La toxoplasmose
Qu’est-ce que la toxoplasmose?
La toxoplasmose est une maladie infectieuse causée par le parasite Toxoplasma gondii (T. gondii). Il est possible de l’attraper en mangeant des viandes pas assez cuites, dont le porc, l’agneau, le boeuf, la viande de gibier sauvage (chevreuil, etc.), mais aussi la chair crue de fruits de mer comme les huîtres, les palourdes et les moules qui ont été contaminés par ce parasite. Les chats sont des porteurs naturels de ce parasite et peuvent donc le transmettre aux humains qui entrent accidentellement en contact avec leurs matières fécales.
La toxoplasmose touche, dans bien des cas, le cerveau et la moelle épinière, mais peut aussi se loger dans d’autres parties de l’organisme, dont les yeux, le cœur, les poumons, la peau, le foie et le tube digestif. Lorsque la toxoplasmose se déclare chez une personne vivant avec le VIH en Amérique du Nord, elle est d’ordinaire attribuable à la réactivation d’une ancienne infection jusqu’alors inactive. En règle générale, le parasite ne provoque aucun symptôme au début de l’infection car le système immunitaire est encore capable de le contenir. Cependant, si l’infection par le VIH n’est pas traitée, le système immunitaire se dégrade et perd la capacité de contrôler le parasite. Lorsque votre compte de CD4+ baisse sous la barre des 200 cellules/mm3, votre risque de voir apparaître des symptômes de toxoplasmose et de contracter d’autres infections liées au sida augmente. La prise du traitement contre le VIH (communément appelé TAR pour traitement antirétroviral) exactement de la manière prescrite contribue à maintenir un compte de CD4+ élevé et permet d’éviter une (ré)apparition de la toxoplasmose.
Symptômes
Les symptômes de la toxoplasmose peuvent comprendre les suivants :
- maux de tête constants et diffus
- épisodes de fièvre
- confusion
Les symptômes peuvent également inclure des déficits neurologiques focaux, tels que :
- faiblesse, voire paralysie, limitée à un côté du corps
- troubles de la parole, notamment une difficulté à prononcer les mots
- faiblesse ou perte de sensation dans les extrémités
- perte d’une partie du champ visuel
Les déficits neurologiques focaux sont causés par des complications (lésions, tumeurs, infections, accidents cérébrovasculaires) survenant dans une région du cerveau. Ces déficits provoquent la perte d’une fonction motrice ou sensorielle spécifique, selon la région. Par exemple, une lésion de toxoplasmose située sur le tronc cérébral peut causer des difficultés à parler ou à avaler; une lésion sur la partie du cerveau responsable de la vue peut amener la perte d’une partie du champ visuel.
Diagnostic
Les symptômes de la toxoplasmose ressemblent à ceux de plusieurs autres affections du cerveau et de la moelle épinière. Pour confirmer le diagnostic, il faut donc effectuer des examens physiques, des tests en laboratoire et des examens d’imagerie (tomodensitométrie [TDM] et imagerie à résonance magnétique [IRM]).
Une personne présentant l’un des symptômes énumérés ci-dessus doit subir un examen physique comportant plusieurs tests conçus pour évaluer l’état du système nerveux. Si la présence d’un trouble neurologique est soupçonnée, la personne sera dirigée vers un neurologue (médecin spécialisé dans les maladies du cerveau et du système nerveux).
Des échantillons de sang sont prélevés et analysés pour détecter le parasite responsable de la toxoplasmose ou tout autre microbe susceptible de causer des symptômes semblables. La plupart des médecins s’appuient sur l’évaluation d’une combinaison de symptômes et sur les résultats des tests de laboratoire et de TDM ou d’IRM avant de poser le diagnostic de toxoplasmose. Cependant, dans la phase initiale de l’infection, les symptômes de la toxoplasmose peuvent être légers ou simuler ceux d’autres affections, et ainsi, une consultation avec un neurologue pourra s’avérer nécessaire pour aider vos médecins à mieux déceler la cause de vos symptômes. Le neurologue procède à un examen physique exhaustif destiné à évaluer la fonction cognitive (aptitude à penser et à raisonner), la fonction motrice (y compris la dimension, la force et le tonus des muscles), la fonction des nerfs sensoriels (capacité à distinguer entre une pression légère et une pression ferme); la coordination (capacité à effectuer certains mouvements : se tenir en équilibre, marcher, etc.) et les réflexes. Cette série de tests permet de préciser où la lésion est située dans le cerveau. Il n’est pas possible de confirmer un diagnostic de toxoplasmose à partir de ces examens, mais ceux-ci permettent d’éliminer plusieurs autres possibilités.
