Dépistage de l’hépatite C et arrimage aux soins en une visite par le biais d’une unité mobile

Madrid, Espagne
2021

Un programme de dépistage de l’hépatite C et d’arrimage aux soins en une seule visite a eu recours à une unité mobile dont le personnel se composait d’un·e infirmier·ère et d’un·e spécialiste en navigation/éducation pour visiter divers endroits à Madrid, en Espagne, où se trouvaient des personnes à risque élevé pour l’hépatite C (c.-à-d., des points chauds). Le personnel effectuait un test de dépistage danticorps au point de service. Si le résultat se révélait positif, il effectuait un test d’ARN au PDS (le test PoC Xpert HCV VL) pour confirmer si la personne était atteinte d’une infection active au virus de l’hépatite C (VHC). Le cas échéant, la personne était immédiatement arrimée à un hôpital pour commencer un traitement contre l’hépatite C si elle le souhaitait. En combinant le dépistage et les tests de confirmation lors de la même visite, cette méthode a permis à 93 % des personnes ayant une infection active au VHC d’être examinées par un·e médecin à l’hôpital et à 77 % de commencer un traitement contre l’hépatite C.

Description du programme

Une unité mobile (soit une fourgonnette et une voiture satellite) visitait les points chauds de Madrid selon un horaire préétabli et effectuait des tests de dépistage pour les personnes à risque pour l’hépatite C. Le programme travaillait en collaboration avec des unités mobiles de réduction des méfaits et visitait des organismes offrant de l’aide sociale, des endroits publics, des refuges pour itinérant·e·s et des endroits où avait lieu du travail du sexe.

Le personnel de l’unité mobile se composait d’un·e infirmier·ère et d’un·e spécialiste en navigation/éducation. Ce·tte dernier·ère était un·e travailleur·se social·e formé·e en dépistage de maladies infectieuses et qui avait de l’expérience dans le travail auprès de personnes qui utilisent des drogues.

Le personnel effectuait le dépistage de l’hépatite C en utilisant le test rapide de dépistage d’anticorps du VHC OraQuick; environ 20 minutes étaient nécessaires pour réaliser le test et obtenir les résultats. Les personnes qui obtenaient un résultat négatif bénéficiaient de counseling de la part du/de la spécialiste en navigation/éducation sur les façons de prévenir la transmission de l’hépatite C. On offrait immédiatement aux personnes obtenant un résultat positif un test de mesure de l’ARN du VHC (c.-à-d. un test de confirmation). Le test PoC Xpert HCV VL était utilisé pour la mesure de l’ARN; les échantillons étaient analysés dans l’unité mobile et les résultats étaient disponibles en 60 minutes. Le test PoC Xpert HCV VL est une pièce d’équipement qui permet d’effectuer la mesure de l’ARN du VHC sur place dans un échantillon de sang prélevé au bout du doigt. Ce test n’est pas autorisé actuellement pour les diagnostics au Canada, mais il a été utilisé dans des contextes expérimentaux. En attendant les résultats, on fournissait aux personnes de l’information sur la prévention de l’hépatite C et la réduction des méfaits.

En Espagne, le traitement de l’hépatite C peut seulement être prescrit par des spécialistes en milieux hospitaliers. On offrait aux personnes qui obtenaient un résultat positif au test de confirmation de l’hépatite C une consultation à l’hôpital la même journée. Si elles acceptaient, on les conduisait à l’hôpital, accompagnées du spécialiste en navigation/éducation. Une fois à l’hôpital, un·e médecin qui pouvait prescrire le traitement de l’hépatite C les examinait la même journée. On donnait aux personnes qui commençaient un traitement contre l’hépatite C un rendez-vous pour confirmer la guérison de l’hépatite C (c.-à-d. l’obtention d’une réponse virologique soutenue [RVS]) 12 semaines après la date de fin prévue de leur traitement.

