CATIE

Déclaration de CATIE sur l’approvisionnement plus sécuritaire

Depuis près de dix ans, le Canada connaît une crise de santé publique caractérisée par des décès dus à la toxicité des drogues (surdoses), lesquels sont causés par les drogues du marché non réglementé. Les drogues qui y sont offertes sont très puissantes, imprévisibles et de plus en plus contaminées, car elles contiennent souvent des substances nouvelles et inconnues. Les personnes qui utilisent ces drogues sont donc particulièrement exposées au risque de décès et à de nombreuses autres conséquences en matière de santé. En réponse à cette crise, l’approche nommée « approvisionnement plus sécuritaire » a vu le jour, qui vise à fournir des produits réglementés et de qualité pharmaceutique aux personnes particulièrement exposées à la toxicité des drogues et à d’autres préjudices. Le contenu et la puissance des médicaments prescrits dans le cadre d’un approvisionnement plus sécuritaire (APS) sont réglementés, connus et constants, ce qui peut réduire le risque de surdose. L’approvisionnement plus sécuritaire est une approche récente qui repose sur les principes de la réduction des méfaits et qui vise à réduire les risques de décès lié à la toxicité des drogues, à favoriser la santé des personnes utilisatrices de drogues et à compléter la gamme de services qui entourent l’utilisation de substances.

Cette déclaration de CATIE entend soutenir les prestataires de services et les décisionnaires en formulant des recommandations fondées sur des données probantes sur la fourniture d’un approvisionnement plus sécuritaire au Canada.

Message à retenir

Les drogues du marché non réglementé sont à l’origine d’une très grave crise de santé publique au Canada. Ces substances, qui sont puissantes, imprévisibles et contaminées, nuisent considérablement à la vie et à la santé des personnes qui les utilisent. Pour faire face à cette crise, il faut des changements politiques importants et un éventail complet de programmes et de services pour les personnes utilisatrices de drogues, dont une gamme d’options de réduction des méfaits et de traitement. L’approvisionnement plus sécuritaire est une nouvelle approche de réduction des méfaits qui consiste à fournir, aux personnes qui courent un grand risque de décès lié à la toxicité des drogues et de subir d’autres préjudices connexes, des produits de qualité pharmaceutique pour remplacer les drogues non réglementées. Cette approche peut compléter la gamme de services liés à l’utilisation de substances. 

Actuellement, l’approvisionnement plus sécuritaire est dispensé selon un modèle médical, dans le cadre duquel des prestataires de soins de santé prescrivent des médicaments à une clientèle admissible pour remplacer les drogues du marché non réglementé. Ces médicaments ne sont proposés qu’aux personnes vivant avec un trouble de l’usage de substances qui utilisent actuellement des drogues non réglementées. La capacité des prescripteur·trice·s et des programmes étant limitée, d’autres critères d’admissibilité peuvent également être appliqués, comme le fait de s’injecter couramment des opioïdes tels que le fentanyl; le fait d’avoir déjà tenté un traitement par agonistes opioïdes (TAO); et l’existence de problèmes de santé tels que l’hépatite C, le VIH ou des infections bactériennes graves. 

Les données relatives à l’approvisionnement plus sécuritaire évoluent rapidement. À ce jour, les études portent à croire que cette approche est associée à différents effets positifs pour les personnes utilisatrices de drogues. Il a notamment été montré qu’un approvisionnement plus sécuritaire peut contribuer à réduire le risque de décès lié à la toxicité des drogues pour les personnes qui utilisent des drogues. Les résultats ont également montré que l’approche favorisait des améliorations sur le plan social et de la santé, comme une réduction du recours aux drogues du marché non réglementé, une meilleure santé et un meilleur bien-être globaux, une diminution des visites à l’hôpital en lien avec les opioïdes, un accès accru aux soins primaires et au traitement d’infections comme l’hépatite C et le VIH, plus de stabilité et de contrôle quant à l’utilisation de drogues, une diminution des pratiques d’injection non sécuritaires et une moindre implication dans des activités criminelles. Il faut toutefois poursuivre les études et l’évaluation des programmes afin d’améliorer notre compréhension des effets d’un approvisionnement plus sécuritaire sur le risque de décès lié à la toxicité des drogues et sur les résultats sanitaires et sociaux, à la fois pour les participant·e·s aux programmes et au niveau de la population.

La mise en œuvre des programmes doit également faire l’objet d’études plus approfondies. Les données actuelles indiquent qu’un certain nombre de facteurs influent sur la participation aux programmes d’APS, notamment les médicaments fournis et leur capacité à répondre aux besoins des participant·e·s, le modèle sur lequel le programme repose (p. ex. l’intégration avec d’autres services, une offre de services sociaux et de santé complets), l’implication des personnes utilisatrices de drogues et le soutien politique et organisationnel. De nouvelles études devraient définir les facteurs individuels et les facteurs des programmes associés aux plus grandes améliorations des résultats sanitaires et sociaux et explorer comment les différents modèles et éléments de programmes peuvent répondre au mieux aux divers besoins des personnes utilisatrices de drogues.

Recommandations

Les recommandations suivantes ont été élaborées à partir d’un examen des données (p. ex. articles évalués par comité de lecture, évaluations de programmes) sur l’approvisionnement plus sécuritaire publiées jusqu’en mars 2024. L’examen des données probantes repose sur une recherche systématique de publications évaluées par comité de lecture relatives à l’approvisionnement plus sécuritaire achevée en juillet 2023. Des recherches hebdomadaires ont ensuite été effectuées entre juillet 2023 et mars 2024 pour trouver de nouvelles publications évaluées par comité de lecture et de la littérature grise pertinente (p. ex. examen des données probantes, évaluations de programmes), afin de s’assurer de prendre en compte les données les plus récentes. 

Dans chaque province et territoire, toute une série d’intervenant·e·s sont impliqué·e·s dans les politiques, les programmes et les pratiques qui façonnent l’approvisionnement plus sécuritaire : décisionnaires fédéraux en matière de santé et de politiques sur les drogues; décisionnaires provinciaux en matière de santé publique et de soins de santé; prestataires de soins, ordres professionnels et associations professionnelles; et directeur·trice·s d’organismes, gestionnaires de programmes, prestataires de services de première ligne et personnes qui utilisent des drogues.

Les recommandations qui suivent s’adressent aux décisionnaires de tous les paliers et aux prestataires de services dans toutes les provinces et tous les territoires pour les aider à assurer un approvisionnement plus sécuritaire dans leur région.

1. Appuyer le développement et l’intégration de l’approvisionnement plus sécuritaire en complément de la gamme existante de services destinés aux personnes qui utilisent des drogues 

Un éventail complet de programmes et de services pour réduire les méfaits et faire face à la crise des drogues contaminées doit être mis en place d’urgence. Chaque option convient en effet à certaines personnes, en fonction du contexte et du moment. La gamme de programmes et services devrait inclure l’accès à un vaste choix d’approches de réduction des méfaits fondées sur des données probantes (p. ex. distribution de matériel de réduction des méfaits, distribution de naloxone, services de consommation supervisée) et d’approches de traitement volontaire également fondées sur des données probantes (p. ex. traitement par agonistes opioïdes, traitement par agonistes opioïdes injectables, traitement psychosocial et traitement en résidence et ambulatoire). 

Il faut également se pencher sur la disponibilité, l’accessibilité et la portée de ces programmes et services. En effet, l’accès aux services de réduction des méfaits et de traitement reste limité pour beaucoup de personnes utilisatrices de drogues au Canada. Les approches existantes doivent être démultipliées d’urgence si nous voulons avoir un effet sur la crise des drogues toxiques, tout en continuant à explorer de nouvelles approches pour combler les lacunes et les limites des services existants.

