- Les éclosions de variole simienne sont typiquement associées à une maladie grippale d’intensité légère accompagnée d’éruptions cutanées sur le visage, les pieds et les mains
- Pendant l’éclosion actuelle, on signale couramment aussi l’apparition de lésions douloureuses dans la région anogénitale et la gorge
- Les hommes ayant des relations sexuelles avec des hommes qui présentent une éruption cutanée inhabituelle ou des lésions devraient consulter un médecin sans tarder
Historique de la variole simienne
La variole simienne est une maladie causée par un microbe appelé virus de la variole simienne. Ce virus appartient à la même famille que le virus responsable de la variole. Dans le passé, voire jusqu’au milieu du 20e siècle, la variole était une maladie relativement courante. Cependant, une campagne de vaccination lancée par l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) a fait disparaître la variole, et l’OMS a déclaré cette maladie éradiquée en 1980. Comme la variole n’était plus un problème, la vaccination systématique contre cette maladie a pris fin. Nombre de scientifiques estiment que la fin des programmes de vaccination a entraîné une diminution de l’immunité contre le virus responsable de la variole simienne.
La variole simienne a été observée pour la première fois chez des enfants vivant dans certaines régions de la République démocratique du Congo dans les années 1970, puis au Nigéria. Dans ces pays, la maladie est devenue endémique parce qu’elle avait tendance à infecter certains animaux (écureuils, souris, rats et singes) y vivant. Comme ces animaux infectés servent de réservoir au virus, ils peuvent transmettre ce dernier aux humains lorsqu’ils entrent en contact avec eux. L’âge des personnes susceptibles de contracter la variole simienne a augmenté depuis les années 1970, et les adultes y sont vulnérables maintenant.
Depuis deux décennies, des cas de variole simienne sont survenus sporadiquement en Europe et aux États-Unis, mais les personnes touchées avaient voyagé dans des régions où des éclosions de variole simienne se produisaient. Dans ces cas, la propagation entre humains était limitée.
Or, en mai 2022, des médecins d’Angleterre, et subséquemment d’autres pays de l’Europe occidentale, ont reconnu les premiers cas de ce qui allait devenir une éclosion importante de variole simienne. Des cas sont ensuite apparus rapidement au Canada, aux États-Unis et dans d’autres pays. Contrairement aux éclosions antérieures, les personnes touchées par l’éclosion actuelle sont presque exclusivement des hommes gais, bisexuels et d’autres hommes ayant des relations sexuelles avec des hommes (gbHARSAH). Des rapports provenant de partout dans le monde laissent croire que la vaste majorité des personnes diagnostiquées pendant cette éclosion se remettront de la variole simienne après plusieurs semaines. Il n’empêche que des rapports récents indiquent également que certaines personnes touchées éprouvent des symptômes graves et débilitants.
Symptômes graves de la variole simienne chez certaines personnes
Dans le passé, on associait habituellement les éclosions de variole simienne à une maladie relativement légère caractérisée par des symptômes généralisés d’une infection virale, soit fièvre, fatigue, douleurs musculaires et ganglions lymphatiques enflés, suivis de l’apparition d’éruptions cutanées sur le visage, la plante des pieds et la paume des mains. Des rapports récents provenant de pays à revenu élevé indiquent toutefois que les hommes atteints de variole simienne peuvent présenter des ulcérations près des organes génitaux, de l’anus ou du rectum ou dans ces derniers, ainsi que dans la gorge. Ces lésions peuvent être extrêmement douloureuses, au point de nécessiter la prise d’opioïdes pour calmer la douleur dans certains cas.
Il semble aussi que la variole simienne évolue différemment cette fois que lors des éclosions décrites dans les rapports antérieurs provenant d’endroits typiquement associés à la variole simienne. Depuis le début de l’éclosion actuelle, certaines personnes ont présenté des ulcérations orales, anales ou génitales avant de faire de la fièvre ou d’éprouver d’autres symptômes habituellement associés aux infections virales (dont la variole simienne). Dans certains cas, les lésions ont été infectées par des bactéries, et des antibiotiques se sont avérés nécessaires pour prévenir des complications graves.
