Essai clinique sur le zolédronate pour accroître la densité osseuse

Le zolédronate (appelé également acide zolédronique et vendu sous plusieurs noms de marque, dont Aclasta, Zometa et Reclast) est l’un des médicaments que les médecins peuvent prescrire pour aider à maintenir ou à accroître la densité osseuse. Membre d’une classe de médicaments appelés bisphosphonates, le zolédronate agit en entravant l’activité des cellules qui dégradent les os. En affaiblissant l’activité de ces cellules (appelées ostéoclastes), il est possible de maintenir ou d’augmenter la densité osseuse. Le zolédronate est administré par voie intraveineuse à raison de 5 mg une fois par an.

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Des chercheurs de Barcelone, en Espagne, ont mené un essai clinique sur le zolédronate lors duquel les participants ont reçu au hasard l’une des interventions suivantes :

  • une dose de zolédronate + counseling diététique
  • counseling diététique seulement

Après un an environ, on a de nouveau réparti au hasard les participants qui avaient reçu du zolédronate afin qu’ils reçoivent l’une des interventions suivantes :

  • une deuxième dose de zolédronate
  • counseling diététique continu

Au cours de cette étude de deux ans, la densité osseuse de la colonne vertébrale des participants qui n’avaient reçu qu’un counseling diététique a baissé d’environ 2 %. Parmi les participants qui avaient reçu du zolédronate pendant un an, la densité osseuse de la colonne a augmenté de 5 %. Chez les participants traités pendant deux ans avec du zolédronate, la densité osseuse a augmenté de 8 %.

Bien que ces changements dans la densité osseuse puissent paraître faibles, les données d’essais cliniques menés auprès de milliers de personnes séronégatives laissent croire que les augmentations de ce genre sont associées à un risque réduit de fractures.

Détails de l’étude

Les chercheurs ont recruté 31 participants, dont une majorité d’hommes (et seule une poignée de femmes) qui suivaient un régime anti-VIH stable depuis au moins six mois. Au début de l’étude, les participants ont été répartis au hasard pour recevoir l’une des interventions suivantes dans un rapport de 2 à 1 :

  • zolédronate + counseling diététique : 21 participants
  • counseling diététique : 10 participants

Le zolédronate a été administré par voie intraveineuse en une dose de 5 mg sur une période de 15 à 30 minutes.

Le counseling diététique avait lieu tous les quatre mois pour éduquer les participants et leur rappeler d’absorber suffisamment de calcium à partir des aliments. Les participants recevaient également 800 UI/jour de vitamine D3. Cette dose de vitamine D facilite l’absorption du calcium de l’intestin, mais est peu susceptible d’avoir un impact significatif sur la densité osseuse.

Après 48 semaines, les participants recevant le zolédronate ont de nouveau été répartis au hasard pour recevoir soit une deuxième dose du médicament soit aucune dose additionnelle.

Les participants avaient le profil moyen suivant au début de l’étude :

  • âge : fin quarantaine
  • temps écoulé depuis le diagnostic de VIH : 14 ans
  • au moins 60 % suivaient un régime comportant du ténofovir
  • compte de CD4+ : entre 500 et 600 cellules/mm3
  • taux de vitamine D : au moins 15 ng/ml (environ 38 nmol/l)
  • indice de masse corporelle (IMC) : 25

Résultats : semaine 48

La densité osseuse de la colonne a changé comme suit :

  • counseling diététique : baisse de 2 %
  • zolédronate + counseling diététique : augmentation de 6 %

Cette différence est significative du point de vue statistique, c’est-à-dire non attribuable au seul hasard.

La densité osseuse de la hanche a changé comme suit :

  • counseling diététique : augmentation de 0,9 %
  • zolédronate + counseling diététique : augmentation de 3,5 %

Cette différence est également significative sur le plan statistique.

Résultats : semaine 96

La densité osseuse de la colonne a changé comme suit :

  • counseling diététique : baisse de 2 %
  • une dose de zolédronate + counseling diététique : augmentation de 5 %
  • deux doses de zolédronate + counseling diététique : augmentation de 8 %

La différence entre les effets du seul counseling diététique et l’usage de zolédronate en une seule ou deux doses est significative du point de vue statistique. Cependant, la différence entre les changements dans la densité osseuse n’est pas significative selon qu’une seule ou deux doses de zolédronate étaient utilisées.

La densité osseuse de la hanche a changé comme suit :

  • counseling diététique : augmentation de 2 %
  • une dose de zolédronate + counseling diététique : augmentation de 4,5 %
  • deux doses de zolédronate + counseling diététique : augmentation de 5 %

Bien qu’elle puisse sembler bénéfique, les chercheurs ont qualifié de « modeste » l’augmentation de la densité osseuse de la hanche parmi les participants n’ayant reçu que du counseling diététique. Les chercheurs ont également souligné l’absence d’augmentation de la densité osseuse de la colonne chez les participants ayant bénéficié du seul counseling diététique (sans zolédronate).