L’approvisionnement plus sécuritaire est un apport prometteur à la gamme de services en lien avec la dépendance : les données disponibles semblent indiquer qu’il peut compléter les approches existantes de réduction des méfaits et de traitement. Par exemple, il peut réduire le risque de décès en lien avec la toxicité des drogues pendant les heures de fermeture des services de consommation supervisée et pendant qu’une personne attend d’avoir accès à une prise en charge du sevrage ou un traitement en résidence. Il peut aussi aider à entamer un traitement par agonistes opioïdes et à le maintenir. Un approvisionnement plus sécuritaire a été fourni dans différents contextes (p. ex. centres de santé communautaires, services de consommation supervisée, services de traitement par agonistes opioïdes, centres d’hébergement et refuges), ce qui montre qu’il s’agit d’une approche flexible et adaptable pouvant être intégrée à la gamme existante de services. Ce type d’intégration permettra de fournir toute une gamme de programmes, services et mesures de soutien là où les gens obtiennent déjà des services.

L’accès à un approvisionnement plus sécuritaire est limité à l’heure actuelle. Il y a très peu de programmes et de prescripteur·trice·s au Canada, surtout dans les régions rurales et éloignées. Pour que les personnes admissibles puissent en bénéficier, il faut lever les obstacles à l’accès. La santé publique et les systèmes de santé à tous les niveaux doivent apporter leur soutien, sous forme de financement, de planification et d’intégration à d’autres services. 

2. Continuer à élaborer, mettre en œuvre et évaluer une diversité de modèles et d’approches d’approvisionnement plus sécuritaire afin de comprendre les composantes d’un programme efficace et les pratiques optimales pour la mise en œuvre

L’élaboration et la mise en œuvre de l’approvisionnement plus sécuritaire au Canada ont surtout eu lieu dans le climat d’urgence de la pandémie de COVID-19, alors que les ressources disponibles pour la planification des systèmes et des programmes étaient limitées. 

L’approvisionnement plus sécuritaire a été mis en place dans divers contextes (p. ex. intégré aux services de soins primaires, de réduction des méfaits ou de traitement), selon diverses approches (p. ex. machines distributrices à lecteur biométrique, regroupement avec des services de consommation supervisée, prise de dose sous supervision ou non) et avec différents objectifs (p. ex. permettre aux personnes de demeurer en isolement lors d’une infection à la COVID-19, favoriser le recours aux soins de santé, réduire le risque de décès lié à la toxicité des drogues). 

Les programmes en place ont adopté différentes approches à l’égard de plusieurs éléments, comme les médicaments proposés et les modes de distribution, la mise à disposition de services sociaux et de santé complets et le recours au test de dépistage de drogues dans l’urine. Cela laisse entendre que l’approvisionnement plus sécuritaire est une approche adaptable, mais il est par contre difficile de déterminer quels éléments des programmes sont les plus efficaces et qui bénéficierait le plus des différents éléments. 

Il faut donc poursuivre les études afin de mieux comprendre comment les différentes approches et les différents éléments des programmes peuvent répondre au mieux aux besoins diversifiés des personnes qui utilisent des drogues, réduire le risque de décès lié à la toxicité des drogues et d’autres préjudices et s’intégrer aux systèmes de santé. 

3. Augmenter la variété d’opioïdes offerts aux participant·e·s des programmes

L’approvisionnement plus sécuritaire a surtout mis l’accent sur la réduction du risque de décès lié à la toxicité encouru par les personnes qui utilisent des opioïdes du marché non réglementé. Les comprimés d’hydromorphone à libération immédiate (p. ex. Dilaudid) sont couramment prescrits comme substitut aux opioïdes non réglementés. Des opioïdes à longue durée d’action (p. ex. méthadone, morphine à libération prolongée) sont parfois aussi prescrits en même temps que les comprimés d’hydromorphone à libération immédiate pour aider à prévenir les symptômes de sevrage pendant de plus longues périodes. Ces médicaments sont souvent proposés parce qu’ils sont couverts par les régimes publics. Autrement dit, ils sont disponibles et remboursés par le régime public d’assurance maladie sans qu’il soit nécessaire de demander une autorisation spéciale pour les obtenir. Ces médicaments fonctionnent pour certaines personnes et doivent demeurer une option. Les données disponibles montrent toutefois que les comprimés d’hydromorphone ne répondent peut-être pas aux besoins de certain·e·s participant·e·s pour diverses raisons (p. ex. ne correspondent pas à la tolérance aux opioïdes pour éviter les symptômes de sevrage, ne fournissent pas les effets escomptés, ne correspondent pas au mode de consommation privilégié).

Il est important de répondre aux besoins des gens, car cela peut favoriser la rétention au programme et l’utilisation des médicaments conformément à la prescription, ce qui devrait réduire le risque de décès lié à la toxicité des drogues. Si les médicaments prescrits répondent aux besoins des gens, le risque qu’ils soient vendus ou partagés (autrement dit, détournés) peut également être réduit.

Bien qu’il n’y ait que peu de données sur les moyens les plus efficaces d’élargir la gamme d’opioïdes proposés, les options suivantes pourraient être envisagées :

  • Permettre l’accès à des préparations d’opioïdes injectables plus puissantes, telles que la diacétylmorphine et l’hydromorphone liquide à forte dose. La réglementation fédérale autorise l’utilisation de ces médicaments pour le traitement des troubles liés à l’utilisation d’opioïdes, mais ils ne sont pas accessibles à cause de certains obstacles (p. ex. stocks nationaux insuffisants de diacétylmorphine, pas de couverture des régimes publics d’assurance médicaments pour la diacétylmorphine et l’hydromorphone liquide à forte dose). 
  • Introduire des opioïdes fumables, les évaluer et augmenter le nombre d’options offertes. Les modes de consommation de prédilection ont évolué et beaucoup de personnes déclarent préférer fumer plutôt que de s’injecter. En offrant plus d’options d’opioïdes à fumer (p. ex. oxycodone, diacétylmorphine à fumer) et en accroissant leur disponibilité dans les programmes d’APS, il sera possible de mieux répondre aux besoins des gens. 
  • Introduire des médicaments à base de fentanyl, les évaluer et augmenter le nombre d’options offertes. Compte tenu de la puissance du fentanyl dans les substances non réglementées et de la tolérance élevée de certaines personnes aux opioïdes, des options à base de fentanyl pourraient aider à répondre à leurs besoins. 

Les programmes donnant accès à une vaste gamme d’opioïdes doivent être évalués afin de comprendre leur effet sur la santé, le taux de rétention, les éléments efficaces et d’autres indicateurs.

Les politiques et les pratiques des programmes relatives à ces nouvelles options doivent être établies en collaboration avec différent·e·s intervenant·e·s, notamment des personnes ayant un savoir expérientiel et des client·e·s actuel·le·s et potentiel·le·s des programmes. On pourrait réfléchir à des politiques et des pratiques novatrices qui permettent de trouver un équilibre entre le besoin d’opioïdes plus puissants (p. ex. diacétylmorphine, fentanyl) et des modes de consommation supplémentaires (p. ex. fumer) et les mesures visant à atténuer les risques comme les surdoses et le détournement. 

4. Élaborer, mettre en œuvre et évaluer des approches visant à améliorer l’équité en matière d’approvisionnement plus sécuritaire 

Il est essentiel, lorsqu’on s’efforce de mettre en œuvre un approvisionnement plus sécuritaire et d’en comprendre les effets, de prendre en compte les besoins propres à chaque communauté. Pour cela, il faut élaborer, mettre en œuvre et évaluer des programmes axés sur l’amélioration de l’équité. Ce travail englobe les éléments suivants : 

Élaborer, mettre en œuvre et évaluer des programmes offrant un approvisionnement plus sécuritaire en milieu non urbain. On observe des décès liés à la toxicité des drogues partout au Canada, y compris en milieu rural et éloigné. Par contre, la majorité des programmes d’APS et de la recherche et de l’évaluation qui s’y rapportent sont concentrés dans les milieux urbains. En travaillant avec les communautés rurales et éloignées pour comprendre leur contexte local, leurs enjeux et les possibilités, il serait possible d’adapter les programmes d’APS aux besoins des personnes utilisatrices de drogues qui s’y trouvent. Par exemple, on pourrait prévoir dans les programmes des consultations et des prescriptions virtuelles ou par téléphone qui seraient délivrées par des pharmacies locales. 

