Le service ambulant de prise en charge du sevrage (SAPCS) a été mis en place par la Klinic Community Health à Winnipeg en 2019. Le SAPCS offre des services communautaires ambulants visant à prendre en charge le sevrage de diverses substances telles que l’alcool, les stimulants et les opioïdes. Les client·e·s peuvent accéder aux services de prise en charge du sevrage pendant une période maximale de 30 jours. Le programme repose sur le principe selon lequel il faut rencontrer les gens là où ils sont, et chaque personne prise en charge définit elle-même ses objectifs. Après quelque deux années de prestation, 343 personnes ont été orientées vers le SAPCS, 225 personnes (65 %) ont suivi le programme jusqu’au bout (sur la base des objectifs qu’elles ont elles-mêmes définis au début du programme), et 92 de ces personnes sont passées à un programme de traitement1.
Description du programme
Le SAPCS a offert des services ambulants de en milieu communautaire d’une durée maximale de 30 jours. Les client·e·s choisissaient le lieu où ils avaient recours aux services au sein de la collectivité; ils optaient le plus souvent pour leur propre domicile. Si la personne n’avait pas de logement fixe, les responsables du programme pouvaient la faire bénéficier d’un hébergement provisoire. Lorsque les services étaient offerts dans un logement provisoire, on aidait les client·e·s à trouver un logement à long terme s’ils ou elles le désiraient.
Les personnes pouvaient être orientées vers le programme de diverses manières (p. ex., par elles-mêmes ou par d’autres organismes communautaires). Les individus pouvaient participer au programme si leur état de santé et leur état mental étaient stables (p. ex., s’ils n’étaient pas en proie à des idées suicidaires ou en phase de psychose) et s’ils n’avaient pas d’antécédents de sevrage difficile (p. ex., des crises de sevrage).
Les interventions relevant du programme étaient fondées sur les besoins et les objectifs individuels de chaque client·e. L’éventail des interventions allait de la stabilisation à court terme au traitement à plus long terme. Le programme était en activité 365 jours par an et les services étaient offerts jusque dans la soirée. La dotation en personnel du SAPCS répondait au schéma suivant : 60 heures de soins infirmiers par semaine, 92 heures de services de santé et de soutien par semaine, 64 heures de soutien par les pairs par semaine, quatre heures de soins médicaux par semaine, et huit heures de travail de coordination par semaine.
Les interventions comprenaient un traitement pharmacologique (p. ex. instauration d’un traitement par un agoniste opioïde) et un soutien psychosocial (p. ex. en santé mentale). Tous les plans de soins intégraient les principes de réduction des méfaits; l’accès aux services de réduction des méfaits (p. ex. formation à l’utilisation de la naloxone, fourniture d’articles destinés à l’utilisation sécuritaire de drogues et aux rapports sexuels à moindres risques) et à d’autres services de santé (p. ex. tests de dépistage des infections transmissibles sexuellement et par le sang, tests de grossesse, vaccins contre la COVID-19) était assuré selon les besoins.
Les employé·e·s du programme ont communiqué quotidiennement avec les bénéficiaires pendant toute la durée de leur participation, soit en personne, soit par message texte ou par téléphone, selon les préférences de chacun. Une ligne d’écoute téléphonique accessible 24 heures sur 24 permettait de bénéficier de services en dehors des heures de travail, si nécessaire. Les client·e·s pouvaient également communiquer directement avec le personnel pendant les heures de travail par téléphone ou par message texte en vue de modifier un plan de soins ou de demander un soutien supplémentaire. Un service de transport était disponible pour les client·e·s qui en avaient besoin.
Le SAPCS a aidé les client·e·s à obtenir les services nécessaires et souhaités (p. ex. soutien culturel autochtone, soutien psychologique lié aux traumatismes, soins primaires), soit dans le cadre du programme lui-même, soit en les mettant en contact avec d’autres organismes communautaires. Les client·e·s étaient aiguillé·e·s vers les soins primaires suivant une approche de « transfert chaleureux », qui consistait en une communication directe entre le personnel du SAPCS et les organismes partenaires, avec la collaboration du ou de la client·e. Le programme a également permis d’offrir un soutien à plus long terme (c.-à-d. plus de 30 jours) assuré par des pairs ou des conseiller·ère·s. Pour mieux répondre aux besoins des client·e·s et surmonter les obstacles, des services virtuels ont été proposés pendant la pandémie de COVID-19.
