CATIE

Déclaration de CATIE sur l’utilisation du traitement antirétroviral (TAR) visant le maintien d’une charge virale indétectable comme stratégie hautement efficace pour prévenir la transmission périnatale du VIH

Nos connaissances en matière de stratégies efficaces de prévention de la transmission périnatale du VIH ont considérablement augmenté depuis le début de l’épidémie. Pour en maximiser la portée, nous devons sensibiliser efficacement le public et promouvoir l’adoption et l’utilisation adéquate de ces outils de prévention.

Cette déclaration de CATIE résume les meilleures données probantes disponibles sur l’efficacité des TAR quant au maintien d’une charge virale indétectable pour prévenir la transmission périnatale du VIH.

Elle a été élaborée pour aider les prestataires de services canadiens à adapter leurs programmes et à incorporer les données probantes dans les messages adressés aux client·e·s. Cette déclaration commence par des messages clés simples, qui sont suivis de recommandations à l’intention des prestataires de services et d’une liste d’outils et de ressources. Elle passe aussi en revue les données probantes afin que les prestataires de services puissent tenir des discussions plus spécifiques avec leurs client·e·s.

Messages Clés

L’utilisation correcte et régulière du TAR pour maintenir une charge virale indétectable est une stratégie hautement efficace pour prévenir la transmission périnatale du VIH. Lorsque le TAR est utilisé régulièrement et correctement avant la conception et tout au long de la grossesse, il n’y a pas de risque de transmission virale pendant le travail et l’accouchement. Lorsque le TAR est utilisé régulièrement et correctement après la conception et tout au long de la grossesse, il y a un faible risque de transmission du VIH.

L’utilisation régulière et adéquate du TAR pour maintenir une charge virale indétectable est une stratégie très efficace de prévention de la transmission sexuelle du VIH chez les couples sérodifférents qui essaient de concevoir un enfant. Lorsque le TAR est utilisé régulièrement et correctement, le risque de transmission du VIH est nul.

Les lignes directrices canadiennes recommandent que les nourrissons soient exclusivement nourris à la préparation maternisée, car les données probantes indiquent qu’il existe toujours un faible risque de transmission du VIH pendant l’allaitement lorsque le parent allaitant suit un TAR et maintient une charge virale indétectable. Toutefois, pour ceux et celles qui choisissent d’allaiter, les lignes directrices recommandent d’offrir du soutien au parent et au nourrisson pour que l’allaitement se fasse de la manière la plus sûre possible.

Pour plus d’information, veuillez consulter le résumé des données probantes à la fin de cette déclaration.

Recommandations aux prestataires de services

En plus d’améliorer la santé des personnes vivant avec le VIH, le TAR présente l’avantage important de contribuer à prévenir la transmission du VIH par de multiples voies, notamment sexuelle et périnatale. Les personnes œuvrant auprès des populations vivant avec le VIH ont un rôle important à jouer pour favoriser l’utilisation du TAR et le maintien d’une charge virale indétectable afin de prévenir la transmission.

Les recommandations suivantes pourraient vous aider à mieux intégrer la prévention de la transmission périnatale du VIH dans vos messages.

1. Facilitez et encouragez le recours au TAR.

Les lignes directrices recommandent maintenant de proposer le TAR à toutes les personnes vivant avec le VIH, quel que soit leur nombre de cellules CD4. Cette recommandation est fondée sur les bienfaits de l’instauration rapide du TAR pour la santé des personnes vivant avec le VIH, quoique la prévention du VIH en soit un avantage secondaire important.

Si votre client·e ne reçoit pas déjà de soins, vous devriez l’aider à prendre contact avec un service de soins du VIH. Il faut que sa décision de commencer le TAR soit le résultat d’une réflexion éclairée. Le TAR implique de prendre des médicaments toute une vie durant et de consulter régulièrement des prestataires de soins de santé, notamment des médecins, des infirmier·ère·s, des infirmier·ère·s praticien·ne·s et des pharmacien·ne·s. Pour faciliter la prise de décisions éclairées par les client·e·s, il faut peut-être leur fournir des services permettant de renforcer la relation médecin-patient·e.