Quelquefois, on effectue une ponction lombaire pour prélever un échantillon du liquide céphalorachidien. Celui-ci est analysé pour détecter la présence du parasite T. gondii ou de tout autre microbe susceptible de provoquer les mêmes symptômes. Bien qu’il permette d’isoler les anticorps de la toxoplasmose dans le liquide céphalo-rachidien, cet examen n’aboutit pas pour autant à un diagnostic confirmé de toxoplasmose. Il permet toutefois d’éliminer plusieurs autres possibilités.
Grâce à un examen par TDM, il est possible de prendre des images de l’intérieur du cerveau et de la moelle épinière. Chez les patients atteints de toxoplasmose, cet examen peut détecter de nombreuses lésions au niveau du cortex et des structures profondes de la matière grise, y compris les ganglions de la base. Il faut cependant noter que les résultats de ces examens peuvent varier largement; il peut y avoir des lésions simples, des lésions diffuses avec rehaussement, ainsi que des lésions en l’absence de rehaussement.
La seule façon de confirmer définitivement un diagnostic de toxoplasmose est d’effectuer une biopsie cérébrale. Celle-ci consiste à ouvrir le crâne et à prélever un fragment du cerveau aux fins d’analyse sous le microscope. Cette intervention est tellement invasive et potentiellement si dangereuse qu’on n’y a presque jamais recours.
Traitement
La décision de traiter la toxoplasmose à domicile ou à l’hôpital repose sur plusieurs facteurs, dont la taille, le nombre et le siège des lésions, les symptômes présentés et l’aptitude de l’individu à tolérer les médicaments.
Le traitement le plus efficace consiste à administrer deux antibiotiques oraux, à savoir la pyriméthamine (50 à 100 mg par jour) et la sulfadiazine (4 à 8 grammes par jour), en association avec de l’acide folique ou vitamine B9 (10 mg/jour). En règle générale, les symptômes s’atténuent en moins d’une semaine et la tomographie révèle une résorption des lésions après 14 jours environ. Cependant, le traitement doit se poursuivre pour un minimum de six semaines.
Relativement parlant, la pyriméthamine est bien tolérée par la plupart des gens, mais elle peut provoquer nausées, vomissements et diarrhée au cours des premiers jours du traitement. Les effets secondaires de la sulfadiazine comprennent éruptions cutanées, démangeaisons, douleurs articulaires, fièvre, frissons et sensibilité à la lumière. Les deux agents peuvent provoquer des réactions allergiques, mais la sensibilité aux sulfamides (dont la sulfadiazépine) est très courante chez les personnes séropositives. L’acide folique est prescrit pour protéger la moelle osseuse des effets nocifs de ces médicaments.
La pyriméthamine n’est pas toujours disponible ou il arrive que l’accès à ce médicament soit tardif. Il se peut donc que certains infectiologues prescrivent d’autres traitements contre la toxoplasmose, notamment une association de deux antibiotiques (le triméthoprime et le sulfaméthoxazole) appelée cotrimoxazole (vendue sous le nom commercial Bactrim ou Septra, et en versions génériques). Une fois les signes et les symptômes disparus et l’infection maîtrisée, un traitement quotidien doit être amorcé pour assurer la suppression permanente du parasite. Le traitement suppressif consiste habituellement en doses réduites des mêmes médicaments utilisés pour traiter l’infection active. Tôt ou tard, à mesure que le système immunitaire s’améliore grâce au TAR, les médecins cessent de prescrire le traitement suppresseur; consultez la section sur la prévention de la toxoplasmose pour plus de détails.
