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Les personnes dont l’infection à VIH est récente peuvent être plus susceptibles de transmettre le VIH, vu la quantité élevée de virus dans le corps à ce stade de l’infection. La détection précoce de l’infection et l’amorce d’un traitement sans tarder sont importantes pour la santé et la qualité de vie de ces personnes. De plus, un traitement efficace élimine le risque de transmission sexuelle du VIH, en réduisant la quantité de virus à un niveau indétectable, dans l’organisme. Le présent article explique pourquoi les personnes ayant une infection à VIH récente peuvent être plus susceptibles de transmettre le VIH et comment les prestataires de services peuvent contribuer à prévenir ces transmissions.

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Que se passe-t-il dans le corps après l’infection par le VIH?

Afin de comprendre pourquoi les personnes ayant une infection à VIH récente sont plus susceptibles de transmettre le VIH, il faut examiner ce qui se produit dans le corps après le moment de l’infection.

Lorsqu’une personne contracte le VIH, le virus commence très rapidement à se répliquer. La quantité de virus présente dans le corps et les liquides corporels (tels que le sang, le sperme, les sécrétions vaginales et rectales) augmente brusquement.1 Cette période est appelée « infection aiguë au VIH ». Quelques semaines plus tard, la quantité de virus dans l’organisme (la « charge virale ») est très élevée – souvent des millions de copies par millilitre de sang. À mesure que la charge virale augmente, certaines personnes présentent des symptômes, parfois semblables à ceux d’une grippe, alors que d’autres n’en ont aucun.

Quelques semaines après l’infection, le système immunitaire commence à s’attaquer au virus. Un aspect important de cette réponse est la production d’anticorps anti-VIH – de petites protéines fabriquées par certaines cellules immunitaires – qui peuvent cibler le VIH et l’empêcher de se multiplier. Le temps nécessaire au système immunitaire pour produire des anticorps anti-VIH varie d’une personne à l’autre; chez certaines, cela peut prendre jusqu’à trois mois.1 Dès lors que l’organisme commence à produire des anticorps, la phase aiguë de l’infection est terminée et laisse place à la phase chronique.2

En début de phase chronique, le taux de réplication du VIH se met à ralentir et la charge virale diminue graduellement, grâce à la production d’anticorps. La charge virale continuera à diminuer pendant environ six mois, pour atteindre une « valeur de référence » autour de laquelle elle se maintiendra. Cependant, au fil des années, la charge virale recommencera à augmenter si la personne ne reçoit pas de traitement contre le VIH.1  

Pourquoi le risque de transmission du VIH est-il plus élevé lorsque l’infection est récente?

Le risque accru de transmission chez une personne dont l’infection à VIH est récente résulte d’une combinaison de facteurs biologiques et comportementaux.

L’un de ces facteurs est le taux élevé de virus dans le sang et les liquides corporels au début de l’infection. La recherche démontre que plus la charge virale est élevée, plus le risque de transmission du VIH est grand.3,4,5,6

Mais une charge virale élevée ne suffit pas à elle seule à transmettre le VIH. Il faut aussi que la personne ayant une infection à VIH récente ait des activités qui peuvent conduire à la transmission du VIH, comme des rapports sexuels non protégés (par exemple, sans condom) ou le partage de matériel pour l’injection de drogues. La recherche démontre que des personnes qui n’ont pas conscience de leur infection à VIH récente sont plus susceptibles d’avoir des activités à risque élevé que des personnes qui ont le VIH depuis plus longtemps.7,8,9 

Deux éléments peuvent expliquer cela. Premièrement, des personnes ayant une infection à VIH récente peuvent se trouver dans une période de leur vie où elles s’adonnent fréquemment à l’activité ou aux activités qui ont conduit à leur infection récente, comme des rapports sexuels non protégés ou le partage de matériel pour la consommation de drogues.8 Deuxièmement, puisque l’infection est récente, des personnes pourraient ne pas savoir qu’elles ont le VIH, et supposer à tort qu’elles ne l’ont pas. La recherche démontre que la plupart des personnes qui sont au courant leur infection à VIH et qui ont accès à des services de prévention et de soins prennent des mesures pour réduire le risque de transmission à autrui.7,10

Combien de transmissions proviennent de personnes ayant une infection récente?

