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L’abacavir (Ziagen)

Sommaire

L’abacavir est un type de médicament anti-VIH appelé analogues nucléosidiques (INTI). Les effets secondaires les plus fréquents de l’abacavir peuvent comprendre maux de tête, nausées, vomissements, fatigue inattendue et problèmes de sommeil. L’abacavir se prend habituellement à raison de 600 mg par jour, avec ou sans aliments.

Remarque : Jusqu’à 8 % des personnes qui prennent l’abacavir risquent d’éprouver une grave réaction allergique (dite d’hypersensibilité) à l’abacavir : veuillez lire la section Mises en garde pour en savoir plus.

Qu’est-ce que l’abacavir?

L’abacavir, vendu sous le nom de marque Ziagen (et aussi un ingrédient de Kivexa et Triumeq, est un type de médicament antirétroviral (anti-VIH) appelé analogue nucléosidique ou INTI (inhibiteur nucléosidique de la transcriptase inverse). L’abacavir est utilisé en association avec d’autres médicaments antirétroviraux pour traiter (mais non pour guérir) le VIH.

Comment l’abacavir agit-il?

Lorsque le VIH infecte une cellule, il prend le contrôle de cette dernière. Le VIH oblige ensuite la cellule à fabriquer de nombreuses copies du virus. Pour fabriquer ces copies, la cellule infectée utilise des protéines appelées enzymes. Lorsque l’activité de ces enzymes est réduite, la réplication du VIH ralentit grandement.

L’abacavir appartient à une classe de médicaments appelés analogues nucléosidiques. L’abacavir inhibe l’action d’une enzyme appelée transcriptase inverse (TI) dont les cellules infectées par le VIH se servent pour fabriquer de nouveaux virus. Puisque l’abacavir inhibe ou réduit l’activité de cette enzyme, ce médicament incite les cellules infectées à produire moins de virus.

Comment les personnes vivant avec le VIH utilisent-elles l’abacavir?

L’abacavir n’est plus très utilisé. Cela dit, quand on le prescrit, il est utilisé en association avec plusieurs autres médicaments anti-VIH. Les associations de ce genre s’appellent traitement antirétroviral ou TAR. Pour en savoir plus sur le TAR, consultez la publication de CATIE intitulée Votre guide sur le traitement du VIH.

Pour beaucoup de personnes vivant avec le VIH, le recours à un traitement antirétroviral a provoqué une augmentation de leur compte de cellules CD4+ et une réduction de la quantité de VIH dans leur sang (charge virale). Ces effets bénéfiques contribuent à réduire le risque de contracter une infection potentiellement mortelle. Ni l’abacavir ni aucun autre médicament anti-VIH ne permet de guérir le VIH. Il est donc important de consulter son médecin pour un suivi régulier et de passer des tests de laboratoire de façon périodique.

Il existe des données probantes indiquant que les personnes séropositives qui suivent un TAR, qui reçoivent des soins et qui maintiennent une charge virale indétectable sont considérablement moins susceptibles de transmettre le VIH à d’autres personnes, que ce soit par les relations sexuelles, le partage de matériel servant à la consommation de drogues ou encore durant la grossesse et l’accouchement. De fait, les données probantes se rapportant à la transmission sexuelle révèlent que les personnes sous TAR qui maintiennent une charge virale indétectable ne transmettent pas le virus à leurs partenaires sexuel·le·s. Pour en savoir plus, voir le feuillet d’information de CATIE Le traitement du VIH et la charge virale indétectable pour prévenir la transmission du VIH. L’utilisation de condoms demeure toutefois une bonne idée parce qu’ils réduisent le risque de contracter ou de transmettre d’autres infections transmissibles sexuellement.

Mises en garde

1. Réaction d’hypersensibilité

Chez jusqu’à 8 % des personnes vivant avec le VIH qui utilisent l’abacavir, le système immunitaire réagit de manière exagérée contre ce médicament; il s’agit d’une réaction d’hypersensibilité à l’abacavir. Cette réaction est très grave et peut être fatale.

Même si une réaction d’hypersensibilité à l’abacavir peut se produire n’importe quand lors d’un traitement comprenant ce médicament, elle se produit en moyenne durant les six premières semaines de l’utilisation. Le fabricant du médicament, ViiV Soins de santé, affirme que vous devriez cesser d’utiliser l’abacavir si vous présentez des signes ou des symptômes d’au moins deux des groupes suivants :

  1. fièvre;
  2. éruptions cutanées;
  3. symptômes gastro-intestinaux (nausées, vomissements, diarrhée ou douleurs abdominales);
  4. symptômes généralisés (fatigue, manque d’énergie ou courbatures);
  5. symptômes respiratoires (maux de gorge, essoufflement, toux) ainsi que la détection d’anomalies sur des radiographies pulmonaires.

