Les changements menstruels

Qu’est-ce qu’un cycle menstruel « régulier » ?

Pour de nombreuses personnes qui ont un cycle menstruel régulier,  les règles commencent chaque mois à une date prévisible et sont de la même durée d’un mois à l’autre, et l’écoulement de sang est reconnu comme typique par la personne en question. D’autres n’ont pas de cycle particulièrement régulier, et cette irrégularité constitue en fait leur « normale ». La majorité des personnes ont une bonne idée de ce qui est normal pour ce qui est de leur cycle menstruel et sont en mesure de reconnaître les changements. À différents moments de leur vie, la plupart des personnes ayant des règles connaissent des changements dans leur cycle menstruel, peu importe si elles vivent avec le VIH ou pas.

Certains de ces changements menstruels sont considérés comme « normaux », notamment ceux associés à la grossesse, à la ménopause (moment plutôt tardif dans la vie où les règles cessent une fois pour toutes et que la grossesse devient impossible) ou la périménopause (période précédant la ménopause où il se produit des changements dans les hormones reproductives et où le corps amorce sa transition vers la ménopause).

Parfois, cependant, les changements sont inattendus et pourraient indiquer un problème de santé. Certaines personnes constatent des irrégularités telles que des menstruations plus ou moins fréquentes que d’ordinaire ou l’absence totale de règles dans certains cas. D’autres encore s’aperçoivent de changements dans l’écoulement menstruel, celui-ci étant plus ou moins abondant lors de certains cycles. La quantité du saignement risque aussi de ne pas être la même d’un cycle à l’autre. Même si elles ne sont pas enceintes (ni en période de périménopause ou de ménopause), certaines personnes n’ont pas de règles pendant quelques mois; on appelle cette affection l’aménorrhée. Certaines autres trouvent que leurs symptômes prémenstruels deviennent plus difficiles à tolérer qu’auparavant.

Alors que de nombreuses femmes cisgenres (non transgenres) et de nombreux hommes trans ne suivant pas de traitement à la testostérone ont des saignements durant leurs règles, certaines femmes trans sous traitement hormonal ont des « cycles sans saignement ». Ces derniers sont caractérisés par de la douleur abdominale, des crampes et d’autres symptômes qui surviennent régulièrement tous les mois. Bien que les cycles menstruels des femmes trans soient mal compris, nous espérons que les renseignements sur les symptômes prémenstruels dans la présente section leur seront utiles.

Quel est l’impact du VIH ?

Les premières études sur le VIH menées chez des femmes cisgenres ont permis de constater plusieurs différences entre les cycles menstruels des femmes séropositives et ceux des femmes séronégatives. Des études plus récentes et mieux conçues ont révélé plus clairement les irrégularités menstruelles directement associées à la séropositivité. Les études en question semblent indiquer que, même si les irrégularités menstruelles sont fréquentes chez les personnes vivant avec le VIH, elles sont courantes au sein de la population générale aussi, ce qui mène à la conclusion que le VIH a peut-être moins d’impact sur les menstruations que l’on ne croyait auparavant.

Les études ne font état d’aucune différence significative entre la prévalence de douleurs menstruelles excessives (appelées dysménorrhée), la présence de symptômes périménopausiques ou l’apparition précoce de la ménopause. Toutefois, certaines études ont permis de constater une plus grande probabilité de règles manquées (aménorrhée) et de règles retardées (oligoménorrhée) chez les femmes séropositives dont l’infection avait beaucoup progressé parce qu’elles ne suivaient pas de thérapie antirétrovirale. Une étude d’envergure en particulier a révélé que les femmes ayant un compte de CD4 inférieur à 200 étaient près de 50 pour cent plus susceptibles d’avoir des cycles irréguliers, l’intervalle entre les règles pouvant aller jusqu’à 90 jours ou plus.

Déterminer la cause

Il est très important de signaler tout changement d’ordre menstruel à son médecin parce que les changements de ce genre peuvent signaler la présence de problèmes de santé liés aux organes reproducteurs, dont la dysplasie cervicale (changements précoces dans les cellules du col de l’utérus susceptibles d’évoluer en cancer), la maladie inflammatoire pelvienne ou les affections endométriales. Il va de soi que les changements menstruels peuvent aussi indiquer une grossesse, et que les saignements inattendus pendant la grossesse peuvent signaler une fausse couche.

Les irrégularités menstruelles sont souvent le résultat de diverses infections transmissibles sexuellement ou de presque n’importe quelle infection grave, qu’elle soit liée au VIH ou pas. Chez certaines personnes séropositives, un faible taux de plaquettes (thrombocytopénie) peut contribuer à des saignements menstruels plus abondants que normalement.

