Santé des reins
Bien qu’ils soient petits, les reins effectuent un travail inestimable pour protéger l’organisme. Ils traitent près de 200 litres de sang par jour, filtrant près de deux litres de déchets et d’excès d’eau qui se transforment ensuite en urine. Si les reins ne fonctionnent pas bien, les déchets s’accumulent dans le sang et peuvent nuire à l’organisme.
Les reins jouent aussi d’autres rôles cruciaux : ils régulent les taux de minéraux dans le corps, produisent une hormone qui stimule la production de globules rouges, aident à réguler la tension artérielle et convertissent la vitamine D en sa forme active, dont nous avons besoin pour former des os solides, maintenir une bonne santé cardiovasculaire, prévenir le cancer et la dépression parmi d’autres choses. Il est essentiel que toutes les personnes vivant avec le VIH fassent évaluer régulièrement leur fonction rénale et qu’elles maintiennent ces organes puissants en bon état afin de vivre longtemps.
Facteurs de risque des maladies rénales
Le VIH et les divers médicaments antirétroviraux peuvent avoir des effets néfastes sur les reins, tout comme les facteurs de risque plus généraux.
VIH
Les personnes vivant avec le VIH dont le taux de CD4 est inférieur à 200 ou dont la charge virale n’est pas maîtrisée courent un plus grand risque de maladie rénale. Lorsque l’infection par le VIH non traitée est à l’origine des problèmes rénaux, le traitement contre le VIH peut aider. Certains médicaments antirétroviraux peuvent toutefois provoquer des lésions rénales, ce qu’on appelle une toxicité rénale ou néphrotoxicité.
Étant donné que l’infection par le VIH provoque une inflammation même chez les personnes dont la charge virale est indétectable et que l’inflammation est associée à un risque accru de maladie cardiovasculaire et de maladie rénale, les personnes séropositives présentent un risque plus élevé de maladie rénale, qu’elles aient ou non une charge virale indétectable.
Médicaments antirétroviraux
Le médicament anti-VIH appelé fumarate de ténofovir disoproxil ou TDF (Viread et également présent dans les coformulations Truvada, Atripla, Complera et Stribild) et certains inhibiteurs de la protéase, dont l’atazanavir (Reyataz) et le lopinavir/ritonavir (Kaletra et formulations génériques), sont tous susceptibles de causer des dommages aux reins.
- En ce qui concerne les reins, le TDF est le médicament anti-VIH qui semble susciter le plus d’inquiétudes. Il a été démontré que le TDF provoque une diminution légère, mais évidente de la capacité des reins à filtrer les déchets et l’excès d’eau dans le sang. Cependant, les lésions rénales aiguës causées par le TDF et les maladies rénales chroniques sont rares.
On a établi une corrélation entre l’utilisation du TDF et des niveaux plus élevés d’hormone parathyroïdienne (HPT). Cette corrélation s’est avérée être plus importante chez les personnes ayant un faible taux de vitamine D. Ainsi, la supplémentation en vitamine D chez ces personnes pourrait protéger contre l’élévation de l’HPT. Par conséquent, si vous prenez du TDF, vous pouvez demander à votre prestataire de soins de santé de vérifier votre taux de vitamine D et, si nécessaire, de vous préciser la quantité de supplément de vitamine D que vous devriez prendre. (Pour plus d’information sur les mesures de la vitamine D, voir l’annexe B.)
Il existe maintenant des médicaments qui utilisent une nouvelle formulation de ténofovir appelée TAF (ténofovir alafénamide ). Ces médicaments comprennent Odefsey, Biktarvy et Descovy. Cette formulation de ténofovir est plus sûre pour les reins qu’un traitement à base de TDF.
- Dans des cas rares, l’atazanavir (Reyataz) peut causer des calculs rénaux ainsi qu’une maladie appelée néphrite interstitielle (enflure des espaces entre les néphrons, soit les unités de filtrage des reins dont on trouve plus d’un million dans chaque organe).
Autres médicaments
De nombreux autres médicaments sur ordonnance ou en vente libre, ainsi que des produits de santé naturels et des drogues, peuvent exercer des effets indésirables sur les reins. La liste inclut les anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS), certains antibiotiques et diurétiques, l’acyclovir ou le valacyclovir intraveineux (Valtrex), le médicament antifongique amphotéricine B (Fungizone), le médicament hypolipidémiant rosuvastatine (Crestor), certains suppléments pour la perte de poids, la cocaïne, l’héroïne et les amphétamines parmi tant d’autres. De plus, les médicaments et drogues qui ne nuisent pas normalement aux reins lorsqu’ils sont utilisés seuls risquent d’interagir les uns avec les autres et de causer ainsi des dommages rénaux. Il est donc important d’aviser votre ou vos prestataire·s de soins de santé et votre pharmacien·ne de tous les médicaments et drogues que vous prenez.
