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CATIE
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  • Une équipe a évalué l’assiduité aux soins de 1 809 personnes co-infectées par le VIH et l’hépatite C
  • La majorité a interrompu les soins au moins une fois, mais la plupart ont réussi à recommencer plus tard
  • Un déménagement s’est avéré une raison courante pour l’interruption des soins

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Selon les scientifiques se spécialisant dans l’étude du virus de l’hépatite C (VHC), la co-infection par ce dernier serait présente chez 20 % à 30 % des personnes séropositives vivant au Canada. Les taux de co-infection sont plus élevés encore chez les personnes qui s’injectent des drogues, soit entre 50 % et 90 %. De nombreuses personnes qui utilisent des drogues ont des antécédents de traumatismes, un faible revenu et une situation de logement instable. De plus, elles sont nombreuses à échanger des actes sexuels contre de la drogue et à courir un risque élevé d’incarcération.

Comme ils ont souvent des déterminants sociaux de la santé défavorables, sans mentionner une histoire et un présent marqués par le colonialisme et le racisme, les peuples autochtones du Canada sont plus à risque de subir des méfaits associés à l’usage de drogues. De plus, des études laissent croire qu’entre 70 % et 80 % des nouvelles infections par le VHC se produisant au Canada concernent des personnes autochtones.

La présence concomitante de ces deux problèmes, soit l’usage de drogues injectables et la co-infection par le VIH et le VHC, peut influer sur l’évolution de chacune de ces infections et rendre les personnes touchées plus vulnérables socialement.

Comprendre l’assiduité aux soins

Souvent, lors des analyses de données se rapportant au cheminement des personnes infectées par le VIH, le VHC ou les deux dans le système de soins, on se concentre sur une seule direction, soit celle menant du dépistage à l’obtention de soins et d’un traitement visant la guérison (dans le cas du VHC) ou l’inhibition virale (dans le cas du VIH). Il s’avère cependant que le cheminement de certaines personnes est plus complexe, car certaines d’entre elles abandonnent les soins ou en reçoivent de façon intermittente, y compris en ce qui concerne le traitement du VIH et du VHC. Pour déterminer des schémas dynamiques qui reflètent fidèlement les vraies expériences des gens en matière d’assiduité aux soins et au traitement, une équipe de recherche canadienne a adopté une approche exhaustive.

Détails de l’étude

L’équipe de recherche a analysé des données se rapportant à 1 809 personnes atteintes à la fois du VIH et du VHC. La collecte de données s’est déroulée de 2003 à 2022 (19 ans). Ces personnes ont pris part à l’Étude canadienne de cohorte sur la co-infection. Les participant·e·s étaient suivi·e·s dans 18 cliniques situées dans les provinces suivantes :

  • Alberta
  • Colombie-Britannique
  • Ontario
  • Québec
  • Saskatchewan

Cette cohorte avait le profil moyen suivant au début de l’étude :

  • 71 % d’hommes, 28 % de femmes, 1 % de personnes trans
  • âge : 45 ans
  • 82 % s’étaient déjà injecté des drogues, et 25 % s’en injectaient encore
  • 24 % étaient des Autochtones (l’équipe n’a pas fourni de données se rapportant aux autres groupes ethnoraciaux)
  • 12 % avaient été incarcéré·e·s au cours des six mois précédents
  • compte de cellules CD4+ : 457 cellules/mm3
  • charge virale indétectable en VIH : 65 %
  • infection au VHC (présence de matériel génétique du VHC dans les échantillons de sang) : 66 %
  • situation par rapport au traitement du VHC : pas de traitement – 83 %; manque de résultats – 8 %; guérison – 7 %; échec thérapeutique – 2 %

Résultats

Se fiant à un type d’analyse appelé modélisation multiétatique, l’équipe a déterminé que 46 % des participant·e·s ont cessé de recevoir des soins après le début de l’étude. Ces périodes d’interruption des soins ont duré un minimum de 18 mois consécutifs. Certaines personnes ont interrompu plus fréquemment les soins : 16 % d’entre elles ont connu deux épisodes d’interruption, 5 % en ont connu trois, et une faible proportion de personnes ont interrompu les soins à plus de trois reprises.

La plupart des personnes (57 %) qui ont interrompu les soins ont réussi à en recevoir à nouveau plus tard.

Selon l’équipe de recherche, une raison courante pour l’interruption des soins a été un déménagement.

