Une étude explore la COVID de longue durée chez des vétérans américains
Même si de nombreuses personnes qui ont été hospitalisées pour la COVID-19 sont malheureusement décédées, de très nombreuses autres y ont survécu. Cependant, après s’être rétablies de la phase aiguë de la COVID-19, certaines personnes continuent d’éprouver des symptômes. Plusieurs équipes de recherche ont donc commencé à s’intéresser aux survivants.
Vétérans américains
Une équipe de recherche aux États-Unis a analysé des bases de données regorgeant d’informations se rapportant à la santé des vétérans de ce pays. L’équipe s’est concentrée sur des personnes qui avaient survécu 30 jours après un diagnostic initial de COVID-19. L’équipe s’est intéressée spécifiquement aux interventions ultérieures, notamment les diagnostics de complications, les tests de laboratoire effectués et la prescription de médicaments, entre autres mesures.
L’équipe de recherche a comparé les données recueillies auprès de divers groupes de personnes. En premier lieu, elle a comparé cinq millions de personnes qui n’avaient pas eu la COVID-19 et qui n’avaient pas été hospitalisées à plus de 73 000 personnes qui avaient survécu 30 jours après un diagnostic de COVID-19 aiguë et qui n’avaient pas été hospitalisées. L’équipe s’est également servie de données se rapportant à environ 26 000 personnes hospitalisées dont certaines avaient eu la COVID-19 et d’autres pas.
L’équipe de recherche a constaté que les survivants de la COVID-19 avaient des problèmes de santé touchant divers systèmes organiques qui duraient jusqu’à six mois après la résolution de la COVID-19 aiguë. (Notons que d’autres études ont trouvé que les symptômes de la COVID de longue durée persistaient plus longtemps). Dans la présente étude, les organes et les systèmes touchés incluaient les suivants :
- cerveau et nerfs
- moelle osseuse
- système gastro-intestinal
- poumons
- métabolisme
Les problèmes courants incluaient les suivants :
- fatigue
- anémie
- douleurs osseuses et musculaires
Selon l’équipe de recherche, certaines personnes rétablies de la COVID-19 aiguë ont reçu subséquemment et pour la première fois des médicaments sur ordonnance appartenant aux catégories suivantes :
- anxiolytiques
- antidépresseurs
- médicaments pour traiter l’hypertension
- médicaments pour traiter le diabète
- médicaments pour faciliter la respiration
Des recherches sont nécessaires d’urgence pour déterminer pourquoi certaines personnes qui contractent la COVID-19 aiguë présentent subséquemment des complications persistantes de stade tardif.
Détails de l’étude
L’équipe de recherche a analysé des données recueillies auprès de deux principaux groupes de personnes, comme suit :
- personnes non hospitalisées : 73 435 personnes qui avaient survécu au moins 30 jours après un diagnostic de COVID-19, et 4 990 835 de personnes qui n’avaient pas eu la COVID-19
- personnes hospitalisées : 13 654 personnes qui avaient survécu au moins 30 jours après avoir été admises à l’hôpital pour la COVID-19, et 13 997 qui n’avaient pas eu la COVID-19 et qui n’avaient pas été hospitalisées
Les participants à cette étude figuraient déjà dans la base de données des Veterans Affairs (équivalent américain d’Anciens Combattants Canada) depuis au moins une année au 31 décembre 2019. Les personnes qui ont contracté le SRAS-CoV-2 ont passé leur test de dépistage positif entre le 1er mars et le 30 novembre 2020. Le suivi des participants a duré jusqu’au 31 janvier 2021.
L’équipe de recherche a analysé des données recueillies pendant jusqu’à six mois après la fin de l’hospitalisation des participants.
Résultats
Parmi les personnes rétablies de la COVID-19 aiguë, qu’elles aient été hospitalisées ou pas, l’équipe de recherche a constaté un « large éventail » de problèmes touchant de nombreux systèmes organiques.