Élaborer, mettre en œuvre et évaluer des programmes offrant un approvisionnement plus sécuritaire aux personnes autochtones, noires et de couleur, aux personnes bispirituelles, lesbiennes, gaies, bisexuelles, trans et queers (2SLGBTQ+), aux jeunes, aux femmes et aux personnes non binaires. Lorsqu’ils se conjuguent, les facteurs sociaux et structurels tels que le colonialisme, le racisme et le patriarcat accroissent le risque de décès liés à la toxicité des drogues et réduisent l’accès aux services sociaux et de santé de certaines communautés et de certains groupes. L’établissement de relations, de partenariats et de programmes visant à fournir un approvisionnement plus sécuritaire selon une approche adaptée à la culture peut contribuer à en améliorer l’accès et réduire les préjudices liés à l’usage de substances pour les groupes marginalisés. 

Élaborer, mettre en œuvre et évaluer des programmes offrant un approvisionnement plus sécuritaire de stimulants. L’utilisation de stimulants a augmenté au Canada ces dernières années, et ces substances semblent jouer un rôle important dans la crise de toxicité des drogues. Les personnes qui en font l’usage risquent de mourir après avoir utilisé des stimulants contaminés par des opioïdes tels que le fentanyl, et également en raison d’une utilisation combinée ou simultanée de fentanyl et de stimulants. Comprendre les diverses raisons pour lesquelles les gens utilisent des stimulants peut aider à éclairer les programmes qui visent à répondre à leurs besoins. Les programmes devraient inclure des stimulants à fumer afin de tenir compte des préférences des gens.

5. Mettre en œuvre et évaluer de nouveaux modèles non médicalisés, notamment des approches communautaires et axées sur la santé publique 

Les programmes actuels d’approvisionnement plus sécuritaire reposent principalement sur un modèle médicalisé qui combine réduction des méfaits et soins de santé. Ce modèle, qui repose sur la participation de prescripteur·trice·s et sur le système de santé, peut s’avérer insuffisant pour réduire les méfaits au niveau de la population. De nouvelles approches non médicalisées, notamment des solutions communautaires et axées sur la santé publique, pourraient être approuvées et soutenues afin de mieux étudier leurs effets et leur efficacité.

6. Faire participer les personnes qui utilisent des drogues dans tous les aspects de l’élaboration, de la mise en œuvre et de l’évaluation des programmes

Une participation réelle des communautés visées dans les décisions touchant aux politiques, aux programmes et aux services qui les concernent est un principe essentiel de l’efficacité de la santé publique et de la réduction des méfaits. Des études ont montré que la mobilisation des personnes qui utilisent des drogues dans les programmes d’APS est un facteur déterminant qui favorise leur mise en œuvre. Les personnes utilisatrices de drogues jouent un rôle de premier plan dans tous les aspects de l’approvisionnement plus sécuritaire, que ce soit au niveau de la conceptualisation ou de la revendication pour sa mise en place. Elles participent à l’élaboration, à la mise en œuvre et à l’évaluation d’approches efficaces. Elles aident les programmes à obtenir la confiance de la communauté. Elles aident les personnes à se procurer un approvisionnement plus sécuritaire. Elles contribuent à repérer les obstacles aux programmes et à les surmonter. Pour être efficace, l’approvisionnement plus sécuritaire doit s’articuler autour des besoins et de l’expertise des personnes qui utilisent des drogues. 

7. Étudier la prévalence du détournement de produits issus d’un approvisionnement plus sécuritaire, les facteurs qui y contribuent et ses effets afin d’élaborer des réponses adaptées 

Le détournement est le fait de vendre ou de faire don de médicaments d’ordonnance à d’autres personnes, ou alors d’en faire le troc ou de les partager avec d’autres. C’est un problème bien connu avec les médicaments pharmaceutiques, surtout ceux aux effets psychoactifs. Le détournement d’opioïdes prescrits contre la douleur et pour le traitement du trouble lié à l’utilisation d’opioïdes (p. ex. méthadone, buprénorphine) suscite des inquiétudes depuis de nombreuses années. Plus récemment, on s’est aussi inquiété du détournement de produits issus d’un approvisionnement plus sécuritaire.

À l’heure actuelle, il existe très peu de données relatives au détournement de ces produits, que ce soit sur le plan de la fréquence et de l’ampleur du phénomène et sur le plan des effets sur la communauté et la population. Certaines études et certains rapports anecdotiques semblent indiquer que le fait de vendre des produits pharmaceutiques à des personnes utilisatrices de drogues qui ne sont pas en mesure d’obtenir un approvisionnement plus sécuritaire, ou alors le fait de partager des doses, pourrait réduire leur risque de décès lié à la toxicité des drogues. En revanche, si des médicaments sont vendus à des personnes qui n’utiliseraient pas autrement des drogues issues du marché non réglementé, on pourrait s’inquiéter de l’apparition d’un trouble lié à l’usage d’opioïdes et du risque de surdose. À ce jour, aucune donnée populationnelle n’indique que le détournement entraîne une hausse des diagnostics de troubles liés à l’utilisation d’opioïdes ou qu’il contribue au risque de décès lié à la toxicité des drogues.

Les programmes d’APS mettent en place différentes politiques et pratiques pour repérer les possibles cas de détournement et pour aider les prestataires de soins à aborder cette question avec leurs patient·e·s. La prévention et la gestion du détournement peuvent impliquer de fournir un soutien en lien avec les facteurs pouvant conduire à ce problème (p. ex. veiller à ce que les médicaments répondent aux besoins des participant·e·s et à ce que les besoins de base des participant·e·s soient satisfaits). 

Pour favoriser la mise en œuvre de l’approvisionnement plus sécuritaire, il est nécessaire de mener des études qui permettront de mieux comprendre le détournement et d’évaluer des mesures de prévention et de lutte contre ce problème. Ces mesures doivent être conçues en collaboration avec divers·es intervenant·e·s afin de s’assurer qu’elles n’élèvent pas d’obstacles à l’accès à un approvisionnement plus sécuritaire. 

8. S’attaquer aux facteurs sociaux et structurels qui portent préjudice aux personnes utilisatrices de drogues

Il est important de reconnaître et de corriger les facteurs structurels et les inégalités sociales sous-jacents qui causent préjudice aux personnes qui utilisent des drogues.

Parmi ces facteurs structurels, citons la criminalisation et la prohibition de l’utilisation de drogues, la stigmatisation, le colonialisme, le racisme et les inégalités entre les sexes. Ces derniers rendent les personnes qui utilisent des drogues plus sujettes aux méfaits tels que la toxicité des drogues, les infections et d’autres problèmes de santé. Ils marginalisent des personnes et des communautés, avec pour conséquence des inégalités sociales qui détériorent l’état de santé et accroissent la vulnérabilité aux troubles liés à l’utilisation de substances. Parmi les facteurs sociaux figurent les traumatismes, la pauvreté, l’incarcération, la précarité du logement, l’insécurité alimentaire et la discrimination. 

Les décisionnaires et les responsables de la santé publique aux paliers fédéral, provincial et local doivent s’attaquer à ces facteurs sous-jacents. Des mesures pourraient être prises pour mettre fin à la prohibition et à la criminalisation de l’utilisation de drogues, qui sont à l’origine de nombreux méfaits associés à l’utilisation de substances, et pour investir dans l’atténuation des effets des déterminants sociaux de la santé. Les prestataires de services qui travaillent avec les personnes utilisatrices de drogues doivent recevoir des ressources et du financement suffisants pour aider les gens à remédier aux facteurs sous-jacents pouvant entraîner des inégalités en matière de santé. Les approches possibles : adapter les services afin de réduire les obstacles et d’améliorer l’accès; aider les gens à répondre à des besoins qui ne sont pas directement liés à l’utilisation de substances (p. ex. logement, sécurité alimentaire, soutien adapté sur le plan culturel, soutien pour la grossesse et la parentalité); orienter rapidement les personnes vers d’autres services adaptés (p. ex. soins de santé), y compris des services de navigation pour améliorer l’arrimage aux soins; et collaborer avec d’autres prestataires de services sociaux et de santé afin de s’attaquer aux difficultés qui empêchent les personnes qui utilisent des drogues d’avoir accès à des soins de qualité.

