Souhaitez-vous recevoir nos publications directement dans votre boîte de réception?

CATIE
Image
 

I=I, le moment est venu

Une femme vivant avec le VIH a cherché l’amour au moyen d’une appli de rencontre destinée aux personnes séropositives. Après plusieurs tentatives infructueuses, elle a rencontré un homme charmant dans le parc, un jour ensoleillé. Ils ont sympathisé, commencé à se fréquenter, puis ont fini par former un couple, mais malheureusement, la compatibilité n’était pas au rendez-vous et ils ont rompu quelques mois plus tard. Un an après leur séparation, ils se sont revus dans un café. Surprise pour la femme : l’homme lui a révélé qu’il vivait à présent avec le VIH. Elle lui a confié qu’elle aussi vivait avec le VIH, depuis cinq ans.

Recevez Vision positive dans votre boîte de réception :

Elle s’est vite retrouvée avec des ennuis juridiques, pour ne pas avoir révélé son statut à l’homme avant leurs rapports sexuels. Malgré la situation, son avocat a mis sur table les preuves scientifiques démontrant qu’indétectable égale intransmissible (I=I). Cela lui a permis d’espérer avoir un procès équitable. De fait, grâce à la science d’I=I, la femme a été acquittée.

Malheureusement, même lorsqu’une personne séropositive a une charge virale indétectable et ne peut donc pas transmettre le virus, il demeure possible dans certaines régions du monde qu’elle subisse des conséquences juridiques pour n’avoir pas dévoilé son statut sérologique avant un rapport sexuel. Cet exemple montre l’importance d’améliorer la sensibilisation au principe de I=I chez les personnes vivant avec le VIH et leurs prestataires de soins de santé.

•••

Le moment est venu de soutenir des initiatives communautaires de sensibilisation et de prévention. En nous unissant en tant que communauté, nous pouvons favoriser la compréhension. Nous pouvons créer un sentiment d’appartenance et un climat de con­fiance. Nous devons nous efforcer de dénoncer et d’éliminer la stigmatisation associée au VIH. Grâce à un dialogue ouvert et franc ainsi qu’à la rectification des idées fausses, nous pouvons bâtir une société plus compatissante. Il est essentiel d’élever nos voix et de veiller à ce que tout le monde connaisse le concept transformateur de I=I. Nous devons faire connaître les avancées thérapeutiques qui préviennent la transmission. L’autonomisation et l’acceptation de soi sont essentielles pour les personnes vivant avec le VIH. I=I a insufflé l’espoir et l’inspiration dans d’innombrables vies. Nous avons tou·te·s un rôle à jouer dans la diffusion du message de I=I dans le monde.

Il est troublant de voir à quel point les femmes noires sont constamment exclues des discussions sur le VIH, la prévention et I=I. C’est particulièrement déconcertant si l’on considère le nombre de femmes noires et de femmes de couleur touchées par le VIH. Les statistiques montrent un impact disproportionné sur les femmes noires, avec un taux de nouveaux cas de VIH plus élevé que dans le reste de la population. Les femmes noires trans rencontrent également d’importants obstacles liés au VIH. Sans oublier la communauté autochtone, souvent laissée pour compte dans ces conversations. La violence entre partenaires et l’absence de représentation contribuent grandement au manque de sensibilisation concernant les impacts du VIH dans ces groupes.

L’autostigmatisation associée au VIH peut être accablante. Elle peut accaparer les pensées et les émotions d’une personne. C’est une expérience solitaire et démoralisante qui suscite souvent la peur et un sentiment d’isolement. Cependant, il faut savoir que personne ne devrait jamais se sentir seul avec le VIH. Il existe, pour les personnes vivant avec le VIH, une communauté aidante qui est prête à leur offrir son accueil et son soutien. Cette communauté est capable d’ajouter de la valeur à la vie. Elle peut contribuer à se former une identité, dans un paysage où les personnes séropositives se sont peut-être déjà senties isolées. C’est une communauté qui peut favoriser la confiance en soi et l’estime personnelle.

Le moment est venu de partager le message de I=I et de transformer collectivement le discours sur le VIH. Les personnes outillées d’une compréhension complète du principe de I=I ne porteront plus un fardeau de honte.

Où sont passé·e·s ceux et celles qui font confiance aux preuves scientifiques à la base de I=I?

