Evusheld : association de deux anticorps pour la réduction du risque d’infection par le SARS-CoV-2

Les vaccins à ARNm de première génération contre le SARS-CoV-2 ont été conçus pour réduire le risque de manifestations graves de la maladie chez les personnes contractant le virus, ainsi que pour prévenir les hospitalisations et les décès dus aux complications de la COVID-19. Les vaccins ont été conçus pour combattre la souche originale du SARS-CoV-2, laquelle s’est propagée largement durant la première moitié de 2020.

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Depuis ce temps-là, le SARS-CoV-2 a muté de sorte à produire plusieurs souches différentes que l’on appelle couramment des variants. Les vaccins à ARNm continuent de conférer une protection très efficace contre les complications graves, les hospitalisations et la mort, et les injections de rappel recommandées par les autorités de la santé publique sont une très bonne idée. Il semble toutefois que l’efficacité de ces vaccins soit en train de diminuer graduellement à mesure que le SARS-CoV-2 continue de muter.

Une autre manière de protéger contre le SARS-CoV-2 consiste à donner un traitement antiviral comme Paxlovid (association des médicaments nirmatrelvir et ritonavir) aux personnes récemment infectées par le virus qui sont très à risque d’éprouver de graves symptômes de la COVID-19.

Anticorps monoclonaux

Outre les vaccins et Paxlovid, des essais cliniques ont révélé une autre façon de réduire le risque de symptômes graves de la COVID-19, laquelle consiste à injecter des anticorps conçus pour s’attaquer au SARS-CoV-2. On trouve les anticorps en question dans le sang des personnes ayant survécu à une infection causée par un coronavirus, soit celui responsable de l’éclosion de SRAS (syndrome respiratoire aigu sévère) en 2003 ou encore celui à l’origine de la pandémie actuelle (SARS-CoV-2), car ces deux virus appartiennent à la même famille. Des scientifiques ont modifié les anticorps afin d’en favoriser le maintien de concentrations élevées dans le système circulatoire pendant beaucoup plus longtemps que normalement (vraisemblablement pendant des mois).

On parle d’anticorps monoclonaux lorsqu’on fabrique des anticorps en grande quantité en laboratoire (à partir de clones de lymphocytes B) pour traiter des infections virales, le cancer et d’autres maladies.

Evusheld

Le plus récent produit à base d’anticorps monoclonaux approuvé au Canada s’appelle Evusheld, nom de marque donné à une association de deux anticorps utilisés ensemble, soit le tixagévimab et le cilgavimab. On a mis ces derniers à l’épreuve dans un essai clinique randomisé et contrôlé contre placebo portant le nom de Provent. Cet essai s’est déroulé auprès de plus de 5 000 personnes présentant un risque élevé d’éprouver de graves symptômes de la COVID-19. L’équipe de recherche a constaté qu’une seule dose des deux anticorps réduisait significativement le risque de contracter une forme symptomatique de la COVID-19.

Détails de l’étude

L’équipe de recherche a recruté des participant·e·s entre novembre 2020 et mars 2021. Leur profil moyen lors de l’admission à l’étude était le suivant :

  • 54 % d’hommes, 46 % de femmes
  • âge : 43 % avaient 60 ans ou plus, 24 % avaient 65 ans ou plus, et 4 % avaient 75 ans ou plus
  • principaux groupes ethnoraciaux : Blanc·he·s – 73 %; Noir·e·s – 17 %; Asiatiques : 3 %
  • indice de masse corporelle (IMC) : 29 kg/m2

Environ 75 % des participant·e·s présentaient au moins un facteur sous-jacent qui augmentait leur risque d’éprouver des complications graves de la COVID-19, dont les suivants :

  • obésité : 42 %
  • hypertension : 36 %
  • tabagisme : 21 %
  • diabète : 14 %
  • asthme : 11 %
  • maladie cardiovasculaire (autre que l’hypertension) : 8 %
  • cancer : 7 %
  • maladie pulmonaire obstructive chronique (MPOC) : 5 %
  • insuffisance rénale chronique : 5 %
  • insuffisance hépatique chronique : 5 %
  • utilisation de traitements affaiblissant le système immunitaire : 3 %

Les participant·e·s ont été réparti·e·s au hasard (dans un rapport de 2 à 1) pour recevoir soit des anticorps soit un placebo. Après avoir reçu une injection par un·e professionnel·le de la santé, les participant·e·s ont été surveillé·e·s pendant une à quatre heures afin que tout effet secondaire puisse être décelé.

Les participant·e·s choisi·e·s pour le traitement par anticorps ont reçu ces derniers en deux injections intramusculaires de 1,5 ml (dans les fesses). Une injection contenait le tixagévimab et l’autre, le cilgavimab.

