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CATIE

Selon les circonstances, la consommation de drogues peut augmenter le risque qu’une personne soit exposée à des microbes, y compris des bactéries infectieuses et des virus transmis par le sang comme le VIH et le virus de l’hépatite C (VHC). Chez les personnes atteintes de ces virus, l’exposition aux drogues contribue également à une mauvaise santé. Pour cette raison, il est important que les chercheurs trouvent des moyens d’aider les utilisateurs à réduire leur exposition aux drogues et, si possible, à en cesser l’usage.

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Héroïne et cocaïne

Plusieurs essais cliniques bien conçus ont permis de constater que le traitement fondé sur l’utilisation supervisée de l’héroïne prescrite à des fins médicales était utile chez certaines personnes ayant une dépendance à l’héroïne pour lesquelles la méthadone seule était inefficace. Lors des études en question, les chercheurs ont trouvé que l’héroïne utilisée dans de telles situations donnait lieu à « des améliorations de l’état mental, de la santé physique et du fonctionnement social ».

Les spécialistes en toxicomanie soulignent toutefois que « de nombreux patients héroïnomanes souffrent également d’une dépendance à la cocaïne ». Dans les cas de dépendance double de ce genre, les médecins ont de la difficulté à aider les patients à réduire leur consommation de cocaïne de façon durable. De nombreux essais cliniques ont évalué le potentiel de divers médicaments pour réduire la dépendance à la cocaïne, mais aucun traitement n’a été homologué à cette fin jusqu’à présent.

Traitement à base d’amphétamine

Les résultats d’essais cliniques portent à croire que certains médicaments qui interagissent avec le messager chimique dopamine (utilisé par les cellules du cerveau et d’autres parties du corps pour communiquer) pourraient offrir des pistes intéressantes à explorer dans la recherche d’un moyen de réduire l’usage et la dépendance à la cocaïne. À cette fin, des chercheurs ont étudié des formes d’amphétamines à libération lente, également appelées amphétamines à libération prolongée.

Une équipe de chercheurs des Pays-Bas a exploré plusieurs approches dans le cadre de ses efforts pour aider les utilisateurs de cocaïne à réduire leur consommation. Pour leur rapport le plus récent publié dans le Lancet, les chercheurs ont analysé les données d’un essai clinique randomisé et contrôlé contre placebo multicentrique de 12 semaines sur l’usage quotidien supervisé de dexamphétamine à libération prolongée par voie orale (60 mg/jour), comparativement au placebo. Tous les participants prenaient du crack-cocaïne, ainsi que de l’héroïne et de la méthadone sur ordonnance.

Les chercheurs ont trouvé que les participants recevant la dexamphétamine à libération prolongée réduisaient de façon importante le nombre de jours où ils consommaient de la cocaïne. Les effets secondaires étaient généralement temporaires et « bien tolérés », selon les chercheurs.

Cette étude a été d’une durée relativement courte et, bien que personne n’ait cessé d’utiliser la cocaïne, ses résultats sont prometteurs et ouvrent la voie à d’autres études sur la dexamphétamine seule et éventuellement en combinaison avec d’autres médicaments.

Détails de l’étude

Une équipe de recherche aux Pays-Bas est en train de mener des études sur différentes interventions destinées à aider les gens à réduire leur consommation de cocaïne. Lors de l’une des études en question, les chercheurs ont évalué des volontaires potentiels recrutés dans des « programmes supervisés de traitement aidé par l’héroïne » à Amsterdam, à Rotterdam et à La Haye. Ils ont recruté 73 personnes qu’ils ont affectées au hasard aux groupes suivants :

  • dexamphétamine à libération prolongée : 38 personnes
  • dexamphétamine factice (placebo) : 35 personnes

Les participants ont été recrutés entre août 2014 et février 2015. Ils prenaient la dexamphétamine ou le placebo sous la surveillance du personnel de la clinique.

Les participants avaient le profil moyen suivant au début de l’étude :

  • âge : 49 ans
  • 90 % d’hommes, 10 % de femmes
  • années de consommation de cocaïne : 20 ans
  • proportion dont le test d’urine révélait la présence de cocaïne le premier jour de l’étude : 99 %
  • nombre de jours de consommation de cocaïne depuis un mois : 24 jours
  • années de consommation d’héroïne : 22 ans
  • proportion ayant consommé une forte quantité d’alcool (cinq verres ou plus par jour) au moins une fois depuis un mois : 34%
  • nombre de traitements contre la dépendance différents essayés dans le passé : sept

Les chercheurs n’ont pas indiqué si les participants avaient des infections virales chroniques comme le VIH ou le VHC.

Résultats

Au cours de l’étude, le nombre moyen de jours de consommation de cocaïne a été le suivant (données recueillies par auto-déclaration) :

  • groupe dexamphétamine : 45 jours
  • groupe placebo : 61 jours

Cette différence est significative du point de vue statistique, c’est-à-dire non attribuable au seul hasard.

Une réduction de la consommation de cocaïne s’est produite, peu importe la ville où les participants vivaient.

