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Colombie-Britannique
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MySafe est un programme d’approvisionnement plus sécuritaire en opioïdes qui s’adresse aux personnes présentant un risque très élevé de faire une surdose d’opioïdes acquis sur le marché illégal. Des machines distributrices sécurisées à lecteur biométrique remettent les doses quotidiennes d’opioïdes prescrits par un·e médecin sous forme de comprimés d’hydromorphone. Une étude qualitative a permis de relever les éléments facilitants, les obstacles et les résultats du programme auprès des participant·e·s. Parmi les éléments facilitants, notons la prise des doses sans surveillance, la facilité d’accès et les politiques permettant de planifier et d’adapter l’utilisation de ses doses. Les problèmes techniques, la quantité insuffisante des doses et leur manque de puissance représentaient pour leur part des obstacles au programme. Les retombées du projet ont été de réduire le recours aux drogues illégales et le risque de surdose et d’améliorer le bien-être des participant·e·s.

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Description du programme

MySafe est un programme d’approvisionnement plus sécuritaire qui utilise des machines sécurisées à lecteur biométrique pour distribuer des opioïdes d’ordonnance aux participant·e·s. Pour en bénéficier, une personne doit avoir des antécédents de surdose, faire usage d’opioïdes et avoir reçu un résultat positif à un test de dépistage du fentanyl dans l’urine. Les participant·e·s vont chercher leur dose quotidienne dans une machine à l’heure de leur choix et sont libres d’utiliser leur dose au moment et à l’endroit choisis et de la manière souhaitée. Quatre emplacements sont proposés : un site de prévention des surdoses (à Vancouver) et trois sites de logements supervisés (deux à Vancouver et un à Victoria). L’équipe de MySafe est composée d’un·e médecin prescripteur·trice et d’employé·e·s du programme à chacun des emplacements.

Machines distributrices à lecteur biométrique : Semblables à des guichets automatiques, ces machines sont faites d’un grand coffre de métal sécurisé. Le lecteur reconnaît les participant·e·s aux veines de leur paume de la main qui, contrairement aux empreintes digitales, ne peuvent pas être reliées à d’autres systèmes d’identification. Le personnel des sites de logements supervisés reçoit une formation de base pour régler les problèmes techniques mineurs la nuit, et le personnel de MySafe est disponible pendant la journée pour résoudre les problèmes plus complexes et réapprovisionner les machines. Ces dernières sont équipées de caméras intégrées qui enregistrent chaque interaction avec la machine.

Admission : Le ou la médecin prescripteur·trice procède à un examen médical des personnes intéressées avant leur admission au programme. Les habitudes d’utilisation de drogues et les risques de surdose seront entre autres évalués. Cet examen aide le ou la médecin à déterminer l’admissibilité d’une personne.

Prescription et dosage : Une fois la personne admise, le ou la médecin prescripteur·trice et la personne participante décident d’une dose quotidienne initiale de comprimés d’hydromorphone. Les doses peuvent être ajustées au cours du programme, généralement pendant le premier mois, lorsque la tolérance au médicament est évaluée.

Distribution des médicaments et remplissage des machines : L’ordonnance est délivrée par une pharmacie et placée manuellement dans la machine par le personnel de MySafe. Les machines sont régulièrement réapprovisionnées pour éviter toute interruption de disponibilité.

Sites et horaire : Chaque site dispose d’une machine et les participant·e·s sont attitré·e·s à un site en particulier. Le personnel des sites de logements supervisés assure un accès à toute heure du jour ou de la nuit aux personnes assignées à la machine, y compris à celles qui ne vivent pas sur place. L’accès à la machine au site de prévention des surdoses est limité à une période de 13 heures (de 8 h à 21 h).