TAR et toxoplasmose
Les lignes directrices américaines de traitement révèlent que la plupart des médecins encourageraient vraisemblablement leurs patients atteints de toxoplasmose à entreprendre un TAR dans les « deux ou trois semaines suivant l’établissement du diagnostic de cette infection ». Le traitement antirétroviral aide à renforcer la capacité du système immunitaire à lutter contre la toxoplasmose et de nombreux autres microbes.
Prévention de la toxoplasmose
La prise de doses réduites de médicaments pour prévenir un autre épisode de toxoplasmose est appelée « prophylaxie secondaire ». Une fois qu’une personne se rétablit d’une toxoplasmose, les médecins lui prescrivent un traitement suppresseur pour prévenir les récurrences. D’après les lignes directrices américaines : « L’association pyriméthamine-sulfadiazine-leucovorine est un traitement suppresseur très efficace pour les patients [ayant contracté la toxoplasmose] et offre une protection contre la pneumonie à Pneumocystis [PCP, une autre complication mortelle du sida] ». Toutefois, les lignes directrices présentent d’autres associations de médicaments à envisager pour prévenir les récurrences de la toxoplasmose.
Les mêmes lignes directrices font la mise en garde suivante en ce qui concerne l’abandon de la prophylaxie antitoxoplasmose :
« Les patients adultes et adolescents suivant un traitement d’entretien à long terme contre la toxoplasmose [dont la forme cérébrale est appelée « encéphalite toxoplasmique » (ET)] présenteront un faible risque de récurrence de l’ET lorsqu’ils auront terminé avec succès le traitement initial de l’ET, à condition qu’ils ne présentent aucun signe ni symptômes d’ET et que leur nombre de CD4 augmente et reste supérieur à 200 cellules/ml pendant plus de 6 mois après le traitement antirétroviral. L’arrêt du traitement d’entretien à long terme chez ces patients peut être envisagé, bien que des récurrences aient parfois été rapportées. Cette recommandation est fondée sur les résultats obtenus chez un nombre limité de patients dans le cadre d’études d’observation et d’un essai clinique à répartition aléatoire, ainsi que sur des déductions tirées de données cumulatives plus vastes montrant l’innocuité de l’arrêt de la prophylaxie secondaire contre d’autres infections opportunistes chez des patients atteints d’une maladie de stade avancé. Pour déterminer si l’arrêt du traitement est envisageable, certains spécialistes recommandent d’effectuer une IRM du cerveau pour vérifier la résorption des lésions cérébrales. »
Soin des chats
Les animaux s’avèrent une source importante de camaraderie et de soutien affectif pour les gens. Pour réduire le risque de contracter la toxoplasmose, les personnes séropositives qui ont un chat devraient prendre certaines précautions :
- l’usage d’une litière qui ne crée pas de poussières
- le port de gants et d’un masque pour retirer tous les jours les excréments de la litière
- l’usage d’une litière qui ne crée pas de poussières peut aider à empêcher l’inhalation du parasite causant la toxoplasmose susceptible d’être présent dans la poussière
- toujours se laver méticuleusement les mains après avoir nettoyé la litière du chat
- garder les chats à l’intérieur et éviter de manipuler les chats errants
- nourrir les chats d’aliments séchés ou en conserve que l’on peut se procurer dans le commerce ou d’aliments de table bien cuits
Salubrité des aliments
Voici d'autres moyens de réduire le risque d'exposition au parasite responsable de la toxoplasmose et à d'autres germes :
- se laver les mains après tout contact avec de la viande crue et tout contact avec le sol
- laver fruits et légumes crus avant de les manger
- éviter la consommation de viandes ou de fruits de mer crus ou insuffisamment cuits (boeuf, poulet, porc, agneau et viande de gibier sauvage)
Références
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Auteur(s) : Maclean D, Foley R, Hosein SR
Traduction : Côté, A
Publié : 2021