De nombreux autres problèmes de santé peuvent contribuer aux irrégularités menstruelles, y compris le stress, les troubles alimentaires, les changements hormonaux (non seulement dans les taux d’œstrogène et de progestérone mais aussi dans les hormones thyroïdiennes, hypophysaires et surrénaliennes), la perte de poids excessive, les excès d’exercice et la présence d’autres maladies chroniques comme le diabète, l’insuffisance rénale ou hépatique et la maladie inflammatoire intestinale.

De nombreux médicaments et drogues sont susceptibles de causer des changements menstruels, y compris les anticoagulants, les antidouleurs narcotiques, la méthadone et l’héroïne, les corticostéroïdes et d’autres. On a également fait le lien entre les menstruations abondantes et certains des premiers inhibiteurs de la protéase à arriver sur le marché (notamment le ritonavir à dose élevée [Norvir], le saquinavir [Invirase] et l’indinavir [Crixivan]). Comme l’aspirine éclaircit le sang, le rendant moins susceptible de coaguler, l’utilisation à long terme de doses élevées de ce médicament peut contribuer à des règles plus abondantes et de plus longue durée. Enfin, notons que certains suppléments à base de plantes médicinales imitent les effets de l’œstrogène, ce qui peut donner lieu à des irrégularités menstruelles.

Une étude canadienne a permis de découvrir un risque accru de carence en magnésium chez les personnes vivant avec le VIH. La carence en magnésium peut entraîner de nombreux problèmes, notamment l’aggravation de plusieurs symptômes prémenstruels. Certains problèmes menstruels risquent à leur tour d’aggraver des affections liées au VIH. À titre d’exemple, notons que les personnes séropositives affichent une incidence élevée d’anémie (faible taux de globules rouges) et que le risque est plus élevé durant les règles parce que la perte de sang durant celles-ci s’ajoute à d’autres causes. Comme le risque d’anémie est déjà plus élevé en présence de l’infection au VIH, les menstruations abondantes sont un sujet à discuter avec son médecin, car elles risquent d’aggraver l’anémie. Pour en savoir plus sur celle-ci, consultez la section intitulée La fatigue.  

Le traitement des irrégularités menstruelles varie selon la nature du problème et sa cause. Pour les personnes dont l’infection au VIH n’est pas traitée, il peut être très important de commencer une thérapie antirétrovirale efficace pour faire augmenter le compte de CD4, car les faibles comptes sont associés à un risque accru d’irrégularités menstruelles. S’il y a une perte de poids importante (syndrome de dépérissement), la thérapie antirétrovirale favorisera la prise de poids et aidera peut-être à restaurer des cycles menstruels normaux.

L’essentiel est de toujours signaler les changements dans votre cycle menstruel à votre médecin afin que les tests appropriés soient effectués pour en déterminer la cause.

Thérapies hormonales

Les faibles taux de l’hormone testostérone ont déjà été associés au syndrome de dépérissement lié au VIH (amaigrissement extrême). Bien que la testostérone soit habituellement considérée comme une hormone masculine, l’organisme de la femme cisgenre en produit aussi en quantité plus faible. Des chercheurs ont testé un timbre transdermique quotidien de testostérone auprès d’un groupe de femmes cisgenres aux prises avec le syndrome de dépérissement et un faible taux de testostérone. La dose utilisée a suffi tout juste à ramener leur taux de testostérone au niveau normal. Six des femmes n’avaient plus de règles avant de participer à l’étude; après 12 semaines de traitement, les menstruations étaient réapparues chez cinq d’entre elles.

En cas d’irrégularités menstruelles, on recommande la prise de pilules anticonceptionnelles pour aider à restaurer la régularité et à réduire les saignements abondants. Dans certains cas, on recommande une hormonothérapie substitutive pendant la périménopause ou le début de la ménopause, surtout lorsque les symptômes sont très intenses. À cause de préoccupations concernant les risques éventuels de cancer associés aux hormonothérapies de longue durée, on préfère l’usage à court terme pour le soulagement de symptômes spécifiques. Toute hormonothérapie substitutive doit faire l’objet d’une discussion exhaustive avec son médecin. Entre autres, cette discussion doit aborder la possibilité d’interactions avec les autres médicaments.