2. Faites bien comprendre que les rapports sexuels non protégés par un condom sont la principale méthode de conception recommandée pour les couples sérodifférents lorsque le partenaire séropositif quant au VIH reçoit un TAR et maintient une charge virale indétectable. C’est un moyen d’éviter la transmission du virus au partenaire sexuel séronégatif quant au VIH tout en permettant la conception.

Les lignes directrices canadiennes en matière de planification de la grossesse recommandent les rapports sexuels non protégés par un condom comme principale méthode de conception chez les couples sérodifférents lorsque le partenaire séropositif quant au VIH reçoit un TAR et maintient une charge virale indétectable. Les personnes qui suivent un TAR et maintiennent une charge virale indétectable ne transmettent pas le VIH à leur partenaire sexuel.

Toute personne ayant un partenaire sérodifférent et souhaitant avoir un enfant doit être informée des avantages du TAR et du maintien d’une charge virale indétectable sur le plan de la prévention de la transmission du VIH lorsqu’elle a des relations sexuelles non protégées par un condom en vue de concevoir. L’information et les conseils doivent porter notamment sur l’utilisation constante et adéquate du TAR. Insistez sur les éléments suivants :

  • L’observance du TAR est essentielle pour atteindre et maintenir une charge virale indétectable (définie habituellement au Canada comme une charge inférieure à 40 ou à 50 copies du virus par millilitre de sang; notons que certains tests plus récents ont un seuil de détection de 20 copies/ml seulement).
  • Les lignes directrices canadiennes recommandent que le partenaire séropositif pour le VIH maintienne une charge virale indétectable pendant au moins trois mois, idéalement six mois, avant d’avoir des relations sexuelles sans condom en vue de la conception.
  • Le maintien d’une charge virale indétectable durable est nécessaire pour que cette approche soit efficace. Un test régulier de la charge virale est la seule façon de vérifier que la charge virale demeure indétectable.
  • Des consultations médicales régulières sont nécessaires pour recevoir des soins réguliers, y compris la surveillance de la charge virale.
  • Les personnes séropositives pour le VIH qui tentent de concevoir un enfant doivent consulter leur médecin pour s’assurer que les médicaments contre le VIH qu’elles prennent ne sont pas contre-indiqués pendant la grossesse.
  • La planification des rapports sexuels pendant la période de l’ovulation augmente les chances de conception.
  • En cas de conception réussie, toutes les personnes enceintes doivent être orientées vers des services de soins prénataux.

Si la conception au moyen des rapports sexuels sans condom échoue, les services d’une clinique de fertilité peuvent être nécessaires. L’adoption est également possible pour les personnes vivant avec le VIH au Canada.

3. Faites bien comprendre que le recours au TAR en vue de maintenir une charge virale indétectable est une stratégie très efficace de prévention de la transmission périnatale du VIH pendant la grossesse et l’accouchement.

Toute personne séropositive quant au VIH qui est enceinte, qui pourrait le devenir ou qui envisage une grossesse doit être informée des avantages du TAR et du maintien d’une charge virale indétectable sur le plan de la prévention de la transmission périnatale du VIH. Leurs partenaires devraient également être informé·e·s à cet égard. L’information et les conseils doivent porter notamment sur l’utilisation constante et adéquate du TAR.

Les personnes qui suivent un traitement et maintiennent une charge virale indétectable avant la conception et pendant toute la durée de leur grossesse ne transmettent pas le VIH à leur bébé pendant la grossesse ou l’accouchement. En revanche, dans le cas des personnes qui n’entament pas un traitement et dont la charge virale n’est indétectable qu’après la conception, il existe toujours un faible risque de transmission du VIH pendant la grossesse ou l’accouchement. Plus une personne séropositive quant au VIH et enceinte entame un traitement et atteint une charge virale indétectable tôt, plus le risque de transmission périnatale est faible. Quel que soit le stade de la grossesse de vos client·e·s, vous pouvez les aider et les encourager à entamer un traitement et à l’utiliser de manière constante et adéquate.