Comme la variole simienne est une nouvelle maladie au Canada et dans d’autres pays à revenu élevé, les médecins et les scientifiques ne la comprennent pas très bien encore. Au fil du temps, à mesure que le nombre de cas augmentera, les connaissances générales en cette matière s’amélioreront. Des études sont en cours, et un vaccin (Imvamune) est disponible, quoiqu’en quantité limitée. À l’heure actuelle, les autorités de la santé publique offrent le vaccin à des personnes courant un risque élevé de contracter la variole simienne. On peut contacter son bureau de santé publique local pour en savoir plus sur la disponibilité et les critères de vaccination en vigueur dans sa région.
Pour connaître les nouvelles les plus récentes concernant la variole simienne au Canada, y compris en matière de prévention, cliquez sur ce lien.
Propagation de la variole simienne
Pendant l’éclosion actuelle, le virus de la variole simienne se propage le plus souvent des façons suivantes au Canada et dans les autres pays à revenu élevé :
- contact de personne à personne
- contact direct avec des objets contaminés
Transmission de personne à personne
L’Agence de la santé publique du Canada (ASPC) a publié la déclaration suivante à propos de la transmission du virus entre deux personnes :
« La variole simienne peut se propager de personne à personne par contact avec les lésions ou les croûtes d’une personne infectée, qui peuvent se trouver sur la peau ou sur les surfaces muqueuses (comme les yeux, la bouche, la gorge, les organes génitaux, l’anus ou le rectum). »
Selon l’ASPC, « Elle peut également se propager par contact avec les liquides corporels d’une personne infectée, comme le sang, la salive et le sperme. Par exemple :
- pendant les contacts sexuels, y compris les contacts oraux et sans pénétration
- lors de la prestation de soins
- lorsque des personnes partagent le même foyer ».
Aux États-Unis, les Centers for Disease Control and Prevention (CDC) soulignent que d’autres genres de contacts peuvent aussi transmettre le virus de la variole simienne, dont « les accolades, les massages et les baisers » avec une personne infectée.
De plus, « Une personne enceinte infectée peut également transmettre le virus à son fœtus en développement à travers le placenta », prévient l’ASPC.
Les scientifiques ne savent pas encore si une personne infectée sans symptômes peut transmettre le virus à d’autres personnes.
Objets contaminés
Selon l’ASPC, il est possible de contracter l’infection en entrant en contact avec certains objets qu’une personne porteuse du virus de la variole simienne a touchés, dont les suivants :
- vêtements
- literie
- serviettes
Toujours selon l’ASPC, il est possible de contracter le virus de la variole simienne en partageant les objets suivants avec une personne atteinte de la maladie :
- rasoirs
- ustensiles
- aiguilles
- jouets sexuels
- brosses à dents
L’ASPC souligne aussi que « Le virus peut se propager par les particules respiratoires, notamment lorsque vous parlez, respirez, toussez ou éternuez, lors d’un contact étroit ». Notons cependant que les scientifiques de la santé publique poursuivent la collecte de données à propos de ce mode de transmission.
L’éclosion actuelle
Dans un rapport récent, des médecins d’Angleterre ont affirmé que, dans de nombreux cas où la variole simienne a été étudiée en profondeur, les hommes touchés avaient présenté d’abord des lésions dans la région anogénitale ou encore dans l’anus et la gorge. Les médecins se doutent que les lésions sont d’abord apparues dans ces tissus parce qu’ils étaient vraisemblablement les premiers lieux de contact avec le virus. La population de loin la plus touchée est celle des gbHARSAH, la plupart desquels ont fait état d’un contact sexuel récent, selon les médecins britanniques. Toutes ces données portent à croire que, dans de nombreux cas touchant des gbHARSAH, le virus de la variole simienne se transmet lors des contacts de peau à peau de nature sexuelle ou par l’exposition à des liquides corporels infectés.
Les gbHARSAH qui présentent une éruption ou des lésions cutanées inhabituelles (y compris sur les organes génitaux) ou des lésions intérieures (dans la gorge ou l’anus) devraient contacter immédiatement leur médecin pour se faire évaluer.
Même si l’éclosion actuelle touche principalement des gbHARSAH, des rapports laissent penser qu’un faible nombre de femmes et d’enfants ont aussi été infectés. Dans certains cas, cela s’est produit au sein d’un ménage où quelqu’un de la famille avait la variole simienne.
