La Zone Rose : facilité d’accès à la prévention et au dépistage des infections transmissibles sexuellement et par le sang

En quoi consiste le programme?

La Zone Rose vise à rejoindre les populations disproportionnellement affectées par les infections transmissibles sexuellement et par le sang (ITSS). Celle-ci propose un espace sécurisant et sans préjugés pour obtenir un test de dépistage, du soutien, ainsi que de l’information sur la réduction des méfaits et la prévention des ITSS. Cela inclut un éventail de services de dépistage des ITSS gratuit et sans rendez-vous, dont des tests de dépistage pour le VIH, l’hépatite C, la syphilis, la gonorrhée, la chlamydia et d’autres ITSS selon les besoins de la personne. Le programme a établi des partenariats avec des cliniques qui effectuent le dépistage sur place. 

La Zone Rose est un programme conçu et géré par l’organisme communautaire RÉZO, situé à Montréal. RÉZO offre des services d’éducation et de prévention du VIH et des autres ITSS dans un contexte de promotion de la santé globale, notamment sexuelle, mentale, physique et sociale auprès des hommes gais, bisexuels ou queers (GBQ), des autres hommes, et des personnes trans ayant des relations sexuelles avec des hommes.

Raison d’être du programme

Le Village de Montréal est une destination LGBTQ+ festive et inclusive, reconnue mondialement et accueillant chaque année des millions de visiteur·euse·s. Le quartier se transforme en zone piétonne chaque année de mai à octobre et cette accessibilité crée une occasion pour les organismes locaux d’interagir avec les communautés du Village et de leur apporter du soutien, notamment aux personnes sans logement fixe et à celles qui utilisent des drogues. La Zone Rose a été pensée pour répondre aux besoins des communautés, car les ressources et services de soutien qu’elle fournit sont à portée de main directement au cœur du Village.  

Avant l’existence de la Zone Rose, RÉZO était présent au cœur du Village de Montréal depuis plus de 15 ans en y tenant un kiosque d’intervention afin de créer des liens avec diverses populations dans la communauté. Par contre, de par sa petite taille ce kiosque était peu visible et on ne pouvait s’en servir les jours de mauvais temps. Pour y remédier, en 2023, RÉZO a mis en place la Zone Rose. En partenariat avec la Direction régionale de Santé publique de Montréal (DRSP), la Société de développement commercial du Village et divers fournisseurs, un conteneur maritime a été installé dans la zone piétonne du Village afin de procurer un endroit plus accessible, plus visible, et à l’abri des intempéries pour proposer des services de réduction des méfaits, de prévention et de dépistage des ITSS et d’autres services de soutien pour les membres de la communauté.

Ce nouvel espace est plus accueillant et plus visible grâce un cône rose de quatre mètres de haut et une signature graphique unique. Il permet à RÉZO d’offrir les mêmes services que ceux du kiosque, mais avec moins de contraintes et avec en plus la possibilité d’y proposer des tests des ITSS en partenariat avec des cliniques. C’est ainsi qu’est née la Zone Rose.

Mise en œuvre du programme 

Le projet comprend deux volets – 1) intervention et 2) dépistage.

Les services de la Zone Rose sont fournis à partir d’un grand conteneur mesurant 20 X 10 X 8 pi. Le conteneur comprend deux pièces : une plus grande pour le dépistage et une plus petite pour entreposer les fournitures. Le conteneur a accès à l’électricité et est équipé d’un climatiseur, d’un lavabo et de portes industrielles. En 2024, une entente particulière a été établie avec le propriétaire de l’édifice derrière le conteneur, pour avoir une connexion électrique plus fiable.

En 2024, la Zone Rose a été ouverte au public du 3 juillet au 5 octobre, et ce, du mardi au samedi en après-midi et en soirée (sauf les jeudis à partir du 3 septembre).

Volet intervention 

Le volet intervention de la Zone Rose est géré par du personnel de RÉZO avec l’aide de bénévoles. Les services sont proposés juste à côté du conteneur, dans un kiosque couvert par un auvent de 10 X 10 pi. Quand l’équipe d’intervention de RÉZO rencontre pour la première fois une personne, elle parle de RÉZO et de la Zone Rose, sa raison d’être, et tente de créer des liens avec la personne. L’équipe distribue des documents informatifs portant sur plusieurs thèmes, incluant les suivants : les ITSS, les pratiques d’utilisation de drogues à moindres risques et la diversité liée au corps sexué, au genre et à l’orientation sexuelle. 

Le kiosque sert également d’endroit de distribution de matériel pour avoir des relations sexuelles plus sécuritaires, comme des condoms (internes et externes), du lubrifiant et des digues dentaires. Cette distribution de matériel permet d’entamer la discussion avec une personne sur les pratiques sexuelles protégées en fonction de ses préférences, entre autres parler de l’association de mesures de prévention qu’elle pourrait prendre (prévention combinée).