Tabagisme et alcool
Fumer la cigarette est un important facteur de risque d’insuffisance rénale. Lorsqu’il est consommé en grande quantité, l’alcool peut également nuire aux reins.
Hypertension artérielle et diabète
L’hypertension artérielle et le diabète sont les deux principales causes d’insuffisance rénale. Ainsi, toute personne atteinte de l’une ou l’autre de ces maladies présente un risque plus élevé d’insuffisance rénale.
Hépatite C
L’hépatite C peut endommager non seulement le foie, mais aussi les reins. Les personnes vivant avec le VIH qui sont co-infectées par l’hépatite C courent un risque accru de maladie rénale chronique et d’insuffisance rénale.
Tests
Il est rare qu’un déclin modéré de la fonction rénale cause des symptômes évidents. L’organisme peut fonctionner plutôt bien avec une fonction rénale normale de 50 pour cent seulement. Voilà pourquoi de nombreuses personnes peuvent faire un don de rein et continuer à vivre en bonne santé. En général, toutefois, de graves problèmes de santé se produisent lorsque la fonction rénale se situe à moins de 25 pour cent. Lorsqu’elle chute jusqu’à 10 à 15 pour cent, le patient doit subir une dialyse rénale (traitement qui aide l’organisme à filtrer les déchets) en attendant une greffe de rein.
Les symptômes associés à une grave détérioration de la fonction rénale incluent les suivants :
- besoin d’uriner plus ou moins souvent
- fatigue ou somnolence
- perte d’appétit
- nausées ou vomissements
- enflure des mains ou des pieds
- sensation de démangeaisons ou d’engourdissement
- difficulté à se concentrer
- brunissement de la peau
- crampes musculaires
Pour déterminer si vos reins ont été endommagés, votre prestataire de soins de santé pourrait vous faire passer un ou plusieurs des tests simples suivants :
- Mesure de la tension artérielle — L’hypertension artérielle est non seulement un facteur de risque de maladies rénales, mais peut aussi être une conséquence des dommages rénaux. Par conséquent, une augmentation de la tension artérielle peut être un indice important d’un problème dans ces organes.
- Un test d’urine pour rechercher la présence de protéines — En temps normal, l’urine ne contient pas de protéines. Lorsque les reins sont endommagés, ils risquent de ne pas séparer les protéines sanguines, dont l’albumine, des déchets qu’ils filtrent. Au début, seule une faible quantité d’albumine fuit dans l’urine (une affection appelée microalbuminurie). Lorsque les dommages rénaux s’aggravent, la quantité d’albumine et d’autres protéines dans l’urine augmente (une affection appelée protéinurie).
- Un test sanguin pour mesurer le taux de créatinine et calculer le DFGe — La créatinine est un produit de déchets provenant des muscles qui est normalement filtré et évacué par les reins. Cependant, lorsque les reins ne fonctionnent pas normalement, la créatinine s’accumule dans le sang. Ce test est utilisé pour calculer le DFGe (débit de filtration glomérulaire estimé), une mesure indiquant l’efficacité avec laquelle les reins accomplissent le filtrage des déchets dans le sang.
- Azote uréique du sang — Ce test mesure la quantité d’azote uréique dans le sang. Après que les cellules ont utilisé la protéine, le sang emporte les déchets sous forme d’urée, qui est filtrée par les reins et évacuée dans l’urine. Ce test peut révéler si le taux d’urée dans le sang demeure élevé; le cas échéant, il est possible que les reins ne fonctionnent pas de façon optimale.
- Autres tests — Votre prestataire de soins de santé pourrait vous recommander d’autres tests pour mesurer la quantité de sucre, de protéines et de phosphore dans votre urine et votre sang, selon les médicaments anti-VIH que vous prenez.
Si les tests ci-dessus révèlent un grave problème rénal, votre prestataire de soins de santé demandera peut-être des tests d’imagerie rénale — échographie, tomodensitométrie ou IRM — ou une biopsie
Protéger les reins
Si les tests révèlent la présence de dommages rénaux, il est important de traiter immédiatement toutes les choses susceptibles de contribuer au problème. Si vous prenez actuellement un médicament susceptible d’en être la cause, votre prestataire de soins de santé vous recommandera peut-être de le remplacer par un autre. (N’oubliez pas qu’il ne faut jamais arrêter de prendre un médicament anti-VIH sans avoir consulté d’abord votre prestataire de soins de santé.) Si votre prestataire de soins de santé vous conseille d’abandonner le TDF, le problème risque de ne pas se régler immédiatement, mais il sera au moins possible de prévenir l’aggravation de vos symptômes.
Voici quelques autres mesures permettant de protéger les reins et de prévenir l’aggravation des dommages rénaux :
- Maîtrisez votre glycémie et prévenez les hausses de la glycémie qui peuvent endommager les reins.