Il est difficile d’évaluer la proportion des transmissions du VIH qui proviennent de personnes ayant une infection récente.11,12,13 Plusieurs études reposent sur des modèles mathématiques, car il est impossible de déterminer précisément à quel stade de l’infection une personne se trouvait au moment d’une transmission du VIH. Les estimations issues d’études de modélisation varient considérablement, de moins de 1 % à 82 %, et dépendent de nombreux facteurs.13 L’effet des infections au stade précoce n’est probablement pas le même dans tous les pays et dans toutes les populations.

Une récente étude de modélisation réalisée aux États-Unis, où l’épidémie de VIH est semblable à celle du Canada, a estimé que l’infection aiguë ne représentait que 4 % des cas de transmission du VIH. Bien que cette estimation soit relativement faible, l’étude a montré que les personnes ayant une infection récente ont un risque plus élevé de transmettre le VIH qu’à d’autres stades de l’infection.10 Les personnes qui sont en phase aiguë de l’infection à VIH et qui ne connaissent pas leur statut présentent le taux de transmission le plus élevé (16,1 par 100 années-personnes). Les taux de transmission les moins élevés concernent les personnes qui :

  • ont une infection chronique à VIH et ne connaissent pas leur statut (8,4 par 100 années-personnes)
  • ont été diagnostiquées mais ne reçoivent pas de soins (6,6 par 100 années-personnes)
  • reçoivent des soins pour le VIH mais n’ont pas une charge virale supprimée (6,1 par 100 années-personnes)
  • reçoivent des soins et ont une charge virale supprimée (aucune transmission).

Bien que l’ampleur du rôle de l’infection récente dans l’épidémie du VIH soit l’objet d’un débat, il est clair que le risque de transmission du VIH est plus élevé à ce stade de l’infection. Des études mettent en relief les avantages de dépistages fréquents chez les personnes à risque de contracter le VIH, et de l’amorce d’un traitement le plus tôt possible après un résultat positif. Elles soulignent également l’importance de faire en sorte que les personnes vivant avec le VIH aient un accès continu au traitement, à la fois pour leur protéger leur santé et pour profiter des bienfaits préventifs complets du traitement.

Quels sont les défis liés au diagnostic des personnes ayant une infection à VIH récente?

Le diagnostic des personnes qui ont récemment contracté le VIH soulève plusieurs défis. De nombreuses raisons expliquent que ces personnes puissent ne pas être au courant de leur statut.

Certaines personnes ne se font pas dépister du tout, ou ne le font pas assez régulièrement pour détecter une infection aussi tôt que possible. Il est possible qu’elles croient n’avoir aucun risque de contracter le VIH, même lors d’activités à risque, et ne sachent pas à quelle fréquence elles devraient se faire dépister. En outre, certains obstacles peuvent empêcher des personnes de demander un dépistage du VIH, comme la peur de la stigmatisation et de la discrimination et le malaise à discuter du dépistage du VIH avec un·e prestataire de soins de santé. De même, des prestataires de soins de santé peuvent manquer de connaissances sur le VIH ou ne pas se sentir à l’aise avec ce sujet, et par conséquent, pourraient ne pas offrir de dépistage à une personne qui en a besoin.1

Aucun test VIH ne peut détecter le VIH immédiatement après l’infection. On appelle « période fenêtre » le délai qui s’écoule entre le moment où une personne contracte le VIH et celui où un test de dépistage peut détecter son infection. Pendant la période fenêtre, un test de dépistage chez une personne récemment exposée au VIH peut donner un résultat négatif alors qu’elle est en réalité séropositive.1

La période fenêtre varie selon le type de test utilisé.14 Le test standard est la méthode la plus courante de dépistage du VIH au Canada qui nécessite une prise de sang au bras.  Puisqu’on détecte à la fois les anticorps et le virus lui-même, la période fenêtre est plutôt courte – entre deux et six semaines et demie. L’autre approche de dépistage du VIH est le test rapide. Les tests rapides (comme le test au point de service et l’autotest) ne détectent que les anticorps. Ils ne sont donc pas en mesure de détecter l’infection tant que la personne n’a pas développé une quantité d’anticorps au-delà du seuil décelable. La période fenêtre des tests rapides est plus longue, soit entre trois et 12 semaines.

