Étude sur la dysfonction érectile chez les hommes gbHARSAH
Grâce à l’efficacité incontestable des traitements contre le VIH (traitements antirétroviraux ou TAR), de nombreuses personnes séropositives vivront jusqu’à un âge très avancé. Or, au fur et à mesure que le risque d’infections potentiellement mortelles liées au sida diminue sous l’effet d’un TAR efficace, d’autres problèmes de santé deviennent préoccupants. La dysfonction érectile (DE) en fait partie.
Une équipe de scientifiques aux États-Unis et de l’Université de Toronto a analysé des données recueillies auprès de 625 hommes gais, bisexuels et autres hommes ayant des relations sexuelles avec des hommes (hommes gbHARSAH), dont certains avaient le VIH. En plus de cerner des facteurs de risque de DE, l’équipe a formulé des recommandations à l’intention des clinicien·ne·s afin de les aider à minimiser le risque de DE chez leurs patients gbHARSAH.
Détails de l’étude
L’équipe de recherche a analysé des données se rapportant à la santé de 625 hommes inscrits à une étude de grande envergure nommée MACS (Multicenter AIDS Cohort Study) qui se poursuit aux États-Unis. Le recrutement des participants a eu lieu dans quatre villes, soit Baltimore, Los Angeles, Pittsburgh et Washington.
Voici le profil moyen des participants au moment de la collecte des données :
- âge : 62 ans
- séropositifs : 285 hommes (46 %)
- séronégatifs : 340 hommes (54 %)
- principaux groupes ethnoraciaux : Blancs – 61 %; Noirs – 26 %; Hispaniques – 13 %
- 58 % faisaient de l’hypertension
- 14 % avaient le diabète
- 95 % suivaient un TAR et avaient une charge virale inhibée
Les données relatives à la DE ont été recueillies à l’aide de questionnaires périodiques.
Résultats
Une analyse statistique a révélé que les hommes séropositifs étaient 41 % plus susceptibles d’être atteints de DE que les hommes séronégatifs.
Chez les hommes séropositifs, les facteurs suivants étaient associés à un risque accru de DE :
- âge plus avancé
- origine hispanique (une explication suivra)
- diabète
- usage d’antidépresseurs
Chez les hommes séronégatifs, les facteurs de risque de DE étaient les suivants :
- tabagisme (le risque augmentait en fonction du nombre d’années de tabagisme)
- âge plus avancé
Analyse approfondie des facteurs de risque
Âge
Certains facteurs liés à l’âge contribuent à un risque accru de DE, notamment le déclin graduel du taux de testostérone. La perte graduelle de cellules péniennes nécessaires au maintien des érections peut également faire augmenter le risque.
Diabète et maladies cardiovasculaires
Le diabète et les maladies cardiovasculaires entraînent des changements dans les vaisseaux sanguins qui rendent ceux-ci moins souples et qui réduisent le flux de sang.
Santé mentale
La dépression et l’anxiété peuvent augmenter le risque de DE. Dans certains cas, les antidépresseurs peuvent atténuer la DE, mais dans d’autres, ils aggravent le problème.
Tabagisme
La cigarette nuit à la santé des artères et réduit le flux sanguin vers les organes et le pénis.
Un mot à propos de l’origine
Cette équipe de recherche a constaté un lien statistique entre l’origine hispanique et un risque accru de DE. Notons toutefois que la proportion d’hommes hispaniques était faible dans cette étude. Il est donc possible que le lien avec la DE ne soit pas cliniquement significatif parce que certains facteurs sous-jacents auraient pu faire augmenter le risque global de DE chez les hommes hispaniques inscrits à cette étude. Il se peut que le lien statistique apparent entre l’origine et la DE soit attribuable à des causes n’ayant rien à voir avec l’ethnicité des participants.
Que faire?
L’équipe de recherche encourage les professionnel·le·s de la santé à effectuer un dépistage de la DE auprès de leurs patients gbHARSAH, qu’ils soient séropositifs ou pas. De plus, elle recommande le dépistage des facteurs de risque de DE, tels le diabète, les maladies cardiovasculaires, le tabagisme et d’autres encore. Le dépistage permettrait de diagnostiquer la DE et de cerner les causes sous-jacentes, afin que les clinicien·ne·s puissent conseiller chaque patient individuellement et l’aider à résoudre ses problèmes.
L’équipe de recherche recommande également de tester les hommes gbHARSAH pour la dépression et de les diriger vers un service de counseling pour mieux faire face à des problèmes liés à l’humeur. Elle encourage aussi les médecins à prescrire « la dose efficace la plus faible » des antidépresseurs. Lorsque la DE semble être causée par un antidépresseur particulier, l’équipe de recherche recommande la substitution d’une autre classe d’antidépresseurs pour réduire le risque de DE.
Facteurs de risque généraux de DE
Selon la Mayo Clinic, les facteurs généraux suivants, dont certains ont été observés dans l’étude MACS, peuvent accroître le risque de DE :
- problèmes médicaux, particulièrement le diabète et les maladies du cœur
- usage de tabac
- surpoids
- certaines interventions médicales, dont une chirurgie de la prostate ou une radiothérapie contre le cancer
- lésions, surtout si elles endommagent les nerfs ou les artères participant aux érections
- médicaments, dont antidépresseurs, antihistaminiques et traitements contre l’hypertension, la douleur ou les maladies de la prostate
- troubles psychologiques, tels le stress, l’anxiété ou la dépression
- drogues et alcool, surtout si l’usage de drogues dure depuis longtemps ou si la consommation d’alcool est excessive
Les personnes éprouvant de tels problèmes devraient en discuter avec leur médecin ou infirmier·ère pour obtenir conseils et trouver des solutions.
—Sean R. Hosein
Ressource
Guide de pratique sur la dysfonction érectile — Association des urologues du Canada
RÉFÉRENCES :
- Mustapha A, Polanka BM, Maini M et al. Incidence of erectile dysfunction among middle-aged and aging sexual minority men living with or without HIV. Frontiers in Public Health. 2024 Jan 24; 12:1302024.
- Guimaraes EL, Dias DO, Hau WF et al. Corpora cavernosa fibroblasts mediate penile erection. Science. 2024; sous presse.