Adoptez un régime alimentaire à faible teneur en protéines. Les taux élevés de protéines peuvent endommager les reins, surtout si un certain degré de dysfonction est déjà présent.
- Évitez de fumer. Le tabagisme augmente le risque de maladies rénales et contribue à la mortalité due aux accidents vasculaires cérébraux et aux crises cardiaques chez les personnes atteintes d’insuffisance rénale chronique.
- Consommez suffisamment de liquides, mais pas trop!
Même si un apport généreux en eau et autres liquides est généralement bon pour les reins, il est possible d’en boire trop et de nuire aux reins s’ils ont déjà subi des dommages importants.
- Maintenez une tension artérielle saine et faites votre possible pour prévenir les dommages cardiovasculaires, car ces derniers peuvent aggraver les lésions rénales.
- Prenez un inhibiteur de l’ECA (enzyme de conversion de l’angiotensine) ou un antagoniste des récepteurs de l’angiotensine, deux médicaments contre l’hypertension qui peuvent protéger les reins.
Calculs rénaux
Les calculs rénaux sont un problème tout à fait distinct qui n’a rien à voir avec les dommages chroniques aux reins. Si vous ou l’une de vos connaissances avez déjà eu des calculs rénaux, vous savez qu’ils peuvent causer une douleur intense. La bonne nouvelle est qu’ils causent rarement des dommages importants à long terme.
Un calcul rénal est une masse solide composée de minuscules cristaux qui se collent les uns aux autres. Il peut être aussi petit qu’un grain de sel ou aussi gros qu’un citron vert. Il est possible d’avoir un ou plusieurs calculs dans un rein et l’uretère (mince tube qui transporte l’urine des reins à la vessie) en même temps. En général, les calculs rénaux se forment lorsque l’urine contient trop de substances susceptibles de former des cristaux et de se transformer en calculs, un processus qui peut prendre quelques semaines, voire des mois.
Les calculs rénaux ont tendance à être plus courants chez les personnes vivant dans des climats chauds. Cela s’explique en partie par le fait que les calculs rénaux se forment lorsque l’urine contient une forte concentration de minéraux ou de cristaux, situation plus probable lorsque les gens transpirent beaucoup. Les personnes qui ne boivent pas assez de liquides sont également plus sujettes aux calculs rénaux.
Les différents types de calculs rénaux
Les calculs calciques sont de loin le type de calculs rénaux le plus commun. Ils peuvent se produire chez toute personne à n’importe quel âge, mais sont plus courants chez l’homme. Le calcium se combine à d’autres substances comme l’oxalate ou le phosphate pour former le calcul.
Vous souhaiterez peut-être boire davantage de liquides pour accroître la quantité d’urine passant par vos reins. Cela permettra de réduire les concentrations de calcium, d’oxalate et de phosphate nécessaires à la formation des calculs rénaux. De plus, il serait peut-être utile de limiter votre consommation de sucre et de sel parce que ces derniers incitent le corps à excréter davantage de calcium et d’oxalate dans l’urine. Un apport plus élevé en fibres alimentaires — davantage de fruits, de légumes et de grains entiers — pourrait également limiter votre excrétion de calcium. Une carence en magnésium, problème relativement courant chez les personnes vivant avec le VIH, peut augmenter le risque de calculs rénaux. En revanche, la combinaison de magnésium et de vitamine B6 peut réduire considérablement la formation de calculs d’oxalate calcique, alors la prise d’une multivitamine contenant ces nutriments pourrait aider. Pour vérifier si votre taux d’excrétion d’oxalate est normal ou trop élevé, votre prestataire de soins de santé peut effectuer un test d’urine.
Les calculs d’acide urique s’observent le plus fréquemment chez les personnes atteintes de la goutte et sont plus courants chez l’homme que chez la femme. Ils peuvent aussi être la conséquence de certains genres de chimiothérapie. Les aliments qui stimulent la production d’acide urique dans le corps augmentent le risque de faire ce genre de calculs. Les aliments en question incluent le foie et les autres abats, les crustacés, certains poissons (surtout les sardines, le maquereau, les anchois et le hareng) et la bière. De plus, le fructose (présent dans le sirop de maïs à haute teneur en fructose, le sucre et de nombreux aliments et boissons) fait rapidement augmenter le taux d’acide urique. Si vous avez tendance à faire des calculs d’acide urique, une réduction de votre consommation de ces aliments diminuera les risques. Pour savoir si vous êtes à risque, vous pouvez passer un test sanguin pour mesurer votre taux d’acide urique.
Les calculs de struvite se produisent généralement chez les femmes présentant une infection des voies urinaires. Ces calculs peuvent devenir si gros qu’ils finissent par obstruer le rein, l’uretère ou la vessie.