Étude britannique
Une équipe de recherche travaillant pour la Guy and St. Thomas NHS Foundation Trust (réseau d’hôpitaux et de centres de santé communautaire situés à Londres) a examiné des données se rapportant à la santé de 197 hommes chez qui la variole simienne avait été diagnostiquée à l’aide d’un test PCR (amplification en chaîne par polymérase). Il s’agissait de 196 gbHARSAH dont la moyenne d’âge était de 38 ans (ils avaient entre 21 et 67 ans). Soixante-dix hommes (36 %) avaient également le VIH. Même si certains hommes ont éprouvé de graves symptômes nécessitant l’hospitalisation, aucun décès n’a été déploré.
Les données se rapportant à ces cas ont été analysées par l’équipe de recherche après que les hommes en question avaient été traités par des médecins qui soupçonnaient des causes autres que la variole simienne. Ces cas se sont produits alors que la vague de variole simienne commençait à déferler. Comme celle-ci est généralement une maladie nouvelle dans les pays à revenu élevé, il est facile à comprendre que les médecins étaient perplexes dans un premier temps quant à la cause des symptômes de leurs patients.
Puisque la variole simienne est une maladie nouvelle qui est mal comprise, elle peut être très effrayante pour les personnes atteintes, surtout si elles en éprouvent des symptômes graves. Il importe toutefois de souligner que la vaste majorité des personnes touchées depuis le début de l’éclosion actuelle ont déjà guéri ou guériront. De plus, la plupart des personnes atteintes n’ont pas été hospitalisées et ont pu se remettre de la variole simienne chez elles en suivant des conseils médicaux.
Des équipes de recherche de nombreux pays se dépêchent de rapporter leurs résultats concernant l’éclosion actuelle de variole simienne dans l’espoir que les renseignements fournis permettront d’améliorer la qualité des soins donnés aux patient·e·s. Comme cela arrive typiquement durant les premiers mois d’une éclosion nouvelle, certains détails risquent de ne pas avoir été inclus dans les rapports. Au fil du temps, à mesure que des données se rapportant à des milliers de cas seront analysées dans les pays à revenu élevé, les médecins et scientifiques auront une meilleure idée de l’éventail de symptômes et de complications susceptibles de se produire chez les personnes atteintes.
Dans le présent rapport, nous mettons l’accent sur un groupe de symptômes et de problèmes signalés par l’équipe de recherche britannique afin de souligner des différences par rapport aux éclosions antérieures de variole simienne.
Éruptions cutanées et lésions
Par le passé, les éruptions cutanées associées à la variole simienne apparaissaient d’abord sous forme de petites zones rouges et plates sur la peau, d’ordinaire sur le visage, les mains et les jambes, mais rarement sur les organes génitaux ou l’anus. Les zones rouges devenaient subséquemment surélevées de manière simultanée, et des lésions se formaient quelques jours plus tard. Après quelque temps, les lésions se ramollissaient et commençaient à suinter. Après ce stade, les lésions durcissaient, et des croûtes se formaient. Les croûtes tombaient plusieurs jours plus tard en laissant une cicatrice, et la personne touchée était considérée comme rétablie.
L’équipe de recherche britannique a observé que durant l’éclosion actuelle, des lésions ne se formaient pas dans toutes les régions touchées par une éruption cutanée. De plus, toutes les lésions n’ont pas évolué au même rythme chez les personnes atteintes.
Chez les patients britanniques, les zones cutanées les plus touchées par des lésions étaient les suivantes :
- organes génitaux
- pourtour et intérieur de l’anus
Des lésions anogénitales se sont produites chez 88 % des patients.
Les lésions cutanées liées à la variole simienne causent habituellement des démangeaisons et peuvent devenir douloureuses.
Au moment où les hommes ont consulté, ils avaient tous pour symptômes des éruptions cutanées et des lésions près de l’anus ou encore dans l’anus ou la gorge. Ils avaient initialement cinq lésions en moyenne.
Vingt-deux hommes avaient une seule lésion au moment de leur première consultation. Chez 17 d’entre eux, la lésion se trouvait dans la région anogénitale.