L’équipe de RÉZO distribue également du matériel de réduction des méfaits. Du matériel neuf d’utilisation de drogues est fourni par la Direction régionale de santé publique de Montréal (DRSP) : kits pour l’injection, pipes en Pyrex, pipes à crystal, kits GHB et kits sniff. La naloxone est également disponible. La distribution du matériel de réduction des méfaits permet de discuter avec les personnes de leur utilisation de drogues et permet également de pouvoir les orienter vers les autres services de RÉZO, comme le programme Chemsex/Party and Play.

Volet dépistage 

Cliniques partenaires

RÉZO collabore avec des cliniques montréalaises afin d’avoir du personnel infirmier sur place pouvant effectuer le dépistage d’un large éventail d’ITSS tous les jours d’ouverture de la Zone Rose. En 2024, RÉZO a collaboré avec deux cliniques différentes : 

Le personnel infirmier de la Clinique SIDEP+ était présent sur la Zone Rose les mardis et les jeudis afin de proposer une clinique de dépistage. Cette clinique peut faire passer des tests de dépistage aux personnes qui ne sont pas détentrices de la carte de la Régie de l’assurance maladie du Québec (RAMQ), le régime provincial public d’assurance maladie. La Clinique SIDEP+ fait passer des tests uniquement aux personnes s’identifiant comme faisant partie des neuf populations suivantes (sans ordre de priorité) : 

• Les hommes ayant des relations sexuelles avec d’autres hommes (HARSAH)
• Les personnes bisexuelles (excluant les femmes cis qui n’ont pas de relations sexuelles avec les HARSAH)
• Les personnes utilisatrices de drogues par injection ou inhalation
• Les jeunes à risque
• Les personnes incarcérées ou l’ayant été
• Les personnes autochtones
• Les personnes originaires de régions où l’infection par le VIH est endémique
• Les personnes qui exercent le travail du sexe 
• Les personnes trans

La Clinique médicale urbaine du Quartier latin proposait une clinique de dépistage les mercredis et vendredis, et certains samedis. Cette clinique offre le dépistage à toutes les personnes se rendant à la Zone Rose à condition qu’elles présentent leur carte RAMQ.

Déroulement du dépistage

Lorsqu’une personne se présente à la Zone Rose pour le dépistage, c’est le personnel de RÉZO qui travaille dans le kiosque à côté du conteneur qui va être leur premier contact. Le personnel détermine si la personne répond aux critères d’admission de la clinique présente sur les lieux (p. ex. si une personne a une carte RAMQ). Si une personne n’est pas admissible au dépistage le jour où elle se présente à la Zone Rose, le personnel lui suggérera de revenir un autre jour.

Pour les personnes qui remplissent les conditions d’admission de la clinique, le personnel de RÉZO fait remplir le formulaire pré-dépistage de la clinique à la personne et l’accompagne à l’intérieur du conteneur, une personne à la fois. Le conteneur est un espace privé et fermé contenant une table d’examen médical, un réfrigérateur pour entreposer les échantillons, une centrifugeuse et une imprimante. Le personnel infirmier se charge d’apporter le matériel nécessaire pour prélever les échantillons (p. ex. seringues et tubes). 

L’infirmier·ère discute avec le ou la patient∙e de ses besoins et de ses facteurs de risque afin de déterminer pour quelles ITSS un test de dépistage est requis. L’infirmier∙ère collecte ensuite les échantillons nécessaires selon le cas (p. ex. prise de sang).

RÉZO a inclus des commerces locaux dans ce projet. En effet, il existe des ententes avec certains commerces du Village pour permettre aux patient·e·s de se servir de leurs toilettes afin de pouvoir y recueillir des échantillons d’urine ou des prélèvements anaux, le cas échéant. Ces ententes sont nécessaires puisque la Zone Rose ne dispose pas de toilette sur place. Un des membres du personnel de RÉZO accompagne la personne à la toilette d’un des commerces partenaires et l’attend à l’extérieur.

À la fin de la journée, le personnel infirmier de la clinique partenaire apporte les échantillons à sa clinique. Les échantillons sont ensuite acheminés par un transporteur spécialisé au Centre hospitalier de l’Université de Montréal (CHUM) à des fins d’analyse. Il faut prévoir une à deux semaines pour recevoir un résultat. 

La Zone Rose distribue également des trousses d’autotest du VIH. Si cela est souhaité, il est possible pour le ou la patient∙e d’effectuer l’autotest en présence du personnel d’intervention ou infirmier. 

Annonce des résultats et arrimage aux soins de santé

Le personnel infirmier qui effectue le dépistage est responsable du suivi, s’assurant que la personne reçoit ses résultats à travers un appel téléphonique, un courriel ou dans la plateforme numérique de la clinique. En cas de résultat positif, un suivi adapté et l’arrimage aux soins sont effectués par le personnel infirmier ou par un∙e médecin de la clinique à laquelle l’infirmier∙ère est affilié·e. Les types de suivi et la façon dont l’arrimage aux soins est réalisé varient en fonction des résultats et de la clinique.

