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  • Le rapport des cellules CD4 aux cellules CD8 brosse un portrait général de la santé du système immunitaire
  • Une équipe de recherche de Montréal a étudié près de 4 000 personnes suivant une variété de traitements contre le VIH
  • Les personnes suivant un traitement à base d’inhibiteur de l’intégrase avaient de meilleurs rapports CD4/CD8

Si elle n’est pas traitée, l’infection chronique au VIH cause une lente dégradation du système immunitaire qui s’opère de façons multiples. Cependant, lorsqu’un traitement contre le VIH (TAR) est amorcé et suivi de façon rigoureuse, la quantité de VIH dans le sang se met à chuter. D’ordinaire, dans les trois à six mois suivant l’amorce du TAR, la quantité de virus dans le sang tombe jusqu’à un niveau tellement faible qu’elle est couramment qualifiée d’« indétectable ».

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Une charge virale indétectable procure de nombreux bienfaits, dont les suivants :

  • Elle permet au système immunitaire de commencer à se réparer.
  • Selon nombre d’études, les personnes qui maintiennent une charge virale indétectable en suivant fidèlement leur traitement ne transmettent pas le virus à leurs partenaires sexuel·le·s.

Les bienfaits du TAR sont tellement énormes que les scientifiques prévoient une espérance de vie quasi normale pour de nombreuses personnes suivant ce genre de traitement.

Le TAR ne peut toutefois résoudre tous les ennuis de santé, et des problèmes immunologiques subtils persistent malgré une bonne observance thérapeutique. Certaines études ont révélé que le système immunitaire semblait vieillir prématurément chez des personnes séronégatives âgées atteintes du CMV, un virus herpétique courant. Notons aussi que l’infection au CMV est associée à une réduction du rapport CD4/CD8 chez cette population. Il est donc possible que la co-infection au CMV exerce des effets semblables, ou d’autres, dans le système immunitaire des personnes vivant avec le VIH.

Une autre préoccupation se rapporte aux intestins. Le revêtement intestinal agit comme une barrière, empêchant l’entrée de protéines produites par des bactéries et champignons nuisibles présents dans le tractus digestif. Certaines études laissent croire que la fonction de barrière accomplie par les intestins est affaiblie chez les personnes séropositives. Comme cette faiblesse persiste malgré une bonne observance du TAR, elle peut permettre aux protéines de certains champignons et bactéries d’entrer dans le sang. Ces protéines risquent à leur tour d’affaiblir partiellement le système immunitaire.

Des scientifiques du Canada et d’autres pays étudient actuellement des moyens de réduire l’impact des co-infections comme le CMV et de renforcer la fonction de barrière accomplie par les intestins.

Étude sur le TAR et les rapports de lymphocytes T

Une manière d’évaluer la santé globale du système immunitaire consiste à mesurer le nombre d’un groupe de lymphocytes T appelés cellules CD4+. En plus de neutraliser le VIH, le TAR a pour objectif d’accroître le nombre de cellules CD4+ dans le sang à moyen et à long terme. Un nombre plus élevé de cellules CD4+ (également dit compte de CD4+) réduit considérablement le risque d’infections liées au sida.

Une autre mesure permettant d’évaluer la santé du système immunitaire consiste à déterminer le rapport entre deux sortes de lymphocytes T, soit les CD4+ et les CD8+. On appelle cette mesure le rapport CD4/CD8.

Chez les personnes séronégatives en bonne santé, un rapport CD4/CD8 normal se situe à 1,0 ou plus. Or, sous les attaques lancées par le VIH contre le système immunitaire, le rapport CD4/CD8 baisse sous le seuil de 1,0 chez la plupart des personnes jusqu’à ce qu’elles commencent un TAR.

Montréal

Une équipe de recherche de Montréal a mené une étude sur l’impact du TAR sur l’évolution des rapports CD4/CD8 au fil du temps. Elle a constaté que certaines personnes sous TAR finissaient par atteindre un rapport de 1,0 ou plus. Les chances d’un tel succès augmentaient chez les personnes dont l’association de médicaments anti-VIH incluait un inhibiteur de l’intégrase, par rapport aux autres classes de médicaments.

