client·e·s, vous pouvez diriger ou soutenir les efforts visant à améliorer la sensibilisation à la PrEP en tant qu’approche de prévention auprès d’un éventail de prestataires de services dans votre région travaillant peut-être auprès de personnes qui utilisent des drogues. Il peut s’agir de médecins, d’infirmier·ère·s, de pharmacien·ne·s et du personnel non clinique d’organismes communautaires.

2. Favorisez l’accès à la PrEP pour les personnes qui utilisent des drogues dans votre communauté et aidez les personnes sous PrEP à la prendre systématiquement et correctement.

Vous pouvez aider les client·e·s qui souhaitent prendre la PrEP à trouver un programme à cet effet ou un·e prescripteur·trice dans leur localité. Essayez de les aider à trouver un·e prestataire qui ne portera pas de jugement et qui connaît bien les soins aux personnes qui utilisent des drogues. Certain·e·s client·e·s peuvent bénéficier d’un soutien pour se préparer à parler de la PrEP à un·e prestataire de soins de santé. Demandez aux client·e·s comment vous pouvez les aider à se préparer à cette conversation. Vous pouvez leur proposer d’assister au premier rendez-vous avec eux ou elles. Les client·e·s peuvent également bénéficier d’une aide pour déterminer comment obtenir une couverture d’assurance pour la PrEP.

Dans la mesure du possible, nouez des partenariats avec les prestataires de soins, les cliniques et les centres de santé de votre localité prodiguant des soins aux personnes qui utilisent des drogues et prescrivant régulièrement la PrEP. Si les options dans votre communauté sont limitées, vous pouvez envisager de militer pour que certain·e·s prestataires commencent à prescrire la PrEP. Réfléchissez aux endroits dans votre communauté où les personnes qui utilisent des drogues peuvent accéder à la PrEP. On parle entre autres d’obtenir une ordonnance, d’aller chercher les médicaments et de se rendre à des rendez-vous de suivi réguliers. Il peut être plus facile pour les personnes qui utilisent des drogues d’accéder à la PrEP et de participer au suivi de ce traitement si les rendez-vous ont lieu dans un endroit où elles ont déjà accès à des services, comme dans une clinique ou un programme offrant des services aux personnes qui utilisent des drogues (p. ex. services de réduction des méfaits, traitement de l’hépatite C, traitement par agoniste opioïde [TAO]). Certains de ces programmes peuvent avoir mis en place des stratégies pour offrir des soins aux personnes qui utilisent des drogues, comme des services mobiles ou d’intervention de proximité, et un soutien par des pairs.

Pour maximiser l’efficacité de la PrEP, il faut la prendre systématiquement et correctement. Cela signifie qu’il faut prendre les médicaments tels qu’ils sont prescrits et se rendre de manière périodique à des rendez-vous médicaux. Les personnes qui utilisent des drogues peuvent bénéficier d’un soutien leur permettant d’adhérer au schéma de la PrEP. En effet, ces personnes pourraient rencontrer des difficultés entravant la prise d’un médicament quotidien et le stockage de leurs médicaments en toute sécurité ou nuisant à leur capacité de se présenter à des rendez-vous de suivi fréquents.

Les prestataires de services peuvent aider les client·e·s à surmonter les difficultés liées à la prise de la PrEP et aux visites médicales. Voici quelques stratégies possibles :

  • recourir à une appli favorisant l’observance ou une sonnerie de rappel sur leur téléphone;
  • utiliser des piluliers en plastique pour stocker leurs comprimés pour la semaine ou demander à la pharmacie d’emballer les médicaments dans des plaquettes thermoformées en fonction de la posologie quotidienne;
  • prendre des dispositions pour que la PrEP soit remise quotidiennement avec d’autres médicaments tels que le TAO ou un approvisionnement plus sécuritaire;
  • obtenir l’aide d’un pair pour l’observance du traitement ou pour se rendre aux rendez-vous de suivi.

3. Encourager la mise en place d’un plan global favorisant la santé sexuelle et la réduction des méfaits

La PrEP est un outil de prévention du VIH auquel peuvent recourir les personnes qui utilisent des drogues, mais ce n’est qu’une option parmi tant d’autres. Tout le monde devrait avoir accès à des services complets de santé sexuelle et de réduction des méfaits.