Outils et ressources

Ressources de CATIE

Les bases de la réduction des méfaits : trousse pour prestataires de services 

Programme SAFER de Victoria 

Le programme d’approvisionnement plus sécuritaire en opioïdes MySafe utilise des machines distributrices à lecteur biométrique

Le programme d’approvisionnement plus sécuritaire en opioïdes (APSO) 

La Colombie-Britannique constate une réduction de la mortalité par surdose grâce aux directives sur l’atténuation des risques (DAR) pour la prescription d’opioïdes 

Documents conceptuels, examens des données probantes et ressources sur les politiques

Prescribed safer opioid supply: A scoping review of the evidence – International Journal of Drug Policy

Source sûre : document conceptuel – Association canadienne des personnes qui utilisent des drogues

Imaginer un approvisionnement sécuritaire : sommaire des résultats – Coalition canadienne des politiques sur les drogues

Programmes de prescription d’un approvisionnement plus sécuritaire : nouvelles données probantes – Communauté de pratique nationale sur l’approvisionnement plus sécuritaire

Cadre pour une démarche de santé publique à l’égard de l’usage de substances – Association canadienne de santé publique 

Examen des données probantes

Des changements dans l’offre de drogues non réglementées : risque accru de décès lié à la toxicité des drogues et d’autres méfaits

Le Canada connaît une crise de santé publique caractérisée par des décès liés à la toxicité des drogues. Entre janvier 2016 et septembre 2023, plus de 42 494 personnes sont mortes à cause de la toxicité des opioïdes1. La vaste majorité de ces décès étaient accidentels et ont été causés par des drogues achetées sur le marché non réglementé1.

L’offre de drogues non réglementées au Canada a beaucoup changé au cours des dix dernières années, avec pour conséquence un risque accru de toxicité. Quelques-uns des changements :

  • Le fentanyl est devenu l’opioïde dominant dans la majeure partie du marché non réglementé au Canada2. Le fentanyl est beaucoup plus puissant que l’héroïne et est impliqué dans la majorité des décès liés à la toxicité des drogues au Canada depuis 2016 (82 % en 2023)1.
  • On observe une hausse de l’utilisation de méthamphétamine et de méfaits liés aux stimulants3,4, y compris chez les personnes qui utilisent des opioïdes5–8. En 2023, les stimulants étaient impliqués dans 57 % des décès liés à la toxicité des opioïdes1.
  • On a constaté une augmentation de la présence de contaminants nouveaux et inconnus dans les substances du marché non réglementé, le plus souvent combinés au fentanyl9–13. Parmi ces contaminants figurent des sédatifs tels que les benzodiazépines et la xylazine, lesquels peuvent être ajoutés au fentanyl pour diverses raisons (p. ex. pour ajouter du volume au fentanyl et réduire ainsi les coûts, pour allonger la courte durée d’action du fentanyl)11,14. Les sédatifs sont associés à de nombreux effets nuisibles. Notamment, ils compliquent l’intervention lors d’une surdose et entraînent une tolérance aux sédatifs, des symptômes de sevrage et d’autres méfaits, comme une plus grande vulnérabilité aux agressions et des plaies liées à la xylazine10,15. 

Ces changements dans les drogues non réglementées en circulation sont liés à la prohibition, qui incite à produire et à transporter des drogues plus petites en volume et plus puissantes pour augmenter les profits16. Contrairement aux drogues telles que l’héroïne et la cocaïne, qui sont fabriquées à partir de composants organiques, les drogues synthétiques telles que le fentanyl et la méthamphétamine peuvent être fabriquées dans des laboratoires situés n’importe où dans le monde. Comme leur production n’est pas limitée à certains climats ou à certaines saisons de croissance, il est plus difficile pour les forces de l’ordre de bloquer la production et le transport16,17. La prohibition signifie également qu’il n’y a pas d’organisme de réglementation pour contrôler la qualité et le contenu des drogues produites et distribuées sur le marché non réglementé18. Les drogues de synthèse non réglementées peuvent donc être très volatiles et imprévisibles. Leur contenu et leur puissance sont susceptibles de varier considérablement d’une région à l’autre et d’une semaine à l’autre, voire d’une partie à l’autre d’un même échantillon19,20. Cette variabilité de contenu et de puissance augmente le risque de décès21

Survol de l’approche d’approvisionnement plus sécuritaire et bien-fondé

Les approches de réduction des méfaits, telles que la distribution de naloxone, les services de consommation supervisée (SCS) et les sites de prévention des surdoses (OPS) et les approches thérapeutiques comme le traitement par agonistes opioïdes (TAO) sont efficaces et ont joué un rôle essentiel dans la réduction du nombre de décès liés à la toxicité des drogues. En fait, la combinaison de ces approches a permis de sauver des milliers de vies22. Et pourtant, malgré la mise en œuvre de ces approches dans certaines régions du Canada, le nombre de décès liés à la toxicité des drogues continue d’augmenter1. L’approvisionnement plus sécuritaire est une solution supplémentaire qui peut s’ajouter à la gamme actuelle d’approches de réduction des méfaits et d’approches thérapeutiques et combler les lacunes de ces dernières, offrant un autre outil pour réduire les décès liés à la toxicité des drogues et favoriser la santé des personnes qui utilisent des drogues.

L’approvisionnement plus sécuritaire vise à fournir aux personnes qui utilisent des drogues des substituts pharmaceutiques réglementés pour remplacer les drogues toxiques du marché non réglementé dont elles font usage. Il s’agit avant tout d’une intervention de réduction des méfaits qui a pour but de réduire le risque de décès lié à la toxicité des drogues et, dans bien des cas, d’orienter les personnes utilisatrices de drogues vers les services sociaux et de santé. Cette solution s’appuie sur les résultats des approches thérapeutiques comme le TAO et le TAOi, tout en étant une approche distincte. 

Pour l’heure, l’approvisionnement plus sécuritaire repose sur un modèle médical dans le cadre duquel les médecins ou les infirmier·ère·s praticien·ne·s prescrivent des médicaments de qualité pharmaceutique dont le contenu et la puissance sont connus et stables pour remplacer des drogues non réglementées dont le contenu et la puissance sont inconnus23. La majorité des programmes se sont jusqu’à présent consacrés à fournir des opioïdes de qualité pharmaceutique comme solution de rechange au fentanyl disponible sur le marché non réglementé. 

Les comprimés d’hydromorphone à libération immédiate (p. ex. Dilaudid) sont les médicaments les plus prescrits dans le cadre de ces programmes24. Ils sont généralement distribués quotidiennement sous forme de dose à emporter par les pharmacies ou les cliniques, ce qui permet aux client·e·s d’utiliser leur dose au moment et à l’endroit choisis et de la manière souhaitée. On peut également prescrire un opioïde à longue durée d’action (p. ex. méthadone ou morphine) pour aider à prévenir les symptômes de sevrage pendant de longues périodes. Ce produit doit généralement être pris chaque jour sous supervision à la pharmacie ou à la clinique. 

Il arrive que certains programmes prescrivent d’autres opioïdes. Par exemple, certains programmes en Colombie-Britannique fournissent des produits pharmaceutiques à base de fentanyl25. Parmi ceux-ci, on retrouve des options à action rapide (p. ex., voie orale, injection) et à longue durée d’action (p. ex. timbres transdermiques). Les produits à base de fentanyl sont généralement pris ou administrés sous supervision26.

Les stimulants, de leur côté, sont moins couramment prescrits dans le cadre de programmes d’APS. Il arrive que certain·e·s prestataires et programmes prescrivent des stimulants à libération immédiate (p. ex. méthylphénidate à libération immédiate) et des stimulants à longue durée d’action (p. ex. méthylphénidate à longue durée d’action, dextroamphétamine à libération soutenue) pour remplacer les stimulants du marché non réglementé27. À ce jour, on ne dispose que de peu d’études sur l’approvisionnement plus sécuritaire en stimulants27–29.