Comme il s’agit ici d’une étude par observation, ses résultats ne peuvent fournir que des suggestions d’explications, mais pas de conclusions définitives. Cependant, comme le recrutement pour cette étude avait lieu dans des cliniques VIH de Montréal, ses résultats reflètent bien les personnes que les médecins de ces cliniques traitent réellement, ainsi que les expériences auxquelles ils et elles peuvent s’attendre. Notons également que d’autres études ont révélé que les schémas thérapeutiques fondés sur un inhibiteur de l’intégrase étaient plus susceptibles d’être associés à une amélioration des rapports de lymphocytes T.

Détails de l’étude

L’équipe de recherche a analysé des données se rapportant à la santé de 3 907 personnes inscrites à la Cohorte VIH du Québec. L’analyse a porté plus précisément sur des données recueillies entre 2006 et 2017.

L’équipe de recherche a réparti les participant·e·s en trois groupes en fonction du médicament servant de base à leur traitement contre le VIH, comme suit :

  • schéma thérapeutique à base d’analogue non nucléosidique (INNTI : inhibiteur non nucléosidique de la transcriptase inverse); cette classe inclut l’éfavirenz (ingrédient d’Atripla et vendu en versions génériques), la rilpivirine (Edurant et ingrédient d’Odefsy) et la doravirine (ingrédient de Delstrigo et de Pifeltro)
  • schéma thérapeutique à base d’inhibiteur de la protéase; cette classe inclut le darunavir (vendu sous le nom de Prezista et en versions génériques) et l’atazanavir (vendu sous le nom de Reyataz et en versions génériques)
  • schéma thérapeutique à base d’inhibiteur de l’intégrase; cette classe inclut le bictégravir (ingrédient de Biktarvy), le dolutégravir (Tivicay et ingrédient de Dovato et de Triumeq) et le raltégravir (vendu sous le nom d’Isentress et en versions génériques)  

Voici la répartition des participant·e·s :

  • groupe recevant l’analogue non nucléosidique : 972 personnes
  • groupe recevant l’inhibiteur de la protéase : 1 996 personnes
  • groupe recevant l’inhibiteur de l’intégrase : 939 personnes

Lors de leur admission à l’étude, les participant·e·s avaient le profil moyen suivant :

  • âge : 42 ans
  • compte de CD4+ : 300 cellules/mm3
  • rapport CD4/CD8 : 0,4
  • 25 % avaient une charge virale indétectable (moins de 50 copies/ml); notons que la plupart des participant·e·s ne suivaient pas de TAR ou n’en avaient commencé un que récemment
  • temps écoulé depuis le diagnostic de VIH : six ans
  • durée de la participation à l’étude : cinq ans

Résultats

Au cours de l’étude, les membres de chaque groupe de traitement ont atteint un rapport CD4/CD8 de 1,0 ou plus dans les proportions suivantes :

  • analogue non nucléosidique : 14 %
  • inhibiteur de la protéase : 10 %
  • inhibiteurs de l’intégrase : 20 %

Une analyse statistique a confirmé que les personnes recevant un schéma thérapeutique à base d’inhibiteur de l’intégrase étaient plus susceptibles de voir leur rapport CD4/CD8 se normaliser.

Lorsque l’équipe de recherche a restreint la portée de son analyse, de sorte qu’il n’y figurait que 1 041 personnes recevant un premier schéma thérapeutique, les tendances ont été semblables. Autrement dit, les personnes qui prenaient un inhibiteur de l’intégrase étaient plus susceptibles d’atteindre un rapport CD4/CD8 de 1,0 ou plus.

À retenir

La force de cette étude réside dans la durée relativement longue de sa période d’observation, soit cinq ans. De plus, elle a porté sur des personnes qui fréquentaient typiquement des cliniques offrant des soins et des traitements contre le VIH.