Toute personne qui vit avec le VIH mérite de connaître ce message porteur de pouvoir, qui l’aidera à retrouver la tranquillité d’esprit. Tout le monde doit apprendre que les personnes vivant avec le VIH dont la charge virale est indétectable ne peuvent pas transmettre le virus. N’ostracisons pas, par ailleurs, les personnes confrontées à un résultat inattendu.

I=I est un moyen de prévention formidablement puissant pour les personnes vivant avec le VIH. Une prévention que personne n’aurait crue possible il y a quelques années. Elle élimine le risque de transmission à nos partenaires sexuel·le·s, ce qui change la donne dans la lutte contre le VIH. Il est essentiel que les prestataires de soins de santé s’activent à faire connaître le message de I=I à leurs client·e·s. Lorsqu’une personne reçoit son diagnostic de VIH et apprend l’existence de I=I, cela peut tout changer pour elle. C’est pourquoi il est crucial que tout le monde parle ouvertement de I=I et en fasse la promotion, car cela donne aux individus le pouvoir de s’affirmer et de faire bouger les choses.

Le moment est venu – toutes les personnes vivant avec le VIH devraient avoir accès à des informations sur leur santé sociale, sexuelle et reproductive. Nous ne devons laisser personne les en priver. Nous devons devenir des catalyseurs du changement et défendre ce qui est juste pour les personnes vivant avec le VIH. Le moment est venu pour que chacun·e d’entre nous utilise sa voix et fasse connaître I=I. Le fait de connaître I=I procure aux personnes séropositives un gain en estime de soi et un élan positif. Mais l’action et le changement ne profitent pas qu’aux personnes séropo­sitives. Cela a un profond impact sur la vie des autres personnes également. Telle est l’essence de I=I : transformer des vies et faire pencher la balance.

Où sont passé·e·s ceux et celles qui étaient si déterminé·e·s à prendre part aux conversations et à mieux connaître I=I?

Nous devons tou·te·s nous unir et travailler concrètement à réduire la stigmatisation et la discrimination à l’égard des personnes vivant avec le VIH. Cela inclut de prioriser leur santé mentale et leur bien-être en général. Cela signifie également qu’il faut veiller à ce que le message de I=I se rende aux personnes qui en ont le plus besoin. Comment peut-on affirmer avoir à cœur les personnes vivant avec le VIH, mais refuser de leur faire connaître I=I?

Depuis plus de 40 ans, le VIH suscite une peur généralisée. Cela vient en grande partie d’un manque de compréhension de ses modes de transmission. Un jour, il a été révélé que le virus se transmettait principalement par voie sexuelle. Cela a conduit à l’idée fausse et malheureuse selon laquelle seuls les hommes gais et bisexuels étaient exposés au risque de le contracter. Puis la vérité concernant cette idée est ensuite sortie. En outre, on a cru généralement que les personnes vivant avec le VIH ne pourraient jamais avoir de relations sexuelles sans condom avec leurs partenaires ou concevoir des enfants. Toutefois, grâce aux progrès de la recherche scientifique et aux avancées concernant les médicaments, la situation a considérablement changé.

Pourquoi tant de personnes ont-elles du mal à accepter que le VIH puisse ne plus être transmis par des rapports sexuels? De nos jours, les preuves scientifiques appuient le concept de I=I. Des recherches rigoureuses ont établi la preuve. Toutefois, lorsque des informations scientifiques vont à l’encontre de croyances ou de valeurs profondément enracinées, des gens peuvent se sentir mal à l’aise. Pour tenter de se rassurer, certaines personnes rejettent tout simplement des faits scientifiques éprouvés.

En 2008, la Commission fédérale suisse sur le VIH/sida a publié une déclaration affirmant que les personnes vivant avec le VIH ne peuvent pas transmettre le VIH à leurs partenaires lorsque leur charge virale est inhibée. En 2016, l’étude Partner 1 (réalisée de 2010 à 2014) a publié ses résultats définitifs. En 2019, l’étude Partner 2 (réalisée de 2010 à 2018) a publié ses résultats dans la revue The Lancet. L’étude Opposites Attract s’est déroulée de 2012 à 2015 et l’étude HPTN 052 a dévoilé ses résultats finaux en 2016. Fait remarquable, toutes ces études ont conclu à l’absence de transmission du VIH dans les couples sérodiscordants où l’un·e des partenaires vivait avec le VIH et suivait un traitement efficace contre le virus tandis que l’autre était séronégatif·ve.