Au-delà des produits pharmaceutiques, les programmes d’APS peuvent aussi offrir des services sociaux et de santé. Exemples de services et programmes proposés : gestion de cas; soins primaires; aide pour naviguer dans le système; soutien par les pairs; information sur la réduction des méfaits; counseling et aide entourant le logement, le revenu, les traitements et les besoins de base; et soutien culturel24. L’accès à ces services peut favoriser la santé et le bien-être général des personnes qui utilisent des drogues et leur rétention dans le programme, en plus de réduire davantage le risque de décès lié à la toxicité des drogues et d’autres préjudices.

Données probantes sur l’approvisionnement plus sécuritaire

Les données relatives à l’efficacité de l’approvisionnement plus sécuritaire se multiplient rapidement. Le présent examen des données probantes comprend des études quantitatives et qualitatives évaluées par des pairs, des données issues d’évaluations de programmes et des analyses de données administratives et de santé.

Effet de l’approvisionnement plus sécuritaire sur le risque de décès lié à la toxicité des drogues 

Les données disponibles montrent qu’un approvisionnement plus sécuritaire réduit le risque de décès lié à la toxicité des drogues. Ces données proviennent de diverses études qui se sont penchées sur différentes approches. Elles sont présentées ci-dessous. 

En mars 2020, des lignes directrices pour aider les prestataires de soins de santé à prescrire un approvisionnement plus sécuritaire ont été publiées en Colombie-Britannique. Des données administratives personnelles ont été analysées afin de vérifier les effets qu’ont eu les prescriptions reçues dans le cadre de ces lignes directrices sur le risque de décès et de visites à l’hôpital pour cause de surdose et pour toutes causes confondues29. Les données comprenaient des informations provenant de régimes publics d’assurance maladie, de pharmacies de quartier, d’hôpitaux, de services correctionnels et de dossiers de coroners. La population étudiée était constituée de résident·e·s de la Colombie-Britannique dont le dossier indiquait une prescription de TAO ou un probable diagnostic de trouble lié à l’utilisation d’opioïdes ou de stimulants. Les données ont été analysées par tranches hebdomadaires. Les dossiers des participant·e·s ont été suivis du 27 mars 2020, ou dès la première semaine où le dossier indiquait un trouble lié à l’utilisation d’opioïdes ou de stimulants, au 31 août 2021. Un groupe de référence a été créé en appariant chaque dossier à ceux de personnes présentant des caractéristiques similaires et n’ayant pas bénéficié d’un approvisionnement plus sécuritaire. Au total, 5 356 personnes ont bénéficié d’un approvisionnement plus sécuritaire en opioïdes; 1 061 personnes, en stimulants; et 535 personnes ont reçu les deux. Cette étude a révélé que les personnes qui avaient reçu un ou plusieurs jours d’approvisionnement en opioïdes étaient 61 % moins susceptibles de mourir de quelque cause que ce soit et 55 % moins susceptibles de mourir d’une surdose dans la semaine suivant la délivrance des produits. Lorsqu’un approvisionnement était fourni pendant quatre jours ou plus, le risque de décès toutes causes confondues était réduit de 91 % et le risque de décès des suites d’une surdose, de 89 %, au cours de la semaine suivante. Pour ce qui est des stimulants, le fait de recevoir un ou plusieurs jours d’approvisionnement était associé à un risque plus faible de décès toutes causes confondues et de décès par surdose au cours de la semaine suivante, mais ces résultats n’étaient pas statistiquement significatifs. Des résultats similaires ont été obtenus pour les personnes ayant reçu un approvisionnement plus sécuritaire en stimulants pendant quatre jours ou plus.

En mai 2021, un programme d’APS et de gestion de l’alcool a été mis en place dans un hôtel pour faciliter la quarantaine de personnes atteintes de la COVID-19 lors d’une éclosion dans le système de refuges à Halifax, en Nouvelle-Écosse30. Des médicaments sur ordonnance étaient distribués quotidiennement. Parmi les substances distribuées figuraient des opioïdes, des stimulants, des benzodiazépines, du cannabis de qualité pharmaceutique, en plus de l’alcool et du tabac. Ce programme a été examiné dans le cadre d’une analyse rétrospective des dossiers médicaux des 77 personnes admises à l’hôtel pour la quarantaine. Vingt-sept participant·e·s ont reçu des comprimés d’hydromorphone, dont 12 qui ont aussi reçu un TAO. Trente et un·e participant·e·s ont reçu des stimulants. Six participant·e·s ont reçu des benzodiazépines.L’étude n’a révélé aucune surdose au cours des 1 059 jours-personnes d’observation. 

Entre janvier et mars 2021, un refuge à Hamilton, en Ontario, a mis en place un programme de TAO, un programme d’APS et un SPS pendant une éclosion de COVID-1931. Les participant·e·s au programme d’APS ont été encouragé·e·s à prendre leurs médicaments dans le SPS, lequel servait uniquement à l’utilisation de médicaments issus du programme. Une étude de cas a comparé le taux de surdoses non mortelles pendant les 26 jours d’activité des interventions avec le taux enregistré au cours des quatre semaines ayant précédé la mise en place des interventions. Cinq personnes ont reçu une prescription d’hydromorphone et d’un opioïde à longue durée d’action à titre d’approvisionnement plus sécuritaire. Au cours des quatre semaines précédant la mise en place des interventions, le taux de surdoses non mortelles était de 0,93 pour 100 nuits d’occupation des lits au refuge. Pendant les 26 jours d’activité des interventions, le taux de surdoses non mortelles est passé à 0,17 pour 100 nuits d’occupation des lits au refuge, une réduction importante. Aucune surdose mortelle n’a été enregistrée au cours de ces deux périodes.

Un programme d’APS a été mis en place en 2016 à London, en Ontario. Il était destiné aux personnes qui présentaient plusieurs problèmes de santé graves liés à l’injection de drogues et dont le risque de décès était considéré comme élevé. Les médicaments des 82 participant·e·s étaient distribués quotidiennement par une pharmacie. Les opioïdes à longue durée d’action étaient pris sur place et les comprimés d’hydromorphone étaient remis aux personnes pour utilisation selon leurs besoins. Les participant·e·s ont également reçu des soins primaires. Les dossiers médicaux ont été analysés entre le 1er janvier 2016 et le 31 mars 2019 afin de comprendre les tendances en matière de recours aux soins de santé avant et pendant leur participation au programme32. Les résultats des soins de santé des participant·e·s ont été analysés par périodes de 30 jours pour les cinq années précédant leur entrée au programme et pour l’année suivant leur entrée au programme. Ces résultats ont été comparés à ceux d’un groupe apparié de personnes vivant dans le même quartier et dont les caractéristiques démographiques et de santé étaient semblables, mais qui n’avaient pas reçu d’approvisionnement plus sécuritaire. Aucune surdose mortelle n’a été enregistrée au cours de l’année qui a suivi l’entrée au programme parmi les 82 participant·e·s, contre moins de cinq décès liés aux opioïdes parmi les 303 personnes du groupe apparié. Le taux de visites aux urgences en lien avec les opioïdes (p. ex. en raison de la toxicité des opioïdes) a diminué de manière importante pour les participant·e·s, de dix dans l’année ayant précédé l’entrée dans le programme à moins de cinq dans l’année suivante. Dans le groupe apparié, il n’y a pas eu de changement important au niveau des visites à l’urgence en lien avec les opioïdes.

Plusieurs évaluations de programmes indiquent que les participant·e·s à des programmes d’APS déclarent avoir vécu moins de surdoses. 