Vous pouvez expliquer à vos client·e·s qu’un grand nombre de données probantes démontrent que la prise de médicaments antirétroviraux et le maintien d’une charge virale indétectable constituent une méthode très efficace de prévention de la transmission périnatale. Insistez sur les points suivants :

  • L’observance du TAR est essentielle pour atteindre et maintenir une charge virale indétectable (définie habituellement au Canada comme une charge inférieure à 40 ou à 50 copies du virus par millilitre de sang; notons que certains tests plus récents ont un seuil de détection de 20 copies/ml seulement).
  • En général, trois mois ou moins sont nécessaires avant l’obtention d’une charge virale indétectable, mais il arrive que ce délai soit de six mois. Un test de la charge virale est la seule façon de savoir si cette charge est devenue indétectable.
  • Le maintien d’une charge virale indétectable durable est nécessaire pour que cette approche soit efficace. Un test régulier de la charge virale est la seule façon de vérifier que la charge virale demeure indétectable.
  • Des consultations médicales régulières sont nécessaires pour assurer la continuité des soins pendant la grossesse, y compris la surveillance de la charge virale (toutes les quatre à huit semaines).
  • En plus du TAR, les lignes directrices canadiennes recommandent l’administration de médicaments contre le VIH par voie intraveineuse aux personnes séropositives pendant le travail et l’accouchement afin de réduire davantage le risque de transmission du VIH à leur bébé.
  • D’après les recommandations des lignes directrices canadiennes, une personne ayant une charge virale indétectable peut accoucher par voie vaginale, à moins qu’elle ne doive pas accoucher par cette voie pour une autre raison médicale.
  • Ces lignes directrices recommandent également de prescrire aux nouveau-nés un traitement de six semaines contre le VIH afin de réduire davantage le risque de transmission périnatale. Toutefois, certains médecins prescrivent un traitement de quatre semaines sur la base de données récentes.
  • Les bébés nés d’un parent séropositif pour le VIH passeront un test de dépistage du VIH immédiatement après leur naissance. Si le résultat de ce test est négatif, l’enfant passera trois autres tests (à l’âge de 1 mois, de 3 mois à 4 mois, et de 18 mois) pour le confirmer.

Vous pouvez également mener ou soutenir les efforts de sensibilisation à l’utilisation du TAR pour le maintien d’une charge virale indétectable et comme moyen de prévention de la transmission périnatale auprès de divers prestataires de services dans votre localité, y compris les médecins, le personnel infirmier, les spécialistes en santé de la reproduction, les pharmacien·ne·s et le personnel non clinique des organismes communautaires.

4. Faites bien comprendre que les lignes directrices recommandent l’alimentation exclusive des nourrissons à la préparation maternisée. Toutefois, pour ceux et celles qui choisissent d’allaiter, les lignes directrices recommandent d’offrir du soutien au parent et au nourrisson pour que l’allaitement se fasse de la manière la plus sûre possible.

Informez les client·e·s qu’il est recommandé au Canada que les personnes vivant avec le VIH nourrissent leur bébé exclusivement à la préparation pour nouveau-né. Expliquer que même si le TAR et le maintien d’une charge virale indétectable réduisent considérablement le risque de transmission du VIH à un bébé par l’allaitement, les données probantes tendent à montrer qu’il existe toujours un faible risque de transmission.

Assurez vos client·e·s que le lait maternisé fournit aux bébés les nutriments nécessaires à un développement sain. Orientez les client·e·s vers des programmes offrant gratuitement des préparations pour nourrissons s’ils sont disponibles dans votre communauté.

Faites savoir aux client·e·s qu’elles peuvent ressentir des douleurs mammaires pendant plusieurs jours après l’accouchement si elles n’allaitent pas. Conseillez aux client·e·s de ne pas pomper leur lait, car cela amènera leur organisme à en produire davantage. Suggérez des moyens de soulager la douleur, par exemple l’application d’une compresse froide ou la prise d’analgésiques en vente libre. Conseillez aux client·e·s de consulter un·e prestataire de soins si elles ont des difficultés à maîtriser la douleur.