Informez vos client·e·s au sujet de toutes les méthodes très efficaces de prévention du VIH afin qu’ils et elles puissent déterminer l’approche (ou la combinaison d’approches) qui leur conviendra le mieux. Cela devrait inclure des renseignements sur la PrEP, les condoms et l’importance de ne pas partager le matériel d’utilisation de drogues, ainsi que sur la prophylaxie post-exposition (PPE) et le traitement efficace du VIH pour les personnes vivant avec ce virus. Veillez à ce que les client·e·s aient accès à toutes ces méthodes hautement efficaces, y compris à des condoms gratuits et à des fournitures de réduction des méfaits (p. ex. aiguilles, seringues, filtres et cups neufs, et eau stérile). Si l’accès à l’un de ces outils de prévention est limité ou s’il existe des obstacles à l’accès, il importe d’y remédier en priorité.

Discutez avec les client·e·s de leur santé sexuelle en général, y compris des infections transmissibles sexuellement (ITS). Encouragez le recours à des stratégies de prévention (comme l’utilisation de condoms) et le dépistage régulier des ITS pour les personnes présentant un risque continu. Discutez également avec vos client·e·s des options et des plans en matière de santé sexuelle et reproductive, ce qui devrait inclure diverses options de planification des naissances pour les personnes qui souhaitent éviter une grossesse.

Les prestataires de services doivent également fournir de l’information sur l’usage de substances à moindre risque. Offrez de l’information sur la manière d’injecter, de fumer et de sniffer des drogues de la manière la plus sécuritaire possible. Il s’agit notamment de fournir des renseignements sur le risque d’hépatite C et d’autres infections (p. ex. bactériennes) qui peuvent être transmises d’une personne à l’autre en cas de partage du matériel d’usage de drogues. Il convient également de discuter des stratégies visant à réduire le risque de surdose et d’intoxication, telles que l’usage de drogues dans un site de consommation supervisé, l’accès à la TAO ou à un approvisionnement plus sécuritaire, le port de trousses de naloxone et le fait d’éviter d’utiliser des drogues seul·e.

4. S’attaquer au risque sous-jacent de contracter le VIH

Le counseling en matière de prévention du VIH offre la possibilité d’arrimer les personnes à d’autres services et sources de soutien, outre que ceux qui sont directement liés au VIH.

Au cours de vos conversations avec un·e client·e, vous pourriez cerner des problèmes dans sa vie qui ont une influence défavorable sur sa santé et son bien-être. Soyez prêt·e à suggérer des mesures de soutien offertes dans votre communauté qui peuvent aider à surmonter les problèmes courants auxquels sont confrontées les personnes qui utilisent des drogues. Il peut s’agir d’obtenir de l’aide pour assurer une alimentation nutritive ou trouver un logement stable, de l’aide en matière de santé mentale, un traitement de la dépendance aux substances, une assistance culturellement adaptée pour les personnes autochtones qui utilisent des drogues et une assistance pour les personnes victimes de violence de la part d’un·e partenaire intime. Ces types de services et de soutien peuvent améliorer la santé et le bien-être des personnes en général et réduire leur risque de contracter le VIH. Il se peut que vous soyez en mesure de fournir certains de ces services ou que vous deviez orienter les client·e·s vers des services de soutien pertinents au sein de votre communauté.

Ressources pour les client·e·s

La PrEP pour prévenir le VIH : Réponses à vos questions - dépliant

Est-ce que la PrEP me convient? – carte-portefeuille

Est-ce que tu sais qu’il y a une pilule qui peut prévenir le VIH? - affiche

De quelle façon la PrEP prévient-elle le VIH? - vidéo

L’usage de substances à moindres risques - série de vidéos

Ressources pour prestataires de services

Prophylaxie pré-exposition - feuillet d’information

L’usage de substances à moindres risques - série de feuillets d’information

Les bases de la réduction des méfaits : trousse pour prestataires de services - cours d’autoapprentissage

Lignes directrices et prises de position

Lignes directrices canadiennes sur les prophylaxies pré-exposition et post-exposition non professionnelle au VIH

Pre-Exposure Prophylaxis (PrEP) for People who Inject Drugs: Community Voices on Pros, Cons, and Concerns (en anglais seulement) - International Network of People who Use Drugs (INPUD)

Données probantes

Épidémiologie du VIH chez les personnes qui utilisent des drogues

La prévalence du VIH chez les personnes qui s’injectent des drogues est élevée au Canada. Une étude appelée enquête Track auprès des utilisateurs de drogues injectables au Canada a recueilli des données auprès de 2 383 personnes qui s’injectent des drogues dans 14 sites sentinelles au Canada entre 2017 et 20191. Parmi les 2 162 participant·e·s ayant fourni un échantillon de sang, 10,3 % étaient infecté·e·s par le VIH1.

