La dexaméthasone et la COVID-19

Chez la plupart des personnes qui le contractent, le SRAS-CoV-2 ne cause que des symptômes légers, voire aucun. Il n’empêche toutefois qu’une minorité considérable de personnes infectées éprouvent des symptômes graves, notamment des difficultés respiratoires, une toux et, dans certains cas, une pneumonie. Comme les poumons sont enflammés et subissent des lésions, ils réussissent moins efficacement à extraire de l’oxygène de l’air et à échanger celui-ci contre du dioxyde de carbone, un produit de déchets. Pour cette raison, certaines personnes hospitalisées pour la COVID-19 ont besoin d’un supplément d’oxygène ou, dans les cas très graves, d’une ventilation mécanique invasive.

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Une équipe de recherche du Royaume-Uni a mené une étude d’envergure auprès de personnes hospitalisées pour la COVID-19. L’équipe a réparti celles-ci au hasard pour recevoir une des interventions suivantes :

  • une faible dose quotidienne du stéroïde dexaméthasone (6 mg) pour une période maximale de 10 jours + des soins de soutien
  • des soins de soutien seulement

En tout, 23 % des personnes traitées par dexaméthasone et 26 % des personnes non traitées sont décédées pendant l’étude. Notons cependant que les résultats ont différé chez les personnes qui recevaient un soutien respiratoire (terme de l’équipe de recherche). Parmi les personnes qui recevaient un tel soutien, dont une ventilation mécanique invasive, 29 % de celles traitées à la dexaméthasone sont mortes, comparativement à 41 % des personnes n’ayant pas reçu ce stéroïde. Cette étude a donc permis de constater que la dexaméthasone peut sauver la vie de certaines personnes atteintes de COVID-19, mais d’autres recherches sont nécessaires.

Détails de l’étude

Comme cet essai clinique s’est déroulé durant la première vague de la COVID-19, l’équipe de recherche a extrait peu de données des dossiers hospitaliers des malades.

Le profil moyen des participants était le suivant au début de l’étude :

  • âge : 66 ans
  • 64 % d’hommes, 36 % de femmes
  • 56 % avaient au moins une affection sous-jacente, dont les suivantes :
    • maladie cardiaque : 27 %
    • diabète : 24 %
    • maladie pulmonaire chronique : 21 %

Soutien respiratoire :

  • 60 % recevaient un supplément d’oxygène
  • 16 % subissaient une ventilation mécanique invasive
  • 24 % ne recevaient aucune de ces interventions

L’équipe de recherche a recueilli des données aux fins d’une analyse provisoire. Elle s’intéressait à déterminer les taux de survie 28 jours après l’admission des participants à l’étude.

En tout, 6 425 personnes ont été réparties au hasard dans un rapport de 2 à 1 pour recevoir une des interventions suivantes :

  • dexaméthasone + soins de soutien : 4 321 personnes
  • soins de soutien seulement : 2 104 personnes

Résultats

À première vue, l’effet global de la dexaméthasone sur la survie risque de paraître modeste, car les taux de décès ont été les suivants :

  • dexaméthasone + soins de soutien : 23 %
  • soins de soutien seulement : 26 %

Cependant, lorsque l’équipe a tenu compte de l’ampleur du « soutien respiratoire » (ventilation mécanique invasive, oxygénothérapie) en cours dès le début de l’étude, elle a constaté de grandes différences par rapport au nombre de décès, comme suit :

Ventilation mécanique invasive

  • dexaméthasone + soins de soutien : taux de décès de 29 %
  • soins de soutien seulement : taux de décès de 41 %

Parmi les personnes qui recevaient de l’oxygène au début de l’étude, mais pas de ventilation mécanique, les taux de décès ont été les suivants :

  • dexaméthasone + soins de soutien : 23 %
  • soins de soutien seulement : 26 %

Il importe de souligner la répartition des décès parmi les personnes qui ne recevaient aucun soutien respiratoire au début de l’étude, soit :

  • dexaméthasone + soins de soutien : 18 %
  • soins de soutien seulement : 14 %

Compte tenu de ces facteurs et d’autres, l’équipe de recherche a déclaré ceci :

« … la dexaméthasone n’a exercé aucun effet clair chez les patients ne recevant aucun soutien respiratoire [au début de l’étude]. »

L’équipe a également affirmé que « les patients qui subissaient une ventilation mécanique invasive [au début de l’étude] étaient plus jeunes de 10 ans en moyenne que les patients ne recevant aucun soutien respiratoire et ils éprouvaient des symptômes depuis sept jours de plus en moyenne avant la randomisation ».