  • Le programme d’APS de London, en Ontario, a été évalué à trois reprises au moyen d’enquêtes et d’entretiens auprès des client·e·s. Entre avril et octobre 2021, les participant·e·s (n = 59) ont été moins nombreux·ses à déclarer une surdose au cours des six derniers mois (23 %) et du mois précédent (11 %) que les personnes qui venaient de commencer le programme (= 19; 59 % et 33 %, respectivement)33. Lors d’une enquête renouvelée en 2022, aucun·e participant·e ayant répondu à l’enquête (= 75) n’a déclaré avoir vécu de surdose au cours du mois précédent34. En 2023, 10 % des participant·e·s ayant répondu à l’enquête (n = 95) ont déclaré avoir fait une surdose au cours du mois prédécent34.
  • Un programme d’APS à Toronto, en Ontario, a été évalué en 2022 à l’aide d’enquêtes et d’entretiens auprès de ses participant·e·s. Le taux de surdoses autodéclaré des personnes qui venaient d’intégrer le programme (n = 10) a été comparé à celui des personnes qui faisaient partie du programme depuis au moins six mois (n = 27). La moitié des personnes qui venaient d’intégrer le programme ont déclaré avoir fait une surdose au cours des trois derniers mois, contre seulement 15 % des participant·e·s qui faisaient partie du programme depuis au moins six mois35.
  • Un programme d’APS à Ottawa, en Ontario, a été évalué en 2022 à l’aide d’enquêtes et d’entretiens auprès de ses participant·e·s. Sur les 30 personnes qui ont participé à la fois à un entretien et à une enquête, 93 % ont déclaré avoir fait une surdose avant le début du programme et 20 % ont déclaré avoir fait une surdose depuis le début du programme36.
  • Un programme d’APS à Kitchener-Waterloo, en Ontario, a réalisé des entretiens et des enquêtes auprès de ses participant·e·s entre juillet 2021 et décembre 202237. Des enquêtes ont été menées auprès de 148 personnes à leur admission au programme et auprès de 58 personnes après six mois de participation. À l’admission, 60 % des personnes ont déclaré avoir fait une surdose au cours des six derniers mois, contre 13 % après six mois de participation au programme.
  • Un club compassion non autorisé à Vancouver, en Colombie-Britannique, a été évalué entre août 2022 et octobre 202338. Le club permettait aux membres admissibles (c’est-à-dire aux personnes âgées de plus de 19 ans qui consommaient alors de la cocaïne, de la méthamphétamine ou du fentanyl du marché non réglementé et qui étaient membres de groupes locaux de personnes utilisatrices de drogues) d’acheter des drogues illégales (héroïne, cocaïne, méthamphétamine) dont la qualité et l’absence de contaminants avaient été vérifiées. L’évaluation a suivi 47 participant·e·s pendant une durée médiane de 12,2 mois et des enquêtes ont été réalisées au début de l’étude et à des intervalles de trois mois. Dans les analyses corrigées, l’étude a montré que les périodes où les personnes achetaient des drogues du club compassion étaient associées à une réduction des surdoses non mortelles par rapport aux périodes où elles n’étaient pas inscrites. 

Effets de l’approvisionnement plus sécuritaire sur la santé

Les données disponibles portent à croire que le fait de bénéficier d’un approvisionnement plus sécuritaire est associé à une amélioration de l’état de santé des participant·e·s aux programmes. Des études qualitatives et des évaluations de programmes ont montré que les participant·e·s signalent différentes améliorations de leur état de santé depuis qu’ils et elles ont amorcé le programme. Parmi ces améliorations autodéclarées, citons l’amélioration générale de la santé et du bien-être24,39, une meilleure alimentation39, une amélioration du sommeil39, une réduction du stress35,39,40, une meilleure maîtrise de la douleur35,39, un accès accru aux soins primaires33 de même qu’un accès accru au traitement et à la prévention d’infections telles que le VIH et ll’hépatite C24,27,33,41.

Des données administratives sur les soins de santé ont été analysées afin d’étudier l’incidence de l’approvisionnement plus sécuritaire sur les hospitalisations et les visites aux urgences. 

Une analyse du dossier médical de 82 participant·e·s à un programme d’APS à London, en Ontario (décrit plus haut) a révélé que le taux mensuel de visites aux urgences (14 visites de moins pour 100 personnes) et d’admission à l’hôpital (cinq admissions de moins pour 100 personnes) avait diminué de manière importante au cours de l’année suivant l’entrée au programme32. Il n’y a pas eu de changements importants dans les taux d’admission à l’hôpital pour des infections graves (liées à l’injection de drogues) après l’entrée dans le programme32. Il n’y a pas eu de changements importants pour aucun de ces résultats dans un groupe de référence apparié32

Dans une étude examinant les données populationnelles en lien avec les lignes directrices de la Colombie-Britannique sur la prescription d’un approvisionnement plus sécuritaire (décrite plus haut), ont été répertoriées 5 356 personnes ayant reçu des opioïdes; 1 061 personnes ayant reçu des stimulants; et 535 personnes ayant reçu les deux29. Selon l’étude, le fait de bénéficier d’un approvisionnement plus sécuritaire en opioïdes n’est pas associé à des changements notables du risque de visites à l’hôpital au cours de la semaine suivante, toutes causes confondues ou pour cause de surdose29. L’obtention d’un approvisionnement plus sécuritaire en stimulants a été associée à une réduction importante des visites à l’hôpital pour toutes causes confondues au cours de la semaine suivante, mais n’a pas modifié de manière notable le risque de visites à l’hôpital pour une surdose29

Effets de l’approvisionnement plus sécuritaire sur d’autres aspects individuels et sociaux

Des études qualitatives et des évaluations de programmes ont montré qu’un approvisionnement plus sécuritaire favorise toute une série de résultats positifs sur le plan individuel et social.

Les participant·e·s aux programmes d’APS signalent une réduction de leur utilisation de drogues du marché non réglementé39,40,42.

  • Dans une enquête réalisée en 2021 (n = 59) dans le cadre d’une évaluation de programme d’APS à London, en Ontario, 63 % des participant·e·s qui avaient bénéficié du programme pendant au moins quatre semaines ont déclaré avoir réduit leur utilisation de fentanyl du marché non réglementé et 9 % ont déclaré ne plus en utiliser33. Lors d’évaluations subséquentes du même programme, les participant·e·s ont systématiquement signalé une réduction de leur utilisation de fentanyl non réglementé. En 2022, 49 % des participant·e·s (n = 75) ont déclaré avoir réduit leur utilisation du fentanyl non réglementé et 25 % ont déclaré l’avoir arrêtée. En 2023, ces chiffres (n = 95) étaient respectivement de 53 % et 11 %34.
  • Dans une enquête (n = 27) menée auprès de participant·e·s d’un programme d’APS à Toronto, en Ontario, 52 % ont déclaré avoir cessé d’utiliser du fentanyl non réglementé et 26 % ont déclaré avoir réduit leur utilisation depuis le début du programme35.
  • Une enquête menée auprès des participant·e·s (n = 58) d’un programme d’APS à Kitchener-Waterloo, en Ontario, a révélé que 82 % ont signalé une réduction de leur utilisation de fentanyl non réglementé après six mois de participation au programme37
  • Une évaluation d’un programme d’APS en stimulants à Ottawa, en Ontario, a révélé que l’utilisation médiane de cocaïne et de crystal meth déclarée par les participant·e·s était passée de 1 gramme par jour pour la cocaïne et de 0,15 gramme par jour pour le crystal meth à 0 gramme par jour pour les deux drogues (écart interquartile de 0–0,1 gramme pour la cocaïne et de 0–0 gramme pour le crystal meth) au moment de l’examen des dossiers27.

Les participant·e·s disent avoir amélioré leurs pratiques d’injection, ce qui permet de prévenir les infections. Parmi les changements nommés, citons la baisse de la fréquence d’injection, l’abandon de l’injection de fentanyl non réglementé au profit de l’injection d’opioïdes pharmaceutiques, la diminution des injections dans des milieux non sécuritaires, la diminution des injections précipitées et l’abandon de l’injection pour favoriser la consommation par voie orale39,43.

Les participant·e·s signalent une plus grande stabilité, un meilleur contrôle de leur utilisation de drogues (p. ex. éviter les cycles de sevrage, d’envies irrépressibles et d’utilisation très fréquente, moins de temps passé à tenter de trouver des drogues, réduction générale de l’utilisation de drogues dans certains cas) et une plus grande autonomie (p. ex. pouvoir utiliser des drogues au moment voulu et de la façon souhaitée, pouvoir sortir de la ville et rendre visite à leur famille sans craindre un état de manque, pouvoir retourner à l’école ou au travail)33,35,36,40,42,44,45. 