Résultats
Entre le 26 août 2019 et le 19 septembre 2021, 343 personnes ont été orientées vers le SAPCS. Les client·e·s ont été orienté·e·s par des prestataires de soins de santé primaires exerçant dans la collectivité (41 %), des cliniques externes spécialisées dans le traitement des dépendances (38 %), des services hospitaliers (14 %), des services psychiatriques (5 %) et d’autres sources (2 %).
Cinquante-neuf pour cent des participant·e·s s’identifiaient comme des femmes (202) et 41 % (141) comme des hommes. La plupart des participant·e·s étaient âgé·e·s entre 25 et 44 ans. Trente-deux personnes ont indiqué qu’elles étaient sans abri ou en situation de logement précaire et se sont vu proposer un hébergement à court terme. Ces participant·e·s ont été mis·e·s en relation avec des travailleur·se·s de soutien pour les aider à trouver un logement de plus longue durée s’ils ou elles le souhaitaient. La principale substance consommée par les participant·e·s au programme était l’alcool, suivie de la méthamphétamine puis des opiacés.
Deux cent vingt-cinq personnes (65 %) ont suivi le programme jusqu’au bout (suivant les objectifs qu’elles s’étaient fixés elles-mêmes au début du programme) et 92 personnes sont passées à un programme de traitement après la fin de la prestation du SAPCS. Aucune surdose, aucune hospitalisation, ni aucun décès n’ont été signalés pendant la durée du programme.
Qu’est-ce que cela signifie pour les prestataires de services?
Ce programme est l’exemple d’une approche souple en matière de services de désintoxication, qui permet de rencontrer les gens là où ils se trouvent. La souplesse en la matière a pris une importance particulière dans le contexte de la pandémie de COVID-19, car l’utilisation de substances a augmenté pendant cette période et il a fallu offrir des services par des voies virtuelles. Le programme favorisait une approche consistant à faciliter l’accès des client·e·s à d’autres services communautaires selon les besoins, afin que les services de désintoxication ne fonctionnent pas en vase clos.
L’une des principales caractéristiques de ce programme était la possibilité d’offrir des services de désintoxication au domicile des bénéficiaires. Cette formule permet d’offrir à ces derniers plus de confidentialité et de souplesse. La majorité des participant·e·s au programme du SAPCS étaient des femmes, une population dont les études de recherche ont permis d’établir qu’elle recourait moins souvent aux services de désintoxication que les hommes2. L’existence de services à domicile explique peut-être qu’un plus grand nombre de femmes ait recouru au programme, car cette formule leur permet de surmonter le malaise que peuvent occasionner les services mixtes en établissement, par exemple. Il est possible que les intéressé·e·s préfèrent les services à domicile de manière générale parce qu’ils contribuent à alléger certains des obstacles associés aux services de prise en charge du sevrage (p. ex. les responsabilités des aidants, la stigmatisation, le besoin de sécurité et de confort). Pour surmonter certains des obstacles liés à la prestation de services de désintoxication, il est important d’envisager un plus grand nombre d’options de services communautaires, notamment en proposant ceux-ci là où les gens se trouvent.
Ressources connexes
Crise des surdoses et des intoxications au Canada : aperçu de la situation actuelle
Références
- Lodge A, Partyka C, Surbey K. A novel home- and community-based mobile outreach detoxification service for individuals identifying problematic substance use: implementation and program evaluation. Canadian Journal of Public Health. 2022;113:562-68.
- Greenfield SF, Brooks AJ, Gordon SM et al. Substance abuse treatment entry, retention, and outcome in women: a review of the literature. Drug and Alcohol Dependence. 2007;86(1):1-21.