- Des chercheurs aux États-Unis ont découvert que l’usage d’opioïdes augmentait le risque de pneumonie.
- Les opioïdes peuvent augmenter la susceptibilité en affaiblissant la réaction immunitaire à une infection.
- Le risque était de deux à trois fois plus élevé chez les personnes séropositives utilisant des opioïdes.
Les opioïdes sont prescrits pour le soulagement de la douleur sévère chez les personnes avec ou sans l’infection par le VIH. Cependant, au cours de la dernière décennie, de plus en plus de recherches suggèrent que l’usage d’opioïdes prescrits a été lié à un risque accru d’infections, particulièrement de pneumonies bactériennes qui nécessitent une hospitalisation.
Les opioïdes peuvent jouer un rôle dans l’augmentation de la susceptibilité aux infections bactériennes, notamment en :
- affaiblissant la réaction immunitaire face aux infections bactériennes
- réduisant la capacité du corps à tousser et à se débarrasser des germes dans les poumons
- réduisant la capacité du corps à produire du mucus qui aide à la protection des poumons
Des chercheurs aux États-Unis ont récemment mené une vaste étude observationnelle qui comparait les renseignements reliés à la santé de plus de 4 000 personnes ayant eu besoin d’une hospitalisation pour cause de pneumonie et ceux reliés à la santé de plus de 25 000 autres personnes qui n’ont pas eu besoin d’hospitalisation pour cause de pneumonie. Ils ont découvert que les gens qui avaient contracté une pneumonie étaient plus susceptibles d’avoir :
- des prescriptions d’opioïdes antérieures ou actuelles
- des prescriptions d’opioïdes en moyenne de doses plus élevées
- des opioïdes prescrits que les chercheurs ont qualifiés d’immunosuppresseurs
Également, les personnes séropositives étaient plus à risque de contracter une pneumonie lorsqu’on leur prescrivait des opioïdes que les personnes séronégatives.
Les chercheurs ont fortement suggéré aux médecins et aux infirmières de garder en tête les résultats de l’étude lors de la prescription d’opioïdes.
Détails de l’étude
Des chercheurs des hôpitaux et des cliniques de la Veterans’ Administration de plusieurs centres aux États-Unis ont analysé les informations relatives à la santé, recueillies entre l’année 2000 et la fin de 2012. Ils ont comparé les données de 4 246 personnes hospitalisées pour pneumonie et de 25 392 personnes non atteintes de pneumonie. Ils se sont concentrés sur l’utilisation des opioïdes 12 mois avant l’épisode de pneumonie ou au moment du diagnostic de pneumonie.
Les chercheurs ont classé les opioïdes ainsi :
- immunosuppresseurs – codéine, dihydrocodéine, fentanyl, morphine
- non-immunosuppresseurs – hydrocodone, hydromorphone, oxycodone, tramadol
- effets immunologiques inconnus – lévorphanol, mépéridine, méthadone, pentazocine, propoxyphène, tapentadol
Découvertes essentielles
Dans l’ensemble, en tenant compte de plusieurs facteurs, les chercheurs ont trouvé des liens statistiques entre l’utilisation d’opioïdes (immunosuppresseurs ou non) et le risque accru de pneumonie. Ainsi, l’utilisation d’opioïdes augmentait généralement le risque de contracter une pneumonie.
Lorsque les chercheurs ont examiné l’utilisation d’opioïdes immunosuppresseurs en particulier (en comparaison avec aucun opioïde), le risque de pneumonie était encore plus élevé.
L’importance de la posologie
Lorsque les chercheurs ont évalué la prise d’opioïdes selon leur dose, ils ont remarqué ces relations :
- ceux qui utilisent actuellement des opioïdes immunosuppresseurs à haute dose ont un risque de pneumonie multiplié par trois
- ceux qui utilisent actuellement des opioïdes immunosuppresseurs à haute dose ou à effets immunologiques inconnus ont un risque de pneumonie multiplié par deux
Infection par le VIH
Les chercheurs ont découvert que, en général, les personnes séropositives avaient un risque de deux à trois fois plus élevé de contracter une pneumonie en utilisant des opioïdes que les personnes séronégatives qui utilisaient des opioïdes.
À garder en tête
Dans la présente étude, les chercheurs ont trouvé ce qu’ils appellent une « association forte et indépendante entre les opioïdes prescrits et le risque d’hospitalisation liée à la [pneumonie] ». Ce risque était présent chez les gens, peu importe leur statut d’infection par le VIH, mais ce risque était plus marqué chez les personnes séropositives.
Chez les gens utilisant actuellement des opioïdes, le risque de pneumonie était augmenté si de plus fortes doses d’opioïdes étaient utilisées.
Selon les chercheurs, les personnes séropositives avaient un risque accru de contracter une pneumonie à de faibles doses d’opioïdes, « particulièrement dans le cas des opioïdes immunosuppresseurs ».
Ajustement pour les sources de biais possibles
Les études observationnelles peuvent parfois tirer des conclusions qui ont, par inadvertance, été influencées par des sources de biais cachées. Afin de réduire cette possibilité, les chercheurs ont tenu compte de certains facteurs, dont : les diagnostics de dépendance aux opioïdes, la consommation excessive d’alcool, l’usage du tabac et l’usage d’autres médicaments immunosuppresseurs comme les corticostéroïdes et les traitements de greffe. Ce faisant, ils ont tout de même trouvé un lien entre l’utilisation d’opioïdes prescrits et le risque accru de pneumonie. Compte tenu de la rigueur appliquée à l’analyse des données, les conclusions de l’étude sont hautement évocatrices et importantes.
Que faire?
L’étude fournit des informations importantes sur les dommages potentiels associés à l’utilisation médicale des opioïdes. Les chercheurs ont déclaré que les professionnels de la santé devraient être conscients du risque de pneumonie lors de la prescription d’opioïdes. Comme il est parfois nécessaire de prescrire des opioïdes sur le plan médical, les chercheurs ont déclaré qu’« il fallait veiller à prendre en compte d’autres facteurs connus pour modifier le risque de [pneumonie] », notamment l’arrêt du tabac et la vaccination contre la pneumonie bactérienne.
— Sean R. Hosein
RÉFÉRENCES :
- Edelman EJ, Gordon KS, Crothers K, et al. Association of prescribed opioids with increased risk of community-acquired pneumonia among patients with and without HIV. JAMA Internal Medicine. 2019; in press.
- Wiese AD, Griffin MR, Schaffner W, et al. Opioid analgesic use and risk for invasive pneumococcal diseases. Annals of Internal Medicine. 2018 Sep 4;169(5):355.
- Plein LM, Rittner HL. Opioids and the immune system - friend or foe. British Journal of Pharmacology. 2018 Jul;175(14):2717-2725.