Une étude torontoise sur l’interféron lambda donne des résultats prometteurs contre la COVID-19

Des expériences de laboratoire sur des cellules et des animaux ont révélé que l’infection par le SRAS-CoV-2 était associée à une réduction de la production de protéines appelées interférons. Ces protéines aident les cellules à résister aux infections virales ou, si elles sont déjà infectées, à ralentir la production de nouvelles copies du virus envahissant. Les interférons peuvent également mobiliser le système immunitaire afin qu’il leur vienne en aide.

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La famille des interférons inclut un membre appelé interféron lambda. Il existe plusieurs sous-types de ce dernier, dont l’interféron lambda-1, l’interféron lambda-2, etc. Les cellules qui tapissent les poumons et les intestins sont sensibles à l’interféron lambda. Dans les expériences de laboratoire sur des cellules et des virus, l’interféron lambda fait preuve d’une puissante activité antivirale et n’est pas généralement associé à l’inflammation.

Il existe une version à action prolongée de l’interféron lambda-1 à laquelle on a donné le nom de peg-interféron-lambda-1. Ce dernier a déjà été mis à l’épreuve chez plus de 3 000 personnes atteintes d’une hépatite virale. Dans les études en question, le médicament s’est révélé aussi efficace et plus tolérable que l’interféron alpha.

Des expériences de laboratoire ont permis de constater que l’interféron lambda pouvait réduire la production de SRAS-CoV-2 chez des souris. Tous les résultats se rapportant à l’interféron lambda portent à croire qu’il mérite d’être mis à l’épreuve chez des personnes atteintes de COVID-19.

À Toronto, une équipe de recherche dirigée par Jordan Feld, M.D., a mené une étude pilote randomisée à double insu et contrôlée contre placebo sur le peg-interféron-lambda-1 (que nous appelons désormais interféron lambda pour simplifier). Cette étude a porté sur des personnes qui en étaient aux stades précoces de la COVID-19. L’équipe a constaté que l’interféron lambda « accélérait le déclin viral chez des patients externes atteints de COVID-19 et augmentait la proportion de patients atteignant la clairance virale avant le jour 7 ». L’équipe de recherche a ajouté que l’interféron lambda avait le potentiel « de prévenir la détérioration clinique et d’écourter la période d’excrétion virale ».

Détails de l’étude

L’équipe de recherche a inscrit des volontaires dans de nombreuses cliniques de Toronto. L’infection par le SRAS-CoV-2 a été confirmée par un frottis nasal dans tous les cas.

Les volontaires avaient le profil moyen suivant au début de l’étude :

  • âge : 46 ans
  • 42 % d’hommes, 58 % de femmes
  • 52 % étaient Blancs, 48 % étaient des personnes de couleur
  • 19 % n’avaient aucun symptôme de la COVID-19
  • charge virale supérieure à un million de copies/ml
  • la plupart éprouvaient des symptômes légers ou modérés de la COVID-19

Vingt-neuf personnes ont reçu une seule injection d’interféron lambda (180 microgrammes), et 30 autres ont reçu une faible solution saline en guise de placebo, également par injection.

Les participants ont appris à effectuer des frottis nasaux afin de prélever des échantillons de virus aux fins des analyses.

Une équipe infirmière a suivi les participants pendant jusqu’à deux semaines.

Résultats

Les procédures employées lors des essais cliniques, notamment la randomisation, l’usage de placebos et le double insu, sont utiles parce qu’elles aident à éviter une éventuelle partialité lors de l’interprétation des résultats. En théorie, la randomisation faciliterait la répartition égale des participants à un essai clinique, de sorte que le groupe recevant le médicament actif et le groupe recevant le placebo comptent un nombre comparable de membres présentant des caractéristiques différentes.

Malgré la randomisation, au début de cette étude, la quantité de virus était plus élevée chez les personnes affectées au groupe interféron lambda. Nonobstant cette différence initiale, la quantité de virus a diminué significativement chez les personnes qui ont reçu subséquemment de l’interféron lambda. La baisse la plus importante s’est produite chez les personnes dont la charge virale était supérieure à un million de copies/ml au début de l’étude. Au jour 7 de l’étude, la charge virale était indétectable dans les proportions suivantes :

  • interféron lambda : 79 %
  • placebo : 38 %

Les personnes recevant l’interféron lambda ont éliminé le SRAS-CoV-2 plus rapidement (sept jours) que les personnes recevant le placebo (10 jours).