Les participant·e·s indiquent que leurs relations avec les prestataires de soins de santé se sont améliorées et qu’ils et elles ont davantage confiance dans le système de santé24,36. Ils et elles disent également que leurs relations avec les membres de leur famille se sont améliorées, et que dans certains cas, ils et elles ont pu retrouver leurs enfants et renouer avec eux24,45.

Les participant·e·s signalent que leur stabilité économique s’est améliorée (p. ex. plus d’argent disponible pour les besoins essentiels tels que la nourriture et les vêtements)39 . Ils et elles indiquent également se livrer moins souvent à des activités criminelles24,33,35,36,39,42. Pour certaines personnes, notamment les femmes et les jeunes, un approvisionnement plus sécuritaire leur permet d’éviter de se livrer au travail du sexe par souci de survie, de réduire cette activité ou d’y mettre fin34,35,44.

Accès à l’approvisionnement plus sécuritaire

L’accès à un approvisionnement plus sécuritaire au Canada est limité et inégal46. L’accès a été déterminé par un certain nombre de facteurs au niveau politique et systémique, notamment les lois fédérales, la pandémie de COVID-19, les politiques provinciales ou les lignes directrices pour la prescription et les directives limitées de la part des ordres professionnels, entre autres47. Les prescripteur·trice·s ont indiqué qu’un certain nombre de facteurs, notamment le manque de ressources (p. ex. financement du personnel nécessaire, formation) et le manque de directives de la part de leur ordre professionnel, ont également limité la mise en œuvre47.

La Colombie-Britannique est la seule province à publier des politiques et des lignes directrices afin d’aider les prestataires de soins à prescrire un approvisionnement plus sécuritaire48,49. Ces initiatives ont été prises en réponse à la pandémie de COVID-19. Cependant, même en Colombie-Britannique, l’accès à l’approvisionnement plus sécuritaire est limité. En septembre 2023, seules 4 331 personnes ont profité d’un approvisionnement en opioïdes et 256 personnes, d’un approvisionnement en stimulants50. Et ce, dans une province où l’on estime à 115 000 le nombre de personnes vivant avec un trouble lié à l’utilisation d’opioïdes et à 225 000 le nombre de personnes risquant de mourir ou de subir des méfaits par l’effet des drogues du marché non réglementé50,51. Dans la plupart des autres provinces et territoires, il est possible pour les prestataires de soins de santé de prescrire un approvisionnement plus sécuritaire, mais on ne sait pas exactement dans quelle proportion cela se fait. 

L’accès semble particulièrement difficile pour les personnes devant lesquelles se dressent des obstacles systémiques à l’accès au système de santé (p. ex. personnes autochtones, noires, 2SLGBTQ+) et pour celles qui vivent en milieu rural et éloigné51–53.

Détournement

Le détournement est le fait de vendre ou de faire don de médicaments d’ordonnance à d’autres personnes, ou alors d’en faire le troc ou de les partager avec d’autres54. C’est un problème bien connu avec les médicaments pharmaceutiques, surtout ceux aux effets psychoactifs. Le détournement de médicaments issus d’un approvisionnement plus sécuritaire suscite des inquiétudes55, et certains programmes ont rencontré ce problème24.

On dispose de peu d’éléments probants sur ce phénomène. Une étude (décrite plus haut) portant sur un programme d’APS dans un hôtel ayant servi de lieu de quarantaine pour des personnes atteintes de la COVID-19 fait état de craintes de détournement consignées dans les dossiers de participant·e·s. Sur 27 personnes ayant reçu de l’hydromorphone, des craintes de détournement ont été consignées par trois fois au cours des 1 059 jours-personnes qu’a duré le programme30

À l’heure actuelle, on ne dispose d’aucune preuve d’un détournement généralisé de médicaments prescrits dans le cadre d’un approvisionnement plus sécuritaire. Les participant·e·s aux programmes qui ont détourné leurs médicaments indiquent ne les avoir partagés ou vendus qu’avec d’autres personnes qui utilisaient déjà des drogues36. Rien n’indique non plus, au niveau de la population, que les médicaments prescrits sont à l’origine de décès liés à la toxicité des drogues ou d’une hausse des troubles liés à l’utilisation de substances. Des analyses des décès liés à la toxicité des drogues en Colombie-Britannique (entre mars 2020 et mai 2021) et en Ontario (entre mars 2020 et décembre 2020) montrent que l’hydromorphone était très rarement impliquée56,57. En Colombie-Britannique, l’hydromorphone a été détectée sans fentanyl dans moins de 2 % des décès56,58. Dans la même province, les nouveaux diagnostics de troubles liés à l’utilisation de substances n’ont pas augmenté depuis la mise en œuvre de l’approvisionnement plus sécuritaire59.

Les participant·e·s aux programmes qui ont déclaré avoir vendu ou partagé des drogues ont donné diverses raisons pour leur geste36,38,44,53,60 :

  • Pour fournir à des personnes sans accès à un approvisionnement plus sécuritaire des substances réglementées pour répondre à leurs besoins (p. ex. prendre en charge le l'état de manque, la douleur) et réduire le risque de décès lié à la toxicité des drogues. 
  • Pour subvenir à leurs besoins (p. ex. acheter les drogues non réglementées qui répondent à leurs besoins, acheter de la nourriture et des vêtements) et ainsi éviter d’avoir à se livrer à des activités criminelles ou au travail du sexe pour la survie.
  • Leurs médicaments issus de l’approvisionnement plus sécuritaire ou les doses prescrites ne répondaient plus à leurs besoins (p. ex. dose insuffisante pour prévenir l'état de manque, maîtriser la douleur ou générer une euphorie).

De nouvelles études sont nécessaires pour comprendre comment les différents aspects de l’approvisionnement plus sécuritaire (p. ex. les options de médicaments offertes, l’accessibilité, les mesures de soutien pour répondre aux besoins de base) influent sur la prévalence du détournement et ses effets.

Données sur la mise en œuvre de l’approvisionnement plus sécuritaire 

Au sein du modèle médical d’approvisionnement plus sécuritaire existe toute une série d’approches. Le modèle a été adapté à divers contextes (p. ex. soins primaires, centres de santé communautaires, refuges, SCS/SPS), par différents organismes et prestataires et avec divers objectifs (p. ex. réduction des décès liés à la toxicité des drogues, incitation à recourir aux soins primaires, réduction de la transmission de la COVID-19 au sein de la communauté)24,30,32,46,49. Certain·e·s prestataires de soins de santé rédigent des ordonnances depuis 2016 déjà, mais la plupart des programmes ont commencé leurs activités relativement récemment, depuis 2020, lorsque les mesures de santé publique contre la COVID-19 ont été adoptées46,61. Ce contexte a fortement influé sur la mise en œuvre de l’approvisionnement plus sécuritaire61. Les sections suivantes passent en revue les données disponibles quant aux obstacles entravant la mise en œuvre des programmes et aux facteurs la facilitant. D’autres études à ce sujet seront nécessaires afin d’éclairer les mises en œuvre futures.

Rétention 

Les données relatives à la rétention des participant·e·s aux programmes d’APS sont variables sur ce point. Les évaluations des programmes pilotes ayant bénéficié d’un financement du fédéral, lequel a souvent permis aux programmes de fournir des services sociaux et de santé complets, font état d’un taux de rétention élevé, de l’ordre de 80 % à 90 % sur des périodes variables, souvent d’un an ou plus24,33–35,37. Dans les données provenant d’analyses au niveau de la population, la rétention est moins claire. En Ontario, entre 2018 et 2020, alors que les programmes d’approvisionnement plus sécuritaire ne bénéficiaient pas d’un financement de services sociaux et de santé complets, le temps médian avant l’interruption du recours au programme était de 309 jours, ce qui est comparable aux taux de rétention pour le TAO62. En Colombie-Britannique, une étude au niveau de la population indique que la plupart des personnes (80 %) qui ont reçu un approvisionnement plus sécuritaire y ont eu accès pendant plus d’une semaine entre mars 2020 et août 2021, mais que ces prescriptions étaient souvent interrompues puis reprises, ce qui signifie que la rétention n’était pas nécessairement continue29.

