CATIE réclame la suspension de la fermeture des sites de consommation supervisée en Ontario

21 août 2024

CATIE, la source canadienne de renseignements sur le VIH et l’hépatite C, demande que le gouvernement de l’Ontario suspende son projet de fermeture de dix sites de consommation supervisée dans la province jusqu’à ce qu’un plan concret soit mis en œuvre pour répondre à la demande de ces services qui sauvent des vies.

« Sept personnes décèdent chaque jour en Ontario en raison de la contamination des drogues », a déclaré Jody Jollimore, directeur général de CATIE. « Ces sites sont les seuls endroits où il est possible d’utiliser des drogues sous la supervision de professionnel·le·s de la santé formé·e·s pour renverser les effets des surdoses. »

Mardi, le gouvernement ontarien a lancé un ultimatum à dix sites de consommation supervisée (cinq à Toronto et un dans chacune de ces villes : Ottawa, Kitchener, Thunder Bay, Hamilton et Guelph), leur demandant soit de transformer ces services en centres de traitement axés sur l’abstinence seulement, sans options de réduction des méfaits, soit de fermer leurs portes.

« Si ces services ferment, a ajouté M. Jollimore, les personnes utiliseront leurs drogues ailleurs – dans les parcs, dans les toilettes publiques ou alors chez elles, au risque de mourir si elles font une surdose seules. Ces fermetures augmenteront le nombre de seringues à la traîne dans les espaces publics, le volume d’appels au 911, l’engorgement des urgences des hôpitaux et les coûts pour notre système de santé. »

Les services de consommation supervisée permettent aux gens d’utiliser leurs drogues sous la supervision de professionnel·le·s de la santé formé·e·s pour prévenir les surdoses et intervenir lorsqu’elles surviennent. On estime que 361 000 Canadien·ne·s se sont rendu·e·s 4,3 millions de fois dans des services de consommation supervisée entre 2017 et juin 2023. Pendant cette même période, les travailleur·euse·s de première ligne sont intervenu·e·s sur place pour contrer environ 49 000 surdoses et autres urgences médicales liées à la drogue.

Selon le plan du gouvernement, les sites qui se transformeraient en centres de traitement axés sur l’abstinence seulement ne seraient pas autorisés à proposer des programmes d’aiguilles et de seringues. Ces derniers offrent aux personnes qui utilisent des drogues des seringues et des aiguilles stériles, prévenant ainsi la propagation du VIH et de l’hépatite C. Ils permettent aussi de retourner le matériel usagé pour qu’il soit jeté de façon sécuritaire, ce qui préserve la propreté et la sécurité des villes.

Tous ces services de réduction des méfaits ont été mis en place dans des quartiers où les besoins sont criants et où les services de santé destinés aux personnes utilisatrices de drogues et à d’autres communautés marginalisées sont implantés depuis longtemps, parfois depuis des décennies.

« Au final, le plus important, c’est que les gens soient en sécurité. Cela vaut aussi bien pour les personnes qui utilisent des drogues que pour leurs voisins qui ne veulent pas voir de seringues et d’aiguilles dans les lieux publics », a déclaré M. Jollimore. « Si le gouvernement pense qu’il existe de meilleurs endroits pour implanter ces services, qu’il nous présente un plan de relocalisation réaliste. D’ici là, il faut suspendre les fermetures, sinon des personnes mourront et les villes deviendront moins sécuritaires. »

Les faits :

  • Les personnes qui recourent aux services de consommation supervisée sont 69 % moins susceptibles de partager des aiguilles et des seringues que les personnes qui n’y ont pas recours1,2,3,4.
  • L’utilisation des services de consommation supervisée est également associée à une réduction des injections effectuées dans les lieux publics et dehors, une réutilisation moins fréquente des aiguilles et une élimination sécuritaire du matériel d’injection usagé5,6.
  • L’offre de matériel d’injection stérile entraîne une réduction des comportements d’injection à risque et des taux de transmission du VIH7,8,9.
  • La mise en place de services de consommation supervisée est associée à une réduction des visites aux urgences et des demandes d’ambulance liées aux opioïdes1,2.
  • Les services de consommation supervisée favorisent l’orientation des personnes utilisatrices de drogues vers les programmes de traitement de l’utilisation de substances, tels que la désintoxication et les traitements de substitution aux opioïdes, et les incitent à y recourir1,2.
  • Les services de consommation supervisée réduisent l’utilisation de drogues en public et la présence de matériel d’injection à la traîne1,2.
  • Des études menées dans plusieurs villes ont montré que les services de consommation supervisée ne sont pas associés à une augmentation de la criminalité dans les quartiers environnants10,3,11.

Pour plus d’information, écrire à media@catie.ca.

CATIE est la source canadienne de renseignements sur le VIH et l’hépatite C. Nous renforçons la réponse pancanadienne face au VIH et à l’hépatite C en faisant le pont entre la recherche et la pratique. Nous mettons les travaux scientifiques les plus récents à la disposition des prestataires de soins de santé et de services communautaires et promouvons les pratiques exemplaires des programmes de prévention, de dépistage, de traitement et de réduction des méfaits. À titre de courtier du Canada en connaissances du VIH, de l’hépatite C, de la santé sexuelle et de la réduction des méfaits, vous pouvez compter sur nous pour obtenir de l’information à jour, exacte et impartiale.

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