Par conséquent, si une personne pense avoir été exposée récemment au VIH, le test standard a plus de chances de détecter l’infection. Quel que soit le test utilisé, des cas d’infection peuvent passer inaperçus si la personne est dépistée pendant la période fenêtre. La pratique exemplaire est de répéter le dépistage à la fin de la période fenêtre pour aider à exclure la possibilité d’une infection.

Un autre défi lié au diagnostic de l’infection à VIH récente est que, hormis un résultat positif au dépistage du VIH, il n’existe pas de signes définitifs qu’une personne est séropositive. Seules certaines personnes ayant une infection à VIH récente présentent des symptômes. Lorsque des symptômes sont présents, ils ne sont pas spécifiques au VIH. Les symptômes les plus courants d’une infection aiguë au VIH incluent la fièvre, des douleurs musculaires, des maux de tête, une diarrhée, des maux de gorge et/ou une éruption cutanée. De nombreuses personnes qui ont ces symptômes peuvent les confondre avec ceux d’une autre maladie (comme la grippe ou la COVID-19) et ne pas demander de dépistage du VIH.1 Certaines personnes qui demandent des soins pour leurs symptômes liés à l’infection à VIH pourraient ne pas se voir offrir de dépistage du VIH par leurs prestataires de soins.15,16 Cela peut être dû au fait que des prestataires de soins supposent que les symptômes ont une autre cause.15

En raison de ces défis, de nombreuses personnes ayant une infection à VIH récente peuvent ne pas être au courant de leur statut.

Implications pour les prestataires de services

Votre organisme pourrait contribuer à surmonter ces défis en repérant les personnes concernées, en les reliant à des soins et traitements et en contribuant à réduire leur risque de transmission du VIH.

Afin d’encourager le recours accru au dépistage et d’aider à prévenir les transmissions au stade précoce de l’infection, les prestataires peuvent offrir les services suivants :  

  • Éducation sur la transmission du VIH : Éduquez les usager·ère·s de services sur les modes de transmission du VIH pour les aider à comprendre leur risque d’infection par le VIH.
  • Éducation sur le dépistage du VIH : Sensibilisez les personnes potentiellement à risque, quant à la nécessité du dépistage du VIH et à ses avantages. Il est important que les personnes séropositives connaissent leur statut le plus tôt possible après l’infection, afin de pouvoir accéder à des services de traitement et de soutien. Cela signifie :
    • encourager les personnes à se faire dépister si elles ont des activités à risque pour le VIH ou si elles ont développé des symptômes (comme la fièvre, la fatigue, des douleurs musculaires, des maux de tête, la diarrhée, des maux de gorge et/ou une éruption cutanée) après une exposition potentielle au VIH;
    • encourager les personnes à se faire dépister dès que possible après une exposition potentielle au VIH et à répéter le dépistage à la fin de la période fenêtre;
    • encourager les personnes qui sont continuellement à risque de contracter le VIH à se faire dépister sur une base régulière.
  • Navigation dans les services de dépistage du VIH : Familiarisez-vous avec les types de tests offerts dans votre région. Le test standard avec prise de sang est offert dans toutes les provinces et tous les territoires. Certaines régions offrent d’autres options, comme le test rapide aux points de service ou le test sur goutte de sang séché. L’autodépistage est une autre option possible. Soyez prêt·e à indiquer aux personnes les endroits où elles peuvent se faire dépister et à leur dire si le dépistage anonyme est offert dans votre région. Si nécessaire, vous pouvez aider des personnes à naviguer dans les services de dépistage du VIH dans votre région. Cela peut vouloir dire prendre un rendez-vous pour une personne ou l’accompagner à son rendez-vous.
  • Éducation sur le traitement du VIH : Éduquez les personnes nouvellement diagnostiquées sur les bienfaits du traitement précoce du VIH. Il est recommandé de proposer immédiatement le traitement aux personnes nouvellement diagnostiquées du VIH. Plus le traitement est amorcé tôt, meilleurs sont les résultats pour la santé des personnes vivant avec le VIH. Cependant, la décision d’amorcer un traitement appartient à chaque personne vivant avec le VIH; il est important que la personne soit prête à s’engager à prendre ses médicaments contre le VIH de façon régulière.
  • Éducation sur les bienfaits préventifs d’un traitement efficace : Assurez-vous que les usager·ère·s comprennent que les recherches l’ont clairement conclu : les personnes sous traitement efficace ne transmettent pas le VIH à leurs partenaires sexuel·le·s.
  • Arrimage aux soins et navigation : Orientez les personnes qui reçoivent un résultat positif vers des services de soins VIH dans votre communauté. Parfois, cela peut inclure l’accompagnement à leurs rendez-vous pour soutenir leur implication dans les soins.
  • Éducation sur la prévention du VIH : Éduquez les personnes (quel que soit leur statut VIH) sur toutes les stratégies de prévention du VIH hautement efficaces, notamment le condom, le matériel neuf pour l’injection de drogues, la prophylaxie pré-exposition (PrEP), la prophylaxie post-exposition (PEP) et les traitements efficaces contre le VIH.