Toute personne dont le test de dépistage du SARS-CoV-2 s’est révélé positif durant le processus de recrutement a été exclue de l’étude.

Au moment de leur admission à l’étude, aucune des personnes inscrites à l’essai Provent n’avait été vaccinée contre la COVID-19.

Une fois l’inscription faite, le personnel infirmier de l’étude communiquait avec les participant·e·s une fois par semaine pour évaluer leurs symptômes éventuels de la COVID-19. Les personnes présentant des symptômes caractéristiques de la COVID-19 passaient alors un test de dépistage et d’autres évaluations. Le suivi des participant·e·s durait un minimum de 83 jours, et s’est étalé sur tout au plus six mois dans de nombreux cas.

Résultats : innocuité

On utilise le terme manifestations indésirables pour décrire toute manifestation malheureuse qui se produit dans le cadre d’un essai clinique. Certaines d’entre elles sont attribuables aux effets secondaires du traitement ou des médicaments utilisés. Dans certains cas, les manifestations indésirables sont attribuables au processus pathologique sous-jacent, et d’autres encore sont la conséquence d’évènements n’ayant aucun rapport avec l’étude, tels des accidents.

Selon l’équipe de recherche de l’étude Provent, « la plupart des manifestations indésirables étaient d’intensité légère ou modérée ». Voici la répartition globale des manifestations indésirables signalées :

Personnes recevant Evusheld

  • n’importe quelle manifestation indésirable : 35 %
  • manifestations indésirables légères : 22 %
  • manifestations indésirables modérées : 11 %
  • manifestations indésirables graves : 2 %

Personnes recevant le placebo

  • n’importe quelle manifestation indésirable : 35 %
  • manifestations indésirables légères : 21 %
  • manifestations indésirables modérées : 11 %
  • manifestations indésirables graves : 2 %

Réactions aux sites d’injection

Des réactions aux sites d’injection — rougeur, enflure, démangeaisons cutanées — se sont produites chez 2 % des personnes recevant les anticorps et 2 % des personnes recevant le placebo.

Anaphylaxie

Historiquement, une très faible proportion de personnes traitées par des anticorps monoclonaux pour une variété de maladies ont fait une grave réaction allergique connue sous le nom d’anaphylaxie. Dans cette étude, une personne a éprouvé d’intenses douleurs à la poitrine peu de temps après son injection d’Evusheld. Dans un premier temps, l’équipe de recherche a soupçonné l’anaphylaxie, mais une investigation et l’évolution subséquente de son état ont permis de croire que la douleur thoracique était une manifestation d’une maladie cardiovasculaire.

Un total de huit personnes sont décédées, comme suit :

Personnes recevant Evusheld

  • deux personnes sont décédées de complications pulmonaires liées à la COVID-19
  • deux personnes sont décédées de surdoses de drogues
  • une personne est décédée d’une crise cardiaque
  • une personne est décédée d’une insuffisance rénale

Personnes recevant le placebo

  • deux personnes sont décédées de surdoses de drogues

Après investigation, on a déterminé qu’aucun des décès n’était attribuable aux anticorps ou au placebo.

Efficacité

La distribution des sujets de l’étude ayant été infectés par le SARS-CoV-2, comme confirmé par test d’amplification en chaîne par polymérase (PCR), et qui ont subséquemment été atteints de la COVID-19, était comme suit :

  • Evusheld : 0,2 %
  • placebo : 1 %

Une analyse statistique a révélé une réduction relative de 77 % du risque de présenter la COVID-19 chez les personnes traitées par Evusheld. Cette différence est significative du point de vue statistique, c’est-à-dire non attribuable au seul hasard.

L’effet protecteur d’Evusheld était semblable chez plusieurs sous-groupes de participant·e·s, sans égard au sexe, à l’âge, à l’origine ethnoraciale, etc.

Taux d’anticorps

Après avoir été injectés par un médicament ou un anticorps, les muscles ont tendance à libérer lentement ces produits dans la circulation. Dans l’étude Provent, les taux d’anticorps ont atteint leur plus haute concentration un mois après l’injection, puis ont diminué graduellement pendant les cinq mois suivants.

À retenir

Les résultats de l’étude Provent laissent croire qu’Evusheld peut réduire significativement le risque de COVID-19. Il reste tout de même des facteurs à considérer à propos du déploiement de ce traitement. Nous en parlons dans la prochaine section.

—Sean R. Hosein

RÉFÉRENCE :

Levin MJ, Ustianowski A, De Wit S et al. Intramuscular AZD7442 (Tixagevimab-Cilgavimab) for prevention of COVID-19. New England Journal of Medicine. 2022 Jun 9;386(23):2188-2200.