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CATIE
  • Une étude ontarienne trouve que les personnes ayant le VIH sont plus susceptibles d’utiliser les services de santé mentale
  • Les personnes ayant le VIH sont quatre fois plus susceptibles d’avoir recours aux soins de santé mentale d’urgence
  • Les chercheurs recommandent des évaluations de routine de la santé mentale pour les patients ayant le VIH

Des études menées dans plusieurs pays à revenu élevé portent à croire que les problèmes de santé mentale et de dépendance sont plus fréquents chez les personnes ayant le VIH que chez les personnes séronégatives. Par exemple, lors d’une étude récente, des chercheurs au Royaume-Uni ont examiné des études menées depuis 2000 et trouvé que les taux de dépression, d’anxiété, de troubles du sommeil et de pensées autodestructrices étaient considérablement plus élevés parmi les personnes séropositives que chez les personnes séronégatives.

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En Ontario

Une équipe de chercheurs de l’Université de Toronto ont étudié l’utilisation des services de santé mentale et de traitement des dépendances par les personnes séropositives et séronégatives vivant en Ontario. L’équipe a constaté que, en 2013 et 2014, les adultes séropositifs étaient plus susceptibles de recevoir des soins pour un problème de santé mentale ou une dépendance auprès de médecins de soins primaires et de psychiatres. Les personnes séropositives étaient également plus susceptibles de faire soigner ces problèmes dans le service des urgences d’un hôpital.

Cette étude menée à l’Université de Toronto est importante pour deux raisons en particulier : elle confirme le besoin plus pressant qu’ont les personnes séropositives de services de santé mentale et de traitement des dépendances, et elle fournit le raisonnement nécessaire pour améliorer la prestation de tels services. Une telle amélioration pourrait faire partie d’un effort plus large visant à renforcer la santé mentale et le bien-être des personnes vivant avec le VIH et à faciliter la prévention et le traitement des dépendances.

Détails de l’étude

Les chercheurs ont décortiqué de nombreuses bases de données ontariennes, y compris celles de l’Institute for Clinical and Evaluative Sciences (ICES), afin de constituer un échantillon de 2 758 186 de personnes séronégatives et de 5 095 personnes séropositives.

Les chercheurs ont trouvé que les personnes séropositives figurant dans leur étude étaient plus susceptibles que les personnes séronégatives d’avoir le profil de base suivant :

  • sexe masculin
  • âge entre 35 et 55 ans
  • résidants d’un quartier à faible revenu
  • résidants d’une zone urbaine

Les chercheurs ont également constaté que les personnes séropositives étaient plus susceptibles d’avoir les affections médicales suivantes :

  • asthme
  • diabète
  • maladie pulmonaire obstructive chronique (MPOC)
  • insuffisance cardiaque congestive

Résultats : accent sur la santé mentale et les dépendances

Les chercheurs ont trouvé que les personnes ayant le VIH étaient plus susceptibles de s’être fait diagnostiquer une variété de troubles de santé mentale et de dépendances, y compris les suivants :

Troubles non psychotiques (dans cette catégorie, il s’agissait dans une grande mesure de l’anxiété et de la dépression mais de nombreux autres problèmes de santé mentale y figuraient aussi)

  • personnes séropositives : 27 %
  • personnes séronégatives : 22 %

Selon les chercheurs, les personnes séropositives « étaient plus susceptibles d’avoir reçu plusieurs diagnostics de troubles de santé mentale et de dépendances », y compris les suivants :

Combinaison de troubles psychotiques et de consommation de substances

  • personnes séropositives : 5 %
  • personnes séronégatives : 1 %

Intensité de l’utilisation des services

Lorsque les chercheurs ont tenu compte de l’âge et d’autres facteurs, ils ont trouvé que, dans l’ensemble, les personnes séropositives étaient plus susceptibles de chercher de l’aide pour les problèmes de santé mentale et de dépendance des façons suivantes (comparativement aux personnes séronégatives) :

  • 1,5 fois plus susceptibles de consulter un médecin de famille
  • trois fois plus susceptibles de consulter un psychiatre
  • près de quatre fois plus susceptibles d’aller au service des urgences d’un hôpital
  • près de cinq fois plus susceptibles d’être admis à l’hôpital pour recevoir des soins psychiatriques

Selon les chercheurs, les personnes séropositives faisaient preuve d’une « utilisation plus intensive des services » que les personnes séronégatives et ce, sans égard au genre de praticien consulté.

Pourquoi ce lien entre le VIH et le besoin de services de santé mentale?

Les raisons de l’utilisation plus fréquente des soins de santé mentale et des dépendances parmi les personnes séropositives sont complexes. Des études antérieures avaient trouvé que les problèmes de santé mentale et de dépendance pouvaient accroître le risque de contracter le VIH pour les personnes touchées. Le stress de vivre avec le VIH et les attitudes négatives qui continuent d’affliger cette infection dans la communauté jouent sans doute un rôle aussi.

Même si les chercheurs ne l’ont pas mentionné spécifiquement, il existe des facteurs biologiques qui jouent un rôle dans la santé mentale. À titre d’exemple, rappelons que le VIH infecte les cellules du système immunitaire, dont certaines se rendent jusqu’au cerveau et s’y logent. Ces cellules infectées libèrent des signaux chimiques et des protéines virales qui peuvent perturber le fonctionnement du cerveau. Ainsi, le diagnostic précoce du VIH, l’offre immédiate d’un traitement antirétroviral (TAR) et une bonne observance thérapeutique sont tous très importants pour maintenir la santé générale et celle du cerveau en particulier.