D’autres résultats

Les personnes recevant la dexaméthasone ont passé une journée de moins à l’hôpital que les personnes n’ayant pas reçu ce médicament.

À retenir

Cette étude britannique a découvert un rôle clair pour la dexaméthasone dans les soins prodigués à certaines personnes hospitalisées pour la COVID-19. Spécifiquement, le médicament est utile aux personnes recevant un soutien respiratoire, soit une ventilation mécanique invasive ou un supplément d’oxygène. Notons toutefois que la dexaméthasone n’a pas procuré de bienfaits aux personnes qui ne recevaient pas de soutien respiratoire au début de l’étude.

Selon l’équipe de recherche, les bienfaits des stéroïdes « pour les infections respiratoires virales graves reposent sur la sélection de la bonne dose au bon moment pour la bonne personne ».

Plusieurs équipes de recherche ont laissé entendre que le SRAS-CoV-2 semblait causer une production importante de virus tôt dans le cours de la COVID-19. Durant ce stade, les stéroïdes et les autres traitements qui suppriment l’inflammation pourraient compromettre également la capacité du système immunitaire à contenir le virus. Selon les équipes, il est possible que la réponse immunitaire soit excessive, voire nuisible, durant les stades avancés de la COVID-19. Pour cette raison, les stéroïdes et les autres médicaments qui servent à calmer le système immunitaire pourraient être plus utiles durant ces stades.

À l’avenir

Cette étude qui a examiné les taux de survie 28 jours après l’admission des participants est importante. Même si de nombreux participants se sont rétablis et ont quitté l’hôpital, le suivi continu et l’équipe de recherche compte effectuer des analyses pour évaluer l’impact de la dexaméthasone sur la survie à long terme.

L’équipe infirmière a évalué un grand nombre de volontaires en vue de leur participation éventuelle à cette étude de recherche, et elle en a exclu 1 707 pour des raisons peu claires. Il est possible que certaines personnes aient été exclues parce qu’elles souffraient d’affections médicales préexistantes qui auraient rendu l’usage de stéroïdes dangereux, comme les suivantes :

  • diabète non maîtrisé
  • un état de confusion ou de désorientation, une perte de mémoire et/ou l’incapacité de penser clairement
  • cancer
  • immunosuppression attribuable à des médicaments donnés à la suite d’une greffe d’organe ou à des troubles auto-immuns comme l’arthrite

Cette équipe de recherche n’a pas évalué l’impact des stéroïdes sur la réplication du SRAS-CoV-2. Cette question importante devrait être abordée lors des études futures sur les stéroïdes. Des recherches de laboratoire donnent à penser que la dexaméthasone peut entraver la capacité du SRAS-CoV-2 à entrer dans les cellules. La question se pose alors de savoir si ce médicament possède une activité antivirale importante chez les personnes atteintes de COVID-19.

—Sean R. Hosein

RÉFÉRENCES :

  1. RECOVERY Collaborative Group. Dexamethasone in hospitalized patients with Covid-19. New England Journal of Medicine. 2021 Feb 25;384(8):693-704.
  2. Normand ST. The RECOVERY Platform. New England Journal of Medicine. 2021 Feb 25;384(8):757-758.
  3. Matthay MA, Thompson BT. Dexamethasone in hospitalised patients with COVID-19: addressing uncertainties. Lancet Respiratory Medicine. 2020 Dec;8(12):1170-1172.
  4. Zhang Y, Hu S, Wang J, et al. Dexamethasone inhibits SARS-CoV-2 spike pseudotyped virus viropexis by binding to ACE2. Virology. 2021 Feb;554:83-88.
  5. Matsuyama S, Kawase M, Nao N, et al. The inhaled steroid ciclesonide blocks SARS-CoV-2 RNA replication by targeting the viral replication-transcription complex in cultured cells. Journal of Virology. 2020 Dec 9;95(1):e01648-20.