Symptômes généralisés
De nombreuses infections virales sont associées dans un premier temps à des symptômes généralisés ou systémiques qui surviennent lorsque le système immunitaire reconnaît que l’organisme subit une attaque et qu’il agit pour le défendre. Dans l’étude britannique, 170 hommes ont fait état d’une maladie systémique caractérisée par les symptômes suivants :
- fièvre
- enflure persistante des ganglions lymphatiques
- sensibilité et douleurs musculaires
Dans le passé, les symptômes généralisés de ce genre se produisaient avant l’apparition des lésions cutanées associées à la variole simienne. Cependant, pendant l’éclosion actuelle, l’équipe de recherche a constaté que près de 40 % des hommes ont présenté des lésions ou ulcérations cutanées avant l’apparition de symptômes généralisés d’une infection virale. Chez 14 % de ces hommes, les lésions étaient présentes dans l’anus ou la gorge avant l’apparition de symptômes généralisés.
Une seule lésion au début
Selon l’équipe de recherche, 22 hommes ont présenté initialement une seule petite lésion cutanée. Pour certains d’entre eux, celle-ci est restée leur seule lésion. Cependant, chez d’autres hommes, l’unique lésion a entraîné des complications, comme l’illustre le cas décrit ci-dessous.
Un homme de 53 ans qui avait le VIH et une charge virale supprimée a consulté lorsqu’il a remarqué une petite lésion sur sa cuisse droite. La lésion a pris de l’ampleur subséquemment et causait une enflure et de la rougeur dans le tissu avoisinant. Son médecin de famille a prescrit l’antibiotique flucloxacilline, mais la lésion a continué de croître, atteignant des dimensions de quatre centimètres sur deux. S’inquiétant de cette croissance, l’homme s’est présenté à l’hôpital.
À l’examen, les médecins ont détecté des ganglions enflés à l’aine. Une échographie a révélé une inflammation étendue dans la cuisse, ainsi qu’une autre lésion. Des tests de dépistage d’ITS (infections transmissibles sexuellement) courantes se sont révélés négatifs. Les médecins ont prescrit les antibiotiques amoxicilline et acide clavulanique (association vendue sous les noms d’Augmentin ou de co-amoxiclav). Comme tous les cas inclus dans le rapport britannique, l’homme a passé subséquemment un test positif à la variole simienne puis s’est rétabli de cette dernière après quelque temps. Ce cas a laissé les médecins perplexes parce que le patient n’avait pas eu de contact sexuel récent et ne semblait pas avoir été exposé au virus d’une autre manière.
Stades différents des lésions
Dans le passé, les lésions de la variole simienne apparaissaient toutes en même temps sur la peau de la personne atteinte et évoluaient ensuite au même rythme. Cependant, cette équipe de recherche a constaté que plus de 33 % des patients avaient des lésions cutanées qui « en étaient à des stades différents de leur évolution ». L’exemple suivant illustre bien la complexité de l’évolution des lésions chez certaines personnes.
Un homme de 48 ans a présenté d’abord une seule lésion scrotale. D’autres lésions sont apparues subséquemment à la base du pénis et sur le prépuce. Trois jours après l’apparition des premières lésions, des lésions suintantes sont apparues sur les bras, derrière les genoux, au-dessous d’une oreille et sur le visage. Les lésions sur les organes génitaux sont ensuite devenues des ulcérations. Le patient a été traité par flucloxacilline. Cinq jours après l’apparition de la première lésion, il a présenté plusieurs autres symptômes, dont fièvre, douleurs musculaires, douleurs lombaires, maux de tête et perte d’énergie.
Dix-sept jours après l’apparition de la première lésion, des croûtes s’étaient formées sur les lésions génitales, indice habituel de guérison, mais de nouvelles lésions étaient apparues en même temps sur ses mains. Les lésions sur les mains ont commencé à suinter.
Au 24e jour suivant l’apparition des premiers symptômes, les lésions sur les mains, les jambes et le visage du patient s’étaient atténuées et des croûtes s’étaient formées. Cependant, les lésions génitales qui s’étaient encroûtées auparavant se sont ulcérées. Les médecins soupçonnaient que ces nouvelles ulcérations avaient été causées par une infection bactérienne (bactéries non liées aux ITS). Ce soupçon a été confirmé par une analyse d’échantillons prélevés sur les lésions. Le patient a été traité par Augmentin et a guéri.