Discutez avec les client·e·s de ce qu’elles pensent de l’alimentation des nourrissons. Certaines client·e·s souhaitent vivement allaiter pour des raisons personnelles ou du fait de pressions sociales ou culturelles. Il est important d’écouter les préoccupations des client·e·s sans porter de jugement. Il sera peut-être nécessaire de dissiper les préoccupations de celles qui choisissent de nourrir leur bébé à la préparation maternisée, notamment pour ce qui est de créer un lien avec le nourrisson sans l’allaiter, ou de composer avec les pressions sociales et culturelles liées à l’allaitement.

Il faut inciter les client·e·s qui décident d’allaiter à obtenir le soutien d’un·e médecin spécialiste du VIH. Un·e médecin spécialiste du VIH peut aider une personne à allaiter de la manière la plus sûre possible. Il/elle l’informera notamment des facteurs susceptibles d’augmenter le risque de transmission. Le/la médecin établira un plan de suivi continu de la santé du parent qui allaite et du bébé et prescrira des médicaments contre le VIH pour le bébé pendant l’allaitement afin de réduire davantage le risque de transmission.

Les recommandations des lignes directrices canadiennes sont différentes de celles de l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) : celles de l’OMS concernent les pays où la prévalence du VIH est élevée et où la diarrhée, la pneumonie et la dénutrition sont des causes courantes de mortalité infantile et juvénile. Dans ces contextes, l’OMS recommande aux personnes vivant avec le VIH de suivre un traitement et d’allaiter. En effet, dans ces pays, les avantages de l’allaitement pour la santé du bébé l’emportent sur le risque de lui transmettre le VIH. L’allaitement contribue à renforcer le système immunitaire du nourrisson, ce qui lui permet de lutter contre des infections potentiellement mortelles fréquentes dans ces pays; l’allaitement peut également contribuer à prévenir la malnutrition. Par ailleurs, l’allaitement est plus sûr que le lait maternisé en l’absence d’accès à l’eau potable à mélanger à la préparation pour nourrissons. Les différences au sein des lignes directrices entre les pays peuvent être source de confusion, notamment pour les personnes qui immigrent au Canada en provenance d’un pays où l’allaitement fait partie des recommandations et de la norme culturelle. Soyez prêt·e à répondre aux questions éventuelles à ce sujet.

5. Abordez les problèmes sociaux et de santé sous-jacents auxquels les client·e·s peuvent être confronté·e·s.

Lorsqu’un·e client·e envisage d’avoir un enfant, est enceinte ou vient de donner naissance, vous devez être prêt·e à l’orienter vers les services nécessaires, tels que :

  • Des programmes de soutien du revenu
  • De l’assistance au logement
  • Des programmes de suffisance alimentaire
  • Des programmes de lutte contre la dépendance aux substances
  • Des programmes de consultations en santé mentale
  • Des soins de santé
  • Des programmes de lutte contre la violence conjugale

Étant entendu que ces problèmes sont très importants et qu’ils ont une incidence sur le bien-être d’une personne et sur son éventuelle observance du TAR, vous devez vous informer des services disponibles dans votre collectivité. Vous pourrez ensuite orienter vos client·e·s et leurs partenaires vers ces services, si nécessaire.

Outils et ressources

Ressources pour les client·e·s

Agrandir sa famille : Une introduction à la planification de la grossesse, à la maternité de substitution et à l’adoption pour les personnes vivant avec le VIH

La préparation pour nourrissons est-elle bonne pour mon bébé?

