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Comme le VIH affaiblit le système immunitaire, les personnes atteintes de ce virus sont plus à risque de présenter plusieurs cancers, notamment les suivants :

  • sarcome de Kaposi (SK)
  • lymphome non hodgkinien
  • cancer invasif du col utérin

Ces trois cancers sont associés au sida. Cependant, depuis l’introduction à grande échelle des combinaisons de médicaments anti-VIH puissants (TAR), ils sont devenus moins courants au Canada et dans les autres pays à revenu élevé, au moins parmi les personnes qui connaissent leur statut VIH et qui suivent un TAR. De plus, grâce au TAR, même si l’un de ces cancers se déclare, les personnes séropositives sont maintenant beaucoup plus susceptibles de répondre à un traitement anticancéreux et de survivre, comparativement à l’époque d’avant l’arrivée du TAR.

Malgré ce progrès, des cancers non liés au sida sont en train d’apparaître chez certaines personnes séropositives en raison de leur longévité accrue. Les cancers en question incluent les suivants :

  • cancer anal
  • cancer du poumon
  • cancer du foie
  • lymphome de Hodgkin

Les études ont fourni des données contradictoires quant à savoir si ces cancers non liés au sida se déclarent à un âge plus jeune chez les personnes séropositives, par rapport aux personnes séronégatives. Pour éclairer cette question, des chercheurs au Canada et aux États-Unis ont collaboré à l’analyse d’une immense quantité de données de santé recueillies auprès de 90 000 personnes dans le cadre d’un projet appelé NA-ACCORD (North American AIDS Cohort Collaboration on Research and Design).

Lors de leur plus récente analyse, les chercheurs affiliés à la NA-ACCORD ont constaté que les personnes séropositives étaient plus susceptibles de recevoir un diagnostic de « cancer du poumon, de l’anus, [de la bouche/gorge], du rein ou de myélome à un âge modestement plus jeune » que les personnes séronégatives atteintes de ces mêmes cancers. Dans l’ensemble, au moment où les cancers se déclaraient, la différence d’âge entre les personnes séropositives et les personnes séronégatives était de deux à quatre ans. L’équipe de recherche a avancé plusieurs explications possibles de cette différence. Or, quelles que soient les raisons, ces résultats et ceux d’études antérieures soulignent la nécessité d’interventions visant la prévention et le dépistage du cancer chez les personnes séropositives.

Détails de l’étude

Au moment de faire cette analyse du cancer, l’équipe de la NA-ACCORD disposait de données de santé recueillies auprès de 88 018 personnes séropositives dans des cliniques situées aux États-Unis et dans les provinces suivantes du Canada :

  • Colombie-Britannique
  • Alberta
  • Ontario
  • Québec

Les chercheurs se sont concentrés sur les participants dont les données avaient été recueillies entre 1998 et 2008. La vaste majorité (86 %) des participants étaient des hommes, et leur âge allait de 20 à 79 ans. Vingt-huit pour cent (28 %) de tous les participants avaient déjà fait l’objet d’un diagnostic de sida.

Afin de pouvoir évaluer les taux de cancer chez les personnes séronégatives, les chercheurs avaient accès à la base de données du National Cancer Institute (NCI) des États-Unis. Voici une liste de cancers au sujet desquels les chercheurs ont trié des données (ils sont énumérés dans l’ordre décroissant de la prévalence chez les personnes séropositives figurant dans l’étude) :

  • poumon
  • prostate
  • anus
  • foie
  • bouche et/ou gorge
  • lymphome de Hodgkin
  • côlon
  • rein
  • larynx
  • peau
  • sein
  • pancréas
  • myélome

Résultats

Les chercheurs ont annoncé une bonne nouvelle : « Il n’y a pas d’accélération générale de l’apparition du cancer chez les [personnes séropositives] à un âge plus jeune [selon les différents types de cancer] ».

Cependant, à la suite d’une analyse détaillée des données triées en fonction de l’âge, de la race et de périodes de temps spécifiques (1996 à 1999, 2000 à 2003, 2004 à 2008), les chercheurs ont observé que le diagnostic des cancers suivants se posait dès un âge légèrement plus jeune chez les personnes séropositives, mais la différence par rapport aux personnes séronégatives était significative du point de vue statistique :

Cancer anal

  • personnes séropositives : 47 ans
  • personnes séronégatives : 51 ans

Cancer du rein

  • personnes séropositives : 52 ans
  • personnes séronégatives : 54 ans

Cancer du poumon

  • personnes séropositives : 54 ans
  • personnes séronégatives : 58 ans

Cancer de la bouche et/ou de la gorge

  • personnes séropositives : 51 ans
  • personnes séronégatives : 53 ans

Myélome

  • personnes séropositives : 49 ans
  • personnes séronégatives : 54 ans

On voit ci-dessus que les cancers se déclaraient généralement de deux à quatre ans plus tôt chez les personnes séropositives que chez les personnes séronégatives.