Complications touchant la bouche et la gorge
Un total de 27 hommes se sont plaints de problèmes dans la bouche ou la gorge, dont les suivants :
- enflure grave
- ampoules
- abcès
Le cas suivant souligne les complications qui peuvent se produire à cause des manifestations buccales de la variole simienne.
Un homme de 25 ans souffrait de douleurs du côté droit de la gorge. Il a ensuite présenté une fièvre et une enflure en dessous du côté droit de la mâchoire, ainsi que de la douleur et de la fatigue. L’enflure s’est aggravée et le patient avait de la difficulté à avaler et à respirer. On l’a envoyé en consultation dans une clinique se spécialisant dans les problèmes touchant les oreilles, le nez et la gorge. Les médecins de cette clinique ont remarqué une lésion cutanée sur le bras du patient. Un frottis a révélé la présence de la variole simienne, et le patient a été hospitalisé. D’autres lésions sont apparues subséquemment sur son corps. Les médecins ont effectué de nombreux tests de dépistage d’infections virales courantes, mais les résultats ont tous été négatifs.
Une ulcération qui suintait du pus jaune-verdâtre est apparue sur la gorge du patient. Les ganglions lymphatiques du côté droit du cou étaient enflés, et un frottis des amygdales s’est révélé positif à la variole simienne. Aucune lésion anale ou génitale n’est apparue.
Le patient a reçu deux antibiotiques, la benzylpénicilline et le métronidazole, pour traiter des complications bactériennes présumées. L’état de l’homme s’est graduellement amélioré pendant son séjour à l’hôpital.
Fusion des lésions
Un homme séropositif de 40 ans qui avait une charge virale supprimée et plus de 500 cellules CD4+ a consulté un médecin après avoir remarqué des lésions à la base du pénis. L’homme a attribué celles-ci à des coupures causées par le rasage.
Le patient a présenté ensuite d’autres symptômes, dont les suivants :
- fièvre
- enflure des ganglions dans le cou
- mal de tête
- perte d’énergie
- perte d’appétit
Des lésions ont commencé subséquemment à apparaître sur d’autres parties du corps (visage, mains, torse, cuisses et le long du pénis). On a remarqué de la rougeur et de l’enflure dans la région avoisinant les lésions. Un médecin a prescrit l’antibiotique flucloxacilline.
Plusieurs jours plus tard, des croûtes se sont formées sur les lésions génitales, laissant croire qu’elles guérissaient. Ces lésions ont toutefois évolué de manière inattendue : elles se sont fusionnées de sorte à créer de grandes ulcérations qui laissaient suinter un pus jaune. L’homme a cherché des soins à l’hôpital pour de la douleur intense, ainsi que pour faire nettoyer ses plaies et traiter ses ulcérations génitales. Les médecins soupçonnaient que les lésions génitales avaient été infectées par des bactéries, chose qu’une analyse de frottis des lésions a confirmée.
Des prélèvements effectués dans la gorge, l’anus et l’ouverture du pénis ont été testés pour des ITS courantes, mais les résultats ont été négatifs. Le patient a reçu des antibiotiques par voie intraveineuse (Augmentin) et sous forme de crème (Fucidin), ainsi qu’une lotion lavante pour la peau (Octenisan). Les lésions ont fini par se résorber graduellement. Le patient a reçu des antibiotiques oraux en quittant l’hôpital cinq jours après son admission.
VIH et variole simienne
Dans cette étude britannique, 70 hommes (36 %) atteints de variole simienne avaient également le VIH (depuis longtemps dans la plupart des cas). Soixante-quatre hommes (91 %) suivaient un traitement contre le VIH (TAR), et cinquante-cinq d’entre eux (79 %) avaient une charge virale supprimée. Ces hommes séropositifs avaient un compte de CD4+ moyen de 664 cellules/mm3.