Si vous présentez des symptômes d’au moins deux de ces groupes pendant que vous prenez de l’abacavir ou un autre médicament qui en contient, cessez immédiatement d’utiliser le médicament en question et contactez votre médecin sans tarder. Si une réaction d’hypersensibilité est confirmée, vous ne pourrez jamais recommencer à prendre le médicament parce qu’une réaction fatale pourrait se produire dans l’espace de quelques heures. Il faudra également que vous évitiez tous les autres médicaments contenant de l’abacavir.

Il existe maintenant un test de dépistage qui vous aidera à prévoir si vous êtes susceptible de faire une réaction d’hypersensibilité à l’abacavir. Veuillez consulter le feuillet d’information de CATIE intitulé Le dépistage de l’hypersensibilité à l’abacavir.

2. Reprise du traitement

Si une réaction d’hypersensibilité est confirmée, vous ne pourrez jamais recommencer à prendre l’abacavir parce qu’une réaction fatale pourrait se produire dans l’espace de quelques heures. Il faudra également que vous évitiez tous les autres médicaments contenant de l’abacavir (y compris Kivexa et Triumeq).

Des réactions d’hypersensibilité se sont même produites chez des personnes qui n’avaient eu aucun problème lorsqu’elles prenaient l’abacavir pour la première fois, mais qui ont ensuite repris le traitement après l’avoir interrompu.

3. Risque cardiovasculaire

Les données d’un essai bien conçu (appelé Reprieve) portant sur 7 769 personnes séropositives ont été analysées. Cette étude a recruté des personnes présentant un risque faible ou modéré de maladie cardiovasculaire. Les participant·e·s ont été réparti·e·s au hasard pour recevoir soit un médicament hypocholestérolémiant, la pitavastatine, soit un placebo. Après une moyenne de cinq ans de suivi, l’équipe de recherche a constaté que les personnes ayant reçu de la pitavastatine présentaient un risque réduit de 35 % de symptômes majeurs de maladie cardiovasculaire (crise cardiaque, accident vasculaire cérébral, etc.). 

Bien que la répartition aléatoire des participant·e·s à l’essai Reprieve n’incluait pas d’option sans traitement contre le VIH (ils et elles étaient tou·te·s sous traitement), la méthode de répartition utilisée dans l’étude permettait de réduire la possibilité de tirer des conclusions biaisées lors de l’analyse des données. L’équipe de recherche est en mesure d’analyser de manière plus poussée les données recueillies dans le cadre de l’étude Reprieve afin de répondre à d’importantes questions de recherche. L’une de ces questions concerne le risque associé à l’utilisation de l’abacavir. 

Depuis 2008, certaines études d’observation ont fait état d’un risque accru de crise cardiaque chez certaines personnes séropositives ayant utilisé l’abacavir. Toutefois, comme ces études étaient de nature observationnelle, elles n’ont pas pu prouver que l’utilisation de l’abacavir était liée à un risque accru de crise cardiaque. En outre, la plupart de ces analyses issues d’études d’observation semblaient présenter des problèmes — données manquantes ou impossibilité de prendre en compte des facteurs tels que le tabagisme et l’usage de substances. 

Aujourd’hui, les choses ont changé. Une analyse de l’étude Reprieve, très bien conçue, a révélé que l’utilisation récente ou passée de l’abacavir était liée à un risque accru de 50 % de crise cardiaque et d’autres symptômes majeurs de maladie cardiovasculaire grave. 

L’analyse des données de l’essai Reprieve a pu prendre en compte des facteurs tels que le sexe, le tabagisme, l’âge, l’usage de substances et la santé des reins. Même lorsque l’équipe de recherche de l’essai Reprieve a apporté des ajustements pour tenir compte de ces facteurs et d’autres éléments, l’abacavir était toujours lié à un risque significativement accru de crise cardiaque et de problèmes connexes. 

Ces résultats de l’essai Reprieve ont de nouveau alimenté les inquiétudes concernant l’innocuité des médicaments contenant de l’abacavir.

Par conséquent, par mesure de précaution, veuillez indiquer à votre médecin, avant de commencer à prendre Ziagen ou tout autre médicament contenant de l’abacavir, si vous présentez tout facteur de risque de maladie cardiovasculaire, comme les suivants :

  • les membres de votre famille immédiate (mère, père, frère, sœur) ont des antécédents de problèmes tels qu’une crise cardiaque ou un accident vasculaire cérébral;
  • vous présentez l’une des maladies suivantes : hypertension artérielle, taux anormal de cholestérol ou de triglycérides dans le sang, prédiabète ou diabète, ou encore lésions/maladies rénales;
  • vous faites usage de tabac ou fumez des drogues;
  •  vous vous injectez des drogues ou utilisez des stimulants (p. ex. cocaïne, crystal meth, MDMA/ecstasy, amphétamines ou speed).
    1. Rauch A, Nolan D, Martin A et al. Prospective genetic screening decreases the incidence of abacavir hypersensitivity reactions in Western Australian HIV Cohort Study. Clinical Infectious Diseases 2006;43(1):99-102.

