- Des chercheurs ont comparé les tendances de consommation de substances chez les femmes séropositives et les femmes séronégatives.
- Les femmes vivant avec le VIH étaient plus susceptibles de déclarer consommer la plupart des substances, sauf l’alcool.
- Les auteurs réclament des programmes de réduction des méfaits adaptés aux femmes vivant avec le VIH.
Nombre d’études ont trouvé que la consommation de substances (drogues et alcool) est relativement courante parmi certaines populations ayant l’infection au VIH ou particulièrement à risque. En général, la consommation continue de quantités dangereuses de certaines substances peut nuire à la santé du cerveau et d’autres parties du corps. Cela peut donner lieu à une mauvaise qualité de vie et à une réduction de l’espérance de vie.
Des chercheurs affiliés à l’Étude canadienne sur la santé sexuelle et reproductive des femmes vivant avec le VIH au Canada (CHIWOS) ont interrogé 1 422 femmes séropositives au sujet de questions se rapportant à la santé. L’information recueillie est analysée et incorporée dans des rapports utilisés pour orienter les politiques et les initiatives futures visant à améliorer la santé et le bien-être des femmes vivant avec le VIH.
Une analyse récente des données de CHIWOS s’est concentrée sur l’information recueillie auprès des femmes séropositives à l’égard de leur consommation de substances. L’équipe de recherche CHIWOS a comparé ces données à un rapport de Statistique Canada aux fins duquel on avait sondé un échantillon représentatif comptant plus de 40 000 femmes séronégatives. Les chercheurs ont trouvé que, en général, les femmes séropositives faisaient état d’une consommation plus importante de la plupart des substances, à l’exception de l’alcool. « Ces résultats semblent indiquer la nécessité de programmes de réduction des méfaits centrés sur les femmes afin d’améliorer la santé des femmes vivant avec le VIH au Canada », ont affirmé les chercheurs.
Détails de l’étude
CHIWOS est une étude communautaire qui se poursuit auprès de 1 422 femmes séropositives âgées de 16 ans ou plus. Près de 4 % des femmes inscrites à CHIWOS sont transgenres. Pour la présente analyse, les chercheurs ont recueilli de l’information auprès des femmes par le biais d’une entrevue ou d’un sondage réalisé lors de l’inscription des participantes à CHIWOS entre 2013 et 2015. Les femmes ont été recrutées dans des cliniques VIH, des organismes de lutte contre le sida, des réseaux de pairs et des réseaux en ligne. Selon l’équipe CHIWOS, le sondage a été administré par des « paires associées de recherche dont plusieurs partageaient l’expérience de vivre avec le VIH et avaient été embauchées et formées pour faire de la recherche communautaire ».
Voici un bref profil moyen des femmes au moment de la réalisation du sondage :
- âge : 43 ans
- années écoulées depuis le diagnostic de VIH : 11
- principaux groupes ethnoraciaux : Blancs – 44 %; Africains, Caribéens ou Noirs – 30 %; Autochtones – 22 %
- 83 % des femmes ont dévoilé qu’elles prenaient un traitement contre le VIH (TAR)
- charge virale : 87 % des femmes sous TAR avaient une charge virale inférieure à 50 copies/ml
- compte de CD4 : 51 % des femmes avaient un compte de CD4 supérieur à 500 cellules/mm3
Femmes séronégatives
Aux fins de la comparaison des tendances de consommation, les chercheurs ont utilisé des données recueillies par Statistique Canada entre 2013 et 2014 dans le cadre de l’Enquête sur la santé des collectivités canadiennes (ESCC). Le sondage en question avait été rempli par 46 851 femmes séronégatives vivant en Colombie-Britannique, en Ontario ou au Québec, les trois principales provinces qui ont contribué à fournir des données à CHIWOS. L’ESCC a exclu les personnes vivant dans des réserves, des institutions ou des bases militaires des Forces canadiennes. Bien que l’ESCC ait recueilli des données sur la consommation de tabac et d’alcool auprès de toutes les participantes, elle n’a pas recueilli de données sur la consommation d’autres substances auprès des femmes de l’Ontario et du Québec. Ainsi, pour faciliter la comparaison des données de CHIWOS, les chercheurs n’ont utilisé que les données recueillies en Colombie-Britannique à l’égard de la consommation d’autres substances.