Ressources pour les prestataires de services

Ce que nous savons (et ne savons pas) sur le risque de transmission du VIH par l’allaitement – Point de mire sur la prévention

Points de vue des premières lignes : Allaitement et transmission du VIH – Point de mire sur la prévention

A step by step process on how we can support mothers living with HIV – Blogue de CATIE

Le traitement du VIH et la charge virale indétectable pour prévenir la transmission du VIH – Feuillet d'information

Lignes directrices, déclarations de principes et énoncés de consensus

Lignes directrices canadiennes en matière de planification de la grossesse en présence du VIH

Canadian Pediatric & Perinatal HIV/AIDS Research Group consensus recommendations for infant feeding in the HIV context

Prevention of vertical HIV transmission and management of HIV-exposed infant in Canada in 2014

Lignes directrices pour ce qui est des soins à offrir aux femmes enceintes qui vivent avec le VIH et des interventions visant à atténuer la transmission périnatale : Résumé directif

Word Health Organization Guideline: Updates on HIV and infant feeding

Données probantes

Nous reprenons les termes employés dans les études concernant le travail, l’accouchement et l’alimentation des nourrissons, où il est question de femmes et de mères, et qui n’ont pas porté sur des personnes transgenres. Les résultats peuvent concerner les personnes qui ont des bébés et qui ne s’identifient pas comme des femmes.

Prévention de la transmission sexuelle pendant la conception

Chez les personnes vivant avec le VIH, un TAR efficace peut réduire la quantité de virus (charge virale) dans le sang et d’autres liquides corporels jusqu’à un taux indétectable. Au Canada, une charge virale indétectable est habituellement définie par la présence de moins de 40 ou 50 copies du virus par millilitre de sang (notons que certains tests plus récents ont un seuil de détection de 20 copies/ml seulement).

Nous savons que la quantité de VIH dans les liquides biologiques d’une personne vivant avec le VIH est un facteur prédictif important de la transmission du VIH à une personne séronégative après une exposition sexuelle. Les recherches montrent qu’une faible charge virale dans le sang est associée à un risque moindre de transmission sexuelle du VIH1, car lorsque la charge virale dans le sang diminue, elle diminue aussi dans les liquides sexuels (sperme, sécrétions vaginales et sécrétions rectales), qui sont des liquides souvent associés à la transmission sexuelle du VIH2.

Les études ayant évalué le lien entre la charge virale et la transmission sexuelle ont porté sur des couples hétérosexuels et des couples homosexuels de sexe masculin. Bien que les études menées auprès de couples de même sexe masculin ne se rapportent pas directement à la conception, nous les avons incluses dans la présente revue car elles contribuent à l’ensemble des données probantes montrant que le maintien d’une charge virale indétectable prévient la transmission sexuelle du VIH.

L’essai clinique randomisé et contrôlé HPTN 052 était la première étude à montrer de façon concluante que le TAR et la charge virale indétectable préviennent la transmission sexuelle du VIH chez les couples hétérosexuels sérodifférents3,4. Dans l’analyse définitive portant sur 1 763 couples hétérosexuels sérodifférents (dont la moitié a fait l’objet d’un suivi de plus de cinq ans et demi), aucune transmission du VIH ne s’est produite lorsque le partenaire séropositif du couple suivait un TAR et avait une charge virale indétectable (définie comme une charge inférieure à 400 copies/ml dans cette étude). Au total, huit cas de transmission se sont produits entre couples pendant que le partenaire séropositif pour le VIH suivait un TAR; toutefois, dans chacun des huit cas, la charge virale du partenaire était détectable malgré l’utilisation du TAR. Quatre transmissions se sont produites durant les trois premiers mois suivant l’instauration du TAR, c’est-à-dire avant que la charge virale du partenaire séropositif pour le VIH ne soit devenue indétectable. Les quatre autres transmissions se sont produites lorsque la suppression virale à un niveau indétectable n’a pas pu être maintenue malgré le traitement chez le partenaire séropositif pour le VIH. En plus de ces huit cas de transmission, 26 personnes ont contracté le VIH d’un partenaire sexuel en dehors du couple principal, ce qui révèle que, pour les couples sérodifférents où le partenaire séropositif suit un TAR et maintient une charge virale indétectable, le risque principal de transmission du VIH vient de l’extérieur de la relation. Les résultats de l’étude HPTN 0524 corroborent les conclusions de trois études observationnelles précédentes menées auprès de couples hétérosexuels sérodifférents, lesquelles avaient montré que le TAR était une stratégie hautement efficace de prévention du VIH5–7.

