Pepcid pourrait-il aider les personnes atteintes de COVID-19?
Comme nous l’avons mentionné plus tôt dans ce numéro de TraitementActualités, les médecins sont en train de recycler de nombreux médicaments dans l’espoir de trouver ceux qui contribueront éventuellement à la prévention et au traitement de la COVID-19. Parmi ces médicaments se trouve l’antiacide et l’antiulcéreux famotidine. Vendu sous le nom de marque Pepcid, ce médicament existe aussi en versions génériques. Les médecins ont commencé à s’intéresser à ce médicament alors qu’ils examinaient les dossiers médicaux de plus de 6 000 personnes atteintes de COVID-19 à Wuhan, en Chine. Les médecins ont découvert que de nombreuses personnes prenaient la famotidine avant de tomber malades de la COVID-19 (pour les excès d’acide gastrique) et encore pendant cette infection. Une analyse a révélé que 14 % des patients prenant la famotidine sont décédés de la COVID-19, contre 27 % des patients n’ayant pas pris ce médicament. Notons cependant qu’un tel résultat ne peut que suggérer un lien et n’est pas définitif.
Encouragés par les résultats obtenus à Wuhan, des chercheurs du Centre médical de l’Université Columbia à New York ont passé en revue les dossiers de santé de 1 620 personnes hospitalisées pour la COVID-19. Cette équipe a également trouvé des indices que la famotidine pourrait être bénéfique.
Les chercheurs ne sont pas certains pourquoi ou comment la famotidine serait utile chez les personnes atteintes de COVID-19. Il semble qu’elle ne possède pas d’activité antivirale contre les coronavirus ou les enzymes utilisées par le SRAS-CoV-2. Il est pourtant possible que la famotidine exerce un ou plusieurs effets sur le système immunitaire. Notons que le mode d’action immunologique proposé est extrêmement complexe et excède la portée de cet article. Il est toutefois plausible que la famotidine soit capable de réduire l’inflammation dans les poumons, une caractéristique courante des cas graves de COVID-19. Des essais cliniques de ce médicament sont en cours chez des personnes atteintes de la COVID-19, et l’on peut espérer qu’ils éclaireront le mode d’action éventuel de la famotidine.
Nous présentons ci-dessous les détails de 10 cas où des personnes ont commencé à prendre de la famotidine après avoir été infectées par le SRAS-CoV-2 et qui ont été suivies par leurs médecins. Bien que les résultats se rapportant à ces 10 personnes soient au mieux anecdotiques et ne puissent être utilisés pour justifier l’utilisation de la famotidine en dehors des essais cliniques, ils sont tout de même intéressants.
Rapports de cas
L’âge des participants allait de la vingtaine à la soixante-dizaine. Il s’agissait de six hommes et de quatre femmes. Quatre personnes avaient des affections sous-jacentes, majoritairement une sorte de maladie cardiovasculaire. Aucune d’entre elles n’était hospitalisée. Les participants ont commencé à prendre la famotidine lorsqu’ils ont présenté des symptômes de la COVID-19.
Le SRAS-CoV-2 a été diagnostiqué chez la plupart des participants (70 %) lorsque des frottis nasaux ont détecté la présence du virus. Deux autres participants avaient des anticorps contre le virus, et un autre a été diagnostiqué seulement en fonction de ses symptômes.
La dose la plus utilisée de la famotidine a été de 80 mg, trois fois par jour par voie orale. La moitié des personnes ont pris la famotidine pendant cinq à 11 jours, et l’autre moitié pendant au plus 21 jours.
Résultats
Aucun des participants n’a eu besoin d’être hospitalisé. Ils ont signalé une certaine amélioration de leurs symptômes à partir de la 24e heure suivant la première dose du médicament. Les symptômes ont continué subséquemment de s’atténuer et n’étaient plus présents 14 jours après l’introduction de la famotidine.
Trois participants ont signalé les effets indésirables suivants :
- une personne : étourdissement léger et « battements de cœur accélérés »
- une personne : étourdissement léger, peau sèche et problèmes de sommeil
- une personne : « symptômes gastro-intestinaux » légers non spécifiés et une étourderie temporaire
Selon les médecins qui ont suivi ces patients, à l’exception de l’étourderie temporaire, tous les effets indésirables étaient vraisemblablement attribuables à la famotidine. Les médecins ont également souligné que « tous les effets secondaires se sont résorbés après la discontinuation de la famotidine ».
À retenir
Ce rapport sur 10 personnes est intrigant. Espérons cependant que des réponses définitives sur l’impact potentiel de la famotidine sur l’évolution de la COVID-19 émergeront des essais cliniques randomisés en cours.
—Sean R. Hosein
RÉFÉRENCES :
- Janowitz T, Gablenz E, Pattinson D, et al. Famotidine use and quantitative symptom tracking for COVID-19 in non-hospitalised patients: a case series. Gut. 2020; en voie d’impression.
- Borrell B. New York clinical trial quietly tests heartburn remedy against coronavirus. Science. 26 April 2020.
- Malone RW, Tisdall P, Fremont-Smith P, et al. COVID-19: famotidine, histamine, mast cells and mechanisms. Preprint. 2020.