Votre médecin peut vous aider à trouver des façons de réduire vos facteurs de risque de maladie cardiovasculaire. Votre médecin peut aussi vous aider à déterminer si l’abacavir vous convient.

4. Acidose lactique et stéatose hépatique

Au cours des dernières années, deux affections apparentées se sont produites, dans de très rares cas, chez certaines personnes qui recevaient des analogues nucléosidiques; il s’agit de l’acidose lactique (accumulation d’acide lactique dans le sang) et de la stéatose hépatique (accumulation de graisse dans le foie). Ces affections peuvent être très graves, voire mortelles. Elles s’observent principalement chez les femmes, les personnes faisant de l’embonpoint ou les personnes qui utilisent des analogues nucléosidiques depuis longtemps. Les symptômes de ces affections comprennent les suivants :

  • fatigue ou faiblesse inattendue;
  • nausées et/ou vomissements;
  • douleurs abdominales persistantes;
  • inflammation douloureuse du pancréas (pancréatite).

Si vous éprouvez un de ces symptômes sans cause apparente, appelez immédiatement votre infirmier·ère ou votre médecin.

L’acidose lactique a été observée par des médecins dans les années 1990 et au début des années 2000 chez des personnes sous TAR. De nos jours, cet effet indésirable est extrêmement rare, car le TAR a un profil d’innocuité nettement supérieur. Si vous présentez un des symptômes mentionnés ci-dessus, cela ne veut pas dire nécessairement que vous êtes atteint·e d’acidose lactique, mais communiquez tout de même avec votre médecin sans tarder.

Effets secondaires

Généralités

Les effets secondaires courants qui ont été signalés par certain·e·s utilisateur·trice·s de l’abacavir comprennent les suivants : maux de tête, nausées, vomissements, fatigue inattendue, diarrhée, perte de l’appétit, fièvre et éruptions cutanées. Plusieurs personnes trouvent que les effets secondaires causés par les médicaments anti-VIH s’atténuent ou disparaissent après quelques semaines de traitement.

Interactions médicamenteuses

Consultez toujours votre médecin et votre pharmacien·ne au sujet de la prise de tout autre médicament, qu’il soit livré sur ordonnance ou en vente libre, y compris les plantes médicinales, les suppléments et les drogues récréatives.

Certains médicaments peuvent interagir avec l’abacavir. Cette interaction peut faire en sorte que le taux d’abacavir augmente ou diminue dans votre corps. L’augmentation du taux d’abacavir peut provoquer de nouveaux effets secondaires ou aggraver des effets secondaires existants. Par contre, si le taux d’abacavir diminue excessivement, le VIH peut acquérir une résistance et vos options de traitement futures risquent de s’en trouver limitées.

Il peut également s’avérer nécessaire d’éviter les médicaments qui, même s’ils n’ont pas d’effet sur le taux d’abacavir, provoquent des effets secondaires semblables.

Si vous devez prendre un médicament qui est susceptible d’interagir avec vos médicaments existants, votre médecin peut faire ce qui suit :

  • ajuster les doses de vos médicaments anti-VIH ou de vos autres médicaments;
  • prescrire d’autres médicaments anti-VIH pour vous.

Interactions médicamenteuses avec l’abacavir

Les médicaments suivants interagissent ou pourraient potentiellement interagir avec l’abacavir. Cette description n’est pas exhaustive :

  • Chez les hommes, la consommation d’alcool fait augmenter le taux sanguin d’abacavir, ce qui pourrait en augmenter la toxicité. Cet effet n’a pas été étudié chez les femmes;
  • L’abacavir interagit avec le riociguat (utilisé pour traiter l’hypertension artérielle pulmonaire) et peut faire tripler les taux de riociguat dans le sang par rapport à leur taux normal. Le fabricant de l’abacavir, ViiV Soins de santé, recommande d’utiliser ces deux médicaments avec prudence. Il note qu’il peut être nécessaire de réduire la dose de riociguat chez les personnes qui utilisent l’abacavir.

Résistance et résistance croisée

Au fur et à mesure que de nouvelles copies de VIH sont fabriquées dans le corps, le virus modifie sa structure. On appelle ces modifications des mutations; les mutations peuvent permettre au VIH de résister aux effets des médicaments anti-VIH, ce qui veut dire qu’ils cesseront d’agir pour vous. Le fait d’associer l’abacavir à d’autres médicaments anti-VIH permet de retarder le développement de la résistance.