Suivi et soutien : Les examens de suivi sont réalisés après un, six et douze mois par un·e prestataire de soins de santé. Ils comportent des tests de dépistage des drogues dans l’urine lorsque le personnel de MySafe le juge nécessaire (p. ex. en cas d’augmentation de la dose) et une évaluation de l’utilisation des médicaments et des résultats. Le ou la médecin prescripteur·trice vérifie les tests de dépistage de drogues et supervise le personnel, qui de son côté fournit aux participant·e·s un soutien continu.

Résultats

Une étude qualitative réalisée entre novembre 2021 et avril 2022 a identifié les éléments facilitants, les obstacles et les résultats du programme. Les employé·e·s de MySafe ont fait le recrutement pendant leur journée de travail, pour un total de 46 participant·e·s à l’étude.

Quelques caractéristiques :

  • Âge médian de 41 ans
  • 32 personnes (70 %) s’identifiaient comme hommes
  • 13 personnes (28 %) s’identifiaient comme Autochtones; 32 personnes (70 %) s’identifiaient comme Blanc·he·s
  • 36 personnes (78 %) vivaient dans un logement supervisé
  • 20 personnes (43 %) suivaient un traitement par agonistes opioïdes (TAO)
  • 40 personnes (87 %) ont déclaré avoir utilisé de l’héroïne ou du fentanyl dans les 30 derniers jours
  • 28 personnes (61 %) ont indiqué que le fentanyl était leur drogue de prédilection

Les guides qui ont servi à interroger les participant·e·s ont été élaborés avec un comité consultatif composé de personnes ayant une expérience vécue et de prestataires de services (p. ex. des clinicien·ne·s). Les participant·e·s décrivaient les éléments facilitateurs du programme, ainsi que les obstacles à la participation et les résultats obtenus.

Éléments facilitateurs

  • Accessibilité : La proximité des machines par rapport au lieu de résidence et l’accès 24 heures sur 24 (dans les sites de logements supervisés) ont donné aux participant·e·s de la flexibilité, du choix et de l’autonomie quant à l’heure choisie pour aller chercher leur dose.
  • Pas de conséquences en cas de doses manquées : Certaines personnes ont souligné que l’absence de sanctions en cas d’oubli d’une dose (p. ex. se faire suspendre du programme, recommencer à une dose plus faible, paperasse) réduisait les interruptions dans le déroulement de leur programme et dans leur routine.
  • Prise de la dose sans supervision : Selon certaines personnes, le fait de choisir où et avec qui prendre sa dose réduisait le sentiment de stigmatisation, de gêne et de jugement (de la part des prestataires de soins, des pharmacien·ne·s, de la clientèle de la pharmacie, etc.)
  • Choix du mode d’utilisation (injecter, sniffer, ingérer) : Certaines personnes ont indiqué que le programme leur permettait de choisir le mode d’utilisation approprié ou privilégié en fonction de la situation (p. ex. en public ou en privé).
  • Prévision des situations d’urgence : Les participant·e·s ont indiqué que la possibilité de stocker des doses leur permettait de se préparer à des situations prévues ou inattendues, telles que des vacances, des problèmes techniques ou des journées où une dose plus élevée serait préférable.

Obstacles

  • Problèmes techniques : La plupart des participant·e·s ont rencontré des problèmes techniques (p. ex. écran gelé, problèmes de lecture de la paume) à un moment ou à un autre, quoique rarement. Dans certains cas, ces problèmes ont entraîné des symptômes de sevrage ou ont mené au recours au marché illégal.
  • Problèmes de dosage : Certaines personnes ont indiqué que les doses prescrites n’étaient pas aussi fortes qu’elles le souhaitaient ou qu’elles n’étaient pas assez fortes pour gérer les symptômes de sevrage. Certaines personnes ont dû compléter leur dose avec des drogues d’une autre source.
  • Machine attitrée : Certaines personnes ont mentionné que le fait que leur ordonnance soit liée à une machine en particulier limitait leur mobilité ou leur liberté de choisir leur lieu de résidence ou de travail.

