Une étude de grande envergure donne une bonne nouvelle au sujet de l’innocuité des médicaments anti-VIH

La plus grande base de données à avoir réuni de l’information sur l’innocuité de la TAR pendant la grossesse s’appelle l’Antiviral Pregnancy Registry (dorénavant appelé le Registre dans cet article). Cette base de données permet d’effectuer des analyses par observation ou de cohorte. Le Registre est situé aux États-Unis, et à peu près 78 % des cas qu’il contient proviennent de ce pays, mais il recueille aussi de l’information dans 67 autres pays, y compris le Canada, le Brésil et des pays d’Europe et d’Afrique australe. Les chercheurs affiliés au Registre ont analysé des données réunies entre 1989 et 2014. Sur les 16 646 rapports évaluables envoyés au Registre, 7 135 concernaient des cas où le fœtus avait été exposé à la TAR pendant le premier trimestre de la grossesse.

Les chercheurs responsables du Registre ont fait la déclaration suivante :

« Concernant la population globale exposée aux antirétroviraux et figurant dans ce Registre, aucune augmentation du risque d’anomalies congénitales générales ou spécifiques n’a été détectée jusqu’à présent. »

Voilà une nouvelle très rassurante pour les mères séropositives et leurs professionnels de la santé.

Accent sur deux vieux médicaments

Le Registre contient des données se rapportant à un si grand nombre de grossesses et de bébés qu’il possède la puissance statistique nécessaire pour détecter une association potentielle entre de nombreux médicaments particuliers utilisés dans des régimes anti-VIH et la présence d’anomalies congénitales. La vaste majorité des médicaments utilisés par les femmes séropositives n’a pas été associée à un risque accru d’anomalies congénitales, sauf deux exceptions notables, soit :

  • ddI (didanosine, Videx EC)
  • nelfinavir (Viracept)

Environ 2,9 % des bébés présentaient des anomalies congénitales qui étaient potentiellement attribuables à l’exposition à ces médicaments. Cela se compare à un taux de 2,7 % dans une autre base de données. Les chercheurs affiliés au Registre ont qualifié de « modeste » cette augmentation (de 2,7 % à 2,9 %) du taux d’anomalies congénitales parmi les mères traitées par ces médicaments. Les chercheurs ont affirmé qu’ « aucune tendance n’a été détectée quant aux anomalies congénitales » suite à l’exposition fœtale au ddI et au nelfinavir, et ils ne sont pas certains que l’augmentation « modeste » du taux d’anomalies congénitales associé à ces médicaments ait une pertinence clinique.

De nos jours au Canada et dans d’autres pays à revenu élevé, les médecins ne prescrivent pas de façon routinière le ddI et/ou le nelfinavir parce qu’ils ont à leur disposition des médicaments plus sûrs et plus efficaces pour soigner toutes les personnes vivant avec le VIH, y compris les femmes enceintes.

Évaluation de nombreux médicaments

Grâce au nombre élevé de participants inscrits, le Registre permet de détecter la possibilité d’ « au moins une augmentation de deux fois du risque global d’anomalies congénitales » associé à l’exposition aux médicaments suivants dans l’utérus au cours du premier trimestre de la grossesse :

  • abacavir (Ziagen et dans le Kivexa, le Trizivir et le Triumeq)
  • atazanavir (Reyataz)
  • darunavir (Prezista et dans le Prezcobix)
  • didanosine (ddI, Videx)
  • éfavirenz (Sustiva, Stocrin et dans l’Atripla)
  • indinavir (Crixivan)
  • stavudine (d4T, Zerit)

Aucun signe d’une augmentation du risque n’a toutefois été détecté.

Le Registre est également en mesure de détecter la possibilité d’ « au moins une augmentation de 1,5 fois du risque global d’anomalies congénitales » associé à l’exposition aux médicaments suivants dans l’utérus au cours du premier trimestre de la grossesse :

  • FTC (emtricitabine et dans l’Emtriva, le Truvada, l’Atripla, le Complera et le Stribild)
  • 3TC (lamivudine et dans le Combivir, le Trizivir, le Ziagen et le Triumeq)
  • ténofovir (Viread et dans le Truvada, l’Atripla, le Complera et le Stribild)
  • lopinavir (dans le Kaletra)
  • AZT (zidovudine, Retrovir et dans le Combivir et le Trizivir)

À l’exception de l’AZT, le Registre n’a trouvé aucun signe de la possibilité d’une augmentation du risque d’anomalies congénitales.

À propos de l’AZT

Étant donné l’indice initial concernant l’innocuité de l’AZT, l’équipe du Registre a poussé plus loin son enquête sur la possibilité d’une association entre l’exposition à l’AZT dans l’utérus et l’apparition d’anomalies des organes génitaux masculins chez les bébés. Voici leur déclaration à ce sujet :

« Le Registre conclut que les données ne révèlent pas de lien causal entre l’exposition à la zidovudine et/ou à la lamivudine et [les anomalies congénitales des organes génitaux masculins]. La disparition du [risque accru] lors des analyses plus sophistiquées laisse croire que l’augmentation pourrait être liée à d’autres facteurs. »

Les chercheurs affiliés au Registre maintiennent leur vigilance à l’égard de l’impact de l’AZT et d’autres médicaments sur la santé du fœtus, et d’autres rapports seront publiés au fur et à mesure que les données s’accumuleront. Notre prochain article parle d’autres facteurs qui pourraient jouer un rôle dans l’hypospadias.

Remerciement

Nous tenons à remercier Jason Brophy, MD et spécialiste des maladies infectieuses, pour ses commentaires, son expertise et son assistance à la recherche.

—Sean R. Hosein

RÉFÉRENCES :

  1. Williams PL, Crain MJ, Yildirim C, et al. Congenital anomalies and in utero antiretroviral exposure in human immunodeficiency virus-exposed uninfected infants. JAMA Pediatrics. 2014; in press.
  2. Chou R, Cantor AG, Zakher B, et al. Screening for HIV in pregnant women: systematic review to update the 2005 U.S. Preventive Services Task Force recommendation.  Annals of Internal Medicine. 2012 Nov 20;157(10):719-28.
  3. National Institutes of Health. NIH-sponsored study identifies superior drug regimen for preventing mother-to-child HIV transmission. Press release. 17 November 2014. Available at: http://tinyurl.com/pfkjhvr
  4. Antiretroviral Pregnancy Registry Steering Committee. Antiretroviral Pregnancy Registry International Interim Report for 1 January 1989 through 31 January 2014. Wilmington, NC: Registry Coordinating Center; 2014. Available at: www.APRegistry.com [accessed 19 November 2014]