Les calculs de cystine sont généralement héréditaires et se forment lorsque les reins excrètent de trop grandes quantités de cystine, un acide aminé.
Nous savons que quelques antirétroviraux peuvent causer des calculs rénaux et un problème semblable appelé « boue urinaire », y compris l’indinavir (Crixivan), un inhibiteur de la protéase plus ancien, et, bien moins couramment, l’atazanavir (Reyataz) et, possiblement, l’éfavirenz (vendu sous la marque Sustiva et aussi un ingrédient d’Atripla et de ses versions génériques). Parmi les autres médicaments susceptibles de causer la formation de calculs, mentionnons l’anti-herpétique acyclovir et la version apparentée valacyclovir (Valtrex); le diurétique triamtérène, utilisé pour traiter la rétention de liquides chez les personnes atteintes de maladies du foie et du cœur, entre autres; l’association antibiotique triméthoprime-sulfaméthoxazole (Septra/Bactrim), utilisée pour la prévention et le traitement de la pneumonie et d’infections bactériennes chez les personnes séropositives; et l’antifongique amphotéricine B (Fungizone).
Symptômes de calculs rénaux
Les symptômes les plus courants des calculs rénaux incluent les suivants :
- douleur intense qui survient soudainement et peut disparaître soudainement. D’ordinaire, la douleur est ressentie dans le bas du dos, les côtés ou l’abdomen; elle peut aussi se produire dans l’aine. Dans certains cas, la douleur est sourde puis devient aiguë par la suite.
- difficulté ou douleur à la miction (uriner) ou incapacité d’uriner
- urine foncée ou contenant du sang
- nausées et vomissements
- frissons ou fièvre
Si vous éprouvez ces symptômes, avisez votre prestataire de soins de santé ou allez à l’hôpital de votre localité dès que possible. Si le traitement est retardé, des dommages rénaux et d’autres complications graves risquent de se produire.
Votre prestataire de soins de santé peut effectuer un ou plusieurs tests pour déterminer si vous avez un calcul rénal ou non et, le cas échéant, de quel genre il s’agit. Les tests en question incluent les suivants :
- un examen physique de la région du ventre (abdomen) ou du dos
- des tests de sang pour vérifier les taux de calcium, de phosphore, d’acide urique et d’électrolytes
- des tests de la fonction rénale
- une analyse d’urine pour vérifier la présence de cristaux et de globules rouges dans l’urine
- une analyse de laboratoire du calcul pour en déterminer le type
Dans certains cas, on a recours à l’imagerie médicale — par exemple, tomodensitométrie, IRM, radiographie, pyélographie intraveineuse, pyélographie rétrograde ou échographie — pour localiser les calculs et en déterminer l’ampleur.
Prévention et traitement des calculs rénaux
Le plus grand facteur de risque de calculs rénaux est la consommation insuffisante de liquides. Le risque de calculs rénaux augmente si vous excrétez moins d’un litre d’urine par jour. Si vous avez des calculs rénaux, buvez au moins 1,5 litre de « bons » liquides par jour, tels que l’eau, les tisanes et les jus ou bouillons de légumes, à moins que vous n’ayez d’autres problèmes médicaux qui vous empêchent de le faire.
Buvez plus d’eau encore s’il fait très chaud, si vous dansez, faites du sport ou faites de l’exercice ou bien si vous présentez de la diarrhée ou des vomissements. N’oubliez pas que l’alcool et la caféine risquent de vous déshydrater. Les boissons contenant l’un ou l’autre de ces derniers peuvent accroître vos besoins en eau et en autres bons liquides. Dans certains cas, la prescription de médicaments peut aider à prévenir la formation de calculs rénaux.
Si vous faites des calculs rénaux, le traitement choisi dépendra du genre de calcul en question. Dans de nombreux cas, grâce à une consommation suffisante de liquides, le calcul finit par passer tout seul. Votre prestataire de soins de santé pourrait vous prescrire des médicaments pour aider à dégrader et à évacuer la substance qui cause le calcul. D’autres techniques pourraient être utilisées dans les cas suivants : le calcul est trop gros pour passer tout seul, il augmente de volume, il bloque l’écoulement d’urine, il cause une infection ou des dommages rénaux ou la douleur est trop intense pour être maîtrisée. Si le calcul est assez petit (environ 13 millimètres ou moins d’un demi-pouce) et situé à proximité du rein ou de l’uretère, un traitement utilisant des ondes sonores ou de choc peut être utilisé pour dégrader les calculs afin qu’ils quittent le corps par l’urine. Lorsque les calculs sont plus gros, on peut avoir recours à des interventions qui consistent à insérer un tube pour enlever les calculs. Lorsqu’aucune de ces méthodes n’est possible, une chirurgie ouverte peut s’avérer nécessaire, mais les cas de ce genre sont rares.