Nous ne disposons pas de données nationales sur l’épidémiologie du VIH chez les personnes qui consomment des drogues par d’autres voies que l’injection. Quelques petites études réalisées au Canada ont révélé une prévalence élevée du VIH chez les personnes qui fument du crack2,3, bien que dans certaines de ces études, les participant·e·s s’étaient également injecté des drogues. Certaines études menées dans d’autres pays, dont les États-Unis, ont comparé la prévalence du VIH chez les personnes qui s’injectent des drogues à la prévalence chez celles qui consomment des drogues par d’autres voies que l’injection, en interrogeant des personnes ayant accès au TAO4. Ces études ont montré que la prévalence du VIH était similaire dans les deux groupes4–6.

Risque de contracter le VIH chez les personnes qui utilisent des drogues

Les personnes qui s’injectent des drogues peuvent être exposées au risque de contracter le VIH à la fois en partageant le matériel utilisé pour s’injecter des drogues et en ayant des relations sexuelles sans utiliser de méthode de prévention du VIH. Cependant, il existe aussi un certain nombre de facteurs structurels et sociaux qui contribuent indirectement au risque d’infection par le VIH chez les personnes qui utilisent des drogues.

Dans l’enquête Track1, 11,6 % des participant·e·s ont déclaré qu’au cours des six mois précédents, ils ou elles s’étaient injecté des drogues à l’aide d’une aiguille ou d’une seringue qui avait été utilisée par quelqu’un d’autre. Le partage d’autres fournitures d’injection (tels que les cups, les filtres et l’eau) était plus courant, 38 % des participant·e·s déclarant y avoir eu recours lors des six mois précédents. L’enquête Track a également posé des questions sur les pratiques sexuelles. Parmi les participant·e·s ayant déclaré avoir eu un·e partenaire sexuel·le occasionnel·le au cours des six mois précédents, 59,2 % ont déclaré avoir eu des relations sexuelles vaginales ou anales sans condom avec un·e partenaire occasionnel·le. Parmi ceux et celles qui avaient un·e partenaire sexuel·le régulier·ère, 84,9 % ont déclaré avoir eu des relations sexuelles vaginales ou anales sans condom avec leur partenaire sexuel·le régulier·ère. Par ailleurs, 15,7 % des participant·e·s ont déclaré avoir eu des relations sexuelles rémunérées au cours des six mois précédents.

Il est possible que le VIH soit transmis par le partage du matériel pour fumer des drogues, en particulier si l’une ou les deux personnes partageant une pipe présentent des plaies, des coupures ou des brûlures sur la bouche2. Toutefois, il est plus probable que le sexe soit la principale voie de transmission du VIH chez les personnes qui fument des drogues telles que le crack ou le crystal meth et qui ne s’injectent pas de drogues2.

Outre les comportements individuels, il existe des facteurs structurels et sociaux qui contribuent au risque de contracter le VIH chez les personnes qui utilisent des drogues7. Les facteurs structurels, tels que la criminalisation de l’usage de drogues et le colonialisme, peuvent créer des conditions qui ont un impact défavorable sur la santé d’une personne, comme la pauvreté, l’exclusion sociale et diverses formes de discrimination. Ces conditions sont appelées facteurs sociaux ou déterminants sociaux de la santé.

Efficacité de la PrEP pour la prévention du VIH

De nombreuses données montrent que la PrEP orale quotidienne (TDF + FTC) est très efficace pour réduire le risque de contracter le VIH lorsqu’elle est utilisée correctement et systématiquement8.

Des essais contrôlés avec répartition aléatoire (ECRA) ont montré que la PrEP quotidienne (TDF + FTC) est très efficace pour prévenir la transmission sexuelle du VIH8. Lorsqu’elle est prise systématiquement et correctement, la PrEP semble prévenir près de 100 % des cas de transmission sexuelle du VIH9. Parmi toutes les études et les millions de personnes qui ont utilisé la PrEP dans le monde, toutes identités de genre et orientations sexuelles confondues, il y a eu très peu de cas documentés de transmission sexuelle du VIH chez les personnes qui ont bien observé la PrEP (c’est-à-dire qui l’ont prise de manière systématique tel qu’elle avait été prescrite)9.

