Les combinaisons de médicaments contre le VIH (couramment appelées multithérapies ou TAR) sont très efficaces et sûres dans la majorité des cas. Il existe un groupe, ou classe, de médicaments anti-VIH appelés analogues nucléosidiques (INTI). Ce sont les premiers médicaments à avoir été homologués pour le traitement du VIH, et ils constituent aujourd'hui le pilier de la multithérapie. Dans les pays à revenu élevé comme le Canada, l'Australie et les nations de l'Europe occidentale, on utilise couramment les combinaisons suivantes d'analogues nucléosidiques :
- Truvada – combinaison à dosages fixes de deux médicaments anti-VIH : ténofovir + FTC
- Kivexa – combinaison à dosages fixes de deux médicaments anti-VIH : abavavir + 3TC
On doit cependant noter que ces analogues nucléosidiques n’ont pas toujours été couramment utilisés. Dans le passé, certaines personnes séropositives étaient exposées à d'autres analogues nucléosidiques, dont les suivants :
- d4T (stavudine, Zerit)
- AZT (zidovudine, et aussi dans le Combivir et le Trizivir)
Il y a plus d'une décennie, l'utilisation du d4T (et dans une moindre mesure celle de l'AZT) a été associée à la perte de la couche de graisse située directement sous la peau (graisse sous-cutanée). La disparition de la graisse sous-cutanée du visage change l'apparence de la personne touchée et l’afflige souvent profondément. De plus, dans bien des cas de ce genre, on observe aussi une accumulation de graisse dans l'abdomen et parfois à l'arrière du cou.
La chirurgie reconstructive pour traiter la perte de graisse sous-cutanée dans le visage consiste en l'injection de produits de comblement; l'acide L-polylactique (ALP, New-Fill, Sculptra) figure parmi les produits couramment utilisés. Après quelques années, l'ALP est absorbé par l'organisme, et de nouveaux implants deviennent nécessaires.
Le gel polyalkylimide (PAIG, Bio-Alcamid) est un autre produit qui est utilisé depuis une décennie. Au début, il semblait que le PAIG était préférable à l'ALP, car il s’agissait d’un implant permanent qui ne se dégradait pas. Toutefois, des rapports commençaient à émerger de l'Europe occidentale qui mentionnaient la présence d'inflammation et d'infections chez des personnes séronégatives et séropositives qui avaient reçu des implants de Bio-Alcamid. Par conséquent, plusieurs sociétés de chirurgiens plasticiens déconseillent maintenant l'usage de Bio-Alcamid et d'autres implants permanents. Pour en savoir plus sur cette question, consultez cet article de Nouvelles-CATIE.
Recherche canadienne
La Dre Mona Loufty, spécialiste canadienne des maladies infectieuses, a mené des études sur différents produits de comblement du visage auprès de personnes vivant avec le VIH. Même si ses résultats à long terme indiquent que la plupart des personnes sont satisfaites de leurs implants faciaux, les taux de satisfaction à l'égard du Bio-Alcamid semblent être quelque peu plus faibles que ceux se rapportant à l'ALP.
La Dre Loufty et ses collègues ont confirmé que le Bio-Alcamid causait des complications à long terme chez certaines personnes : après une période moyenne de trois ans, environ 25 % des participants ayant reçu des implants étaient touchés. Ce chiffre incluait des personnes atteintes d'infections confirmées ou soupçonnées du visage. Les conséquences de ces infections comprenaient la présence d'inflammation, de bosses ou de nodules. Dans certains cas, les infections causaient des problèmes et nécessitaient une antibiothérapie prolongée et la chirurgie. L'équipe de recherche a constaté que tous les participants présentant des infections confirmées avaient subi des interventions dentaires. Il est possible que ces interventions, dont des nettoyages dentaires de routine, aient endommagé ou contaminé les implants de Bio-Alcamid par des bactéries qui ont causé des infections.
Conseils de médecins à l'intention des dentistes
La Dre Loufty et ses collègues à la Maple Leaf Medical Clinic de Toronto encouragent les dentistes qui soignent des patients séropositifs ayant des implants de Bio-Alcamid à administrer à ces derniers un antibiotique à large spectre une heure avant les interventions dentaires, y compris les nettoyages de routine. Les médecins recommandent les antibiotiques suivants :
- céfalexine
- amoxicilline
- amoxicilline + acide clavulanique
Ces médicaments s'apparentent tous à la pénicilline sur le plan chimique. En cas d'allergie à la pénicilline, la Dre Loufty et ses collègues recommandent l'antibiotique clindamycine.
En outre, la Dre Loufty et ses collègues préviennent les dentistes que les patients ayant des implants de Bio-Alcamid ne devraient pas recevoir d'injections dans « les gencives supérieures allant vers les joues, car cela risque de perforer [l'implant de Bio-Alcamid] et de causer une infection. »
Les médecins déconseillent aussi l'exposition des joues aux rayons X, car ces derniers peuvent endommager le Bio-Alcamid; mentionnons qu'on a souvent recours aux rayons X après les accidents. Les rayons X de faible énergie, tels que ceux utilisés dans les cliniques dentaires pour les examens de routine, n'ont pas d'effet sur le Bio-Alcamid.
Conseils pour les personnes séropositives
Les résultats de l'étude de la Dre Loufty soulignent qu'il est nécessaire que les personnes séropositives ayant des implants faciaux préviennent toujours leurs professionnels de la santé buccale – dentistes, hygiénistes, chirurgiens – de la présence de ces implants avant de subir des soins dentaires de tout ordre.
—Sean R. Hosein
RÉFÉRENCES :
- Loutfy MR, Brunetta J, Kovacs C, et al. Four-Year Follow-Up of Polyalkylimide Gel Use for the Treatment of HIV-Associated Lipoatrophy. HIV Clinical Trials. 2011 Nov-Dec;12(6):323-32.
- Loufty MR. Antibiotic prophylaxis for patients who have had Bio-Alcamid injections into their cheeks. Dear Dentist letter. 21 December 2011.