Les résultats d’une vaste étude observationnelle en deux phases, PARTNER/PARTNER 2, ont montré que le TAR et une charge virale indétectable (définie comme une charge inférieure à 200 copies/ml dans cette étude) prévenaient la transmission sexuelle du VIH chez les couples hétérosexuels et les couples d’hommes gais, et ce, même en l’absence d’autres formes de prévention du VIH (condoms, prophylaxie pré-exposition [PrEP] ou prophylaxie post-exposition [PPE])8,9. La première phase de l’étude incluait à la fois des couples hétérosexuels et des couples d’hommes gais, alors que la deuxième phase s’est poursuivie auprès de couples d’hommes gais seulement. Au cours de cette étude, on a recensé un nombre élevé d’actes sexuels non protégés (pas de condoms, de PrEP ou de PPE) lorsque la charge virale était indétectable, soit environ 36 000 actes parmi les couples hétérosexuels et 76 000 parmi les couples d’hommes gais inscrits à l’étude. À la fin de l’étude, on n’a signalé aucun cas de transmission du VIH parmi les couples lorsque le partenaire séropositif pour le VIH suivait un TAR et avait une charge virale indétectable. Il s’est toutefois produit 16 nouvelles infections par le VIH (chez 15 hommes gais et une personne hétérosexuelle) qui avaient été transmises par un partenaire sexuel en dehors du couple.

Lors d’une étude d’observation semblable à l’étude PARTNER, soit l’étude Opposites Attract, on n’a recensé aucune transmission du VIH parmi des couples d’hommes gais sérodifférents lorsque le partenaire suivait un TAR et maintenait une charge virale indétectable (< 200 copies/ml), et ce, malgré quelque 16 800 actes sexuels anaux sans condom. Dans cette étude, trois personnes séronégatives ont contracté le VIH d’un partenaire sexuel venant de l’extérieur du couple principal10.

Prévention de la transmission pendant la grossesse et l’accouchement

En l’absence d’un traitement efficace, le VIH peut être transmis d’une personne vivant avec le VIH à un bébé pendant la grossesse et l’accouchement. On estime que le risque de transmission du VIH pendant la grossesse ou l’accouchement est de 15 à 30 % en l’absence de tout traitement anti-VIH11.

Sans traitement du VIH, le risque de transmettre le virus à un bébé culmine pendant l’accouchement ou juste avant. Des études réalisées avant le lancement des traitements très efficaces contre le VIH ont montré qu’environ deux tiers des bébés nés avec le VIH ont contracté le virus pendant l’accouchement ou vers la fin de la grossesse, et le tiers restant l’a contracté plus tôt pendant la grossesse12,13.

Depuis ces trois dernières décennies, de plus en plus de données probantes montrent que les bébés sont beaucoup moins susceptibles de naître avec le VIH si la mère a suivi un traitement12,14–19. Une étude de la Cohorte périnatale française est la plus vaste étude à montrer l’impact du traitement sur la prévention de la transmission du VIH à un nouveau-né16. Cette étude a été menée entre 2000 et 2017 auprès de 14 630 paires mères-enfants, dont la mère vivait avec le VIH. Dans 5 482 de ces cas, la mère a commencé un traitement contre le VIH avant de devenir enceinte, a poursuivi le traitement tout au long de sa grossesse, avait une charge virale indétectable (définie dans cette étude comme étant inférieure à 50 copies/ml) au moment de l’accouchement et n’a pas allaité. Dans ces cas, aucun des nouveau-nés n’a contracté le VIH.

L’étude française a également montré que l’instauration d’un traitement anti-VIH le plus tôt possible pendant la grossesse réduit considérablement le risque de transmission. Pendant l’étude, le risque de transmettre le VIH à un bébé était de 0,52 % si la mère commençait le traitement durant le premier trimestre, de 0,75 % si elle le commençait durant le deuxième trimestre, et de 1,67 % si elle le commençait au troisième trimestre. La charge virale de la mère n’a pas été prise en compte dans ces calculs.