Un ECRA a évalué l’efficacité de la PrEP chez des personnes qui s’injectent des drogues10. Dans cette étude, les personnes qui s’injectent des drogues ont reçu quotidiennement du TDF en guise de PrEP. L’étude a révélé une réduction de 84 % du risque d’infection par le VIH chez les personnes ayant bien observé la PrEP11. Il convient de noter que le TDF seul ne fournit pas le même niveau de protection que l’association TDF + FTC12 et n’est pas recommandé comme PrEP dans aucune population particulière au Canada13. Seule la PrEP quotidienne associant le TDF et le FTC est actuellement recommandée pour les personnes qui s’injectent des drogues13.

Effets secondaires possibles de la PrEP

Les médicaments utilisés en guise de PrEP sont généralement bien tolérés14. Une minorité de personnes ayant participé à des essais de recherche ont signalé des effets secondaires, qui disparaissent souvent au cours des premières semaines d’utilisation de la PrEP. Parmi les effets secondaires les plus fréquents, on note douleurs abdominales, nausées, maux de tête et étourdissements14. L’utilisation de la PrEP a été associée à des effets toxiques plus préoccupants chez un petit nombre de personnes, telles que de légers troubles affectant la santé des reins, des os et, dans de rares cas, du foie8. Il est encourageant de constater que ces changements sont réversibles après l’arrêt de la PrEP8. Les prestataires qui prescrivent la PrEP surveillent les effets secondaires et les autres réactions possibles aux médicaments à l’aide d’analyses de laboratoire et en demandant à leurs client·e·s s’ils ou elles ressentent de nouveaux symptômes.

Sensibilisation à la PrEP et volonté d’utiliser la PrEP chez les personnes qui utilisent des drogues

Les études montrent que la sensibilisation à la PrEP et l’usage de cette stratégie sont faibles chez les personnes qui s’injectent des drogues15–18. Dans l’enquête Track auprès des utilisateurs de drogues injectables, seul·e·s 14,3 % des participant·e·s ont déclaré avoir entendu parler de la PrEP1. Parmi ceux et celles qui étaient séronégatif·ve·s ou qui ne connaissaient pas leur statut, 0,3 % avaient utilisé la PrEP au cours de l’année écoulée. Bien que la sensibilisation soit faible, des études ont montré qu’une fois qu’on leur avait expliqué en quoi consiste la PrEP, de nombreuses personnes qui s’injectent des drogues ont dit souhaiter la prendre15. Par exemple, dans une étude menée à Vancouver portant sur 543 personnes séronégatives qui s’injectent des drogues, 34,5 % d’entre elles ont exprimé un intérêt pour la PrEP après en avoir été informées19.

Obstacles à la PrEP pour les personnes qui utilisent des drogues et moyens possibles de les surmonter

Des études ont mis en évidence plusieurs obstacles à l’accès à la PrEP et au maintien de la PrEP chez les personnes qui utilisent des drogues15,20–22. Parmi les obstacles les plus courants, on peut citer ce qui suit :

  • ne pas se sentir à l’aise de parler ouvertement avec un·e prestataire de soins de santé en raison de la stigmatisation liée à l’usage de drogues ou au VIH;
  • avoir des préoccupations concernant les effets secondaires et les interactions possibles avec d’autres médicaments (y compris les substances non réglementées et les médicaments sur ordonnance);
  • faire usage de drogues et avoir d’autres priorités concurrentes nécessaires à la survie, ce qui rend difficile le maintien d’un emploi du temps régulier, y compris le fait de se rappeler de prendre la PrEP tous les jours et de se rendre à des rendez-vous réguliers;
  • avoir de la difficulté à protéger les médicaments contre la perte ou le vol, en particulier pour les personnes en situation de logement précaire.

Les personnes qui utilisent des drogues peuvent être plus enclines à amorcer la PrEP et à la poursuivre si celle-ci est intégrée dans des programmes de réduction des méfaits ou de traitement de troubles liés à l’usage de substances, ou si la PrEP est dispensée dans des lieux où les personnes se procurent le TAO ou un approvisionnement plus sécuritaire23,24. Dans le cadre d’une étude pilote menée à Ottawa, la PrEP a été proposée à des personnes ayant accès à un programme d’approvisionnement plus sécuritaire24. Dans le cadre de ce programme, 42 personnes se sont vu proposer la PrEP et 23 d’entre elles ont accepté l’offre. Sur les 23 personnes qui ont commencé à prendre la PrEP, 15 l’ont poursuivie pendant les six mois de l’étude. Les scientifiques attribuent ce succès en partie à l’intégration du programme dans le programme existant d’approvisionnement plus sécuritaire.