Symptômes prémenstruels

Il peut se produire des symptômes physiques et émotionnels dans la semaine précédant les règles, et ils risquent de persister pendant toute la durée de celles-ci. Bien que presque toutes les femmes qui ont des menstruations éprouvent des symptômes prémenstruels jusqu’à un certain degré, de nombreuses personnes vivant avec le VIH font état de symptômes plus fréquents et plus intenses. Il existe de nombreux remèdes pour soulager les symptômes prémenstruels; vous aurez peut-être besoin d’en essayer plusieurs avant de trouver celui qui marche pour vous.

La bonne nouvelle est qu’il est possible d’alléger considérablement voire d’éliminer les symptômes prémenstruels. Quelle que soit l’approche que vous choisissez, il sera utile de tenir un journal pour noter comment vous vous sentez, autant sur le plan physique qu’émotionnel, avant de commencer quoi que ce soit de nouveau et pendant plusieurs mois après. Cela vous aidera à déterminer ce qui agit bien et ce qui est inutile afin de pouvoir faire des choix plus judicieux concernant les éléments de votre approche.

Exercice et alimentation

L’exercice régulier peut aider à soulager les symptômes prémenstruels. Un programme d’exercices régulier est un élément important de tout mode de vie sain; si l’activité physique ne fait pas partie de votre vie à l’heure actuelle, le fait de savoir qu’il aide à soulager les symptômes prémenstruels pourrait vous inciter à en faire.

De nombreux experts recommandent de réduire ou de cesser sa consommation de caféine, de sucre, de sel et d’alcool afin d’alléger les symptômes prémenstruels. On a montré que la réduction de l’apport alimentaire en sel permettait de réduire la rétention d’eau et la sensation inconfortable de ballonnement. Il peut être difficile de trouver des aliments sans sel, mais il est possible de réduire la teneur quotidienne en sel de son alimentation en préparant ses repas avec des ingrédients frais et en vérifiant la teneur en sodium sur l’étiquette des emballages de produits alimentaires.

La réduction de sa consommation de caféine peut aussi être utile parce que cette substance est susceptible d’accroître l’anxiété et l’irritabilité associées aux symptômes prémenstruels. N’oubliez pas que la caféine est présente non seulement dans le café et le thé, mais aussi dans de nombreuses boissons gazeuses, le chocolat et plusieurs médicaments en vente libre. L’alcool peut aggraver les maux de tête, la fatigue et la dépression chez les personnes souffrant de symptômes prémenstruels. Si l’alcool fait partie de votre mode de vie, il pourrait être utile de ne pas en boire durant la semaine précédant vos règles.

La recherche indique que la consommation d’une combinaison de glucides donne lieu à une augmentation du taux de sérotonine (substance chimique du cerveau qui procure le sentiment de « bonheur ») et à une réduction de la tension, de la dépression et de la colère chez les personnes aux prises avec ces symptômes prémenstruels. N’importe quelle combinaison d’aliments qui fait augmenter le taux sanguin de tryptophane sera efficace aussi parce que cette substance stimule la production de sérotonine. Les aliments à teneur élevée en glucides, telles les rôties de grains entiers et les céréales chaudes, et les aliments riches en protéines et en tryptophane, tels les produits laitiers et la dinde, font augmenter le taux de sérotonine.

L’ajout de quelques collations riches en glucides pendant quelques jours avant ou durant les règles aide parfois à réduire la détresse émotionnelle qui accompagne parfois les menstruations. Toutefois, si vous en ajoutez à votre alimentation jour après jour, vous risquez de prendre du poids, à moins d’accroître votre niveau d’activité physique. N’oubliez pas de parler à votre médecin de vos problèmes émotionnels persistants et des moyens sécuritaires pour les soulager.

Suppléments

Il existe plusieurs suppléments de micronutriments qui peuvent être utiles contre les symptômes prémenstruels.

Le magnésium aide certaines personnes à réduire ou à éliminer les crampes douloureuses. Il est utile aussi contre l’irritabilité et les fluctuations de l’humeur dans certains cas. On peut commencer avec une dose de départ sure de 250 à 350 mg par jour. Bien que les doses plus élevées risquent de causer la diarrhée, elles peuvent être nécessaires pour obtenir un soulagement efficace. Il est possible que le glycinate de magnésium soit mieux toléré que les autres sortes de magnésium.

Lorsque la poitrine ou les seins sont douloureux ou gonflés, la vitamine E est souvent très utile. La prise d’une dose quotidienne de 800 à 1 200 UI pendant la semaine précédant les règles et encore pendant celles-ci pourrait soulager les symptômes de ce genre. Comme la dose nécessaire pour soulager ces symptômes varie d’une personne à l’autre, il est souhaitable de parler à un docteur en naturopathie. Assurez-vous que votre supplément contient la gamme complète de composés (appelés tocophérols mixtes) appartenant à la famille de la vitamine E.