Prévention de la transmission par le mode d’alimentation des nourrissons

Avant le lancement des traitements très efficaces contre le VIH, le risque de transmission du VIH par l’allaitement avait été estimé à environ 15 %20,21. Avec le TAR, les taux de transmission du VIH par l’allaitement sont beaucoup plus faibles. Une revue systématique a révélé que chez les femmes sous traitement anti-VIH qui allaitent, le taux de transmission postnatale était de 1 % après 6 mois et de 3 % après 1 an22. Cependant, dans le cadre des études en question, les femmes avaient suivi leur traitement pour des périodes variables et ne l’avaient pas poursuivi au-delà du sixième mois suivant l’accouchement. La revue systématique n’a pas tenu compte de l’observance du traitement et de la charge virale, ce qui signifie que même si les femmes suivaient un traitement contre le VIH, nous ne savons pas combien d’entre elles avaient une charge virale détectable au moment de la transmission.

Seules quelques études ont permis de mesurer le risque de transmission par l’allaitement lorsque la mère suivait un traitement et que sa charge virale était indétectable. L’étude de plus grande envergure réalisée à cette fin est l’étude PROMISE, qui a été menée dans plusieurs pays d’Afrique et en Inde23. Parmi les 1 220 nourrissons dont la mère suivait un traitement, 7 ont contracté le VIH par l’allaitement, soit un taux d’infection de 0,57 %. Dans cinq cas sur sept, la mère présentait une charge virale détectable lors de son dernier test de détection de la charge virale avant que le bébé n’obtienne un résultat positif. Dans les deux autres cas, la mère présentait une charge virale indétectable lors de son dernier test de détection de la charge virale. Cela signifie que certains nourrissons ont contracté le VIH alors que leur mère suivait un traitement et que sa charge virale était indétectable aux alentours du moment de la transmission.

Trois études de moindre envergure ont également porté sur la transmission du VIH par l’allaitement pendant un traitement et avec une charge virale indétectable24-26. Deux de ces études n’ont fait état d’aucun cas de transmission lorsque la mère suivait un traitement et présentait une charge virale indétectable pendant toute la durée de l’allaitement24,25. Dans le cadre de la troisième étude, deux nourrissons ont contracté le VIH alors que la charge virale de leur mère était indétectable lors du dernier test26. Dans l’ensemble, ces études tendent à montrer que le risque de transmission lorsque la mère suit un traitement et que sa charge virale est indétectable est très faible, mais pas nul.

De vastes études sur le risque de transmission du VIH par l’allaitement maternel ont été réalisées dans des pays à faible revenu où les avantages de l’allaitement maternel peuvent l’emporter sur les risques de transmission virale par l’allaitement. Aucune étude de grande envergure n’a été réalisée dans un pays à revenu élevé pour montrer le risque de transmission lorsque la mère a une charge virale indétectable (au seuil de 50 copies/ml)27. Cependant, certains chercheurs ont suggéré que le risque de transmission du virus lorsque la charge virale est indétectable est si faible que les femmes qui souhaitent allaiter pourraient raisonnablement décider que les avantages de l’allaitement pour la santé l’emportent sur les risques27,28. Plusieurs études de cas ont porté sur des femmes vivant avec le VIH en Amérique du Nord qui ont été encouragées à allaiter par leur équipe médicale. Aucun des bébés concernés n’a contracté le VIH29,30.

Références

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  9. Rodger AJ, Cambiano V, Bruun T et al. Risk of HIV transmission through condomless sex in serodifferent couples when the HIV-positive partner is using suppressive antiretroviral therapy (PARTNER): final results of a multicentre, prospective, observational study. The Lancet. 2019 Jun 15;393(10189):2428–38. Disponible au : https://www.thelancet.com/journals/lancet/article/PIIS0140-6736(19)30418-0/fulltext
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