La prise de poids associée à des médicaments non liés au VIH
À mesure que les chercheurs avancent dans leur étude de la prise de poids chez les personnes séropositives, il est important de tenir compte de l’existence de médicaments non liés au VIH qui sont susceptibles de causer la prise de poids. Notons que plusieurs des études récentes où l’on a signalé des cas de prise de poids chez des personnes séropositives n’ont pas fourni de données sur les autres médicaments que les participants prenaient, médicaments qui auraient pu provoquer aussi la prise de poids.
En Belgique, des médecins qui étudient le diabète ont décortiqué la littérature scientifique pour déterminer le potentiel qu’avaient certains médicaments (et affections médicales) de causer la prise de poids chez les personnes séronégatives. Il est probable que les résultats obtenus auprès de cette population s’appliquent également aux personnes séropositives. Rappelons qu’il vaut toujours mieux discuter de tous ses médicaments avec un médecin et un pharmacien afin qu’ils puissent déterminer les catégories de médicaments utilisées et leur potentiel de causer la prise de poids.
À souligner
Nous résumons ci-dessous les résultats obtenus par les médecins belges en ce qui concerne les médicaments associés à la prise de poids. Cela ne veut pas dire qu’un médicament particulier figurant dans cette liste causera une prise de poids chez chaque personne qui le prend. La présence d’un médicament dans cette liste veut toutefois dire que le risque de prise de poids augmente généralement. Chez certaines personnes, la prise de poids se produit sur une longue période et consiste en quelques kilos seulement.
En ce qui concerne plusieurs des études examinées par les médecins belges où l’on a fait une association entre la prise de poids et un médicament ou une classe de médicaments spécifique, il n’est pas clair si les chercheurs en question ont pris en considération la quantité d’activité physique quotidienne. Il est donc important de ne pas considérer la liste suivante comme une source définitive, mais elle pourrait tout de même servir à stimuler une discussion entre les médecins et leurs patients.
Comme nous l’avons mentionné plus tôt dans ce numéro de TraitementActualités, il existe plusieurs facteurs associés à la prise de poids qui n’ont rien à voir avec les médicaments. Il est important de prendre ces facteurs en considération chaque fois qu’une prise de poids a lieu.
Agents antidiabétiques
L’insuline, la sulfonylurée et les glitazones
Médicaments pour traiter une tension artérielle supérieure à la normale (hypertension)
Certains bêta-bloquants (les résultats peuvent varier d’une personne à l’autre; autrement dit, certaines personnes prennent du poids après avoir commencé un traitement par bêta-bloquants, alors que d’autres n’en prennent pas).
À propos des problèmes de santé mentale et du poids
Les médicaments utilisés pour traiter les troubles de la santé mentale s’appellent des médicaments psychotropes. En général, l’obésité est plus courante chez les personnes souffrant de troubles de la santé mentale que chez les personnes n’ayant pas de tel diagnostic. Selon les médecins belges, les facteurs suivants jouent vraisemblablement un rôle dans la prise de poids observée chez les personnes atteintes de troubles de la santé mentale : « une mauvaise alimentation, l’activité physique insuffisante, une prévalence élevée du tabagisme ou [de la consommation] d’autres substances accompagnent de nombreuses maladies psychiatriques ».
Les médecins soulignent également que de nombreux troubles de la santé mentale touchent une partie du cerveau appelée hypothalamus, ainsi que l’hypophyse et les surrénales (il s’agit de l’axe HHS). Ces trois parties du corps produisent des hormones qui peuvent avoir un effet sur la faim, l’appétit et le poids. Les troubles de la santé mentale peuvent stimuler excessivement ces parties du corps, de sorte que les taux de l’hormone cortisol deviennent chroniquement élevés. À leur tour, les taux élevés de cette hormone peuvent provoquer une accumulation de graisse dans les parties profondes du ventre (graisse viscérale). Ce genre de graisse produit des hormones qui causent de l’inflammation et contribuent à l’accumulation continue de graisse viscérale, ce qui provoque un cercle vicieux. Les médecins ont en effet constaté que l’obésité pouvait contribuer à la dépression dans certains cas, et la dépression à l’obésité.
Il est important de noter qu’il est parfois difficile pour les médecins d’évaluer l’effet précis qu’exercent les psychotropes sur la prise de poids. Comme l’ont affirmé les médecins belges, « parce que le trouble psychiatrique sous-jacent peut lui-même être caractérisé par des changements d’appétit et d’activité physique ». Les médecins ont ajouté que « la prise de poids durant le premier mois du traitement est un prédicteur fort de la prise de poids à long terme. Ainsi, le poids devrait être surveillé avant et peu après le début de la prise de médicaments psychotropes, et une augmentation de 5 % du poids de base à la fin du premier mois devrait inciter les chercheurs à reconsidérer les options thérapeutiques ou à introduire des stratégies de contrôle du poids ».