Le supplément 5-hydroxytryptophane (5-HTP) s’apparente au tryptophane (mentionné ci-dessus sous le sous-titre « Exercice et alimentation ») et se convertit directement en sérotonine. (Consultez la section intitulée Les problèmes de sommeil pour en savoir plus.) Le 5-HTP peut aider à soulager les symptômes émotionnels de la période prémenstruelle. Il est important de prendre le 5-HTP avec de la vitamine B6 parce que cette vitamine est nécessaire pour que le 5-HTP se convertisse en sérotonine, et de nombreuses personnes vivant avec le VIH présentent une carence en vitamine B6. Toutefois, le 5-HTP ne doit pas être utilisé par les personnes recevant des médicaments contre la dépression ou l’anxiété.

Un supplément quotidien de vitamine B6 peut aider à réduire la rétention d’eau et les ballonnements. Il est important de le prendre avec un supplément du complexe B afin de maintenir l’équilibre des vitamines B. Il semble aussi qu’il aide à atténuer les fluctuations de l’humeur associées aux symptômes prémenstruels.

L’acide gamma-linolénique (GLA), qui se vend le moins cher dans les suppléments d’huile de bourrache ou d’huile d’onagre, est parfois utile contre la douleur mammaire, les ballonnements et les symptômes émotionnels comme l’irritabilité et la dépression. Une dose de 240 mg, deux fois par jour, est couramment recommandée par les docteurs en naturopathie pour soulager les symptômes prémenstruels.

Lors d’une étude menée en 1991, les femmes qui consommaient 1 300 mg de calcium par jour sous forme d’aliments comme le lait ou le yogourt faisaient état d’un soulagement de symptômes comme la rétention d’eau et les changements de l’humeur. Comme la personne moyenne n’en obtient que 550 mg par jour à partir de son alimentation, une supplémentation temporaire pourrait être utile. Cependant, avant de prendre des suppléments, il vaudrait peut-être mieux essayer de manger davantage d’aliments riches en calcium. Si cela est trop difficile, parlez à votre médecin de vos besoins en ce minéral.

Plantes médicinales

Les plantes médicinales comme le cimicaire à grappes, la racine de framboise et la rue officinale sont efficaces contre les symptômes prémenstruels chez certaines personnes. Comme certaines plantes médicinales interagissent avec de nombreux médicaments, il faut consulter un docteur en naturopathie ou un herboriste ainsi que votre médecin et un pharmacien s’y connaissant en matière de VIH avant d’entreprendre toute phytothérapie, quelle qu’elle soit.

Médicaments sur ordonnance et en vente libre

Le naproxène (Aleve, Anaprox), l’acide méfénamique (Ponstan) et l’ibuprofène (Advil, Motrin) sont des médicaments anti-inflammatoires qui soulagent les crampes et aident à réduire les symptômes prémenstruels. Ils sont offerts en vente libre dans les pharmacies. Parlez à votre médecin de l’usage de ce genre de médicaments, surtout si vous prenez du ténofovir (Viread et dans le Truvada, l’Atripla, le Complera et le Stribild) car il y a un risque de lésions rénales.

Plusieurs médicaments sur ordonnance sont également recommandés pour le traitement des symptômes émotionnels graves associés aux règles. Certains antidépresseurs améliorent les sautes d’humeur, l’irritabilité et la dépression grâce à l’augmentation du taux de sérotonine dans le cerveau. Ces médicaments risquent toutefois de causer de graves effets secondaires, alors assurez-vous de discuter exhaustivement de vos options avec votre médecin.

Interactions médicamenteuses

Avant d’en prendre, parlez à votre médecin et à votre pharmacien de l’utilisation de n’importe quel produit thérapeutique, y compris les multivitamines avec minéraux, les plantes médicinales et autres thérapies complémentaires, les produits en vente libre et les médicaments sur ordonnance. Certains produits risquent d’interagir avec les médicaments anti-VIH et de provoquer ainsi davantage d’effets secondaires ou encore de réduire l’efficacité des antirétroviraux. Il peut être nécessaire de décaler la prise de certains médicaments et celle de quelques suppléments de minéraux, dont le calcium et le magnésium. Parlez à votre médecin ou pharmacien pour déterminer la meilleure manière de prendre tous vos médicaments et produits de santé.