Ressources requises

• Gestionnaire ou directeur·trice chargé·e de la supervision du programme
• Personnel d’intervention de première ligne : deux personnes présentes en tout temps lors des heures d’ouverture de la Zone Rose
• Partenariat avec une ou des cliniques pour le dépistage, le suivi et l’arrimage aux soins
• Un∙e infirmier∙ère d’une clinique partenaire 
• Bénévoles
• Matériel de réduction des méfaits : naloxone et matériel neuf d’utilisation de drogues (kits pour l’injection, pipes en Pyrex, pipes à crystal, kits GHB et kits sniff)
• Matériel pour avoir des relations sexuelles plus sécuritaires (condoms externes et internes, lubrifiants et digues dentaires)
• Ressources sur la santé sexuelle, les ITSS et la réduction des méfaits
• Trousses d’autotest du VIH
• Un espace clos et privé, équipé d’un évier, d’électricité et d’un climatiseur
• Un auvent de 10 X 10 pi pour le kiosque extérieur
• Une table d’examen clinique, un réfrigérateur pour l’entreposage des échantillons, une centrifugeuse et une imprimante

Évaluation

Les résultats présentés ci-dessous sont ceux recensés lors de la deuxième année de la Zone Rose, du 3 juillet au 5 octobre 2024. 

Volet intervention

*Ce nombre d’interventions représente celles documentées par les équipes, mais ne reflète pas l’entièreté des contacts réalisés, ni bien sûr l’achalandage global autour de la Zone Rose.

Volet dépistage 

Selon le tableau ci-dessus, ce sont 15,9 % des visites de dépistage qui ont permis de détecter une ITSS minimum.

Obstacles

• La dynamique avec différentes cliniques partenaires a pu parfois être difficile, en raison de la diversité des façons de faire dans un seul espace. 
• Maintenir une offre permanente de services de dépistage a posé des difficultés, étant donné la pénurie de personnel infirmier dans tout le système de soins de santé, ce qui a eu des répercussions sur la disponibilité du personnel infirmier des cliniques partenaires.
• Les critères d’admission au dépistage des deux cliniques ont empêché certaines personnes à se faire tester. Dans d’autres cas, il a aussi été demandé à des personnes de revenir un autre jour pour être admissible au dépistage par la clinique présente afin de recevoir des services de dépistage.
• Malgré l’établissement de partenaires pour l’utilisation des toilettes, le fait de ne pas avoir de toilette directement à l’intérieur du conteneur a pu être un défi.
• Les aspects logistiques de l’implantation du conteneur ont pris du temps, comme la demande pour l’accès à l’électricité et l’obtention d’un permis de la Ville pour pouvoir s’implanter sur la rue Sainte-Catherine Est. 
• Avec des personnes plus festives ou sous l’influence de substances le soir, la dynamique de la rue Sainte-Catherine Est est moins favorable au dépistage pendant cette période. Des situations de violence et de crise sont notamment arrivées lors de l’ouverture de la Zone Rose, que les intervenant·e·s de RÉZO ont dû gérer étant en première ligne.
• Les interactions du personnel de la Zone Rose avec la police patrouillant le Village pour maintenir la sécurité pouvaient parfois affecter le lien de confiance que la Zone Rose avait développé avec des personnes du Village.
• La Zone Rose se veut être une stratégie de dépistage additionnelle et accessible pour les communautés qui sont disproportionnellement affectées par le VIH et les autres ITSS, dont la communauté desservie par RÉZO, et pour qui l’offre de dépistage est déficiente à Montréal. Toutefois, étant en plein cœur du Village, des personnes issues d’autres communautés peuvent se présenter à la Zone Rose, car elles ont aussi des besoins. Les cliniques partenaires, mais aussi l’équipe d’intervention de RÉZO doivent alors trouver l’équilibre entre la mission première de la Zone Rose et satisfaire les besoins multiples des différentes communautés.

Enseignements tirés 

• Embaucher du personnel infirmier à l’interne (RÉZO), en plus des partenariats cliniques possibles, pourrait être la clé pour fournir une plus grande offre de dépistage en continu et avec moins de critères d’admission. 
• Plusieurs mois sont nécessaires pour régler les aspects logistiques. 
• Prioriser le dépistage durant la journée et en début de soirée plutôt que de rester ouvert tard le soir.
• Demander aux patrouilles policières d’éviter de se tenir près du site pour ne pas affecter les liens de confiance créés avec les membres de la communauté.
• S’assurer de mettre assez de temps de côté pour établir les partenariats, pour la planification et le suivi et pour s’approvisionner en matériel de manière à ce que tout soit prêt et que la mise en place se fasse sans heurts au début de la saison.

Matériel du programme

Rapport Zone Rose 2023

Faits saillants 2023

Communiqué

Revue de presse

Coordonnées

Alexandre Dumont Blais
Directeur général RÉZO
207-2075, rue Plessis
Montréal (Québec) H2L 2Y4
Canada
alexandre@rezosante.org