Résultats : tendances de l’usage de tabac
Les chercheurs ont trouvé qu’une plus grande proportion de femmes séropositives fumaient du tabac et fumaient davantage de cigarettes chaque jour que les femmes séronégatives. Voici les proportions de femmes ayant dévoilé qu’elles fumaient du tabac tous les jours :
- séropositives : 41 %
- séronégatives : 14 %
Tendances de la consommation d’alcool
Les femmes séropositives étaient plus nombreuses à déclarer ne jamais boire d’alcool que les femmes séronégatives. De plus, les chercheurs ont affirmé que les femmes séropositives étaient moins susceptibles d’utiliser l’alcool de façon problématique que les femmes séronégatives.
Voici la répartition des femmes n’ayant rapporté aucune consommation d’alcool :
- séropositives : 41 %
- séronégatives : 28 %
Voici les proportions de femmes ayant dévoilé un usage problématique d’alcool (binge drinking [calage d’alcool] selon les chercheurs) au moins une fois par mois :
- séropositives : 20 %
- séronégatives : 35 %
Tendances de la consommation de marijuana
Voici les proportions de femmes ayant dévoilé une consommation régulière de marijuana non prescrite au cours du mois précédent (ces données se rapportent exclusivement aux femmes de la Colombie-Britannique, sans égard au statut VIH) :
- séropositives : 15 %
- séronégatives : 7 %
Tendances de la consommation de cocaïne et de crack
Voici les proportions de femmes ayant dévoilé une consommation régulière de cocaïne ou de crack :
- séropositives : 17 %
- séronégatives : 0,1 %
Voici la répartition de la consommation occasionnelle de cocaïne ou de crack :
- séropositives : 8 %
- séronégatives : 2 %
Tendances de la consommation d’amphétamines (speed)
Voici les proportions de femmes ayant dévoilé une consommation régulière ou occasionnelle d’amphétamines :
- séropositives : 3 %
- séronégatives : 0,1 %
Tendances de la consommation d’héroïne
Voici les proportions de femmes ayant dévoilé une consommation régulière ou occasionnelle d’héroïne :
- séropositives : 11 %
- séronégatives : 0,1 %
À retenir
Nous parlons dans cet article d’une étude transversale, ce qui veut dire que les données ont été recueillies auprès de chaque participante à un seul moment dans le temps.
Il est possible que plusieurs facteurs ne figurant pas dans cette analyse de CHIWOS aient eu un impact sur la consommation d’alcool, de tabac et d’autres substances parmi les participantes, tels que les suivants :
- faible revenu
- chômage
- problèmes de santé mentale
- discrimination et stigmatisation liées au VIH
- exposition à des abus et à la violence
Malgré ce bémol, les résultats de CHIWOS se rapportant aux tendances de la consommation de tabac font écho à des études menées auprès de femmes séropositives en France et aux États-Unis. De plus, d’autres études américaines ont permis de constater des taux semblables, voire plus élevés dans certains cas, de consommation de substances parmi certaines femmes ayant le VIH ou particulièrement à risque.
Vers l’avenir
À la lumière de leurs résultats, les chercheurs affiliés à CHIWOS ont fait plusieurs déclarations, dont les suivantes :
- « Rendre les interventions accessibles aux femmes qui consomment [des substances et qui prennent] le TAR, particulièrement dans les cas où la consommation de substances compromet le maintien du traitement efficace du VIH. »
- « L’intégration des services de traitement de la consommation de substances dans les contextes de soins primaires du VIH pourrait contribuer à améliorer la qualité des soins du VIH et de la prestation des soins. »
- « Nos résultats permettent aussi de prôner l’élaboration de stratégies de réduction des méfaits ciblées et centrées sur les femmes dans lesquelles les besoins particuliers des femmes sont reconnus de façon efficace, et aussi d’interventions qui permettent aux pairs de contribuer à la prestation des soins et des programmes de traitement. »
CHIWOS est une étude très utile qui continuera de recueillir des données à l’avenir, ce qui permettra d’analyser les données à plusieurs moments étalés dans le temps, autrement dit une étude longitudinale. Les études de ce genre peuvent révéler des tendances ou changements de comportements, ainsi que d’autres enjeux.
Ressources
Des chercheurs canadiens réclament une meilleure intégration de la planification des grossesses dans les soins des femmes vivant avec le VIH – Nouvelles CATIE
Profil : les femmes de CHIWOS – Vision positive
—Sean R. Hosein
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