L’équipe a regroupé les maladies caractérisant la COVID de longue durée dans les catégories suivantes :
Poumons
- problèmes de respiration, toux
Cerveau et système nerveux
- augmentation des diagnostics de maux de tête, de problèmes de mémoire/cognition et de perte d’odorat, ainsi qu’une augmentation du risque d’AVC
Santé mentale
- problèmes de sommeil, anxiété et dépression
Métabolisme
- cholestérol élevé, glycémie élevée
Symptômes généraux
- fatigue, douleurs et faiblesse musculaires, anémie
Cœur et système circulatoire
- tension artérielle, rythme cardiaque anormal, douleurs à la poitrine
Système gastro-intestinal
- problèmes de déglutition, douleurs abdominales, nausées, excès d’acide gastrique, constipation chez certains et diarrhées chez d’autres
Autres problèmes
- augmentation du risque de caillots sanguins dans les poumons, ainsi que d’autres problèmes liés à la coagulation : troubles de la peau, douleurs osseuses et articulaires et infections (y compris des voies urinaires)
Survie
L’équipe de recherche a souligné un risque accru de décès parmi les personnes ayant survécu 30 jours après le diagnostic initial de COVID-19 aiguë. Le risque était le plus élevé chez les personnes qui avaient été hospitalisées pour la COVID-19 antérieurement. De plus, parmi les personnes diagnostiquées, mais pas hospitalisées pour la COVID-19, le risque de décès augmentait même si elles avaient survécu aux 30 premiers jours de la maladie.
À retenir
La présente analyse, dont les résultats révèlent une augmentation des risques d’une vaste gamme de complications un mois ou davantage après un diagnostic de COVID-19 aiguë, révèle une triste réalité. La COVID de longue durée s’est produite même si certains participants n’avaient pas été hospitalisés initialement pour la COVID-19. Chez les participants qui ont survécu 30 jours après leur diagnostic de COVID-19 aiguë, qu’elles aient été hospitalisées ou pas pendant cette période, on a constaté une augmentation marquée du risque de décès au cours des six mois suivants.
Selon l’équipe de recherche, ces résultats concernant les conséquences à long terme de la COVID-19 « soulignent la nécessité d’une approche de soins intégrée, holistique et multidisciplinaire à long terme pour les patients atteints de COVID-19 ».
De nombreuses causes potentielles
Comme nous l’avons expliqué plus tôt dans ce numéro de TraitementActualités, les scientifiques sont en train d’explorer plusieurs pistes dans l’espoir de découvrir les causes de la COVID de longue durée. L’équipe des Veterans Affairs n’est pas certaine pourquoi la COVID de longue durée se produit, mais compte tenu de la nature généralisée du phénomène, elle a avancé les possibilités suivantes :
- Des fragments du SRAS-CoV-2 persistent longtemps dans les régions profondes de l’organisme, notamment dans le système nerveux central (cerveau et moelle épinière).
- Le système immunitaire continue d’être hautement activé et enflammé.
- Le système immunitaire s’attaque à diverses parties de l’organisme.
Outre les facteurs biologiques mentionnés ci-dessus, l’équipe de recherche a indiqué que des facteurs d’ordre social ou d’autres problèmes pourraient contribuer indirectement au mauvais état de santé de certaines personnes souffrant de COVID de longue durée, dont les suivants :
- réduction des contacts sociaux et solitude
- perte d’emploi
- changements alimentaires et réduction de l’activité physique
Quelques remarques à propos de l’étude
Même si la présente étude constitue un important pas en avant, elle présente quelques limites :
- En raison de la manière dont l’étude a été conçue, il n’est pas clair quelles manifestations de la COVID de longue durée sont des conséquences directes ou indirectes du SRAS-CoV-2.
- La vaste majorité des participants étaient des hommes, même si d’autres études ont montré que la COVID de longue durée était courante chez les femmes.
- Au fur et à mesure que le SRAS-CoV-2 continue de muter et que davantage de personnes sont vaccinées, les manifestations de la COVID de longue durée pourraient changer au fil du temps.
—Sean R. Hosein
RÉFÉRENCE :
Al-Aly Z, Xie Y, Bowe B. High-dimensional characterization of post-acute sequelae of COVID-19. Nature. 2021 Jun;594(7862):259-264.