Jusqu’à présent, peu d’études ont examiné et comparé les facteurs associés à la rétention pour l’approvisionnement plus sécuritaire. Les données disponibles indiquent que la rétention peut être favorisée ainsi :

  • En consacrant des ressources à la sensibilisation et au maintien du contact avec les participant·e·s24
  • En prescrivant une dose maximale plus élevée et en proposant un TAO et des médicaments pour la santé mentale en complément62,63

Modèles et éléments de programmes qui permettent de répondre aux besoins

Les personnes qui utilisent des drogues ont des préférences et des besoins variés, de sorte qu’il est difficile pour un programme ou une approche donnés de satisfaire efficacement tout le monde. On dispose actuellement de peu d’éléments probants sur les pratiques optimales pour la mise en œuvre d’un approvisionnement plus sécuritaire et sur les éléments efficaces des programmes d’APS. Des facteurs tels que l’intégration à des services existants de réduction des méfaits et de traitement ou le regroupement avec ceux-ci, l’accès à des services sociaux et de santé complets et une flexibilité au niveau des politiques et des pratiques des programmes devront être pris en compte et examinés dans de futures études sur la mise en œuvre.

Les approches d’approvisionnement plus sécuritaire comprennent l’intégration aux soins primaires, aux services sociaux et de santé (p. ex. centres de santé communautaires, hébergement), aux services indépendants de réduction des méfaits (p. ex. SCS/SPS, TAO) et aux soins spécialisés (p. ex. soins entourant le VIH ou la santé mentale, services adaptés à la culture des Autochtones)24. D’autres études et évaluations sont nécessaires pour mieux comprendre les pratiques optimales pour la mise en œuvre de différentes approches.

Certains programmes d’APS ont reçu du financement pour fournir, à titre expérimental, des services sociaux et de santé complets, y compris la gestion de cas, des soins primaires, de la sensibilisation, du soutien par les pairs, du soutien au logement et au revenu, de l’aide juridique et une orientation vers d’autres services24. Dans ces programmes, l’accès à ces services et mesures de soutien a été reconnu comme un élément important pour la santé et le bien-être des participant·e·s24. Mais toutes les personnes exposées aux risques de la toxicité des drogues ne souhaitent pas ou n’ont pas besoin de services sociaux et de santé complets, et certaines pourront préférer obtenir des services à bas seuil d’accessibilité ou recevoir des soins de santé à l’extérieur du programme24. De nouvelles études et évaluations pourront aider à mieux comprendre comment différentes approches d’approvisionnement plus sécuritaire pourraient contribuer à étoffer la gamme des services liés à l’utilisation de substances. 

Les évaluations de programmes et les études qualitatives ont montré que la flexibilité était un élément important de l’approvisionnement plus sécuritaire24,64,65. La flexibilité peut s’exprimer ainsi :

  • La possibilité de choisir comment et quand utiliser ses doses (p. ex. en ayant accès à des doses à emporter)36,66 et quand obtenir ses médicaments (p. ex. heures d’ouverture des pharmacies, accès à des machines distributrices à lecteur biométrique)40
  • La possibilité de sauter des doses sans être pénalisé·e, stigmatisé·e ou soumis·e à une réduction importante de sa dose40
  • La possibilité d’adapter les protocoles des médicaments aux besoins individuels (p. ex. en décidant ensemble des doses, en discutant de l’endroit, de l’horaire et des pratiques de distribution de préférence)24,26,40

Certain·e·s prestataires de soins de santé ont fait remarquer que la flexibilité des programmes actuels d’approvisionnement plus sécuritaire est limitée par le modèle médical dans lequel ils évoluent65. Ces prestataires ont souligné la nécessité d’une plus grande diversité des modèles afin de pouvoir s’adapter aux différents besoins des gens65.

Participation des personnes qui utilisent des drogues

La participation des communautés concernées à l’élaboration, à la mise en œuvre et à l’évaluation des politiques, des programmes et des services qui leur sont destinés est un principe fondamental de la santé publique et de la réduction des méfaits67–69. Ce principe est souvent illustré par le slogan « Rien à notre sujet sans nous »68. Les personnes qui utilisent des drogues ont joué un rôle déterminant en conceptualisant l’approvisionnement plus sécuritaire et en militant pour sa mise en place70. En faisant participer des personnes qui utilisent des drogues, les programmes ont pu s’adapter aux besoins de la communauté, rejoindre des participant·e·s éventuel·le·s, établir des relations avec ces personnes et accroître la confiance de la communauté24,71. Enfin, il est essentiel de veiller à ce que les personnes qui utilisent des drogues soient au centre de l’élaboration, de la mise en œuvre et de l’évaluation des programmes d’APS pour faire en sorte qu’ils répondent aux besoins des gens24.

Des drogues qui répondent aux besoins

Même si les participant·e·s aux programmes sont nombreux·ses à déclarer que leur utilisation de drogues non réglementées a diminué, certaines personnes continuent à se procurer du fentanyl sur le marché non réglementé24,36,42. L’une des raisons principales est que les doses offertes dans les programmes sont trop faibles pour répondre à leurs besoins (p. ex. pour procurer les effets recherchés ou pour soulager des symptômes de sevrage en raison d’une grande tolérance aux opioïdes)24,42,44. Autrement dit, les participant·e·s restent exposé·e·s à un risque de décès lié à la toxicité des drogues et à d’autres préjudices s’ils et elles continuent d’obtenir des substances du marché non réglementé. 

Pour rendre les programmes plus efficaces, plus adéquats et plus souples, il est essentiel de corriger l’écart entre les besoins des personnes et les médicaments offerts61. Les facteurs à prendre en compte sont les suivants :

  • Il faut satisfaire les besoins en matière de puissance des médicaments. Les comprimés d’hydromorphone, généralement associés à des opioïdes à longue durée d’action, ne sont pas toujours assez puissants pour permettre aux personnes ayant une tolérance élevée aux opioïdes d’éviter les symptômes de sevrage ou de ressentir les effets désirés24
  • Il faut répondre aux besoins quant au type de produit recherché (p. ex. fentanyl, héroïne, cocaïne ou méthamphétamine de qualité pharmaceutique)64,72
  • Il faut également répondre aux préférences en matière de mode de consommation. Cela inclut des substances plus sécuritaires pouvant être fumées. Les drogues fumées sont maintenant le mode de consommation de prédilection et aussi celui qui entraîne le plus de décès lié à la toxicité des drogues dans certaines régions24,26,65,73,74.
  • Des benzodiazépines et d’autres sédatifs ont été ajoutés dans des drogues offertes sur le marché non réglementé (souvent dans le fentanyl), ce qui peut entraîner une tolérance12. Fournir un approvisionnement plus sécuritaire en benzodiazépines pour réduire les symptômes de sevrage a été cerné comme une solution importante à envisager le cas échéant72.

Références 

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  2. Service d’analyse des drogues (SAD) de Santé Canada. Pleins feux : L’évolution du fentanyl au Canada au cours des 11 dernières années. Longueuil (QC) : gouvernement du Canada; mars 2023. Accessible à : https://www.canada.ca/fr/sante-canada/services/publications/vie-saine/evolution-fentanyl-canada-11-annees.html  
  3. Lourenço L, Kelly M, Tarasuk J et al. The hepatitis C epidemic in Canada: an overview of recent trends in surveillance, injection drug use, harm reduction and treatment. Canada Communicable Disease Report. 2021;47(12):505-14. 
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La production de ce document a été rendue possible grâce à une contribution financière du Programme sur l’usage et les dépendances aux substances (PUDS) de Santé Canada. Les opinions exprimées ici ne reflètent pas nécessairement celles de Santé Canada.