Ressources

La transmission du VIH

L’abc du VIH

Références

  1. Agence de la santé publique du Canada. Virus de l’immunodéficience humaine : Guide pour le dépistage et le diagnostic de l’infection par le VIH. Ottawa : Agence de la santé publique du Canada; 2013. Accessible à : https://www.catie.ca/sites/default/files/2021-07/FR_Guide-pour-le-depistage-et-le-diagnostic-de-linfection-par-le-VIH-2013.pdf
  2. HIVinfo.NIH.gov. The stages of HIV infection [fact sheet]. National Institutes of Health; 2021. Accessible à : https://hivinfo.nih.gov/understanding-hiv/fact-sheets/stages-hiv-infection
  3. Quinn TC, Wawer MJ, Sewankambo N et al. Viral load and heterosexual transmission of human immunodeficiency virus type 1. Rakai Project Study Group. New England Journal of Medicine. 2000 Mar 30;342(13):921-29.
  4. Baeten JM, Kahle E, Lingappa JR et al. Genital HIV-1 RNA predicts risk of heterosexual HIV-1 transmission. Science Translational Medicine. 2011 Apr 6;3(77):77ra29.
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  7. Marks G, Crepaz N, Senterfitt JW et al. Meta-analysis of high-risk sexual behavior in persons aware and unaware they are infected with HIV in the United States: implications for HIV prevention programs. Journal of Acquired Immune Deficiency Syndromes. 2005 Aug 1;39(4):446-53.
  8. Moore ZS, McCoy S, Kuruc J et al. Number of named partners and number of partners newly diagnosed with HIV infection identified by persons with acute versus established HIV infection. Journal of Acquired Immune Deficiency Syndromes. 2009 Dec 1;52(4):509-13.
  9. Colfax GN, Buchbinder SP, Cornelisse PGA et al. Sexual risk behaviors and implications for secondary HIV transmission during and after HIV seroconversion. AIDS. 2002 Jul 26;16(11):1529-35.
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  11. Cohen MS, Shaw GM, McMichael AJ et al. Acute HIV-1 infection. New England Journal of Medicine. 2011 May 19;364(20):1943-54.
  12. Bellan SE, Dushoff J, Galvani AP et al. Reassessment of HIV-1 acute phase infectivity: accounting for heterogeneity and study design with simulated cohorts. PLoS Medicine. 2015 Mar 17;12(3):e1001801.
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  15. Prins HA, Verbon A, Boucher CA et al. Ending the epidemic: critical role of primary HIV infection. Netherlands Journal of Medicine. 2017 Oct 1;75:321-7.
  16. Nanditha NGA, St-Jean M, Tafessu H et al. Missed opportunities for earlier diagnosis of HIV in British Columbia, Canada: a retrospective cohort study. PLoS One. 2019 Mar 21;14(3):e0214012.

 

 

À propos de l’auteur

Mallory Harrigan est spécialiste en connaissances, Dépistage du VIH chez CATIE. Elle détient une maîtrise en psychologie communautaire de l’Université Wilfrid Laurier.

Révision externe effectuée par : Dr Ahmed M. Bayoumi et Kimberly Templeton