Nous parlons ici d’une étude par observation. Lors des études de ce genre, les scientifiques sont parfois amené·e·s à tirer involontairement des conclusions faussées. Notons toutefois que l’équipe de Montréal a pris des mesures pour minimiser cette possibilité. Il reste que des facteurs qu’elle n’a pas pris en considération auraient pu influer sur ses conclusions. À titre d’exemple, notons que l’équipe n’a pas évalué l’observance thérapeutique. Mentionnons aussi que les raisons motivant le choix du schéma thérapeutique prescrit à certaines personnes n’étaient pas claires.

Quoi qu’il en soit, les résultats de cette étude montréalaise ressemblent largement à ceux de plusieurs autres études par observation. Une étude susceptible de donner des résultats plus concluants, tel un essai clinique randomisé d’envergure et de longue durée, coûterait cher et prendrait beaucoup de temps à mener. De plus, à cette époque où le financement de la recherche est limité, il est peu probable que la priorité soit donnée à un essai randomisé d’envergure conçu principalement pour évaluer des changements dans le rapport CD4/CD8 et leur association avec le type de TAR utilisé.

En examinant une étude comme celle menée à Montréal, il est important de se rappeler que les lignes directrices thérapeutiques évoluent. Elles privilégient au fil du temps différentes classes de médicaments au fur et à mesure que les données d’essais cliniques s’accumulent. À titre d’exemple, notons qu’au début de l’ère du TAR, on recommandait couramment les inhibiteurs de la protéase, mais les recommandations ont changé subséquemment en faveur des analogues non nucléosidiques. Or, depuis l’arrivée des inhibiteurs de l’intégrase il y a une décennie, cette classe est considérée comme la plus efficace et la mieux tolérée, d’où la priorité que lui accordent maintenant les principales lignes directrices. Il est possible qu’une nouvelle classe de médicaments se révèle plus efficace ou mieux tolérée à l’avenir et qu’elle vole conséquemment la place aux inhibiteurs de l’intégrase.

Même si l’étude montréalaise a permis d’observer des résultats favorables grâce à l’usage d’inhibiteurs de l’intégrase, personne ne devrait changer précipitamment son traitement à la lumière des résultats de cette étude ou de n’importe quelle autre étude. Avant de choisir un schéma thérapeutique, les médecins prennent soin de considérer de nombreux facteurs, et tout changement de schéma augmente le risque d’effets secondaires. Une réflexion attentive s’impose donc lorsqu’il s’agit de modifier un schéma thérapeutique, surtout si le traitement en cours est bien toléré, sécuritaire et efficace contre le VIH.

Rapports de lymphocytes T et risque de cancer

Lors d’une grande étude nord-américaine menée auprès de plus de 83 000 personnes séropositives sous TAR, on a constaté que les personnes ayant un rapport CD4/CD8 de 0,8 ou plus étaient considérablement moins susceptibles de présenter un cancer que les personnes ayant un rapport CD4/CD8 de 0,3. Plus précisément, chez celles-ci, le risque de cancer était 24 % plus élevé que chez les personnes ayant un rapport CD4/CD8 plus élevé. Notons que d’autres études ont également trouvé une association entre un faible rapport de lymphocytes T et un risque accru de cancer et d’autres complications. Cela ne veut pas dire toutefois que la plupart des personnes ayant un faible rapport CD4/CD8 finiront par présenter un cancer ou d’autres complications, mais seulement que leur risque est plus élevé.

—Sean R. Hosein

Ressources

Guidelines for the Use of Antiretroviral Agents in Adults and Adolescents with HIVDepartment of Health and Human Services

Un faible rapport CD4/CD8 peut aider à prévoir le risque de cancer chez les personnes séropositives, selon une étude nord-américaineNouvelles CATIE

L’attention portée à l’inflammation se tourne vers les champignons – TraitementActualités 232

Usage du létermovir pour atténuer l’inflammation et d’autres problèmes chez les personnes séropositivesNouvelles CATIE

Le CMV serait un problème pour le système immunitaire, selon des chercheurs canadiensNouvelles CATIE

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