suPAR : un signe avertisseur précoce

Un élément important de la recherche sur l'inflammation liée au VIH consiste à déterminer les meilleurs moyens de surveiller l'inflammation. Des chercheurs de Copenhague, au Danemark, ont étudié les taux d'une protéine qui est libérée dans le sang des humains. Dénommée suPAR (récepteur soluble de l'activateur du plasminogène de l'urokinase), cette protéine est libérée durant les périodes d'inflammation chronique. Lors d'une étude menée auprès de plus de 900 personnes séropositives, les chercheurs ont trouvé que la présence d'un taux élevé de suPAR au début de l'étude était associée à un risque accru de problèmes de santé graves subséquents et à une réduction de la survie. D'autres recherches sur le suPAR chez des personnes atteintes du VIH se poursuivent au Danemark et aux États-Unis.

À propos du suPAR

Avant de parler du suPAR, il est important d'expliquer son précurseur, l'uPAR (récepteur de l'activateur du plasminogène de l'urokinase). L'uPAR est une protéine qui se trouve principalement sur les cellules activées du système immunitaire, y compris les suivantes :

  • cellules T
  • neutrophiles
  • macrophages

Lorsque l'inflammation se produit, ces cellules libèrent de l'uPAR dans la circulation, où elle se fait donner le nom d'uPAR soluble ou suPAR. De nombreuses études ont trouvé un lien entre un taux élevé de suPAR et plusieurs problèmes de santé où l'inflammation et l'endommagement des systèmes organiques majeurs se produisent chez les personnes séronégatives. Chez les personnes séropositives, des études ont permis de constater que les taux les plus élevés de suPAR s'observent dans les cas de sida et sont associés à une réduction de la survie.

Détails de l'étude

Les chercheurs ont collaboré avec les responsables de la base de données observationnelles sur le VIH du Danemark. Ils ont analysé des échantillons de sang prélevés en 2007 (début de l'étude) et ont suivi les participants jusqu'en mai 2015 afin d'évaluer les complications subséquentes.

Neuf cent quarante-sept personnes (947) ont pris part à l'étude. Ils avaient le profil moyen suivant lors de leur admission :

  • âge : 45 ans
  • 73 % d'hommes, 27 % de femmes
  • 46 % étaient des hommes gais ou bisexuels
  • taux de suPAR : 2,65 ng/ml

Les participants sont restés dans l'étude pour une période moyenne de sept ans.

Résultats : nouveaux problèmes de santé

Un total de 270 diagnostics de complications non liées au VIH ont été posés après le début de l'étude. Les diagnostics figuraient dans les catégories suivantes :

  • maladie cardiovasculaire : 68 cas
  • cancer : 66 cas
  • maladie pulmonaire chronique : 56 cas
  • diabète : 34 cas
  • maladie rénale chronique : 23 cas
  • maladie hépatique chronique : 23 cas

Les analyses statistiques ont révélé que les participants dont le taux de suPAR était élevé au début de l'étude étaient significativement plus susceptibles de présenter ces affections (à l'exception du diabète).

suPAR et survie

Au cours de l'étude, 121 (13 %) participants sont morts. Ces personnes avaient un taux de suPAR considérablement plus élevé au début de l'étude (4,09 ng/ml) que les survivants (2,56 ng/ml).

Selon les chercheurs, chaque augmentation de 1 ng/ml du taux de suPAR correspondait à une augmentation de 23 % du risque de mortalité. Les chercheurs ont réparti les participants en quatre groupes ou « quartiles » en fonction de leur taux de suPAR (les premiers 25 %, ou premier quartile, avaient les taux de suPAR les plus faibles, alors que les derniers 25 %, ou quatrième quartile, avaient les taux les plus élevés). Les chercheurs ont constaté que le risque de mortalité était six fois plus élevé chez les personnes du quatrième quartile, comparativement au premier.

Points à retenir

1. Facteurs de risque additionnels

Cette étude prospective a révélé une relation entre les taux de suPAR élevés et une augmentation des risques de plusieurs complications et de mortalité n'ayant aucun lien avec l'infection au VIH. Lorsque les chercheurs ont tenu compte des facteurs qui déclenchent l'inflammation, notamment le tabagisme et l'usage de drogues, la relation entre les taux de suPAR élevés et ces événements malheureux s'est avérée encore valide.

2. Populations

Lorsque les chercheurs ont réparti les participants en fonction de leur taux de suPAR et de la manière dont ils avaient contracté le VIH, l'équipe a trouvé que la valeur prédictive du taux de suPAR quant à la probabilité d'événements malheureux futurs était « la plus forte chez les personnes ne présentant aucun autre facteur de risque d'inflammation potentiel comme l'injection de drogues et le tabagisme ».

Rôle du suPAR

Comme les chercheurs n'ont pas effectué de contrôles d'autres protéines associées à l'inflammation (interleukine-6, CD14, CD163) ou d'analyses de laboratoire sur les cellules et le suPAR, il n'est pas clair si celui-ci est simplement un marqueur du risque d'événements malheureux futurs ou encore s'il joue directement un rôle dans le déclenchement de l'inflammation.

Prochaine étape pour le suPAR?

Aux États-Unis, des chercheurs affiliés à l'ACTG (AIDS Clinical Trials Group) ont mené une étude sur le suPAR dont les résultats seront publiés en 2018, et d'autres études sur le suPAR se poursuivent aussi dans ce pays.

Au Danemark, des chercheurs continuent d'étudier le suPAR chez des personnes séropositives qui commencent le TAR et qui atteignent une charge virale indétectable. Les chercheurs danois sont en train de comparer les taux de suPAR de ces personnes à ceux de personnes séronégatives.

Le suPAR a beaucoup de potentiel à titre d'outil de surveillance de la santé, et un taux élevé de cette protéine indique que des problèmes futurs sont probables.

Remerciement

Nous tenons à remercier Jesper Eugen-Olsen, Ph. D., de l'Université de Copenhague, pour notre discussion utile, son assistance à la recherche et l'expertise prêtée à la révision de cet article.

—Sean R. Hosein

RÉFÉRENCES :

  1. Kirkegaard-Klitbo DM, Langkilde A, Mejer N, et al. Soluble urokinase plasminogen activator receptor is a predictor of incident non-AIDS comorbidity and all-cause aortality in human immunodeficiency virus type 1 infection. Journal of Infectious Diseases. 2017 Oct 17;216(7):819-823.
  2. Desmedt S, Desmedt V, Delanghe JR, et al. The intriguing role of soluble urokinase receptor in inflammatory diseases. Critical Reviews in Clinical Laboratory Sciences. 2017 Mar;54(2):117-133.
  3. Rasmussen LJ, Knudsen A, Katzenstein TL, et al. Soluble urokinase plasminogen activator receptor (suPAR) is a novel, independent predictive marker of myocardial infarction in HIV-1-infected patients: a nested case-control study. HIV Medicine. 2016 May;17(5):350-7.