Autres infections transmissibles sexuellement
Parmi les hommes qui ont passé des tests de dépistage d’ITS, les infections courantes suivantes ont été détectées :
- gonorrhée
- chlamydiose
- herpès
- syphilis
Dans l’ensemble, l’équipe de recherche a constaté que 31 % des hommes figurant dans cette étude avaient une ITS. Ce résultat souligne l’importance de soumettre les hommes faisant l’objet d’un diagnostic de variole simienne à des tests de dépistage d’ITS et de leur offrir un traitement lorsque cela est nécessaire.
Hospitalisation et variole simienne
Vingt-cinq hommes ont été hospitalisés. Dans cinq cas, l’hospitalisation a été nécessaire parce que les hommes en question ne pouvaient s’isoler chez eux.
Les principales raisons cliniques pour l’hospitalisation étaient les suivantes :
- douleur anale ou rectale intense
- accumulation de liquide dans le pénis
Les raisons moins courantes pour l’hospitalisation incluaient les suivantes :
- abcès dans les amygdales
- abcès à l’aine ou dans la région anale
- soins oculaires pour traiter la rougeur et l’enflure (notons que la variole simienne peut causer des complications oculaires, dont la cécité)
- incapacité d’uriner (causée par une enflure grave du pénis)
Douleur rectale
Dans l’exemple suivant, on voit comment la variole simienne peut évoluer différemment et causer des complications et des symptômes différents chez certains hommes touchés par l’éclosion actuelle, comparativement aux éclosions antérieures.
Un homme de 46 ans avait le VIH et une charge virale indétectable. Son compte de CD4+ se situait à 1 200 cellules/mm3.
Le patient a présenté les symptômes initiaux suivants :
- fièvre
- mal de gorge
- perte d’énergie
Le patient a souffert ensuite de douleur rectale. Dans un premier temps, les médecins ont soupçonné une infection bactérienne du rectum et lui ont prescrit un traitement par l’antibiotique doxycycline. Une éruption cutanée est apparue subséquemment et s’est propagée sur les bras et le torse du patient. Une semaine après l’apparition des symptômes initiaux, la douleur rectale s’est aggravée tellement qu’il a fallu hospitaliser le patient (et lui prescrire des analgésiques). Les tests de dépistage d’ITS courantes ont donné des résultats négatifs. Comme les symptômes persistaient, y compris des ulcérations buccales, l’homme a reçu l’antiviral técovirimat (Tpoxx) à raison de 600 mg deux fois par jour pendant deux semaines consécutives.
Douze jours après la consultation initiale, un test d’imagerie par résonance magnétique (IRM) a révélé des dommages et de l’inflammation dans le rectum. Les médecins ont soupçonné une infection bactérienne de ce dernier. Pour traiter cette infection et prévenir d’éventuelles complications additionnelles, les médecins ont prescrit des antibiotiques intraveineux, soit la ceftriaxone et le métronidazole.
Bien que les médecins n’aient pas effectué de biopsie (à cause de la douleur intense), il est possible que l’homme ait présenté d’abord une ulcération rectale causée par la variole simienne et que cette ulcération ait été infectée subséquemment par des bactéries.
Accumulation de liquide dans le pénis
Chez 31 hommes, il s’est produit une accumulation de liquide dans les tissus du pénis, ce qui a causé une enflure de certaines parties de ce dernier. Il est probable que cela s’est produit à cause d’une inflammation causée par des lésions de la variole simienne dans ou sur le pénis. Quoique très douloureuse, l’enflure de certaines parties du pénis n’a pas causé la destruction de tissu pénien, et des urologues ont conseillé l’usage de compresses froides, de massage et d’analgésiques (ibuprofène ou morphine), ainsi que des crèmes ou des gels anesthésiques au besoin.
Maîtrise de la douleur et de l’inflammation
Certains patients souffrant de douleurs légères ou modérées ont reçu des remèdes en vente libre comme l’acétaminophène et l’ibuprofène. D’autres patients ont reçu des opioïdes pour des douleurs plus intenses. Dans certains cas, les médecins ont prescrit des crèmes contenant l’anesthésique lidocaïne pour soulager les régions douloureuses de la peau. Chez un homme, la douleur rectale était si intense que les médecins lui ont permis de contrôler la fréquence de ses doses de fentanyl. Comme les opioïdes peuvent causer la constipation, certains hommes ont reçu également des laxatifs.