Selon les chercheurs, les troubles de la santé mentale et les traitements connexes semblaient causer des prises de poids plus importantes chez les femmes que chez les hommes.
Antidépresseurs
Même si les antidépresseurs sont surtout prescrits pour le traitement de la dépression, les médecins s’en servent parfois pour traiter l’anxiété ou la dépression accompagnée de symptômes d’anxiété.
Les antidépresseurs tricycliques sont des médicaments plus anciens qui sont peu utilisés de nos jours pour le traitement de première ou de deuxième intention de l’anxiété ou de la dépression. Notons cependant que les médicaments tricycliques causent généralement une certaine prise de poids.
D’autres classes de médicaments qui agissent surtout sur la sérotonine et/ou la norépinéphrine peuvent causer une perte de poids temporaire ou encore un effet neutre sur le poids. Il s’agit des médicaments appelés ISRS (dont le citalopram, la fluoxétine et la sertraline) et IRSN (dont la venlafaxine et la duloxétine).
Il semble que la paroxétine soit l’ISRS qui risque le plus de causer la prise de poids.
Le bupropion peut réduire l’appétit et causer ainsi la perte de poids. Lors d’essais cliniques, la combinaison de naltrexone et de bupropion s’est avérée utile pour réduire le poids chez des personnes souffrant d’obésité.
L’antidépresseur plus ancien, mirtazapine, est associé à la prise de poids.
La vortioxétine (Trintrellix), un antidépresseur plus récent et couramment utilisé, n’a pas été analysée par les médecins belges. Les analyses d’essais cliniques de ce médicament qu’ont effectuées d’autres chercheurs portent cependant à croire que son effet sur le poids est minime.
Le lithium est associé à la prise de poids chez certaines personnes.
Antipsychotiques
En plus de traiter la psychose, les antipsychotiques de deuxième génération sont parfois prescrits pour la prise en charge de troubles non psychotiques comme les suivants : le trouble bipolaire, le trouble du déficit de l’attention avec hyperactivité et la démence chez les personnes âgées. Cette classe de médicaments inclut les agents suivants : la clozapine, l’olanzapine, la quétiapine et la rispéridone. Selon les médecins belges, ces quatre médicaments sont les plus susceptibles de causer la prise de poids.
Les médecins ont également affirmé que d’autres antipsychotiques de deuxième génération, dont l’aripiprazole, l’amisulpride et la ziprasidone, « sont neutres par rapport au poids ou n’induisent qu’une prise pondérale minime ». Selon les médecins, les médicaments plus récents comme l’asénapine, l’ilopéridone, la lurasidone et la palipéridone « semblent également avoir moins d’effets secondaires métaboliques » que les médicaments plus anciens.
Anticonvulsivants
Cette catégorie de médicaments est surtout utilisée pour traiter les crises épileptiques, mais certains anticonvulsivants ont déjà été utilisés pour traiter les douleurs nerveuses.
Certains anticonvulsivants peuvent causer la prise de poids, tels que le valproate et la carbamazépine. D’autres anticonvulsivants, dont la prégabaline et la gabapentine, sont parfois utilisés pour traiter la douleur causée par les lésions nerveuses et peuvent également causer la prise de poids.
D’autres anticonvulsivants, dont la lamotrigine, le lévétiracétam et la phénytoïne, ont tendance à avoir un effet neutre sur le poids.
Certains autres anticonvulsivants, dont le felbamate, le topiramate et le zonisamide, peuvent causer la perte de poids.
—Sean R. Hosein
RÉFÉRENCES :
- Verhaegen AA, Van Gaal LF. Drug-induced obesity and its metabolic consequences: a review with a focus on mechanisms and possible therapeutic options. Journal of Endocrinological Investigation. 2017 Nov;40(11):1165-1174.
- Gafoor R, Booth HP, Gulliford MC. Antidepressant utilisation and incidence of weight gain during 10 years' follow-up: population based cohort study. BMJ. 2018 May 23;361:k1951.
- Heymsfield SB, Wadden TA. Mechanisms, pathophysiology, and management of obesity. New England Journal of Medicine. 2017 Apr 13;376(15):1492.
- Baldwin DS, Chrones L, Florea I, et al. The safety and tolerability of vortioxetine: Analysis of data from randomized placebo-controlled trials and open-label extension studies. Journal of Psychopharmacology. 2016 Mar;30(3):242-252.