Une analyse statistique a permis de déterminer que les personnes présentant un ou plusieurs des facteurs suivants couraient un risque élevé d’interrompre les soins :

  • charge virale détectable en VHC
  • aucun traitement antérieur contre le VHC
  • traitement contre le VHC amorcé mais aucun test subséquent pour vérifier si l’infection était guérie ou pas
  • incarcération récente

Survie

L’équipe de recherche a constaté que près de 20 % des participant·e·s (383 personnes) sont décédé·e·s durant l’étude. En général, le risque de décès était deux fois plus élevé chez les personnes qui avaient interrompu les soins que chez les personnes qui avaient continué d’en recevoir.

Les causes de décès étaient semblables, que les personnes aient interrompu les soins ou pas. Elles incluaient intoxications aux drogues, infections graves et complications découlant de lésions hépatiques graves (causées par la co-infection par le VHC).

Dans l’ensemble, les personnes autochtones étaient deux fois plus susceptibles de mourir que les non-Autochtones, peu importe si elles continuaient de recevoir des soins ou si elles n’en recevaient que de façon intermittente.

Méfaits et Autochtones

L’équipe de recherche s’est inquiétée de constater que les personnes autochtones étaient plus à risque de mourir même si elles recommençaient à recevoir des soins après les avoir abandonnés. Selon l’équipe, ce risque accru de mortalité « laisse soupçonner le rôle éventuel que joue le racisme structurel et les iniquités profondément enracinées auxquelles les communautés autochtones du Canada font face même dans le contexte des soins cliniques ».

Et d’ajouter l’équipe : « La discrimination historique et actuelle ancrée à l’endroit des peuples autochtones du Canada constitue un obstacle généralisé à leur engagement durable dans les cascades de soins du VIH et du VHC, ce qui entraîne des conséquences négatives à long terme sur leur santé. Alimentée par des systèmes d’oppression et de suprématie blanche toujours existants, la discrimination systémique à l’endroit des peuples autochtones est malheureusement incrustée dans le système de santé canadien. Ces obstacles aux soins se trouvent partout dans le système de santé canadien, y compris en ce qui a trait au VIH et au VHC ».

Approches à envisager

Il n’existe aucun remède simple pour réparer les dommages causés à la vie et à l’esprit humains par ce que cette équipe de recherche décrit comme « la discrimination historique et actuelle ancrée à l’endroit des peuples autochtones du Canada […] ». Cela ne veut pas dire toutefois que nos systèmes de santé ne peuvent être améliorés. Il est cependant probable que de nombreuses approches seront nécessaires pour rendre ces systèmes plus efficaces et plus sécuritaires pour un grand nombre de populations, y compris les Autochtones.

L’Organisation mondiale de la Santé (OMS) a exhorté les villes, les régions et les pays du monde à se joindre à la lutte pour éliminer le VHC comme menace pour la santé publique d’ici 2030. Si le Canada souhaite atteindre cet objectif et améliorer la santé des personnes co-infectées par le VIH et le VHC, il sera nécessaire de tenir compte des conséquences de ce que cette équipe de recherche décrit comme « des traumatismes historiques, transgénérationnels et personnels – y compris les séquelles des pensionnats, de l’assimilation forcée et de la pauvreté – sur l’engagement dans le système de soins et l’atteinte conséquente de l’inhibition virale [pour le VIH et la guérison pour le VHC] ». Pour y parvenir, des interventions soutenues et une collaboration avec les peuples autochtones seront nécessaires de la part de tous les paliers de gouvernement.

—Sean R. Hosein

Ressources

CAAN Communautés, alliances et réseaux

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On constate des améliorations de la survie, mais des changements dans les causes de décès en AlbertaNouvelles CATIE

Des scientifiques encouragent le dépistage simultané de trois virus : VIH, VHB et VHCNouvelles CATIE

Élimination de l’hépatite d’ici 2030 – Organisation mondiale de la Santé

L’hépatite B au Canada : Mise à jour des données de surveillance de 2021 – ASPC
Lire en ligne | Télécharger l’infographie

L’hépatite C au Canada : Mise à jour des données de surveillance de 2021 – ASPC
Lire en ligne | Télécharger l’infographie

Le VIH au Canada : Les points saillants de la surveillance pour 2022 – ASPC
Lire en ligne | Télécharger l’infographie

Tendances de l’utilisation de la prophylaxie préexposition au VIH [VIH-PPrE] dans neuf provinces canadiennes, 2019-2022 – ASPC
Lire en ligne | Télécharger l’infographie

Dépistage et diagnostic de l’hépatite C – CATIE

Modèle directeur pour guider les efforts d’élimination de l’hépatite C au Canada — Réseau Canadien sur l’Hépatite C

Les bases de la réduction des méfaits : trousse pour prestataires de services — CATIE

Fondation canadienne du foie

RÉFÉRENCES :

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