Les médecins ont également prescrit des suppositoires d’émollients afin de faciliter le passage des selles. Dans certains cas, des suppositoires du médicament mésalamine ont été prescrits pour ses effets anti-inflammatoires. Des corticostéroïdes ont été prescrits dans d’autres cas pour la même raison.
À propos de l’usage d’analgésiques et d’anti-inflammatoires chez des hommes atteints de variole simienne, les médecins ont affirmé que « jusqu’à présent, aucun effet indésirable associé à ces traitements n’a été observé ».
En moyenne, l’hospitalisation des patients a duré huit jours.
À retenir
Dans son rapport, cette équipe britannique décrit l’évolution douloureuse et complexe qui caractérise parfois la variole simienne pendant l’éclosion actuelle de la maladie. Nombre de problèmes étaient relativement courants, dont l’accumulation de liquide dans le pénis, l’apparition de lésions anales et de douleurs intenses dans le rectum ou la gorge. De plus, les lésions de certains hommes ont été infectées par des bactéries et des complications nécessitant des antibiotiques se sont produites.
Il importe de souligner que ce rapport traitant de patients soignés dans des hôpitaux britanniques contient des données se rapportant à des patients gravement malades. Ce rapport n’est donc pas représentatif de toutes les personnes qui contractent la variole simienne.
Selon l’équipe de recherche, il n’existait aucune association entre le nombre de lésions qu’une personne présentait et la gravité de sa maladie.
L’équipe de recherche a fait la déclaration suivante : « La prédilection des lésions pour les régions génitale, périanale, péribuccale ou amygdalienne, ainsi que les antécédents de contact sexuel récent chez 96 % de notre cohorte, donne à penser que les lésions se forment initialement au site de l’inoculation, puis sont suivies de l’apparition de symptômes systémiques et de la dissémination des lésions ». Cette affirmation porte à croire que les tissus des organes génitaux, de l’anus et de la bouche/gorge ont été les premiers points de contact du virus de la variole simienne avec le corps. Cette observation faite par l’équipe de recherche soutient l’hypothèse de la propagation sexuelle du virus.
L’équipe de recherche a fait valoir que « les lésions apparaissant à différents stades et à différents moments dans le temps pourraient être une conséquence de [personnes transférant le virus de la variole simienne d’un endroit à un autre sur leur corps après avoir touché une lésion] ». Cette hypothèse se comprend, car les lésions de la variole simienne ont tendance à démanger. D’où l’importance pour les personnes atteintes de garder les lésions couvertes et de se laver fréquemment les mains, afin de ne pas faire propager le virus sur le corps.
L’équipe de recherche a également constaté que certains patients avaient des éruptions cutanées étendues qui ne se sont pas transformées en lésions.
Des rapports anecdotiques portent à croire que, chez certaines personnes, la variole simienne peut causer non seulement de la douleur, mais aussi une fatigue intense.
À mesure que la recherche sur la variole simienne se poursuit, nous disposerons de plus de données sur les symptômes et les complications et les moyens de mieux les maîtriser. Le besoin d’études sur les symptômes de la variole simienne et la proportion de personnes éprouvant des symptômes graves est particulièrement criant.
—Sean R. Hosein
Ressources
Variole simienne : Modes de transmission, prévention et risques – Gouvernement du Canada
Ce qu’il faut savoir sur la variole simienne à Montréal – Santé Montréal
Monkeypox – B.C. Centre for Disease Control (BCCDC)
Monkeypox – U.S. Centers for Disease Control and Prevention (CDC)
RÉFÉRENCES :
- Patel A, Bilinska J, Tam JCH et al. Clinical features and novel presentations of human monkeypox in a central London centre during the 2022 outbreak: descriptive case series. BMJ. 2022 Jul 28;378:e072410.
- Sukhdeo SS, Aldhaheri K, Lam PW et al. A case of human monkeypox in Canada. CMAJ. 2022 Aug 2;194(29):E1031-E1035.
- Thornhill JP, Barkati S, Walmsley S et al. Monkeypox virus infection in humans across 16 countries – April-June 2022. New England Journal of Medicine. 2022; sous presse.