Dans l’ensemble, les chercheurs ont constaté que l’un des cancers, soit le myélome, avait tendance à se déclarer quatre ans plus tôt chez les personnes séropositives qui avaient fait l’objet d’un diagnostic de sida, comparativement aux personnes séropositives qui n’avaient jamais reçu de diagnostic de sida. Ils ont également trouvé que le cancer du poumon avait tendance à apparaître quatre ans plus tôt chez les personnes séropositives ayant un faible compte de CD4+ (moins de 200 cellules/mm3) que chez les personnes séropositives ayant un compte de CD4+ plus élevé.

Les chercheurs ne sont pas certains pourquoi certains cancers survenaient quelques années plus tôt chez les personnes séropositives et d’autres non. Ils ont offert quelques explications possibles, mais d’autres recherches devront être menées pour mieux comprendre le fondement biologique de leurs résultats.

Prévention du cancer

Quelle que soit la raison de l’apparition de certains cancers chez les personnes séropositives dès un âge modestement plus jeune, les causes sous-jacentes de certains de ces cancers sont connues, et il existe des options à envisager pour réduire le risque de cancer, y compris les suivantes :

  • L’amorce précoce du TAR afin de préserver le système immunitaire. La recherche a révélé que le fait de commencer le TAR dès un stade précoce de l’infection au VIH aidait à réduire considérablement le risque de cancer. Les principales lignes directrices internationales sur le traitement du VIH recommandent maintenant que les médecins proposent l’amorce du TAR dès que possible après le diagnostic de l’infection au VIH.
  • Le tabagisme est associé à de nombreux méfaits et peut causer plusieurs des cancers mentionnés dans cet article, y compris les cancers du poumon, du col utérin, du rein, du foie et de la bouche/gorge. Il est donc important d’amener les fumeurs à reconnaître la nécessité d’arrêter de fumer et de leur offrir du soutien lorsqu’ils tentent d’écraser pour de bon.
  • Le dépistage de la co-infection au virus de l’hépatite B ou C (ces deux infections peuvent causer le cancer du foie). S’ils détectent une infection active à l’un de ces virus, les médecins peuvent offrir un traitement. Dans les cas où aucune infection active à l’hépatite B n’est détectée et que la personne n’a pas d’immunité contre ce virus, la vaccination pourrait être une option.
  • Discuter avec un médecin de la pertinence de la vaccination anti-VPH (virus du papillome humain) est une première étape importante car ce virus peut causer le cancer de l’anus, du col utérin, de la bouche/gorge, du pénis ou de la vulve. Les médecins et pharmaciens seront aussi au courant de subventions éventuelles disponibles dans leur région pour payer la vaccination anti-VPH.
  • Selon l’équipe NA-ACCORD, « d’autres recherches sont nécessaires sur le dépistage du cancer du poumon et de l’anus » chez les personnes séropositives. Si un tel dépistage n’est pas offert dans le cadre des soins de routine donnés dans la région du patient, il existe des programmes de recherche qui offrent le dépistage du cancer anal aux personnes séropositives dans certaines villes d’Amérique du Nord. Les patients peuvent se renseigner sur cette possibilité auprès de leur médecin ou infirmière. Discuter avec un médecin de la disponibilité du dépistage du cancer anal dans votre région est une bonne première étape.
  • Même si les lignes directrices américaines recommandent l’usage d’examens tomodensitométriques de faible dose pour détecter le cancer du poumon chez certains fumeurs actuels et anciens, les chercheurs croient que « d’autres données sont nécessaires » pour déterminer l’utilité de cette méthode chez les personnes séropositives.

Vers l’avenir

À mesure que les gens vieillissent, leur système immunitaire s’affaiblit graduellement. Pour cette raison, l’équipe NA-ACCORD a laissé entendre que « le fardeau du cancer continuera à s’alourdir à mesure que la population [séropositive] prendra de l’âge ». Les chercheurs ont ajouté que cet effet du vieillissement sur le système immunitaire souligne la « nécessité [de mesures visant] la prévention et la détection précoce du cancer ».

Ressources

Cancer

Cessation du tabagisme

Hépatite C

 —Sean R. Hosein

RÉFÉRENCE :

Shiels MS, Althoff KN, Pfeiffer RM, et al. HIV infection, immune suppression and age at diagnosis of non-AIDS-defining cancers. Clinical Infectious Diseases. 2017; in press.