L’intégration de la PrEP dans les services existants destinés aux personnes qui utilisent des drogues peut contribuer à lever certains des obstacles à l’accès à la PrEP de la manière suivante :

  • Elle peut offrir une option qui n’oblige pas la personne à se rendre chez un·e nouveau·elle prestataire de soins. Les personnes qui utilisent des drogues peuvent se sentir plus à l’aise d’accéder à la PrEP auprès d’un organisme qu’elles connaissent bien et où elles ne se sentent pas jugées en raison de leur usage de drogues22,23.
  • Elle offre la commodité en permettant d’accéder à la PrEP en même temps qu’à d’autres services21,22,24.
  • Elle peut offrir une flexibilité adaptée aux personnes qui utilisent des drogues, par exemple grâce à la remise des médicaments tous les jours ou toutes les semaines (au lieu de fournir l’approvisionnement habituel de trois mois) afin d’aider les personnes qui ont des difficultés à prendre leurs comprimés tous les jours ou qui n’ont pas d’endroit sûr où conserver un approvisionnement de comprimés pour trois mois21,24.

Références                                                                                                                                 

  1. Tarasuk J, Zhang J, Lemyre A et al. Résultats nationaux de l’enquête Track auprès des utilisateurs de drogues injectables au Canada, phase 4, 2017-2019. Relevé des maladies transmissibles au Canada. 2020;46(5):155-168. À l’adresse : https://www.canada.ca/content/dam/phac-aspc/documents/services/reports-publications/canada-communicable-disease-report-ccdr/monthly-issue/2020-46/issue-5-may-7-2020/ccdrv46i05a07f-fra.pdf
  2. Strike C, Miskovic M, Perri M et al. Recommandations de pratiques exemplaires pour les programmes canadiens qui fournissent des produits de réduction des méfaits aux personnes qui consomment des drogues et qui sont à risque pour le VIH, le VHC et d’autres méfaits pour la santé : 2021. Toronto (Ont.) : Groupe de travail sur les pratiques exemplaires pour les programmes de réduction des méfaits au Canada; 2021. À l’adresse :  https://www.catie.ca/fr/recommandations-de-pratiques-exemplaires-pour-les-programmes-canadiens-de-reduction-des-mefaits
  3. Bayoumi AM, Strike C, Jairam J et al. Report of the Toronto and Ottawa Supervised Consumption Assessment Study. Toronto (Ont.) : St. Michael’s Hospital et Dalla Lana School of Public Health, Université de Toronto; 2012. À l’adresse : https://www.catie.ca/sites/default/files/TOSCA%20report%202012.pdf  (en anglais seulement)
  4. Strathdee SA, Stockman JK. Epidemiology of HIV among injecting and non-injecting drug users: current trends and implications for interventions. Current HIV/AIDS Reports. 2010 May;7:99-106.
  5. Des Jarlais DC, Arasteh K, Perlis T et al. Convergence of HIV seroprevalence among injecting and non-injecting drug users in New York City. AIDS. 2007 Jan 11;21(2):231-5.
  6. Strathdee SA, Sherman SG. The role of sexual transmission of HIV infection among injection and non-injection drug users. Journal of Urban Health. 2003 Sep;80(Suppl 3):iii7-14.
  7. Rhodes T, Singer M, Bourgois P et al. The social structural production of HIV risk among injecting drug users. Social Science & Medicine. 2005 Sep 1;61(5):1026-44.
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  9. To KW, Lee SS. A review of reported cases of HIV pre‐exposure prophylaxis failure with resultant breakthrough HIV infections. HIV Medicine. 2021 Feb;22(2):75-82.
  10. Choopanya K, Martin M, Suntharasamai P et al. Antiretroviral prophylaxis for HIV infection in injecting drug users in Bangkok, Thailand (the Bangkok Tenofovir Study) : a randomised, double-blind, placebo-controlled phase 3 trial. The Lancet. 2013 Jun;381(9883):2083-90.
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  14. Conniff J, Evensen A. Preexposure prophylaxis (PrEP) for HIV prevention : the primary care perspective. Journal of the American Board of Family Medicine. 2016 Jan 1;29(1):143-51.
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  19. Escudero DJ, Kerr T, Wood E et al. Acceptability of HIV pre-exposure prophylaxis (PrEP) among people who inject drugs (PWID) in a Canadian setting. AIDS and Behavior. 2015 May;19:752-7.
  20. Footer KH, Lim S, Rael CT et al. Exploring new and existing PrEP modalities among female sex workers and women who inject drugs in a US city. AIDS Care. 2019;31(10):1207-13.
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