Les participants recevant la dexamphétamine avaient tendance à s’abstenir de consommer de la cocaïne pendant plus longtemps. En termes de jours consécutifs, la durée de l’abstinence a été la suivante dans les deux groupes :

  • groupe dexamphétamine : 25 jours
  • groupe placebo : 12 jours

Les participants ont réussi à cesser de prendre de la cocaïne pendant au moins 21 jours dans les proportions suivantes :

  • groupe dexamphétamine : 29 %
  • groupe placebo : 6 %

Toutes les différences ci-dessus sont significatives du point de vue statistique.

Pendant les quatre dernières semaines de l’étude, les chercheurs ont effectué des analyses d’urine deux fois par semaine pour rechercher la présence de cocaïne. Dans l’ensemble, les résultats obtenus durant cette partie de l’étude se comparaient largement à ceux des autres périodes de l’étude, de sorte qu’ils confirmaient la réduction de la consommation de cocaïne parmi les participants recevant la dexamphétamine.

Effets indésirables

Des effets indésirables se sont produits dans les proportions suivantes :

  • groupe dexamphétamine : 74 %
  • groupe placebo : 46 %

Selon les chercheurs, la plupart des effets secondaires signalés par les utilisateurs de la dexamphétamine « se sont résorbés avant la fin de l’étude ». Les problèmes de sommeil ont été l’effet indésirable le plus couramment signalé, comme suit :

  • groupe dexamphétamine : 34 %
  • groupe placebo : 9 %

Les chercheurs n’ont pas observé d’effets secondaires graves parmi les participants recevant la dexamphétamine.

Points à considérer

Cette étude s’est déroulée dans un contexte supervisé où les participants visitaient obligatoirement une clinique tous les jours. Selon les chercheurs, ce contexte permettait au personnel de la clinique de « motiver [les participants] et de surveiller rigoureusement les effets secondaires potentiels ». Notons qu’un tel contexte facilite aussi l’optimisation de l’observance thérapeutique.

Cette étude a été de courte durée, soit 12 semaines seulement. Étant donné que de nombreux participants prenaient des drogues depuis de nombreuses années, il serait déraisonnable de s’attendre à ce qu’une intervention aussi courte donne lieu à la cessation de la consommation de cocaïne. Il n’empêche que l’étude donne des nouvelles encourageantes aux chercheurs travaillant dans le domaine de la toxicomanie ainsi que de bonnes raisons pour mener une étude plus grande et de plus longue durée.

Besoins futurs en matière de recherche

Selon les spécialistes en toxicomanie suisses qui ont examiné l’étude néerlandaise, celle-ci met en évidence les besoins suivants, entre autres :

  • confirmation des résultats de l’étude chez d’autres populations, y compris les jeunes et les femmes
  • études qui aident les consommateurs de drogues à prendre fidèlement la dexamphétamine en l’absence du soutien quotidien intense offert dans l’étude néerlandaise
  • évaluation de l’innocuité de doses plus élevées de dexamphétamine pour traiter la dépendance à la cocaïne
  • association de la dexamphétamine à d’autres agents contre la dépendance potentiels pour prolonger les périodes sans consommation de cocaïne

Dans un rapport distinct, des chercheurs en toxicomanie canadiens ont réclamé « un programme de recherche rigoureux » pour explorer l’effet potentiel des cannabinoïdes (composés présents dans la marijuana) chez les personnes utilisant le crack-cocaïne. Selon ces chercheurs, de petites études par observation menées dans plusieurs pays ont révélé que nombre de consommateurs de drogues utilisaient la marijuana pour atténuer les effets nocifs du crack-cocaïne, y compris la paranoïa, la perte de poids, les envies de consommer, l’agression et l’anxiété. De plus, selon au moins un des rapports en question, certains utilisateurs du crack-cocaïne ont réussi à surmonter leur dépendance grâce à la marijuana.

Point à retenir

Selon les spécialistes en toxicomanie et médecins Christine Pace et Jeffrey Samet de l’Université de Boston :

« Des études laissent croire que [les gènes que portent une personne] pourraient contribuer à son risque de dépendance dans une proportion de 40 % à 60 %. Des facteurs environnementaux, notamment ceux liés à l’enfance ou à l’adolescence, jouent également un rôle important, y compris  l’âge lors de la première exposition à l’alcool et à la drogue et les expériences éprouvantes dans l’enfance. Enfin, les troubles de consommation sont couramment associés aux comorbidités psychiatriques, y compris la dépression, l’anxiété et le trouble bipolaire. Ces affections pourraient accroître la vulnérabilité d’une personne à la dépendance; de plus, les symptômes d’anxiété et de dépression peuvent être la conséquence d’une consommation à long terme de drogues. »

Compte tenu de tous ces facteurs, il est clair qu’une combinaison d’approches visant à aider les gens à surmonter leurs dépendances est nécessaire. Les approches en question devraient tenter d’aborder les problèmes qui sous-tendent et servent de moteur à la dépendance, dont certains sont décrits dans le paragraphe précédent.

Ressources

Prévention et réduction des méfaits tiré d’Hépatite C : Un guide détaillé

Recommandations de pratiques exemplaires pour les programmes canadiens de réduction des méfaits

—Sean R. Hosein

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