Alison Rodger, une chercheuse de l’étude Partner 2, souligne qu’il n’y a plus d’excuse. Le risque de transmission sexuelle est absolument nul. C’est un fait confirmé scientifiquement. Il est facile d’accéder à ces études et de s’informer à leur sujet. Si les gens acceptaient cette vérité, nous pourrions faire des progrès considérables dans le soutien aux personnes vivant avec le VIH. La conscientisation à l’importance de I=I n’est pas encore totale à l’échelle mondiale. Les prestataires de soins de santé doivent se montrer plus diligent·e·s et diffuser ce message afin que tou·te·s leurs client·e·s le connaissent.

Le gouvernement canadien insiste sur l’importance de l’inclusion lorsqu’on discute du principe de I=I. En partageant cette information avec tout le monde, on contribuera à créer des espaces plus sûrs pour les personnes vivant avec le VIH. Cela normalisera les conversations sur la santé sexuelle et favorisera le bien-être en général et une approche positive de la sexualité. Il est essentiel d’employer des formulations claires et directes telles que « ne peut pas transmettre le VIH », « aucun risque de transmission » et « risque nul ». Ces formulations communiquent le message de manière efficace. Les attitudes négatives et les déclarations prudentes sous-entendant quelque risque que ce soit de transmission par une personne sous traitement efficace ne feraient qu’affaiblir le message et son impact. Plus nous parlerons ouvertement de I=I, et plus il aura une influence positive.

Environ 62 790 personnes vivaient avec le VIH au Canada à la fin de l’année 2020. Le Canada a atteint avec succès les première et troisième cibles 90-90-90 pour cette année-là, ce qui illustre un progrès remarquable. On a estimé que 90 % des personnes vivant avec le VIH avaient reçu leur diagnostic et que 87 % d’entre elles étaient sous traitement. On a estimé également que 95 % des personnes traitées avaient atteint l’objectif de suppression virale. Par conséquent, environ 16 690 personnes au Canada n’avaient pas atteint la suppression virale.

Il est crucial de savoir quelles régions du monde offrent le dépistage du VIH en milieu communautaire de façon soutenue. Le dépistage périodique du VIH est vital pour les personnes qui présentent un risque plus élevé de contracter le VIH ou d’y être exposées. Il est recommandé d’y voir au moins tous les six mois ou tous les ans. Soulignons que les personnes qui ne sont pas au courant de leur séropositivité au VIH sont plus susceptibles de complications médicales sérieuses et de décès prématuré. C’est pourquoi un diagnostic précoce du VIH est de la plus haute importance. Il est nécessaire de responsabiliser tous les gouvernements qui échouent à leurs obligations. Plusieurs échouent à collaborer avec les organismes communautaires qui effectuent du travail de prévention sur le terrain. L’autotest doit être encouragé. Le dépistage doit également être encouragé dans les universités, les établissements d’enseignement supérieur et autres établissements d’enseignement, ainsi que dans les communautés les plus touchées. Toutefois, des journées de dépistage du VIH ne suffisent pas à elles seules à garantir des conversations sur le dépistage et I=I.

Le temps est venu de nous laisser, nous les personnes vivant avec le VIH, mener les conversations et déterminer ce qui est nécessaire pour nous. Nous apprécions et valorisons nos allié·e·s, mais il faut reconnaître que ce sont les personnes vivant avec le VIH qui travaillent à réduire la transmission du VIH et à moderniser les lois qui criminalisent le VIH. Nos expériences personnelles peuvent éduquer et influencer grandement les personnes ayant récemment reçu leur diagnostic. Nous pouvons souligner l’importance d’une observance thérapeutique soutenue. Les organismes de réponse au VIH et les services de santé doivent embaucher des personnes vivant avec le VIH à titre de mentor·e·s. Dans ces rôles, nous pouvons offrir notre soutien et nos conseils à ceux et celles qui viennent d’être diagnostiqué·e·s. Certains organismes non gouvernementaux reçoivent des fonds des gouvernements fédéral et provinciaux, et s’efforcent d’avoir un rayonnement positif dans tout le pays. Le financement n’est toutefois pas suffisant pour promouvoir le message de I=I et aider les personnes vivant avec le VIH qui rencontrent des obstacles particuliers.

