Le sirolimus en monothérapie à la suite d’une greffe du foie
Le sirolimus (rapamycine, Rapamune) est un médicament immunosuppresseur qui possède aussi une activité modeste contre certaines tumeurs et le VIH. Contrairement à beaucoup d’autres médicaments utilisés pour supprimer le système immunitaire, le sirolimus ne cause pas de dommages aux reins et n’augmente pas le risque de diabète. Des chercheurs italiens ont mené une étude pilote où le sirolimus était le seul traitement immunosuppresseur donné à des personnes séropositives ayant reçu une greffe d’organe. Leurs résultats sont prometteurs, mais doivent être confirmés par un essai clinique rigoureux.
Détails de l’étude
Les chercheurs ont recruté 14 participants (12 hommes, 2 femmes), dont dix co-infectés par le virus de l’hépatite B ou C. Ils avaient en moyenne un compte de CD4+ de 275 cellules et une charge virale inférieure à 50 copies/ml, et se trouvaient sur la liste d’attente pour une greffe du foie depuis huit mois en moyenne. La moitié des participants avaient un cancer du foie. Selon le système de notation MELD, en l’absence de greffe hépatique, le risque de mourir dans les trois mois s’élevait à 20 % pour ces participants. La trithérapie a été interrompue juste avant la greffe puis recommencée deux semaines plus tard.
Résultats
Tout de suite après la greffe, on a prescrit un traitement immunosuppresseur à base de cyclosporine ou de tacrolimus (Prograf), en association avec de la prednisone.
Dans six cas, les chercheurs ont remplacé la cyclosporine par le sirolimus, en moyenne 67 jours après la greffe, à cause d’une dysfonction rénale (cinq cas) ou de l’apparition de lésions cutanées (un cas) du sarcome de Kaposi (SK).
Dans tous les cas, l’état des participants recevant du sirolimus s’améliorait à mesure que leur fonction rénale revenait à la normale et que leurs lésions du SK se résorbaient. De plus, après la disparition de celles-ci, les techniciens ne pouvaient plus détecter le virus responsable du SK (HHV8; virus de l’herpès humain 8) dans le sang du participant en question.
Un rejet aigu léger s’est produit chez une personne recevant le sirolimus, mais le problème s’est résolu grâce à l’ajout, pendant dix jours, de l’immunosuppresseur méthylprednisone. Par contraste, notons que trois cas de rejet aigu se sont produits chez les personnes qui continuaient de prendre la cyclosporine ou le tacrolimus.
À la suite de la greffe, l’infection au virus de l’hépatite C (VHC) s’est réactivée chez sept personnes recevant la cyclosporine ou le tacrolimus. Chez deux autres personnes porteuses du VHC qui recevaient le sirolimus, cette infection s’est résorbée.
Survie
Quatre personnes sont mortes — deux sous cyclosporine ou tacrolimus et deux sous sirolimus. Dans ces cas-ci, la mort s’est produite des suites d’infections fongiques et bactériennes graves. Chez les personnes ayant reçu de la cyclosporine ou du tacrolimus, les décès étaient attribuables à une insuffisance cardiaque et à une infection bactérienne grave. Après 50 mois d’observation, les taux de survie des participants sous sirolimus ou tacrolimus/cyclosporine étaient semblables, soit 68 % environ.
Effets secondaires
Le sirolimus peut causer des effets secondaires, notamment une augmentation des taux de cholestérol et de triglycérides dans le sang qui, à la longue, peut accroître le risque de maladies cardiovasculaires. Dans tous les cas, ce problème a été réglé grâce à la prise d’hypolipidémiants (médicaments qui réduisent les taux de lipides).
On doit faire preuve de prudence pour bien interpréter les résultats de cette étude. Puisqu’il ne s’agit pas d’un essai clinique randomisé, l’étude comporte un risque non intentionnel de facteurs confusionnels et d’interprétations faussées. Les chercheurs ne peuvent donc affirmer avec certitude que le sirolimus a procuré des bienfaits additionnels aux participants.
RÉFÉRENCES :
- Di Benedetto F, Di Sandro S, De Ruvo N, et al. First report on a series of HIV patients undergoing rapamycin monotherapy after liver transplantation. Transplantation. 2010 Mar 27;89(6):733-8.
- Baccarani U, Adani GL, Tavio M, et al. mTOR immunosuppression in HIV-positive liver transplant recipients. Transplantation. 2010 Nov 15;90(9):1039-40.