Effets secondaires et complications

L’équipe de recherche a évalué les symptômes au début de l’étude puis de façon régulière durant celle-ci. Les symptômes ont été classés comme suit :

  • gastro-intestinaux
  • symptômes affectant l’humeur
  • musculaires et osseux
  • neurologiques
  • respiratoires
  • cutanés
  • systémiques

Selon l’équipe : « Dans l’ensemble, les symptômes dans les deux groupes étaient légers ou modérés, et nous n’avons constaté aucune différence entre les groupes quant à la fréquence ou à la gravité des symptômes dans les sept catégories ».

Sept membres du groupe interféron lambda ont qualifié leurs symptômes de graves à plusieurs reprises; il s’agissait généralement d’une perte temporaire de l’odorat et du goût. Notons que ces symptômes auraient pu être attribuables à l’infection par le SRAS-CoV-2.

Sept participants du groupe placebo ont qualifié leurs symptômes de graves à plusieurs reprises; il s’agissait notamment de fièvres, de frissons, de frémissements et de fatigue.

Notons que les symptômes se sont atténués au cours de l’étude.

Les symptômes respiratoires — douleurs thoraciques, toux, écoulements nasaux, essoufflements et maux de gorge — se sont atténués plus rapidement chez les personnes recevant l’interféron lambda.

Tests de laboratoire

Les taux d’enzymes hépatiques dans le sang ont augmenté légèrement chez la plupart des personnes recevant l’interféron lambda. Seulement deux personnes de ce groupe ont toutefois connu une augmentation grave de leurs taux d’enzymes hépatiques, soit le taux d’ALT chez une personne et le taux d’AST chez l’autre. À titre de comparaison, notons que trois personnes dans le groupe placebo avaient un taux très élevé d’ALT et une autre avait un taux très élevé d’AST.

Inflammation et coagulation

Le D-dimère est une petite protéine sanguine dont le taux augmente en présence d’inflammation ou d’un excès de caillots sanguins. Au début de l’étude, les taux de D-dimère étaient élevés dans les deux groupes, mais ils ont baissé significativement par la suite chez les personnes recevant l’interféron lambda. Ce résultat est prometteur.

Consultations à l’hôpital

Cinq personnes se sont présentées dans un service des urgences à la recherche de soins dans les 14 jours suivant leur admission à l’étude, comme suit :

  • groupe interféron lambda : une personne
  • groupe placebo : quatre personnes

Ces cinq personnes se sont toutes rendues à l’urgence parce que leurs symptômes respiratoires s’aggravaient, mais une seule personne de chaque groupe a été hospitalisée :

  • groupe interféron lambda : essoufflement attribuable à un caillot sanguin dans le poumon
  • placebo : essoufflement attribuable aux complications de la COVID-19

Personne n’est décédé durant l’étude.

À retenir

Une seule injection sous-cutanée d’interféron lambda a donné lieu à un délai de clairance plus court du SRAS-CoV-2 par rapport au placebo. Cet effet de l’interféron lambda s’est révélé le plus important chez les personnes présentant des quantités élevées de SRAS-CoV-2.

L’interféron lambda a été bien toléré et n’a provoqué que des effets secondaires semblables à ceux du placebo. Notons qu’environ 20 % des personnes inscrites à l’étude n’avaient pas de symptômes de la COVID-19 à leur admission. Dans ce sous-groupe, aucun effet secondaire ne s’est produit après l’introduction du traitement par interféron lambda. Ces résultats pourraient surprendre certaines personnes parce que les interférons ont historiquement la réputation de provoquer des effets secondaires désagréables. Cette réputation est due au fait que les interférons, spécifiquement l’interféron alpha, devaient être injectés de façon répétée sur une longue période chez les personnes atteintes du virus de l’hépatite C (VHC). Cependant, dans l’étude sur la COVID-19, une seule injection était suffisante parce que les cellules qui sont sensibles à l’interféron lambda sont réparties de façon limitée dans le corps. Cela devrait rassurer les personnes qui aimeraient éventuellement s’inscrire aux études futures sur l’interféron lambda et la COVID-19.

En conclusion, étant donné qu’une seule injection d’interféron lambda est bien tolérée et possède une bonne activité antivirale, ce médicament constitue un candidat très prometteur pour les recherches futures sur les personnes atteintes de COVID-19. La compagnie californienne Eiger Biopharmaceuticals a entamé des discussions avec la Food and Drug Administration des États-Unis dans l’espoir de mener un essai de phase II/III de l’interféron lambda chez des personnes atteintes de COVID-19.

—Sean R. Hosein

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