La vaginose bactérienne : quelques enjeux de la recherche
Comme nous l’avons mentionné plus tôt dans ce numéro de TraitementActualités, la vaginose bactérienne (VB) est la conséquence d’un déséquilibre des bactéries vivant dans le vagin.
Pistes de recherche émergentes
Quand on compare la VB à de nombreuses autres affections, on dirait que la recherche à ce sujet avance plus lentement. Malgré cette lenteur, quelques thèmes sont en train d’émerger de la recherche sur la VB. Nos lecteurs devraient noter que ces idées sont préliminaires et à l’étude; il est donc possible qu’elles ne soient pas largement acceptées par les médecins qui étudient et soignent les femmes atteintes de VB.
Propagation probable de la VB
La cause et les déclencheurs du déséquilibre des bactéries vaginales qui caractérisent la VB ne sont pas clairs. Certaines recherches portent à croire que la VB est transmise sexuellement, le facteur de risque le plus important étant les relations sexuelles avec un nouveau partenaire. On a également associé des épisodes récurrents de VB aux relations sexuelles avec le même partenaire. De plus, les femmes ayant des relations hétérosexuelles qui se sont remises d’un épisode de VB sont moins susceptibles de revivre ce problème si leur partenaire masculin utilise un condom.
S’agit-il d’un seul microbe ou plusieurs?
Certains chercheurs croient qu’une seule sorte de bactérie, soit G. vaginali, joue un rôle fondamental dans la VB. D’autres chercheurs pensent que plusieurs bactéries travaillent ensemble pour se créer un milieu plus favorable dans le vagin, causant ainsi la VB.
Réseaux sexuels
À en croire certaines études, le risque de VB serait plus élevé chez les femmes d’ascendance africaine et chez les femmes blanches ayant des relations sexuelles avec des hommes d’ascendance africaine. Les chercheurs ne sont pas certains des raisons de ce lien mais ils se doutent que les bactéries à l’origine de la VB sont présentes dans certains réseaux sexuels.
Enjeux liés au traitement
Les traitements recommandés aux femmes éprouvant des symptômes de la VB incluent les suivants :
- comprimés de métronidazole (Flagyl) par voie orale tous les jours pendant une semaine
- gel de métronidazole par application intravaginale pendant cinq jours consécutifs
- crème de clindamycine par application intravaginale pendant sept jours
Ces traitements sont généralement efficaces dans 75 % à 85 % des cas. Cependant, la VB revient souvent (rechute) quelque temps après la fin du traitement.
Les chercheurs ne savent pas avec certitude pourquoi les rechutes sont fréquentes dans les cas de VB, mais ils croient que les bactéries qui causent la VB produisent une mince pellicule collante (au nom technique de biofilm) qui les aide à adhérer aux parois du vagin. Ce biofilm pourrait aussi leur conférer une certaine protection contre les antibiotiques.
Les scientifiques étudient plusieurs composés pour déterminer leur capacité de perturber le biofilm associé à la VB.
Bonnes bactéries
Les chercheurs étudient des souches de bactéries inoffensives et « amicales » vivant dans le corps. Ils sont en train de tester différentes combinaisons de bonnes bactéries (appelées probiotiques) prises sous forme de capsules orales. La plupart des essais cliniques sur les probiotiques menés chez des femmes atteintes de VB n’ont pas donné lieu à des taux élevés de guérison ou de prévention. Cependant, il est possible que l’on ait obtenu ces résultats décevants parce que, comme l’a dit un membre de l’équipe, les chercheurs ont testé des « candidats de probiotiques mal choisis ». La recherche émergente porte à croire que les nouvelles formulations de probiotiques, y compris celles contenant la bactérie L. crispatus, mériteraient d’être explorées dans le cadre d’essais cliniques bien conçus.
Traitement des partenaires
Comme la recherche émergente semble indiquer que la VB est transmise sexuellement, des essais cliniques conçus pour traiter à la fois la femme touchée et son partenaire pourraient constituer un pas en avant utile. Dans le cas des relations sexuelles entre femmes et hommes, les chercheurs ne sont pas certains quelle partie du tractus génital masculin constitue la principale source (ou réservoir) de bactéries. S’il s’avérait que les bactéries résident seulement sur la peau du pénis, on pourrait utiliser des crèmes ou des gels pour traiter le partenaire masculin. Cependant, si le réservoir de bactéries causant la VB se trouvait à l’intérieur du pénis ou dans d’autres parties internes du tractus génital masculin, l’usage d’antibiotiques oraux serait peut-être une approche plus fructueuse à explorer.
À l’extérieur autant qu’à l’intérieur
De nombreuses habitudes et pratiques sont considérées comme des déclencheurs potentiels de la VB. Les chercheurs n’ont toutefois trouvé aucun lien clair entre l’apparition de la VB et l’exposition aux produits suivants :
- serviettes hygiéniques
- protège-slips
- aérosols
- poudres
- essuie-doigts
Certaines études ont associé les douches vaginales à un risque accru de VB. Notons que, lors de la majorité des études scientifiques en question, les chercheurs ont trouvé que « les femmes disaient faire des douches vaginales pour soulager des symptômes ou à des fins d’hygiène ». Par conséquent, il n’est pas clair si ces femmes avaient déjà la VB avant d’avoir recours aux douches vaginales. De plus, les chercheurs ont affirmé que « l’habitude de faire des douches vaginales est fortement liée aux comportements sexuels », de sorte qu’il est difficile de savoir si la VB est causée par la douche ou l’exposition sexuelle qui a lieu après la douche. Compte tenu de toutes les recherches menées, certains scientifiques sont d’avis que les douches vaginales pourraient être un cofacteur dans l’apparition de la VB chez les femmes, surtout celles ayant déjà un équilibre bactérien vaginal quelque peu anormal.
—Sean R. Hosein
RÉFÉRENCES :
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