Il existe une sphère de recherche émergente qui s’intéresse à l’inflammation chronique et à son impact défavorable sur la santé mentale de certaines personnes séronégatives. Notons que l’infection au VIH fait augmenter les taux d’inflammation et d’activation immunitaire. Le TAR peut réduire considérablement l’inflammation et l’activation immunitaire liées au VIH mais sans pour autant les éliminer. À long terme, il est possible que l’inflammation chronique (et l’activation immunitaire) rende certaines personnes séropositives plus vulnérables aux problèmes de santé mentale.

Dans la présente étude, les chercheurs n’ont pas été en mesure d’obtenir de l’information sur les différentes combinaisons de TAR utilisées par les participants, ni sur leur charge virale ou les mesures de routine de l’inflammation effectuées.

Enjeux à considérer

L’équipe de chercheurs torontois a qualifié de « préoccupants » les taux élevés de services de santé mentale et de traitement des dépendances dispensés dans les hôpitaux. Les chercheurs ont affirmé ceci à ce propos :

« Il est possible que la gravité de la maladie soit pire [chez les personnes séropositives] par rapport aux personnes séronégatives, et plus difficile à gérer. Cependant, l’accès rapide aux services communautaires peut être un défi. Une étude de suivi incluant l’interrogation de personnes séropositives faisant face à plusieurs barrières chevauchantes aux soins pourrait aider à expliquer ces résultats. »

Enjeux socioéconomiques

Selon les chercheurs, un nombre disproportionné de personnes séropositives figurant dans cette étude vivaient dans des quartiers à faible revenu. Cela laisse croire que ces personnes étaient désavantagées. « Le fait d’être désavantagé peut créer de multiples barrières à l’accès aux soins de santé mentale et des dépendances, ce qui peut causer le report de la recherche de soins et entraîner des crises nécessitant des soins d’urgence. Le manque de ressources peut également mener à l’insécurité alimentaire et à la précarité du logement, ce qui peut perturber la capacité d’une personne à rechercher des soins réguliers, à suivre une stratégie thérapeutique et/ou à gérer les effets secondaires des médicaments », a souligné l’équipe.

Impact de diagnostics complexes

Selon les chercheurs, des études antérieures avaient trouvé que les personnes vivant avec de nombreux diagnostics de troubles mentaux « avaient moins de soutien social et étaient moins susceptibles d’assister aux rendez-vous prévus avec leurs soignants ». Ces personnes pourraient avoir besoin de plus de soutien pour améliorer leur accès aux soins et [leur observance] des plans de traitement du VIH, des troubles mentaux et des dépendances, et plus particulièrement les médications ».

Dépistages de routine pour la détection précoce des problèmes

Les chercheurs ont affirmé que « l’augmentation, dans le cadre des soins primaires, des dépistages de routine des troubles mentaux et des dépendances chez les patients séropositifs peut faciliter la reconnaissance et l’orientation [des patients] vers des [soignants] spécialisés ayant une expertise en VIH qui sont disposés à accepter des patients séropositifs ». Pour cette raison, les chercheurs encouragent les médecins et les infirmières à faire des dépistages de routine.

Faciliter l’accès aux soins

Les chercheurs ont recommandé que les systèmes de santé augmentent l’accessibilité de « modèles de soins intégrés et centrés sur le client » qui dispensent des services de santé mentale et de traitement des dépendances dans la communauté. Une telle mesure réduirait le fardeau pour les patients qui « doivent naviguer et coordonner leurs soins dans divers secteurs distincts du système de santé ».

À retenir

Cette étude menée à l’Université de Toronto constitue un bon pas en avant pour l’exploration préliminaire de l’utilisation des services de santé mentale et de traitement des dépendances par les personnes vivant avec le VIH. L’étude révèle que les problèmes de santé mentale et de dépendance sont fréquents parmi la population séropositive de l’Ontario. De plus, les chercheurs ont constaté un taux d’utilisation relativement élevé des services des urgences hospitaliers, ce qui doit intéresser les planificateurs des politiques de santé. Les services des urgences sont généralement congestionnés et ne constituent pas l’endroit idéal pour faire soigner un problème médical de routine ou chronique, à moins qu’il y ait une crise ou un problème médical pressant. Que tant de gens aient cherché des soins dans les urgences souligne la nécessité de rendre le traitement des problèmes de santé mentale et de dépendance plus largement accessible dans la communauté. D’autres études sont nécessaires pour comprendre comment on peut surmonter les barrières aux services nécessaires pour stabiliser et améliorer la santé mentale et la qualité de vie des personnes vivant avec le VIH.

Ressources

Association canadienne pour la santé mentale

Santé mentale – Ministère de la Santé et des Services sociaux du Québec (MSSS)

Le VIH et le bien-être émotionnel

Santé mentale, consommation de substances et VIHTraitementActualités 219

VIH et problèmes cérébrauxTraitementActualités 204

Des chercheurs américains explorent l'impact de la dépression sur le risque de crise cardiaqueTraitementActualités 217

—Sean R. Hosein

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