Si une personne ayant obtenu un résultat positif au test de confirmation de l’hépatite C ne souhaitait pas bénéficier d’une consultation à l’hôpital la même journée, on communiquait avec elle à une date ultérieure pour déterminer un autre moment.

Résultats

Une étude observationnelle a été menée du 1er février 2019 au 15 mars 2020. Lors de cette période, 2 001 personnes provenant de populations à risque ont passé un test de dépistage de l’hépatite C. La majorité des participant·e·s (68 %) étaient des hommes, 48 % étaient des migrant·e·s, 58 % n’avaient aucun revenu et 66 % étaient en situation d’itinérance. Parmi les personnes ayant passé un test de dépistage, 43 % utilisaient des drogues et parmi ces dernières, 50 % s’injectaient des drogues (33 % des personnes de ce groupe s’étaient injecté des drogues au cours de la dernière année).

Parmi les personnes ayant passé un test de dépistage, 380 (19 %) ont obtenu un test positif aux anticorps de l’hépatite C et 136 (7 %) étaient atteintes d’une infection active au VHC. Parmi ces dernières :

  • 134 (99 %) ont obtenu leurs résultats de dépistage à l’hépatite C
  • 133 (98 %) ont pris un rendez-vous à l’hôpital
  • 126 (93 %) ont été examinées par un·e médecin une fois à l’hôpital
  • 105 (77 %) ont commencé un traitement pour l’hépatite C

On a établi un lien direct entre l’infection active au VHC et le fait d’être âgé·e de 50 ans et plus et d’utiliser des drogues. Les personnes qui avaient récemment utilisé des drogues injectables présentaient les taux les plus faibles de consultation à l’hôpital (89 %) et d’amorce d’un traitement de l’hépatite C (70 %).

Même si l’étude a été réalisée pour évaluer l’arrimage aux soins, des données liées à la RVS (c.-à-d., la guérison) étaient disponibles pour 67 % (70/105) des personnes qui commençaient un traitement. De ce groupe, 94 % (66/70) ont été guéri·e·s de l’hépatite C à la suite de leur traitement.

Qu’est-ce que cela signifie pour les prestataires de services?

Cette étude a démontré qu’un programme qui intégrait le dépistage et les tests de confirmation lors d’une même visite par l’entremise d’une unité mobile et qui offrait des services de navigation réussissait à diagnostiquer un grand nombre de personnes atteintes d’une infection active au VHC en plus de les arrimer à un·e médecin qui pouvait leur prescrire un traitement la même journée. La capacité à effectuer des tests de dépistage et à diagnostiquer l’hépatite C lors d’une même visite a des conséquences importantes lorsqu’il s’agit de favoriser l’amorce d’un traitement de l’hépatite C. Même si le test PoC Xpert HCV VL n’est pas autorisé actuellement à des fins de diagnostic au Canada, des études de recherche l’ont utilisé. L’étude a révélé qu’en plus d’amener les services là où se trouvent les personnes et de diminuer le nombre de visites requises pour commencer un traitement, le recours à un·e navigateur·trice peut aider à favoriser l’arrimage aux soins liés à l’hépatite C dans les populations marginalisées (p. ex., les personnes qui utilisent des drogues).

Bien que le point central de la présente étude était le dépistage de l’hépatite C et l’arrimage aux soins, il est important de tenir compte de la façon de rester en contact avec les personnes que l’on rejoint à l’aide de ce type de programme pour possiblement les arrimer à d’autres services de santé et services sociaux nécessaires et pour confirmer la RVS.

Ressources connexes

Programme de lutte contre l’hépatite C « Connais ton statut » au sein de la Première Nation Ahtahkakoop

Un modèle de dépistage et de traitement de l’hépatite C dirigé par du personnel infirmier dans un service communautaire de santé mentale

Check Hep C

Référence

Ryan P, Valencia J, Cuevas G et al. Detection of active hepatitis C in a single visit and linkage to care among marginalized people using a mobile unit in Madrid, Spain. International Journal of Drug Policy. 2021;96:103424.