Pour réduire le risque de résistance médicamenteuse, vous devez prendre tous vos médicaments anti-VIH tous les jours en suivant les posologies à la lettre. Si vous manquez ou retardez des prises, ou si vous ne respectez pas les prescriptions de votre médecin, le taux d’abacavir risque de tomber trop bas. Si cela se produit, des virus résistants risquent d’apparaître. Si vous avez de la difficulté à prendre vos médicaments de façon régulière et en suivant les instructions, parlez-en à votre médecin ou votre infirmier·ère. Il ou elle peut vous aider.

Lorsque le VIH devient résistant à un médicament d’une classe, il risque parfois de devenir résistant à tous les autres médicaments de cette classe. Il s’agit de la résistance croisée. N’hésitez pas à parler de vos options de traitement actuelles et futures avec votre médecin. Pour vous aider à déterminer quels traitements vous pourrez utiliser à l’avenir, votre médecin peut faire analyser un petit échantillon de votre sang dans le cadre de tests de résistance. Si le VIH finit par acquérir une résistance à l’abacavir, votre médecin pourra utiliser les tests de résistance pour vous aider à trouver une autre association de médicaments.

Posologie et formulations

L’abacavir est offert sous forme de comprimés de 300 mg et de liquide de 20 mg/ml. La posologie standard pour les adultes est un comprimé deux fois par jour ou deux comprimés une fois par jour, avec ou sans aliments, pour un total de 600 mg par jour. Les formulations peuvent changer et les posologies doivent parfois être personnalisées. Tous les médicaments doivent toujours être pris conformément aux prescriptions de votre médecin.

Accessibilité

L’abacavir est homologué au Canada pour le traitement de l’infection au VIH, en association avec d’autres médicaments anti-VIH. Votre médecin peut vous renseigner davantage sur l’accessibilité et le remboursement de l’abacavir dans votre région. CATIE a créé un module électronique intitulé Accès aux médicaments anti-VIH : Programme fédéraux, provinciaux et territoriaux d’accès aux médicaments qui contient de l’information sur le remboursement des médicaments au Canada.

Veuillez consulter également les feuillets d’information de CATIE sur KivexaTriumeq et le dépistage de l’hypersensibilité à l’abacavir.

Références

  1. Rauch A, Nolan D, Martin A et al. Prospective genetic screening decreases the incidence of abacavir hypersensitivity reactions in Western Australian HIV Cohort Study. Clinical Infectious Diseases 2006;43(1):99-102.
  2. ViiV Soins de santé. Ziagen : comprimés et solutions buvables Ziagen. Monographie de produit. 5 juillet 2023.
  3. Berenguer J, Padilla B, Estrada V et al. Safety of abacavir therapy after temporary interruptions in patients without hypersensitivity reactions to the drug. AIDS 2002; 16(9):1299-1301.
  4. Grinspoon SK, Fitch KV, Zanni MV. Pitavastatin to Prevent Cardiovascular Disease in HIV Infection. New England Journal of Medicine. 2023 Aug 24;389(8):687-699.  
  5. Fichtenbaum CJ, Malvestutto CD, Watanabe MG et al. Abacavir is associated with elevated risk for cardiovascular events in the REPRIEVE trial. 25e Conférence internationale sur le sida, 22 au 26 juillet, 2024, Munich, Allemagne. Résumé OAB3406LB.
  6. Mushin AS, Trevillyan JM, Lee SJ et al. Factors associated with the development of coronary artery disease in people with HIV. Sexual Health. 2023 Oct;20(5):470-474.  
  7. van der Heijden WA, Wan J, Van de Wijer L et al. Plasmatic Coagulation Capacity Correlates with Inflammation and Abacavir Use During Chronic HIV Infection. JAIDS. 2021 May 1;87(1):711-719.  
  8. Kovari H, Calmy A, Doco-Lecompte T et al. Antiretroviral Drugs Associated with Subclinical Coronary Artery Disease in the Swiss Human Immunodeficiency Virus Cohort Study. Clinical Infectious Diseases. 2020 Feb 14;70(5):884-889.  
  9. Peltenburg NC, Bierau J, Schippers JA et al. Metabolic events in HIV-infected patients using abacavir are associated with erythrocyte inosine triphosphatase activity. Journal of Antimicrobial Chemotherapy. 2019 Jan 1;74(1):157-164. 
  10. Nan C, Shaefer M, Urbaityte R et al. Abacavir Use and Risk for Myocardial Infarction and Cardiovascular Events: Pooled Analysis of Data from Clinical Trials. Open Forum Infectious Diseases. 2018 Apr 20;5(5): ofy086.

 

Auteur·trice·s : Hosein SR, Thaczuk D, Ziegler B

Traduction : Boutilier A

Publié : 2025