En 2018, c’est précisément ce qu’a fait le Canada en appuyant très tôt la campagne I=I. Il a été l’un des premiers pays à le faire. Les ministres de la Santé, de la Santé mentale et des Dépendances ainsi que la ministre associée à la Santé ont affirmé publiquement que le Canada appuyait la déclaration mondiale sur I=I. Cette position favorable a depuis été intégrée dans des politiques et programmes canadiens. Il s’agit d’un élément fondamental de la lutte contre les inégalités systémiques et de la réduction des obstacles à l’accès aux soins de santé. En donnant la priorité à I=I, elles ont voulu apporter le soutien nécessaire aux personnes touchées par le VIH. I=I permet de mener une vie saine. D’autres pays peuvent suivre l’exemple et appuyer le principe de I=I. Car I=I concerne la vie humaine et cela devrait avoir un sens pour les gens.

Parlant de la vie humaine, pourquoi les personnes séropo­sitives sont-elles encore criminalisées pour le VIH? Il est temps d’intensifier les efforts pour mettre à jour les lois. La criminalisation du VIH est injuste et ces lois n’auraient jamais dû voir le jour. À l’heure actuelle, treize États des États-Unis ont réformé ou abandonné leurs lois sur la criminalisation du VIH. Cependant, treize autres États obligent encore les personnes séropositives à divulguer leur statut à leurs partenaires sexuel·le·s. Quatorze prévoient des peines maximales de plus de 10 ans pour les personnes qui ne le divulguent pas.

Selon le Center for HIV Law and Policy, en 2023, plus de 30 États seraient encore dotés de lois pénales sur le VIH ou les maladies sexuellement transmissibles. D’autres ont progressé en les modernisant ou les en abrogeant. Les changements juridiques apportés incluent des critères comme l’intention de transmettre [peu importe ce que ça signifie], la présence d’un comportement susceptible d’entraîner la transmission, ou une transmission avérée. Des réformes effectuées dans certains États protègent également contre les poursuites en cas de recours à des mesures préventives, par exemple la suppression virale, l’utilisation de condoms ou l’utilisation de la PrEP par le/la partenaire.

Fait choquant, cinq États des États-Unis exigent que les personnes condamnées en vertu d’une loi spécifique au VIH s’inscrivent au registre des délinquant·e·s sexuel·le·s. Une étude réali­sée par le Williams Institute de l’UCLA montre que plus de 63 % des personnes inscrites au registre des délinquant·e·s sexuel·le·s de l’État de la Louisiane l’ont été uniquement en raison de leur condamnation liée au VIH. C’est consternant. Le Canada est aussi l’un des pays qui inscrivent les personnes vivant avec le VIH à un registre des délinquant·e·s sexuel·le·s si elles ont été déclarées coupables d’agression sexuelle pour n’avoir pas divulgué leur séropositivité. Au Canada, plus de 220 personnes ont été accusées au criminel pour des allégations de non-divulgation du VIH, même en l’absence de transmission de l’infection. Répétons-le : le VIH ne devrait pas être un crime.

N’oublions pas que le Canada a approuvé la déclaration mondiale sur I=I, ce qui est excellent! En 2018, le gouvernement fédéral a modifié ses lignes directrices en matière de poursuites judi­ciaires afin de tenir compte de la compréhension scientifique de I=I. Selon les directives révisées, les procureur·e·s du service fédéral ne devraient pas intenter de poursuite contre une personne vivant avec le VIH dont la charge virale est inhibée (moins de 200 copies/ml). La criminalisation de la non-divulgation du VIH n’empêche pas la transmission du virus. En revanche, elle décourage des personnes de se faire dépister, ce qui n’a rien de bon. De plus, ces lois alimentent la stigmatisation dans nos communautés. 

On ne doit pas considérer les personnes vivant avec le VIH comme des criminel·le·s. Il est essentiel de poursuivre les efforts pour moderniser les lois sur la criminalisation dans le monde entier.

Afin de militer véritablement pour le changement, nous devons exprimer nos souhaits et en même temps poser des gestes. Malgré les difficultés que pose ce virus, les personnes vivant avec le VIH ont montré qu’elles savent encore exprimer leurs besoins. L’expression de nos désirs ne suffira pas à faire bouger les choses. Envisagez plutôt de former un groupe, une coalition, et de vous concentrer collectivement sur les enjeux particuliers que vous souhaitez résoudre. Prenez le temps de définir les tâches nécessaires à la réalisation des objectifs et cochez-les au fur et à mesure qu’elles sont accomplies. Comment allons-nous mobiliser les responsables politiques, les ministères de la Santé et la communauté VIH, puis éduquer le public?

Le moment est venu : rassemblons-nous en groupes de personnes vivant avec le VIH afin d’avoir un impact notable – et créons un changement positif pour tous et toutes.