Résultats

  • Réduction de l’utilisation de drogues illégales : La plupart des participant·e·s ont déclaré avoir réduit leur utilisation de drogues illégales. Quelques personnes ont complètement cessé leur utilisation de drogues illégales, tandis que d’autres l’ont réduit substantiellement. Certaines personnes utilisaient des drogues illégales moins souvent, tandis que d’autres en utilisaient à plus petites doses. Quelques participant·e·s dont les besoins ont été satisfaits par les médicaments prescrits ont déclaré ne plus utiliser de drogues illégales.
  • Diminution du risque de surdose : Les participant·e·s ont insisté sur ce résultat, même si certain·e·s ont déclaré avoir fait des surdoses après leur admission (la plupart complétaient encore leur médicament sécuritaire avec des drogues illégales). Certaines personnes ont signalé des surdoses moins fréquentes après l’admission et d’autres ont noté qu’elles couraient simplement moins de risques en raison d’une moins grande dépendance au marché illégal.
  • Impacts financiers : Bon nombre de participant·e·s ont indiqué dépenser beaucoup moins d’argent pour des drogues illégales. Certain·e·s ont déclaré que cela réduisait leur dépendance à l’égard de sources de revenus criminelles ou stigmatisées et leur permettait de consacrer leur argent à l’achat de nourriture ou de vêtements.
  • Amélioration de la santé et du bien-être : La plupart des participant·e·s ont déclaré que leur santé et leur bien-être s’étaient améliorés : meilleure humeur, moins de stress, meilleures relations, plus de temps libre, meilleure alimentation, améliorations fonctionnelles et plus grand investissement dans leurs soins de santé. Beaucoup de personnes ont mentionné que le programme leur avait permis de mieux gérer le sevrage.

Qu’est-ce que cela signifie pour les prestataires de services?

Les résultats de cette étude indiquent que MySafe a favorisé le recours à l’approvisionnement plus sécuritaire en réglant certaines des principales difficultés associées aux programmes médicalisés ou faisant appel aux pharmacies. Le programme MySafe a rendu l’approvisionnement plus sécuritaire très accessible en le rapprochant des lieux de vie et en offrant des horaires prolongés. La flexibilité et le choix ont permis aux participant·e·s d’intégrer l’approvisionnement plus sécuritaire à leur vie en choisissant à quel moment aller chercher leur dose. Le programme leur a aussi permis de se libérer de la stigmatisation et du jugement, car il était possible d’obtenir sa dose et de la prendre sans se faire observer. De plus, la plupart des participant·e·s ont déclaré avoir réduit leur utilisation de drogues de la rue après leur admission au programme. Enfin, selon certaines personnes, le programme a réduit leur risque de surdose.

Des programmes semblables pourraient être particulièrement bénéfiques dans les contextes où l’on retrouve moins de ressources, de services et de soutien. L’obtention de financement pour des programmes semblables dans divers contextes dépendra en partie de la poursuite de la recherche et de l’évaluation, y compris des études longitudinales reposant sur des mesures objectives des résultats et des évaluations continues de programmes.

Ressources connexes

MySafe Society

Approvisionnement sécuritaire : De quoi s’agit-il et quel est l’état des choses au Canada? – Synthèse des données, CATIE

Programme SAFER de Victoria  Étude de cas, CATIE

Le programme d’approvisionnement plus sécuritaire en opioïdes (APSO) – Sommaire des données, CATIE

Références

  1. Bardwell G, Ivsins A, Mansoor M et al. Safer opioid supply via a biometric dispensing machine: a qualitative study of barriers, facilitators and associated outcomes. Canadian Medical Association Journal. 2023;195(19):E668-76.
  2. Mansoor M, Foreman-Mackey A, Ivsins A et al. Community partner perspectives on the implementation of a novel safer supply program in Canada: a qualitative study of the MySafe Project. Harm Reduction Journal. 2023;20(1):1-2.
  3. Tyndall M. Safer opioid distribution in response to the COVID-19 pandemic. International Journal of Drug Policy. 2020; 83:102880.