On a constaté une différence statistiquement significative dans la densité osseuse entre le seul counseling diététique et l’usage de deux doses de zolédronate. Toutefois, on n’a trouvé aucune différence significative dans la densité osseuse selon qu’une seule ou deux doses de zolédronate étaient utilisées.

Renouvellement osseux

Bien que la plupart des gens croient que les os sont rigides et généralement inactifs, ils sont en fait très dynamiques au niveau cellulaire. Des parties des os sont continuellement réparées, détruites ou renforcées. Cette activité, soit la dégradation et la réparation continues des os, est connue sous le nom de renouvellement osseux parmi les chercheurs.

Il est possible de mesurer certaines protéines dans le sang qui servent de marqueurs du renouvellement osseux. Ces protéines peuvent donner une idée approximative de l’équilibre entre les processus de dégradation et de renforcement osseux ayant lieu dans le corps. L’évaluation de ces protéines se fait lors des études de recherche mais non dans le cadre des soins de routine. L’évaluation des changements dans ces protéines, ainsi que les radiographies, donnent aux chercheurs une idée de ce qui se passe dans les os.

Dans l’ensemble, au cours de la présente étude, les taux des marqueurs du renouvellement osseux ont chuté de façon importante parmi les participants qui ont reçu du zolédronate, comparativement aux participants qui n’en ont pas reçu. Étant donné cette différence, il est plus probable que la densité osseuse augmentait, au lieu de diminuer, chez les participants traités par zolédronate.

Effets secondaires et complications

Trois participants traités par zolédronate ont éprouvé les effets secondaires suivants pendant un ou deux jours suivant la perfusion du médicament :

  • manque d’énergie
  • fièvre

À retenir

Les résultats de cette étude laissent croire qu’une ou deux doses de zolédronate exercent plus ou moins les mêmes effets sur la densité osseuse et réussissent mieux à augmenter celle-ci que le seul counseling diététique accompagné d’une faible dose de vitamine D3. Il faut cependant se rappeler que cette étude ne peut fournir de résultats fermes en ce qui concerne la comparaison de l’efficacité du zolédronate en une seule dose ou deux. Quoique randomisée et dotée d’un groupe témoin (les personnes n’ayant reçu que le counseling diététique), cette étude a inscrit un nombre relativement faible de participants. Les résultats pourront orienter la conception d’une étude plus longue et de plus grande envergure pour évaluer l’impact de différentes doses et posologies de zolédronate chez les personnes séropositives.

À propos de l’acide zolédronique

Des études menées auprès de personnes séronégatives souffrant d’amincissement osseux dû à la prise de corticostéroïdes ou à la ménopause ont permis de constater que le zolédronate était plus efficace pour maintenir ou accroître la densité osseuse que d’autres bisphosphonates comme le risédronate (Actonel) et l’alendronate (Fosamax, Fosavance).

L’amélioration de la densité osseuse qui s’est produite sous l’effet de l’acide zolédronique lors de l’étude de Barcelone se compare à celle signalée par les auteurs de petites études menées auprès de personnes séropositives. Les résultats de l’étude de Barcelone confirment que l’activité d’une seule dose de zolédronate peut s’exercer pendant jusqu’à deux ans.

Bien que des cas rares d’ostéonécrose de la mâchoire aient été signalés chez des personnes séronégatives traitées par zolédronate lors d’autres essais cliniques, ce médicament n’a causé aucune toxicité grave lors de l’étude menée à Barcelone.

Les chercheurs barcelonais ont affirmé ceci : « À la lumière de nos résultats, on pourrait espacer les doses [de zolédronate] pour prévenir la toxicité aiguë et à long terme ». De plus, ont-ils ajouté : « [Une dose unique ou deux doses annuelles consécutives] pourraient faciliter l’observance pour les patients recevant déjà de nombreux traitements différents. » Les chercheurs ont également souligné que l’administration intraveineuse du zolédronate permet d’éviter les problèmes gastro-intestinaux qui se produisent parfois chez les personnes recevant un traitement aux bisphosphonates par voie orale. Les chercheurs ont précisé que le zolédronate était métabolisé par les reins et n’interagissait pas avec les médicaments anti-VIH utilisés par les participants (soulignons toutefois que les interactions médicamenteuses n’ont pas été formellement évaluées lors de cette étude).

—Sean R. Hosein

RÉFÉRENCE :

Negredo E, Bonjoch A, Pérez-Álvarez N, et al. Comparison of two different strategies of treatment with zoledronate in HIV-infected patients with low bone mineral density: single dose versus two doses in 2 years. HIV Medicine. 2015; in press.